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Impressum
Humanité, 1re édition 2014
Février 2014
ISSN 1664-2015
Photo de couverture et verso: Tres Camenzind
Editeur: Croix-Rouge suisse,
Rainmattstrasse 10, Case postale, 3001 Berne
Téléphone 031 387 71 11, [email protected],
www.redcross.ch
Dons: CP 30-9700-0
Conseil sur les legs: téléphone 031 387 72 83
Notification de changement d’adresse: par courriel
à [email protected] ou par téléphone au
031 387 74 64
Adresse de la rédaction: Croix-Rouge suisse,
Rédaction Humanité, Case postale, 3001 Berne
[email protected], www.magazine-humanite.ch
Rédaction: Tanja Reusser (rédactrice en chef), Urs Frieden
(Santé et intégration), Andreas Häner (Levée de fonds),
Isabelle Roos (Partenariats avec le secteur privé), Christine
Rüfenacht (Santé et intégration), Isabel Rutschmann
(Communication), Katharina Schindler (Coopération
internationale)
Contributions à la présente édition: Myriam Bschir,
Markus Mader, Marco Ratschiller, Katrin Schöni,
Sandra Weiss
Abonnement: l’abonnement coûte 6 CHF par an et est
offert aux donateurs de la CRS.
Parution: trimestrielle
Langues: français, allemand et italien
Tirage: 125 580 exemplaires
Copyright sur toutes les photos sans indication:
Croix-Rouge suisse
Traduction: Service de traduction CRS
Graphisme et impression: Vogt-Schild Druck SA,
Derendingen
Prochaine édition: juin 2014
PERFORM ANCE
neutral
Imprimé
No. 01-14-777589 – www.myclimate.org
© myclimate – The Climate Protection Partnership
Humanité est imprimé sur du papier recyclé à 100%. Parce qu’économiser les
ressources, c’est préserver l’environnement.
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Humanité 1/2014
Reportage – Auxiliaire de santé CRS
4 Engagée corps et âme
8 «La situation va encore se compliquer»
12 COUP DE PROJECTEUR – Aide d’urgence aux
Philippines
«Plongée dans l’inconnu»
14 ARRIÈre-plan – Conseil sur les directives
anticipées
Une éclaireuse dans la jungle médicale
16 RÉTROSPECTIVE – L’emblème de la Croix-Rouge
Question de vie ou de mort
18 TÉMOIGNAGE – Soudan du Sud
Un début difficile
22 ENTRETIEN – Service ambulatoire CRS pour
victimes de la torture et de la guerre
«Une voie pour retrouver l’autodétermination»
24 SUR LE TERRAIN – Des arbres et de l’eau en Haïti
Victimes de la pauvreté
29 PÊLE-MÊLE
Pirouette, cacahuète!
Jeux, dessin humoristique
© Roland Blattner
É d i tor i a l
Là pour vous
Chère lectrice, cher lecteur,
Dès les premières heures qui ont suivi le passage du typhon qui a ravagé les Philippines début
novembre, il était évident que nous allions intervenir. Car après un tel drame, il est de notre
devoir, en tant que Société nationale de la Croix-Rouge, d’apporter notre aide aux populations sinistrées. Ce principe vaut également pour les catastrophes de moindre ampleur qui
se déroulent loin des projecteurs – à moins que le pays concerné ne refuse notre appui. Nous
vous remercions sincèrement de votre générosité, qui nous permet d’agir ici et ailleurs.
Vous souhaitez savoir précisément où et comment la Croix-Rouge suisse (CRS) apporte son
aide? Vous le découvrirez à la lecture de ce magazine, via nos appels aux dons, ou jour après
jour sur notre nouveau site Internet www.redcross.ch. Vos dons font la différence longtemps
encore après une catastrophe. Qu’ils soient affectés spécifiquement à l’aide d’urgence ou
destinés à nos autres activités dans les domaines de la coopération au développement, de la
santé et de l’intégration, ils sont toujours les bienvenus.
N’hésitez pas à consulter les rubriques Dans le monde et Près de chez vous de notre site Internet! Vous voyagerez autour de la planète aux côtés de la CRS avant de partir à la découverte
des offres proposées dans votre région par votre Croix-Rouge cantonale. Courriel, permanence téléphonique ou courrier traditionnel: nous sommes non seulement près de chez vous,
mais surtout là pour vous.
Merci à vous aussi d’être là pour nous à travers votre soutien et vos précieuses suggestions!
Meilleures salutations,
Markus Mader
Directeur de la Croix-Rouge suisse
Humanité 1/2014
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Humanité 1/2014
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r e po rtage
V
olubile et déterminée, Josephine
Niyikiza, 33 ans, aurait fait une excellente avocate. Mais la vie en a décidé autrement. «Je rêvais d’aider ceux
qui sont opprimés, mais la guerre m’en
a empêchée», raconte celle qui a fui le
génocide rwandais en 1994. Ce besoin
d’aider semble être son fil conducteur.
La jeune femme a traversé huit pays
d’Afrique, (sur)vécu dans des camps
de réfugiés, toujours en s’engageant
pour autrui. A Congo-Brazzaville, par
exemple, elle a œuvré dans un foyer où
des personnes âgées et handicapées
trouvaient refuge.
Sa mère étant médecin,
elle savait un peu s’y prendre
avec les plus fragiles.
Sa mère étant médecin, elle savait un
peu s’y prendre avec les plus fragiles.
«Elle m’emmenait avec elle pour aller
soigner les gens du village», se souvient
Josephine Niyikiza, qui a perdu sa mère
dans le conflit qui a déchiré son pays.
Démarrer de zéro
La jeune femme est arrivée à Zurich en
2004, à bord d’un avion en provenance du
Cameroun. Elle est alors affaiblie et traumatisée. Son fils cadet n’est encore qu’un
bébé.
Des gestes rodés et sûrs – l’auxiliaire de santé aide ce résidant à se lever de sa chaise roulante pour se coucher dans son lit.
Josephine Niyikiza s’accoutume progressivement à sa nouvelle vie à Jona, au bord
du lac de Zurich. Grâce au Service de recherches de la Croix-Rouge, elle retrouve
tout d’abord ses deux autres fils (plus
tard aussi son mari), perdus de vue lors de
sa fuite. Et elle apprend l’allemand – dans
un cours que lui offre sa thérapeute pour
Noël. Celle-ci lui propose ensuite son
soutien pour suivre la formation d’auxiliaire de santé CRS (AS CRS): 120 heures
de cours et douze jours de stage, en allemand bien entendu. Elle dit oui sans
hésiter. «J’étais très heureuse de pouvoir
faire quelque chose de ma vie», raconte
Josephine Niyikiza, rayonnante. Aujourd’hui encore, elle est fière des bonnes
notes glanées durant sa formation.
