DICTIONNAIRES, LEXIQUES ET AUTRES GLOSSAIRES
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DICTIONNAIRES, LEXIQUES ET AUTRES GLOSSAIRES
DICTIONNAIRES, LEXIQUES ET AUTRES GLOSSAIRES Quelques notes et pistes de recherche par John Humbley, Université Paris 7 Une typologie pour quoi faire ? Il existe de très nombreuses typologies de dictionnaires, établies selon différents critères (visée, contenu, destinataires, pondération des informations linguistiques et encyclopédiques…). Il est commode de définir les paramètres qui correspondent à l’analyse qu’on souhaite faire, et d’établir à partir de ces critères les grilles de lecture correspondantes. Puisque ce sont les dictionnaires de spécialité qui nous intéressent, nous examinerons surtout le contenu et la présentation des informations spécialisées. Toutefois, avant de passer aux dictionnaires de spécialité, il convient de dire un mot des dictionnaires de langue générale, et d’en présenter les grandes catégories. DICTIONNAIRES DE LANGUE Pour le grand public, le dictionnaire est avant tout le dictionnaire de langue. Pour le public francophone, le prototype du dictionnaire est sans doute le Petit Larousse Illustré, pour les Allemands le ou plutôt les Duden, et pour les Américains le Webster’s. Un examen même très superficiel de ces dictionnaires révèle des différences frappantes, mais on peut s’accorder sur le fait qu’ils sont avant tout des dictionnaires de décodage. Dictionnaires d’encodage, dictionnaires de décodage Les grands dictionnaires sont en fait de type mixte, puisqu’ils réunissent des fonctions de décodage et d’encodage, mais on constate toutefois que la priorité est accordée au décodage. On prend le PLI lorsqu’on relève un mot qu’on ne comprend pas, lorsqu’on bute sur un proverbe latin… La nomenclature de ces dictionnaires (les mots-vedettes ou entrées qu’ils contiennent) est très importante, elle constitue un argument de vente. Plus le dictionnaire a de mots, plus il est utile, donc il est surtout utile pour comprendre des mots difficiles, donc il est surtout un dictionnaire de décodage. A côté de ces dictionnaires, il en existe dont la fonction est exclusivement l’encodage ; si le Grévisse peut être assimilé à un dictionnaire, c’est un dictionnaire d’encodage. De même pour les dictionnaires du type Dictionnaire des difficultés de la langue française, bien connus à l'ISTI. Parmi les dictionnaires d’encodage, on peut encore distinguer entre ceux qui sont conçus pour des utilisateurs de langue maternelle (on ne met pas le Grévisse entre les mains de tout apprenant du français !), et ceux qui sont destinés aux non natifs. Ces derniers constituent une grande spécialité anglo-saxonne, et toute collection de dictionnaires anglais comporte aujourd’hui un “ learner’s dictionary ”. Ces dictionnaires mettent l'accent sur les aspects combinatoires, intuitifs pour le natif, que l’apprenant ne possède pas. Ils l’aident à “ mettre en langue ” le vocabulaire qu’il connaît déjà. Dictionnaires monolingues, dictionnaires bilingues Les dictionnaires dont nous avons parlé sont tous monolingues. Mais les bilingues sont tout aussi nombreux. Parmi les différences qui sautent aux yeux, la plus frappante se situe sans aucun doute au niveau de la microstructure. (On sait que la microstructure est la forme des articles du dictionnaire, et que la présentation des articles – par ordre alphabétique ou par thème, ainsi que le système de renvois – constitue la macrostructure.) Le dictionnaire monolingue présente des mots suivis d’une définition, d’une explication ou d’une illustration. La tradition française privilégie les définitions de type logique ; l’anglo-saxonne, plus pragmatique, se contente souvent d’explications. Le dictionnaire bilingue de langue ne comporte pas de définition, il comporte des équivalents. Bien entendu, les fonctions d’encodage et de décodage doivent être prévues dans les dictionnaires bilingues, mais en général les maisons d’édition se montrent très réticentes lorsqu’il s’agit de déclarer laquelle est privilégiée. Pour les dictionnaires français-danois/danois-français, par exemple, il est évident qu’il s’agit de dictionnaires d’encodage en français pour le Danois (les entrées françaises comportent de nombreuses informations grammaticales). Un Français a bien plus de mal à utiliser le même dictionnaire pour l’encodage vers le danois, car les informations grammaticales concernant le