Réforme de la Procédure Pénale Evolutions, Involutions

Transcription

Réforme de la Procédure Pénale Evolutions, Involutions
Réforme de la Procédure Pénale
Evolutions, Involutions ?
Conséquences en matière de lutte
contre la fraude ?
CORINNE GROSBART
Avocat au Barreau de Paris
76, Avenue Raymond Poincaré
75116 PARIS
Tél: 01 45 53 68 34
Fax: 01 45 53 87 94
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1ère Partie
Présentation de la Loi du 5/03/07
tendant à renforcer l’équilibre de
la Procédure Pénale
A. Entrée en vigueur
échelonnée dans le temps
1.
2.
3.
4.
5.
Dispositions régissant la Chambre de l’instruction, la Cour
d’Assises, le pourvoi en cassation et le principe selon lequel le
criminel tient le civil en l’état : application immédiate.
Dispositions régissant la détention provisoire, le déroulement
des instructions, les plaintes avec constitution de parties civiles
ainsi que l’assistance obligatoire de l’Avocat et l’enregistrement
des auditions pour les victimes mineures : application au
1er juillet 2007.
Dispositions régissant les pôles d’instruction et la co-saisine de
Juges d’instruction : application au 1er mars 2008.
Dispositions régissant les enregistrements audiovisuels
obligatoires des interrogatoires des personnes gardées à vue ou
mises en examen, en matière criminelle : application au 1er Juin
2008.
Dispositions régissant la collégialité de l’instruction : application
au 1er Janvier 2010.
B. Dispositions tendant à assurer
la célérité de la Procédure
Pénale
(chapitre V, art 20-21)
1. Le Pénal tient-il toujours le
Civil en l’état ?
Art. 4 CPP :
Avant
L’action civile peut être aussi exercée séparément de
l’action publique.
Toutefois, il est sursis au jugement de cette action
exercée devant la juridiction civile tant qu’il n’a pas
été prononcé définitivement sur l’action publique
lorsque celle-ci a été mise en mouvement.
Art. 4 CPP :
Après
L’action civile en réparation du dommage
causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut
aussi être exercée devant une juridiction civile, séparément
de l’action publique.
Toutefois, il est sursis au jugement de cette action
tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur
l’action publique lorsque celle-ci a été mise en
mouvement.
La mise en mouvement de l’action publique n’impose
pas la suspension du jugement des autres actions
exercées devant la juridiction civile, de quelque
nature qu’elles soient,même si la décision à intervenir
au pénal est susceptible d’exercer, directement ou
indirectement, une influence sur la solution du
procès civil. La décision rendue par la juridiction
pénale postérieurement à la décision rendue par la
juridiction civile peut cependant constituer une cause
de révision du procès civil si au cours de l’instance
civile une demande de sursis à statuer pour bonne
administration de la justice a été déposée ou
rejetée.
2. La recevabilité de la plainte avec
constitution de partie civile art. 85
CPP en matière de délit
AVANT
Toute personne qui se prétend lésée par un crime
ou un délit peut en portant plainte se constituer
partie civile devant le juge d’instruction compétent
en application des dispositions des articles 52 et
706-42.
APRES
I – L’article 85 du code de procédure pénale est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
Toutefois la plainte avec constitution de partie civile
n’est recevable qu’à condition que la personne justifie
soit que le procureur de la République lui a fait connaître,
à la suite d’une plainte déposée devant lui ou un service de
police judiciaire, qu’il n’engagera pas lui-même des
poursuites, soit qu’un délai de troismois s’est écoulé
depuis qu’elle a déposé plainte devant ce magistrat, contre
récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis
de réception, ou depuis qu’elle a adressé selon les mêmes
modalités copie à ce magistrat de sa plainte déposée devant
un service de police judiciaire. Cette condition de recevabilité n’est pas requise s’il s’agit d’un crime ou s’il
s’agit d’un délit prévu par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté
de la presse. Par les articles L86, L 87, L91 à L100, L102 à
L 104, L106 à L 108 et L 113 du code électoral.
La prescription de l’action publique est suspendue, au profit
de la victime, du dépôt de la plainte jusqu’à la réponse du
procureur de la République ou, au plus tard,une fois écoulé
le délai de 3 mois.
3. Extension des pouvoirs du
Parquet : art. 86 CPP
Après
Avant
Le juge d’instruction ordonne communication de la
plainte au procureur de la République pour que ce
magistrat prenne ses réquisitions.