Offrir du bonheur
Josephine Niyikiza discute de tâches administratives avec Pia Mariano, sa supérieure.
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Humanité 1/2014
Depuis trois ans, Josephine Niyikiza travaille à temps partiel en tant qu’auxiliaire
de santé dans le logement protégé Spinnereistrasse à Rapperswil. «Tous les habitants sont emballés par la jeune femme»,
constate Pia Mariano, sa responsable. La
barrière linguistique qui lui faisait souci
au moment de l’engager est tombée dès
la première rencontre avec les seniors. Il
faut dire que Josephine Niyikiza est extraordinairement douée pour la communication – son empathie et sa patience y
sont sans doute pour beaucoup.
Huit seniors vivent dans l’appartement
Spinnereistrasse de la fondation RaJoVita. Ils sont âgés de 70 à 100 ans et
ont besoin de soins, ce à des degrés divers. «J’aime ce travail, qui est à la fois
physique et mental. Surtout, il permet
d’offrir du bonheur», répète Josephine
Niyikiza, qui s’épanouit au sein d’une
r e po rtage
Reconnaissance des titres professionnels étrangers
«La situation va
encore se compliquer»
Depuis 1949, la Croix-Rouge suisse (CRS) assure la reconnaissance des titres étrangers sanctionnant des formations à
des professions non universitaires de la santé. Marie-Pierre
Studer Lachat, responsable du service Formation de la CRS,
nous explique l’impact de la menace de pénurie de personnel soignant sur son travail.
Interview: Urs Frieden et Katrin Schöni photo: Tres Camenzind
Quel est votre rôle à la CRS?
Je dirige le service Formation, qui englobe notamment les secteurs Enregistrement et Reconnaissance des titres
professionnels étrangers. Les procédures de reconnaissance visent à établir
une équivalence éventuelle entre titres
étrangers et diplômes suisses. En clair,
nous vérifions si des personnes d’origine
étrangère peuvent travailler en Suisse,
et si oui, dans quelles fonctions. La CRS
assume cette mission sur mandat de la
Confédération et contribue ainsi grandement à garantir la qualité dans le secteur
de la santé.
Combien de diplômes étrangers sont
reconnus chaque année?
En 2012, il y en a eu 2754. La reconnaissance permet aux migrants d’avoir accès au marché suisse de l’emploi, de prétendre à des rémunérations conformes à
leur formation et d’intégrer des filières
et des formations continues suisses. Si
le chiffre que je vous ai cité est plus élevé que par le passé, c’est que les besoins
Marie-Pierre
studer lachat
Infirmière et formatrice
d’adultes titulaire d’un CAS
en gestion d’organisations
à but non lucratif, elle dirige le service Formation
du département Santé et
intégration de la CRS.
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Humanité 1/2014
en main-d’œuvre de notre pays sont importants, mais aussi que les conditions
de travail y sont plutôt bonnes.
La reconnaissance des diplômes étrangers prive des pays moins prospères de
leurs spécialistes. Ne contribuez-vous
pas à «délocaliser» la pénurie de personnel?
Non. Ce n’est pas la CRS qui va chercher
ces requérants, ce sont eux qui font la
démarche, soit qu’ils habitent déjà en
Suisse, soit qu’ils souhaitent émigrer. La
CRS respecte les principes du code de
l’OMS concernant le recrutement de personnels étrangers et n’a aucune influence
sur la demande. Celle-ci, du fait des difficultés économiques de certains pays de
l’UE, a fortement augmenté ces dernières
années: +25% entre 2009 et 2011!
Voilà des années que l’on évoque la
menace d’une pénurie de personnel
dans la santé. Où en est-on réellement?
Dans certaines régions et institutions,
par exemple dans les soins de longue durée, le recrutement de personnel qualifié est délicat, voire problématique. La situation va encore se compliquer dans les
années à venir, notamment avec le départ à la retraite de nombreux soignants
après 2020. Notre système de santé dépend d’ores et déjà à 30% de spécialistes
étrangers. Renforcer cette dépendance
Une auxiliaire de santé
CRS comme Josephine
Niyikiza (pp. 4-7)
consacre chaque jour
beaucoup de temps à
des activités de prise
en charge et de soins
de base.
n’est pas une solution, ni pour nous, ni
pour les autres pays concernés.
Quelles sont les conséquences de
cette pénurie sur votre travail? Vous
sentez-vous poussés à ouvrir la porte
à plus de travailleurs étrangers?
Ces trois dernières années, le secteur chargé de la reconnaissance a fait face à un
bond de la demande et les effectifs ont dû
être renforcés. Néanmoins, nous ne cédons
pas à la pression et continuons de nous en
tenir strictement au cadre juridique défini
notamment par les directives UE et le droit
suisse. Du reste, je rappelle que reconnaissance n’est pas synonyme d’engagement:
la décision finale appartient à l’employeur.
Quelles solutions préconisez-vous
pour satisfaire aux besoins de personnel?
Une expérience:
Allianz Family
s’occupe de tout.
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rendez-vous!
Plus d’infos sur:
allianz-family.ch
Assuré Allianz? Quelle chance!
Allianz Suisse est partenaire officiel de la Croix-Rouge suisse (CRS).
Joignons nos forces pour protéger et pour aider.
humanite_Geburtstag_4c_180x270_f.indd 1
16.01.14 16:27
en bref
REDOG, une aide de
tous les instants
■ REDOG s’étant rattaché à la centrale d’alarme et de service Curena, une
filiale de la CRS, il est possible dès à présent de solliciter des équipes cynotechniques en appelant le numéro d’urgence
0844 441 144. REDOG met à disposition, en Suisse comme à l’étranger, des
sauveteurs spécialisés dans la localisation de personnes disparues dans des
décombres et en terrain découvert. En
sa qualité d’organisation humanitaire,
REDOG, qui a récemment obtenu la certification ZEWO, est tributaire de la générosité des donateurs.
➔ redog.ch
Biélorussie: un véhicule pour enfants handicapés
■ Grâce à la générosité d’Allianz Suisse,
la CRS a pu acquérir un véhicule utilitaire
destiné à un foyer pour enfants en Biélorussie, dont les pensionnaires à mobilité réduite peuvent désormais eux aussi
partir en excursion. Le foyer se situe dans
une région fortement irradiée lors de la
catastrophe nucléaire de 1986 à Tchernobyl. Les sols sont encore contaminés,
et de nombreux enfants souffrent d’affections congénitales. Au total, le foyer
accueille 65 enfants de 4 à 18 ans atteints de handicaps physiques et mentaux. Dans notre pays, Allianz Suisse soutient le service des transports de la CRS
et l’Alarme Croix-Rouge sous la devise
«Joignons nos forces pour protéger et
aider».
