La piece: THE DOG DAYS ARE OVER Compagnie: Jan Martens En

Transcription

La piece: THE DOG DAYS ARE OVER Compagnie: Jan Martens En
La piece: THE DOG DAYS ARE OVER
Compagnie: Jan Martens
En un mot: une pièce à vous couper le souffle, au sens propre comme au sens figuré, qui
fait de vous le voyeur gêné de tant de souffrance volontaire. En même temps, tous ces sauts
commentent clairement la façon dont nous vivons nos vies, de plus en plus superficielles et à
toute vitesse.
Meilleur moment: Quand sept danseurs sautent de gauche à droite et d'avant en arrière en
battant des bras, une huitième danseuse se retire en haletant bruyamment. A ce moment là
la pièce change de tournure et devient une véritable épreuve de survie pour les huit
danseurs, comptant à voix haute, grognant et haletant.
Score: ****
Sauter sans interruption pendant une heure, en comptant, mais encore en trouvant la
force de varier les rythmes, les figures , les formations... peu pourront et voudront
imiter les huit danseurs de Jan Martens.
Maarten a fait fureur avec des duos intimes et merveilleux, comme Victor et Sweat Baby
Sweat, mais se sert ici de la sobriété de son style pour metter en scène sans faux-semblants
la foire d'empoigne dans laquelle nous nous trouvons tous. Il lâche ses huit danseurs en
survêtements criards sur une scène quadrillée de lignes et de croix. Comme un écran
d'ordinateur vu de très près. Martens zoome ainsi sur nos conflits existenciels où tout doit
aller plus vite, mieux, être plus court et plus fort. Jusqu'à ce qu'on se consumme littéralement
d'épuisement, dans un burn-out.
Les danseurs enfilent sagement leurs chaussettes et chaussures colorées, se mettent en
rang, et regardent le public. Que voulez-vous de nous? semblent-ils penser. Doucement ils
commencent à sauter, pour n'arrêter qu'une bonne heure plus tard. On est époustouflé de
voir comment ils livrent ce combat avec la danse. Et comme ils flanchent aussi parfois. Dans
ces moments, ça n'est pas seulement le danseur derrière la personne, mais aussi soi-même
que l'on reconnait, et tous ceux qui se battent avec la réalité, faisant tout leur possible,
toujours à court de temps, mais continuant pourtant , pour se retrouver le soir épuisés, à
regarder dans le vide. Sans même de temps pour l'intimité.
Tout ça fait de THE DOG DAYS ARE OVER une pièce à vous couper le souffle, et de vous
le voyeur gêné de tant de souffrance volontaire. En même temps, tous ces sauts
commentent clairement la façon dont nous vivons nos vies, de plus en plus superficielles et à
toute vitesse. Y a-t-il une alternative? celle-ci apparait à peine deux fois quand Martens
accorde (enfin) un rôle plus ingénieux à l'éclairage. Dans la lumière devenue obscurité
apparaissent des ombres qui font incroyablement de leur mieux et le faisceau d'une lampe
électrique cherche les visages épuisés. Et soudain on est là, face à soi-même. Sauté trop
longtemps pour voir que c'est tellement beau de sauter, et aussi tellement inutile. Ou pas?
Els van Steenberghe