Le réquisitoire peut être pris contre personne dénommée ou non-dénommée.
Lorsque la plainte n’est pas suffisamment motivée ou
justifiée, le procureur de la République peut, avant
de prendre ses réquisitions et s’il n’y a pas été procédé d’office par le juge d’instruction, demander à
ce magistrat d’entendre la partie civile et, le cas
échéant, d’inviter cette dernière à produire toute
pièce utile à l’appui de sa plainte.
Le procureur de la République ne peut saisir le juge
d’instruction de réquisitions de non informer que si,
pour des causes affectant l’action publique elle-même
les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits démontrés, ils ne
peuvent admettre aucune qualification pénale. Dans
le cas où le juge d’instruction passe outre, il doit statuer par une ordonnance motivée.
Lorsque le juge d’instruction rend une ordonnance de
refus d’informer, il peut faire application des dispositions des articles 177-2 et 177-3.
2° Après la première phrase du quatrième alinéa, il
est ajouté la phrase suivante :
«Le procureur de la République peut également
prendre des réquisitions de non-lieu dans le cas où
il est établi de façon manifeste , le cas échéant au
vu des investigations qui ont put être réalisées à la
suite du dépôt de la plainte ou en application des
dispositions du troisième alinéa du présent article,
que les faits dénoncés par la partie civile n’ont pas
été commis. Dans le cas ou le juge d’instruction
passe outre, il doit statuer par une ordonnance
motivée ».
4. Limitation des demandes
d’expertise art. 88-2 du CPP
Le juge d’instruction peut, en cours de procédure, ordonner à la partie civile, qui demande la réalisation d’une
Expertise, de verser préalablement un complément de la
consignation prévue à l’article 88 afin de garantir le
paiement des frais susceptibles d’êtres mis à sa charge
en application du second alinéa de l’article 800-1.
Cette décision est prise par ordonnance motivée susceptible d’appel devant la chambre de l’instruction saisie
après que le juge d’instruction a refusé d’ordonner
l’expertise demandée.
Le complément de consignation est restitué s’il n’est pas
fait application du second alinéa de l’article 800-1.
1ère Conclusion
Influence du contexte :
• Engorgement de la justice : prétexte des plaintes abusives et dilatoires.
Influence du rapport Magendie du 15 juin 2004 sur la célérité et qualité de
la justice : « On trouve en ce moment en France dans les cabinets
d’instruction nombre de dossiers de procédure plaignants qui collectionnent
les plaintes, souvent titulaires de l’aide juridictionnelle, souvent sincères
mais qui ne bénéficient pas toujours de toutes leurs facultés mentales et qui
se croient…. l’objet de complot mêlant Avocats, Huissiers, Notaires,
Magistrats, etc…. »(Monsieur Magendie était doyen des juges d’instruction
du Tribunal de Nice).
• Manque de moyens entraîne la constitution d’un filtre limitant l’accès à
la justice et masquant son inertie (déjà par le passé problème identique)
et/ou atteinte aux droits des victimes ?
• Parallélisme avec les pourvois en matière civile et la carte judiciaire dont la
réforme est en cours.
• Affaire d’OUTREAU.
Tentative d’abolition avortée de la suppression du principe : « Le pénal tient le
civil en l’état ».
Formalisme entraînant l’effet inverse à la célérité voulue.
2ème Partie
Les conséquences pratiques
des modifications
A. Apparente restriction de la règle :
« Le criminel tient le civil en l’état »
1.
L’évidence confirmée par un jeu sémantique
•
•
•
2.
L’appréciation des juges du fond doit visiblement être
guidée.
Le sursis vaut pour : actions civiles exercées en réparation
du dommage causé par l’infraction.
Le sursis ne vaut pas pour : les autres actions exercées.
devant la juridiction civile de quelque nature qu’elle soit.
Exemple : prud’hommes, créance commerciale, divorce, etc…
Risque patent de contrariété de décision
•
•
•
Erreur du juge dans l’appréciation.
Jugement inutile et dangereux.
Révision du jugement abandonnée par le législateur.
B. Subordination de la recevabilité
de la plainte CPC à la saisine du
Ministère Public
1.
Uniquement pour les délits
•
•
•
•
2.
Plainte préalable déposée devant lui ou un service de police
judiciaire : forme RAR ou récépissé.
Si police judiciaire copie au Ministère Public récépissé ou
RAR.