© Caspar Martig
Beaucoup de nouveautés pour 2 5 Noël
La Croix-Rouge
genevoise a 150 ans
■ La Croix-Rouge genevoise (CRG) célèbre cette année son 150e anniversaire.
L’occasion pour elle de publier l’ouvrage
150 ans de passion humanitaire, qui retrace les évènements majeurs de son histoire, et d’organiser en juin un concert
de musiques du monde. Un tram à
ses couleurs circulera en outre sur les
grands axes de Genève pour rappeler
son engagement en faveur de la population locale. L’action de la CRG auprès
des jeunes, des familles, des personnes
âgées ou des migrants vise avant tout à
améliorer leur santé et à préserver leur
dignité.
➔ croix-rouge-ge.ch
■ En début d’année à la CRS, un grand
travail de tri attendait de nouveau les bénévoles. La 17e édition de 2 5 Noël a permis de récolter quelque 71 000 paquets
par la Poste et 2000 colis électroniques.
De plus, de nombreuses personnalités se
sont engagées en faveur de l’action: le
24 décembre, Bastian Baker et ses amis
chanteurs ont donné un concert dans le
cadre d’une émission spéciale diffusée
sur La Première et sur le site Internet de
la RTS en vidéo HD. Ajoutés au produit de
la vente des colis électroniques, les fonds
récoltés à cette occasion permettront
à la CRS d’acheter
des marchandises
en Europe de l’Est à
un prix avantageux
pour en faire bénéficier des personnes
démunies sur place.
En Suisse, la société de grande distribution Coop a elle
aussi contribué généreusement à l’ac-
tion, soutenue également par la compagnie d’assurance Allianz Suisse et la DDC.
Pour la première fois, 2 5 Noël a collaboré avec l’organisation Table Suisse en lui
donnant des denrées alimentaires qui, du
fait de leur date de péremption proche,
ne pouvaient être distribuées par les organisations Croix-Rouge. 2 5 Noël est une
opération de La Poste Suisse, de SRG SSR
et de la CRS. Un grand merci à tous les donateurs ainsi qu’aux organisations et personnes participantes!
➔ 2xnoel.ch
Humanité 1/2014 11
Coup de proj ecteur
Thomas Büeler dans la zone sinistrée: «Ce n’est qu’en voyant les photos que j’ai pu imaginer comment c’était avant.»
Aide d’urgence aux Philippines
«Plongée dans l’inconnu»
Thomas Büeler s’est rendu aux Philippines peu après le passage du typhon Haiyan pour y
organiser les premières opérations d’aide d’urgence de la Croix-Rouge suisse (CRS). Il a été
impressionné par la rapidité avec laquelle des gens qui avaient tout perdu ont repris leur vie
en mains.
Texte résumé par Katharina Schindler Photos fournies par Thomas Büeler
«
12
J
’ai beau intervenir souvent au lendemain de catastrophes majeures, c’est à
chaque fois une plongée dans l’inconnu.
Car chaque catastrophe est différente.
Qu’auront vécu les gens que je vais rencontrer? Qu’est-ce que je peux faire pour
eux? Rétrospectivement, j’en conserve
des souvenirs marquants et uniques.
Je garderai de bons souvenirs de mon intervention aux Philippines. Bien sûr, cette
fois encore, la tâche a été difficile, j’ai vu
beaucoup de souffrances et croisé des
familles qui avaient tout perdu. Mais j’ai
rarement rencontré des gens qui se reHumanité 1/2014
troussaient les manches avec autant de
courage dans une situation désespérée.
Ils ont mis une telle ardeur à reprendre
le plus vite possible les rênes de leur existence!
J’ai rarement rencontré des gens
qui se retroussaient les manches
avec autant de courage dans
une situation désespérée.
J’étais parmi les premiers intervenants
à partir pour les Philippines, trois jours
après le passage du typhon. En tant que
logisticien d’urgence, je devais faire un
rapide tour d’horizon, définir les besoins et lancer dès que possible l’aide
d’urgence de la CRS. Par chance, la ville
de Cebu, où je suis arrivé et qui nous
servait de base, avait été épargnée.
Alors qu’en Haïti, il y a quatre ans, nous
avions longtemps été aux prises avec
des conditions chaotiques, à Cebu, j’ai
pu préparer très rapidement l’aide matérielle. Autre point positif: la CroixRouge philippine (CRP), notre principal partenaire, est très compétente. Il
faut dire que les inondations, typhons
a rr iè re- Pl an
Conseil sur les directives anticipées
Une éclaireuse dans
la jungle médicale
La Croix-Rouge suisse (CRS) propose des directives anticipées que toute personne peut remplir elle-même gratuitement ou, en contrepartie d’une participation, dans le cadre d’un entretien-conseil. Récit de quelqu’un qui a recouru à l’aide d’autrui pour consigner ses volontés.
Texte: Tanja Reusser Photos: Roland Blattner
A
ujourd’hui, le calme se prête à la
réflexion. Je suis à l’avant-veille de
mon entretien avec la conseillère de la
CRS qui va m’aider à établir mes directives anticipées. Le dossier que je viens
de recevoir me plonge dans la perplexité. «En guise de préparation, réfléchis14
Humanité 1/2014
sez et prenez quelques notes sur vos valeurs personnelles. Vous trouverez des
précisions à ce sujet sur les deux premières pages du dossier», m’a expliqué
au téléphone Mme Andreani, de la CRS
Berne-Mittelland, lors de la prise de rendez-vous.
Facile… au début
La première question est simple. J’écris
spontanément ce qui motive ma démarche. Puis les questions se font plus
complexes. Il m’est de plus en plus difficile de formuler mes pensées par écrit. A
partir du troisième point, désemparée,
a r r i è r e -Pl a n
dance. Je suis rattrapée par tout ce que
j’ai pu vivre, lire ou entendre. Difficile
de se représenter une vie avec une atteinte sévère. Pourtant, je me résous à
une prise de position claire, sans équivoque.
Après cette partie, je réalise que j’aurais du mal à répondre sans l’aide d’autrui aux questions détaillées qui suivent.
Aussi suis-je impatiente de me présenter à l’entretien-conseil. Celui-ci me réserve-t-il des moments d’angoisse?
Le fil conducteur
Priska Andreani (à
droite), de la CRS
Berne-Mittelland,
passe en revue les
différents points en
toute neutralité.
je consulte la notice jointe. Chaque notion y est expliquée; après quelques cogitations toutes philosophiques, l’inspiration revient. Pourtant, même s’il ne
Des valeurs influencées
par le vécu
s’agit que de notes, je m’interroge sur la
pertinence de chacune de mes formulations. Est-ce que je m’exprime de façon
trop ambiguë ou trop crue? Je m’aperçois que je suis très marquée par mes
expériences. En particulier sur la question de la qualité de vie et de la dépen-
Je me sens tout de suite à l’aise avec
Priska Andreani, qui me reçoit dans une
salle de réunion de la CRS Berne-Mittelland. Les pensées que j’ai laborieusement couchées sur le papier ne
l’étonnent nullement – ce qui me rassure. En guise d’entrée en matière, elle
revient sur ce principe essentiel: «Vos valeurs personnelles sont le fil conducteur
qui se déroule de question en question,
préservant vos directives anticipées de
toute contradiction.» L’importance de
la cohérence interne, comme dans tout
bon concept. Une considération primordiale quand on échafaude des scénarios
de type «Qu’est-ce qui se passerait si…».