danois sont peu explicites – le genre des substantifs, par exemple, n’est pas indiqué. DICTIONNAIRES DE SPECIALITE Il est faux de prétendre que les dictionnaires de langue générale se limitent au vocabulaire général. Tous les dictionnaires “ usuels ” cités plus haut comportent une part très importante de terminologie, qui correspond à leur mission de décodage déjà mentionnée. Les dictionnaires de spécialité en revanche font totalement abstraction de la langue générale pour se concentrer sur le vocabulaire de leur domaine propre. Qu’est-ce qu’un dictionnaire de spécialité ? Si on prend un catalogue bilingue ou multilingue, on pourrait être tenté de considérer qu’il s’agit d’une sorte de dictionnaire très spécialisé. Après tout, il comporte plusieurs fonctions qui sont propres aux dictionnaires - une vedette – sous la forme du terme qui dénomme l’article en question un équivalent dans une autre langue une description, parfois une définition des illustrations Sa présentation est thématique, ce qui est typique de nombreux dictionnaires de spécialité. Il peut comporter un index alphabétique, comme de nombreux dictionnaires thématiques. Cependant, malgré ces ressemblances, on ne peut pas dire qu’il s’agit véritablement d’un dictionnaire. Pourquoi ? Les lexiques Le dictionnaire bilingue ou multilingue le plus simple est le lexique. Son article est réduit au strict minimum : un équivalent, accompagné éventuellement d’une précision grammaticale. La macrostructure peut être alphabétique ou thématique (systématique). Le lexique est un outil relativement fruste ; il comporte peu de redondance, et lorsqu’on connaît mal le domaine, il peut être d’un usage mal aisé. Cependant, dans beaucoup de domaines et pour de nombreuses langues, il n’existe rien d’autre et l’utilisateur est condamné à compléter sa documentation dans d’autres sources. Les glossaires Le glossaire, du moins dans le sens français du terme, n’a pas de prétention d’exhaustivité. Il explique “ les termes ancien, rares ou mal connus ” (BOUTIN-QUESNEL 1985). C’est le type de dictionnaire partiel qui figure typiquement en fin d’ouvrage, ou qui accompagne une thèse. Sous l’influence de l'anglais glossary, il recouvre de nos jours tout dictionnaire de spécialité. Les vocabulaires Le vocabulaire, contrairement au glossaire, vise l’exhaustivité du domaine concerné. Il comporte des définitions, et éventuellement des illustrations. Contrairement à ce qu’on observe dans les dictionnaires de langue générale, le vocabulaire peut être monolingue, bilingue ou multilingue. Sa présentation peut être alphabétique ou thématique. Les vocabulaires des grands domaines sont souvent appelés des dictionnaires (Dictionnaire de la physique). Dictionnaire terminologique Le dictionnaire terminologique est un vocabulaire d’un “ seul domaine [qui] comporte un haut degré d’exhaustivité ” (BOUTIN-QUESNEL 1985), et qui présente une très forte structuration, parfois matérialisée par un arbre du domaine. Dictionnaire encyclopédique Ces dictionnaires privilégient la présentation d’informations de nature référentielle, c’est-à-dire relatives aux objets. Dictionnaire d’encodage Jusqu’à une époque très récente, les dictionnaires de spécialité visaient surtout le décodage. Depuis une vingtaine d’années on assiste à l’incorporation de différents éléments dans les dictionnaires de spécialité susceptibles d’aider l’utilisateur à mettre en langue le vocabulaire du domaine. Ces dictionnaires sont destinés aux apprenants étrangers, aux traducteurs, aux journalistes. EVALUER UN DICTIONNAIRE DE SPECIALITE Il n’est pas facile d’évaluer un dictionnaire, car les critères sont nombreux et longs à vérifier. On peut commencer par s’interroger sur les principes d’inclusion retenus par l’auteur : le dictionnaire comporte-t-il des termes qui ne relèvent pas vraiment du domaine ? En lisant un texte du domaine, le lecteur trouve-t-il dans le dictionnaire les termes qui lui posent problème ? DICTIONNAIRES PAPIER, DICTIONNAIRES ELECTRONIQUES La typologie proposée ne concerne que les dictionnaires papier. Les dictionnaires électroniques, dans un premier temps calqués sur leurs aînés, commencent à présenter de nouvelles combinaisons de fonctions, qui méritent une étude particulière. Référence BOUTIN-QUESNEL, R, et al. (1985) : Vocabulaire systématique de la terminologie, Québec, Les publications du Québec (Les cahiers de l'Office de la langue française).