Réponse explicite : n’engage pas les poursuites (dans les 3
mois de sa saisine).
Réponse implicite de rejet : 3 mois écoulés.
Les prescriptions : quid ?
•
•
•
Prescription de l’action publique est suspendue jusqu’à la
réponse ou les 3 mois écoulés nouvelle cause de
suspension de l’action publique.
Quid des prescriptions civiles : la biennale ?
Ne pas oublier l’article 10 du CPP.
C. Extension des pouvoirs du Parquet
avant l’ouverture de l’information
judiciaire
•
•
•
•
•
Résultats d’investigations, audition de la partie civile, pièces.
Le Parquet peut prendre des : « Réquisitions de non lieu » lorsqu’il est établi de
façon manifeste : « que les faits dénoncés par la partie civile n’ont pas été
commis ».
Le juge peut passer outre Ordonnance motivée.
Le juge pourra refuser d’informer Recours devant la chambre d’instruction.
Certains abandons du législateur :
Enquête préliminaire 15 à 30 jours supprimée
Citation directe avec accord du juge d’instruction et de la partie civile et
caducité de la plainte avec CPC supprimée
• Droits des victimes limités
• Remise en cause de la jurisprudence Laurent ATTHALIN (8.12.06) :
l’obligation d’informer imposée au juge par la CPC est atteinte
• Décourager les parties civiles
D. Frais d’expertise à la
charge de la partie civile
•
Tentative de limiter les demandes d’expertise abusives ou dilatoires.
•
Article 800-1 du code de procédure pénale : mise à la charge des frais de
justice correspondant aux expertises ordonnées à la demande des parties
civiles lorsque la constitution est jugée abusive ou dilatoire (sauf s’il s’agit de
délit portant atteinte aux personnes).
•
En cours de procédure le juge peut ordonner, préalablement à l’expertise, un
complément de consignation à la charge de la partie civile par ordonnance
motivée susceptible d’appel devant la chambre d’instruction.
Si refus d’ordonner l’expertise par le juge, recours devant la chambre
d’instruction qui peut l’ordonner et mettre les frais à la charge de la partie
civile.
Eviter les durées d’instruction trop longues.
Accélérer la phase de jugement du procès pénal.
A-t-on évité les rapports d’experts qualifiés devant la commission
d’OUTREAU de rapports de femme de ménage ?
3ème Partie
Solutions et stratégies à adopter
A.
Constitution en amont des pièces et
preuves qui viennent sous-tendre la
demande de constitution de partie civile
1.
Accélérer l’enquête faite au sein de la compagnie pour toute la
partie qui concerne l’escroquerie à l’assurance ou l’exagération
frauduleuse des dommages.
2.
Efficacité des intervenants extérieurs en amont : inspecteurs,
enquêteurs, avocats.
3.
Déposer au plus vite, pour réduire le délai de 3 mois, la constitution
de partie civile directement devant le Parquet compétent pour
éviter les doubles saisines police judiciaire/parquet.
4.
La plainte doit être motivée, argumentée, construite et étayée de
preuves pour emporter la conviction rapide du Procureur de la
République.
5.
Mettre en mouvement l’action publique au plus vite
B. Protéger les intérêts civils
1.
Résister à toutes les demandes d’indemnisation qui pourraient
être faites de la part de l’assuré ou de tiers, en démontrant
que leurs actions civiles ou commerciales ont un lien tel avec
l’infraction que le sursis à statuer ne peut qu’être ordonné.
2.
« Tenir la plume et remplir l’encrier » de ceux qui rédigeront
les jugements à intervenir, par la présentation de conclusions
particulièrement motivées pour obtenir le sursis à statuer.
3.
Ne pas oublier l’article 5-1 du code de procédure pénale, il
convient de résister en référé à toutes mesures provisoires et
démontrer l’existence de l’obligation qui est sérieusement
contestable : dol, nullité du contrat.
C.
En cas de décision implicite de rejet du
Parquet, agir dès la fin du délai de 3 mois
et un jour en déposant la constitution de
partie civile devant le juge d’instruction
sans tarder pour manifester derechef sa
volonté de poursuite.
Conclusion
L’excès de formalisme introduit par la loi du 5 mars 2007
ne doit pas décourager les assureurs pour qu’ils :
cessent de poursuivre la fraude à l’assurance
continuent à constituer leur dossier avec conviction
et pugnacité.
CORINNE GROSBART
Avocat au Barreau de Paris
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