Ma réticence à poser les questions prétendument idiotes est vite vaincue. Car,
pour ma conseillère, de telles questions
n’existent pas. Priska Andreani a acquis
son savoir sur les directives anticipées
grâce à une formation modulaire. Forte
de sa propre expérience, cette femme
de 59 ans dégage une aura teintée de
fermeté, de sérénité et de cordialité. Je
n’éprouve pas la moindre angoisse pendant tout l’entretien. J’ai même l’occasion de rire. Au moment où je suis tentée – par pure lâcheté, je l’avoue – de
cocher à un endroit «Décision de la personne de confiance». Ma conseillère me
renvoie alors à ma motivation initiale et
me fait observer avec un clin d’œil que
cela reviendrait à «faire porter le chapeau à quelqu’un». C’est vrai, elle a raison, il faut revenir au fil conducteur.
Je suis toujours seule à décider. Celle
qui me sert d’éclaireuse dans la jungle
médicale ne réagit pas à mes regards
interrogateurs, parfois implorants.
Elle se conforme scrupuleusement au
troisième Principe fondamental de la
Croix-Rouge: la neutralité. Certes, je me
sens guidée, accompagnée sur le chemin. Mais je suis la seule à fixer le cap.
Si je m’éloigne trop de l’itinéraire que
j’ai choisi, j’ai droit à un petit rappel. La
conseillère veille à ce qu’aucun écart
ne rompe la linéarité du parcours, pour
qu’aucune déclaration contradictoire
ne complique un jour la tâche du personnel médical. Car, en la matière, toute
La référence constante à ses
valeurs propres, gage de la
cohérence des déclarations
interprétation erronée pourrait être très
lourde de conséquences.
Une conclusion apaisante
Pendant tout l’entretien, les conditions d’un dialogue spontané sont réunies: rien – même pas un ordinateur
– ne vient s’interposer entre mon interlocutrice et moi. Priska Andreani prend
des notes manuscrites et m’envoie
quelques jours après par courrier les directives anticipées dûment remplies. J’ai
la possibilité de les conserver chez moi
ou de les déposer en lieu sûr à la CRS, où
des personnes habilitées y auront accès
à tout moment le cas échéant.
Tous les deux ans, je serai invitée par
la CRS à adapter mes directives anticipées. La question du don d’organe est
également réglée par le document.
Mon compagnon étant institué comme
mandataire, il aurait, en cas de situation
critique, accès à l’hôpital et à toute information relative à mon état. Je suis
soulagée et satisfaite de «notre» œuvre,
qui pourtant n’appartient qu’à moi.
➔ directives-anticipees.ch
Tanja Reusser
Agée de 40 ans, celle qui
est depuis 2010 rédactrice
en chef d’Humanité a établi des directives anticipées
pour la première fois.
Humanité 1/2014 15
r é tro sp ect ive
L’emblème de la Croix-Rouge
Question de vie ou de mort
Un vent de renouveau souffle sur l’an 1863. Pères fondateurs de la Croix-Rouge, Henry Dunant
et le général Dufour réfléchissent à un signe de protection et de reconnaissance pour les comités de secours aux blessés. En l’honneur de la Suisse, c’est une croix rouge sur fond blanc qui
est adoptée, obtenue en inversant les couleurs du drapeau helvétique.
texte: Myriam Bschir E
n 1862, Henry Dunant relate, dans
son ouvrage Un souvenir de Solférino, le sort tragique de soldats blessés sur
le champ de bataille. La souffrance humaine et la déficience des secours qu’il y
dépeint provoquent un choc dans la société d’alors, incitant des personnalités
influentes à se mobiliser.
Un signe fort
ART. 7, Convention de Genève, 1864 –
Un drapeau distinctif et uniforme sera
adopté pour les hôpitaux, les ambulances et les évacuations. Il devra être,
en toute circonstance, accompagné du
drapeau national.
Un brassard sera également admis pour
le personnel neutralisé, mais la délivrance en sera laissée à l’autorité militaire.
Le drapeau et le brassard porteront
croix rouge sur fond blanc.
Plus de 150 ans plus tard, la croix rouge
figure parmi les emblèmes les plus
connus et fiables. Aux côtés du croissant
rouge (introduit en 1876) et du cristal
rouge (2005), elle est un symbole d’aide
et de protection.
Le droit international humanitaire régit
© Panorama Bourbaki Lucerne
La négociation qui donnera naissance
à la première Convention de Genève
se tient le 29 octobre 1863. Réunis en
conférence internationale, des représentants officiels de quatorze Etats discutent d’un projet de Convention de
Genève pour l’amélioration du sort des
militaires blessés dans les armées en
campagne. Il est proposé d’accorder
la neutralité aux services sanitaires et
aux bénévoles reconnus apportant leur
aide. Les parties prenantes débattent
en outre d’un signe de reconnaissance
commun: la croix rouge.
En août de l’année suivante, la première
Convention de Genève est signée solennellement.
En 1871, lors de la première grande intervention de la CRS, l’emblème distinguait la voiture
transportant les blessés.
16
Humanité 1/2014
Le CICR ne pourrait mener d’interventions humanitaires
l’emblème.
r é tr o s pe c t i v e
Dans les pays islamiques,
l’emblème de protection est le croissant rouge.
L’emblème du 3e Protocole
additionnel de 2005, le cristal rouge,
est moins connu.
l’utilisation de ces trois emblèmes qui,
employés pour désigner les unités sanitaires, les hôpitaux, les ambulances ainsi
que le personnel et le matériel humanitaires, doit les protéger contre toute attaque en cas de guerre. Or il n’en va malheureusement pas toujours ainsi.
Une étude du CICR portant sur 22 pays
a montré que ces dernières années, des
ambulances ont régulièrement été arrêtées ou prises pour cibles dans diverses
régions du monde (Afghanistan, Colombie, Liban, territoires palestiniens
occupés, Libye, Yémen et Syrie). Sur les
quelque 1400 incidents examinés en un
peu plus d’un an, 214 concernaient des
ambulances. Cette insécurité a des effets
dévastateurs voire mortels sur de nombreuses personnes cherchant à accéder
aux services de santé.
C’est pourquoi le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a lancé en 2011 la campagne «Les soins de santé en danger».
Objectif: améliorer d’ici 2015 la protection des biens et du personnel humanitaires ainsi que des véhicules et structures sanitaires.
S’exprimant au sujet d’un rapport édité dans ce cadre, Yves Daccord, directeur
général du CICR, précise: «Ce rapport
n’offre pas de solutions magiques. En revanche, il propose des mesures pratiques
que peuvent prendre les autorités, les
forces militaires et les fournisseurs de
soins de santé eux-mêmes. Même au
cœur de la violence armée, il existe des
moyens de réduire les risques.» Aussi le
CICR préconise-t-il le renforcement des
législations nationales protégeant l’action des ambulances et la recherche d’un
terrain d’entente avec les autorités et les
forces armées.
lisation de l’emblème est réservée exclusivement aux organisations liées à la
Croix-Rouge. Ce principe figure pourtant
dans la loi fédérale de 1954 concernant
la protection de l’emblème et du nom de
la Croix-Rouge, dont voici quelques extraits:
La croix rouge en Suisse
Il arrive souvent que par ignorance,
des agences de graphisme ou de marketing intègrent la croix rouge dans
leurs travaux. Or les emblèmes utilisés par le Mouvement international de
la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
(croix rouge, croissant rouge et cristal
rouge) sont protégés par la législation
aussi bien internationale que nationale,
comme précisé ci-dessus.
© CICR / C. von Toggenburg
La croix rouge sur fond blanc
est un emblème protégé partout et
en tout temps.
dans les zones de guerre s’il n’était protégé par
En tant que Société nationale de la CroixRouge en Suisse, nous avons le privilège
d’utiliser la croix rouge comme signe distinctif de notre organisation et de nos activités. Il est de notre devoir de sensibiliser le public à la signification particulière
de cet emblème afin que celui-ci continue de protéger nos confrères œuvrant
aux quatre coins du monde en faveur
des victimes de conflits armés.
Car en Suisse comme ailleurs, de nombreuses personnes ignorent que l’uti-
Art. 2, L’emblème de la croix rouge sur
fond blanc pourra, avec l’autorisation
du Conseil fédéral ou des autorités ou
organisations désignées par lui, être
employé (…).
Art. 3, L’emblème de la croix rouge sur
fond blanc pourra être employé pour signaler, en temps de guerre, les zones et
localités sanitaires exclusivement réservées à des blessés et malades (…).
Art. 4, al. 1, La Croix-Rouge suisse
pourra faire usage en tout temps de
l’emblème et du nom de la Croix-Rouge,
pour ses activités conformes aux principes formulés par les conférences internationales de la Croix-Rouge et à la législation fédérale. (...)
➔ redcross.ch/emblemes
Humanité 1/2014 17
T É M OIGNAGE
Devant sa cabane, Rebecca Sibid prépare avec les aliments du dispensaire une bouillie nourrissante pour son petit-fils malnutri.
Soudan du Sud
Un début difficile
Au Soudan du Sud, dernier-né des Etats du monde, le quotidien s’apparente à une lutte pour
la survie: l’accès aux soins et à l’eau est précaire et la malnutrition fait rage, notamment chez
les tout-petits. Notre reportage date d’avant les exactions qui ont ensanglanté le pays fin
2013. L’aide d’urgence fournie par le personnel des dispensaires et les bénévoles formés par
la Croix-Rouge suisse (CRS) est plus capitale que jamais.
texte: Isabel Rutschmann photos: Remo Nägeli L
es conditions de vie sont incroya­
blement difficiles à Hai Salam, un
faubourg de Malakal, ville située dans
le nord du Soudan du Sud. Ici, pas d’eau
courante ni d’électricité. Pendant la
période sèche, le soleil chauffe à blanc
les toits de paille des cabanes en torchis dès le petit matin. Au fil de la journée, la température dépasse 40°C à
18
Humanité 1/2014
l’ombre. Pendant la saison des pluies,
les inondations sont récurrentes. Les
pistes qui desservent la ville deviennent
alors bourbeuses et impraticables. Pauvreté, faim, insalubrité et maladies sont
le lot de ceux qui, après la guerre qui
s’est achevée en 2011, sont rentrés dans
leur pays pour commencer une nouvelle
vie.
Il y a quelques semaines encore, les habitants d’Hai Salam étaient à la merci de
maladies pourtant curables, telles que
paludisme et diarrhées infectieuses. Privés de services médicaux accessibles à
pied, beaucoup y ont succombé. Conçu,
construit et ouvert en octobre 2013 par
la Croix-Rouge sud-soudanaise conjointement avec la CRS, le nouveau dispen-
T É MO IGNAGE
Mis en service alors
que les travaux ne
sont pas finis, le
nouveau dispensaire de la CRS est
très fréquenté.
veau-né. Conformément aux courbes de
croissance pondérale, le poids qui correspond à son âge est de 8 kilos environ. Zake
n’a pas pu être allaité: sa mère, qui vit séparée de son père, est contrainte depuis
sa naissance de travailler toute la journée
au marché afin de subvenir à ses besoins
et à ceux de ses trois premiers enfants. Le
fait est que personne n’avait les moyens
de pourvoir à l’alimentation de l’enfant.
La pesée et la mesure de sa taille par les
auxiliaires du dispensaire n’arrachent
à Zake que cris et résistance. Il ne peut
saire assure à la population une vie un
peu plus digne. D’autres régions du pays
ont déjà été dotées d’une telle structure
par la CRS.
L’une des premières causes de mortalité chez les enfants en bas âge, la malnutrition est un autre fléau que le dispensaire entend combattre. L’offre de soins
de base correspond à un véritable besoin, comme en témoigne la fréquentation de l’établissement: à peine celui-ci
ouvre-t-il ses portes le matin que les malades affluent de toutes parts, avant d’at-
Faute de soins de proximité,
beaucoup ont succombé à des
maladies pourtant curables.
tendre patiemment leur tour. Accueillant
quotidiennement jusqu’à 50 personnes,
le tout nouveau centre est déjà à la limite
de ses capacités. Le directeur du ministère de la santé parle déjà d’accroître
les effectifs pour doubler le nombre de
consultations. Il est même question de
mettre en place un service d’urgence de
nuit.
Le dispensaire dispose des médicaments élémentaires, remis gratuitement aux patients.
Aide pour les enfants malnutris
Parmi les personnes qui attendent dans
la cour du dispensaire, Rebecca Sibid,
45 ans, et Zake, son petit-fils âgé de
8 mois. Comme chaque semaine, la
grand-mère se présente avec le bambin à la consultation mère-enfant pour
un contrôle. Dès qu’elle retire l’enfant
de l’écharpe de portage, découvrant ses
membres décharnés et ses côtes saillantes, la nature du problème qui motive
sa venue ne fait plus aucun doute: le petit souffre de malnutrition sévère. Avec
ses 3 kilos, il ne pèse pas plus qu’un nou-
Malgré l’affluence, chacun attend patiemment son tour à la consultation mère-enfant.
Humanité 1/2014 19
Votre parrainage – pour
répondre à l’urgence
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© Canadian Red Cross/Gwen Eamer
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Novembre 2013: un typhon ravage les Philippines. La CRS envoie des équipes d’urgence et des biens de secours.
 Oui, je souscris à un parrainage pour 1 CHF par jour,
soit 30 CHF par mois.
 Veuillez m’envoyer des informations sur les parrainages
de la CRS.
Prénom/nom:
Rue/n°:
En Suisse comme à l’étranger, les situations de crise
requièrent une intervention rapide. Parrainer notre action,
c’est secourir sans tarder les victimes de catastrophes –
et donc répondre efficacement à l’urgence. Avec 1 CHF par
jour, vous pouvez alléger la souffrance et sauver des vies.
Souscrivez dès aujourd’hui à un parrainage.
www.crs-parrainage.ch
NPA/localité:
Date de naissance:
Tél.:
Courriel:
Signature:
A retourner à: Croix-Rouge suisse, Parrainages
Rainmattstrasse 10, Case postale, 3001 Berne
Courriel: [email protected]
e ntretien
Service ambulatoire CRS pour victimes de la torture et de la guerre
«Une voie pour retrouver
l’autodétermination»
Depuis près de vingt ans, le Service ambulatoire s’occupe de personnes parmi les plus
vulnérables: les victimes de la torture et de la guerre. Angelika Louis donne un aperçu des
activités en cours au sein de l’importante structure qu’elle dirige.
Entretien: Urs Frieden
Pourquoi les personnes traumatisées
sont-elles orientées vers le Service
ambulatoire plutôt que vers le cabinet de psychothérapie le plus proche?
Les personnes qui viennent nous voir
ont été victimes de graves violations
des droits de l’homme. Lieu de conseil
et de prise en charge destiné aux victimes de la torture et de la guerre, le Service ambulatoire pratique l’interdisciplinarité: nos psychologues, psychiatres,
psychothérapeutes et travailleurs sociaux se consultent en permanence et
collaborent dans l’intérêt des patients.
Au besoin, ils sont appuyés par des interprètes lors des séances de conseil
ou de thérapie. Nous pouvons ainsi offrir aux personnes concernées, pour qui
la Croix-Rouge revêt une forte valeur
symbolique, une prise en charge et un
conseil adaptés.
On ne peut que souhaiter que le
Service ambulatoire pour victimes
de la torture et de la guerre vienne à
manquer de travail. Mais c’était loin
d’être le cas durant l’année qui vient
de s’écouler.
Oui, hélas! Demandes et prises de rendez-vous ont de nouveau été nombreuses. Le Service ambulatoire a ouvert
ses portes en 1995 et, ces dernières années, s’est occupé de plus de 3300 patients, totalisant au moins 30 000 consultations. Les quatre centres, à Berne,
Genève, Lausanne et Zurich, ont pris en
22
Humanité 1/2014
charge plus de 6000 personnes dans le
cadre de 60 000 consultations au moins.
Les spécialistes confirmés des quatre
structures font preuve d’un engagement
sans relâche et hautement méritoire en
faveur de ce public, qui est l’un des plus
vulnérables qui soit.
Quel cas vous a particulièrement
émue ces derniers temps?
Chaque histoire est émouvante, car ces
personnes ont survécu à quelque chose
qui dépasse l’entendement. Je suis particulièrement impressionnée par tous
ceux qui, malgré les atrocités qu’ils ont
subies et les séquelles irréversibles qu’ils
en conservent, viennent volontiers chez
nous, sont chaleureux et attentifs, s’as-
«Ces personnes ont déjà vécu
quelque chose qui dépasse
l’entendement et dont elles
conservent des séquelles
irréversibles.»
soient dignement dans la salle d’attente,
cherchent une voie pour retrouver l’autodétermination et surtout n’ont pas
perdu espoir.
Votre équipe propose toujours de
nouvelles thérapies spécialement
destinées aux parents (cf. Humanité 3/13) ou aux enfants et jeunes
concernés. Quelles nouveautés ont
marqué 2013?
Je voudrais mentionner deux projets en
particulier. Premièrement, l’organisation d’un groupe de femmes en 2013.
Les deux psychothérapeutes du Service
ambulatoire ont été épaulées par des interprètes. Ce cours était axé sur la compréhension et sur la maîtrise du stress.
Les participantes ont déclaré avoir beaucoup appris sur différentes pathologies,
s’être senties très à l’aise dans le groupe
et avoir énormément apprécié la discussion avec les autres femmes. Elles ont
été initiées à de nombreux exercices pratiques à réaliser au quotidien. Deuxièmement, le projet dentaire pour les sans-papiers. La partie dédiée à la prévention
consiste à donner des informations générales sur la santé bucco-dentaire et à
alerter sur les risques d’un mauvais état
bucco-dentaire. Par ailleurs, nous encourageons l’accès du public visé aux soins
dentaires, domaine où les besoins sont
considérables.
L’équipe thérapeutique du Service
ambulatoire a participé, avec des
patients, à une étude menée par les
universités de Zurich et de Sydney sur
la «régulation des émotions». Les résultats préliminaires sont prêts. Qu’en
est-il ressorti d’essentiel?
Ces résultats ont permis d’étayer scientifiquement des constats qui se dégagent
de la pratique clinique quotidienne et
de démontrer ainsi l’importance de
notre travail. A mon avis, la conclusion
© iStock.com/SRK
e n tr e t i e n
On n’efface jamais les souvenirs traumatiques; toutefois, une thérapie au Service ambulatoire aide à retrouver le courage de vivre et à
s’ouvrir des perspectives (image symbolique).
la plus importante de l’étude valide ce
que nous avons fait jusqu’ici et nous
motive pour l’avenir: «Si l’on veut favoriser l’intégration des migrants traumatisés, il faut proposer non seulement
une prise en charge complète, mais aussi tenir compte des conditions de vie
réelles.» Il faut donc compléter le travail thérapeutique par un travail social.
Par exemple, nous pouvons encourager
les gens à adopter un emploi du temps
structuré par des activités utiles et adaptées, ou alors, et c’est primordial, les aider à échafauder des perspectives professionnelles. Nombre de ces personnes
sont diplômées de l’enseignement supérieur dans leur pays d’origine et doivent
désormais composer avec une situation
totalement différente et trouver une solution réaliste.
Vos spécialistes ont apporté une
contribution importante lors de la
consultation sur la procédure d’asile
accélérée. Pourquoi?
Nous ne devons pas nous taire lorsque
la protection des plus vulnérables est
en jeu. La nouvelle procédure d’asile
prévue apporte des améliorations, que
nous saluons en tant que structures de
soins spécialisées. On peut citer la réduction des délais, l’intervention précoce de conseillers juridiques indépendants ainsi que l’évaluation immédiate
des atteintes à la santé. Nous craignons
cependant que l’accélération de la procédure n’ait des retombées qualitatives préjudiciables pour les réfugiés
présentant des traumatismes sévères,
lesquels sont particulièrement tributaires des mesures de protection. En effet, nombre d’entre eux ne sont pas à
même de rendre compte dans les délais
et le cadre impartis de leurs éventuelles
«atteintes à la santé déterminantes»,
comme il leur est demandé. Lors d’une
réunion, à l’automne dernier, les quatre
Services ambulatoires de Berne, Genève,
Lausanne et Zurich ont défini, avec des
experts extérieurs, une série de condi-
tions garantes de la protection de ces
personnes, y compris dans le cadre de la
procédure accélérée.
➔ Avec le parrainage CRS pour les victimes
de la torture et de la guerre, soutenez régulièrement le Service ambulatoire. Avec 1 CHF seulement par jour. Pour obtenir des informations
sans engagement de votre part: 031 387 74 64
ou [email protected]
Angelika Louis
Cette économiste d’entreprise dirige depuis février 2008 le Service ambulatoire pour victimes de la
torture et de la guerre,
à Wabern près de Berne.
Humanité 1/2014 23
S ur le terrain
Le vert, la couleur de l’espoir: Louise Blanchard montre des jeunes pousses de la pépinière.
Des arbres et de l’eau en Haïti
Victimes de la pauvreté
Dans la région de Léogane, la Croix-Rouge suisse (CRS) a terminé le travail de reconstruction entamé après le séisme de 2010. L’heure est à présent à l’amélioration de l’approvisionnement en eau et à la prévention des catastrophes. Pendant des décennies, la population a dans sa détresse sacrifié les arbres, qui stabilisaient les versants.
Texte: Sandra Weiss photos: Florian Kopp
L
ouise Blanchard se souvient encore
de cette magnifique forêt à l’ombre
de laquelle, dans son enfance, elle faisait toujours une halte en rentrant de
l’école. Un léger souffle d’air amenait un
rafraîchissement bienvenu quand le soleil ardent était à son zénith, et au loin,
on entendait le murmure d’une source.
Le village de Morin, situé à mi-hauteur entre les eaux turquoise de la mer
des Caraïbes et l’imposant massif de la
Selle, était un petit paradis. Aujourd’hui,
24
Humanité 1/2014
Louise Blanchard a 38 ans. La forêt et
la source ont disparu. Les fleuves s’assèchent en hiver et gonflent pendant la
La rentrée scolaire est une
catastrophe naturelle qui
revient chaque année.
saison des pluies jusqu’à devenir des torrents destructeurs emportant tout sur
leur passage, les terres fertiles comme
les ponts et les habitations. De la forêt
tropicale luxuriante qui autrefois recouvrait le pays, il ne reste plus que 2%. Les
arbres ont été abattus, le bois noble
pour servir à la fabrication de meubles
et à la construction, le reste pour être
transformé en charbon de bois. Ils ont
été victimes de la pauvreté. Ces cinquante dernières années, si la population haïtienne a triplé, la croissance économique n’a pas suivi. Les trois quarts
des Haïtiens cuisinent toujours au bois
et au charbon sur un feu ouvert.
S u r l e te r r a i n
Un arbre sacrifié par année scolaire
Là où se trouvait jadis la forêt, le soleil darde aujourd’hui ses rayons implacables sur les pierres et le peu d’herbe
laissé par les chèvres. La pluie a creusé de
profonds sillons dans le sol dénudé. L’air
est brûlant. Le fils du voisin, muni d’une
vieille pioche, trace des sillons parallèlement au versant abrupt afin d’y planter
du manioc. Quel bonheur de se réfugier
une centaine de mètres en contrebas
dans la petite cabane en bois de Louise
Blanchard: autour des deux maisons de
cette grande famille, quelques vieux
manguiers et acérolas encore debout
dispensent une ombre bénéfique. «C’est
tout ce qu’il reste», déplore Louise
Blanchard. Ses parents aussi, à l’instar
de millions d’autres, ont dû abattre des
arbres pour permettre d’aller à l’école à
quelques-uns au moins de leurs dix enfants. Grâce au charbon de bois ainsi fabriqué, ils ont acheté des uniformes, des
crayons et des cahiers. La rentrée scolaire
est une catastrophe naturelle qui revient
chaque année.
Louise Blanchard sait aujourd’hui que
«pour chaque arbre abattu, il aurait fallu en replanter cinq. Sans arbres, il n’y
a pas de vie.» Elle tente désormais de
réparer les erreurs du passé, pour que
sa fille maintenant adulte et Gregory,
son fils qui vient de naître, aient un
avenir meilleur. Avec le soutien de
Stéphane de Rengervé, agronome de
Stéphane de Rengervé (au centre), agronome CRS, détermine quels sont les versants particulièrement dangereux et explique à la population pourquoi le reboisement doit être prioritaire.
la CRS, elle et une quarantaine d’autres
villageois gèrent une pépinière et un
tas de compost. Les graines auront
germé dans quelques mois pour donner un magnifique bosquet de cèdres
d’Haïti, de chênes, de marronniers,
de cocotiers, de papayers et de manguiers. Les premiers semis seront bientôt plantés, d’abord autour des sources
d’eau puis sur des pentes particulière-
Quand Louise Blanchard était enfant,
de l’eau potable
s’écoulait d’une
source à cet endroit.
Humanité 1/2014 25
S ur le terrain
Axelain Kessner,
promoteur de santé, montre comment bien se laver
les mains pour éviter des maladies.
La citerne en plastique noir sert à récolter de l’eau de
pluie. Olivier Le Gall,
ingénieur CRS, examine quelles sont
les réparations nécessaires.
dizaine d’emplois, et les ouvriers bénéficient d’une formation artisanale de base.
Tandis que la CRS met le matériel à disposition et assure le transport, ce sont les bénéficiaires eux-mêmes qui accomplissent
les travaux, sous la supervision des spécialistes. L’équipe d’Olivier Le Gall répare en
outre quelque 150 citernes endommagées installées à la hâte après le séisme.
Cette activité permet de créer
une dizaine d’emplois, et les
ouvriers bénéficient d’une
formation artisanale de base.
ment menaçantes que Stéphane de
Rengervé a choisies avec les habitants.
A quoi s’ajoute la formation de bénévoles à la protection contre les catastrophes. «Il est primordial que l’initiative vienne de la population», indique
l’agronome, qui, dans cet esprit, a organisé quelques réunions avec la communauté du village, à l’issue desquelles il a
été décidé qu’à Morin, il fallait donner
la priorité absolue au reboisement et
à la protection contre les catastrophes
naturelles.
26
Humanité 1/2014
Construction de latrines sous
la supervision de spécialistes
A Tchawa, dans la commune voisine, les
habitants ont quant à eux privilégié l’accès à l’eau potable. Olivier Le Gall, ingénieur CRS, se charge d’installer des réservoirs d’eau de pluie. Comme les citernes
en plastique noir de fabrication locale ne
peuvent contenir assez d’eau, il construit
à présent, sur le site de la CRS à Léogane,
des réservoirs en pierre ainsi que des latrines en bois et en ciment de sa conception. Cette activité permet de créer une
Autre élément essentiel: l’hygiène. Les
moustiques et les mouches, faisant des allers-retours entre les matières fécales disséminées dans la nature et les aliments,
transmettent des maladies. Et lorsque
même l’eau potable est contaminée par
des excréments, le choléra peut se répandre, comme ce fut le cas en 2010 en
Haïti. D’où la décision de la CRS de s’atteler
à la fabrication et à l’installation de latrines.
Pendant ce temps, Axelain Kessner, formé
par l’œuvre d’entraide comme promoteur
de santé, parcourt les montagnes pour distribuer des tablettes de chlore et du savon
et apprendre aux villageois comment bien
se laver les mains. Les faire sécher en l’air
est l’un de ses tuyaux, car dans les foyers,
les torchons propres sont denrée rare.
➔ redcross.ch/haiti
en bref
■ Grâce à Freedreams, les donateurs de
la CRS peuvent séjourner pour moins de
15 CHF par nuit et par personne dans l’un
des 3000 hôtels partenaires situés dans les
plus belles régions de Suisse et d’Europe.
Pour ce faire, il vous suffit de commander deux chèques hôteliers Freedreams à
85 CHF chacun. Chaque chèque donne
droit à trois nuits pour deux personnes dans
l’un des hôtels 3 ou 4 étoiles listés dans le
catalogue. En contrepartie, vous devez
simplement prendre le petit-déjeuner et
le repas du soir à l’hôtel. L’offre est valable
jusqu’au 30 avril 2014. Pour toute commande passée d’ici là, Freedreams verse
50 CHF à la CRS. Pour réserver un séjour, appelez le 0848 88 11 88 ou rendez-vous sur
le site de la société, où vous pourrez également consulter le catalogue des hôtels et
les conditions de participation.
➔ freedreams.ch/redcross
La CRS à l’OFFA
■ Du 9 au 13 avril 2014, des spécialistes
en gestion de catastrophes de la CRS
présenteront leur travail lors de l’OFFA
de Saint-Gall. Les visiteurs de la foire découvriront quels biens de secours ont été
expédiés aux Philippines et quels sont les
défis à relever en cas d’urgence.
© Carole Vann
Freedreams: offre aux
donateurs de la CRS
Une leçon convaincante
■ Le Dr Heidi Goubran (photo), médecin-conseil de la CRS qui dirige le département de sérologie du Service national
de transfusion sanguine au Caire, a été
dépêchée pour un certain temps au Liban, où elle intervient en tant que formatrice. Car assurer la qualité des produits
sanguins en laboratoire est une question de vie ou de mort, qui passe notamment par la suppression des échanges involontaires d’échantillons. De même, les
réserves de sang doivent en tout temps
être suffisantes. Le Dr Goubran, spécialiste expérimentée et convaincante, est
la personne toute trouvée pour accomplir cette mission de formation. Pleine
d’entrain, la jeune Egyptienne de 38 ans
a transmis son savoir aux bénévoles du
centre médical du Croissant-Rouge pa-
lestinien à Beyrouth tout en leur donnant
de nombreux conseils pour mener des actions de don de sang avec succès. Comme
c’est le cas par exemple dans les rues du
Caire, où des équipes mobiles abordent
des passants, surtout des jeunes, dans des
endroits stratégiques. «Nous devons gagner la confiance du grand public et expliquer pourquoi le don de sang exclusivement réservé à un membre de la famille
ne suffit plus, et qu’il peut même être néfaste pour la santé», a indiqué le médecin
aux participants au cours, qui l’ont écoutée avec attention et ont posé des questions pertinentes. Mandatée par le Secrétariat d’Etat à l’économie, la CRS poursuit
son travail en Egypte, où elle s’assure de
la qualité des produits sanguins.
➔ redcross.ch/egypte
White Risk – mieux évaluer le risque d’avalanche
Collecte pour les
victimes du typhon
■ Les nombreux comptes rendus sur les
Philippines (p. 12) ont amené la CroixRouge Jeunesse de Saint-Gall à s’associer
à l’élan de solidarité. Lors d’une vente
dominicale peu avant Noël, celle-ci a
donc installé un stand bien en vue sur la
Marktplatz de Saint-Gall et a pu récolter
en à peine cinq heures plus de 1700 CHF,
qu’elle a reversés à la CRS en faveur des
régions frappées par le typhon Haiyan.
■ Ces dix dernières années, plus de 2000
personnes ont été victimes d’une avalanche
en Suisse. Un tiers d’entre elles ont été blessées ou ont perdu la vie. Si l’on s’aventure
hors des pistes sécurisées, il est donc capital
de planifier soigneusement son itinéraire.
Car plus de neuf avalanches sur dix sont déclenchées par la victime elle-même, que ce
soit en randonnée, à skis, en raquettes ou
en snowboard. Pour la CRS, l’Institut pour
l’étude de la neige et des avalanches et la
Suva, c’est une évidence: quiconque pratique un sport d’hiver en dehors des pistes
balisées se doit d’acquérir les connaissances
nécessaires. D’où l’idée de lancer White
Risk, une plateforme interactive en ligne
destinée à prévenir les accidents d’avalanche. Dotée d’une version gratuite et
liée à l’application du même nom, elle
propose des informations complètes et
un outil de planification de randonnées.
➔ whiterisk.org
Humanité 1/2014 27
Votre dernière volonté peut
être un geste pour l´avenir.
 Veuillez m´envoyer la brochure
sur les testaments
 Merci de prendre contact avec moi
En rédigeant un testament, vous avez l’assurance que votre
patrimoine sera réparti selon vos dernières volontés et que vos
valeurs vous survivront. La brochure sur les testaments éditée
par la Croix-Rouge suisse vous aidera dans cette démarche.
Nom
Prénom
Commande
Croix-Rouge suisse, Rainmattstrasse 10, 3001 Berne
Courriel: [email protected], Téléphone: 031 387 74 64
Rue/n°
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Tél.
Date de naissance
Pour de plus amples informations: www.redcross.ch/legs
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TION
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TERRES
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FAIRE RÉFLÉCHIR
FAIRE
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