marcher avec les dragons

Transcription

marcher avec les dragons
Tim Ingold
m a rc h e r av ec
l e s d r ag o n s
Traduit de l'anglais
par Pierre Madelin
z
s
2013
zones sensibles
Pactum serva
préface
On considère généralement l’anthropologie comme une discipline
centrifuge qui envoie ceux qui la pratiquent sur des terrains aussi
isolés et éloignés que possible afin qu’ils puissent faire l’expérience
de modes de vie aussi différents des leurs que ce qu’ils pourraient
espérer ou s’attendre à trouver. J’ai en revanche toujours eu le sentiment qu’il s’agissait du contraire. Depuis que je me suis lancé
dans des études sur le sujet, l’anthropologie a été pour moi une
manière de retrouver le chemin du retour à la maison. Au moment
d’entreprendre ce cheminement, je ne pouvais pas m’appuyer sur
la moindre fondation solide. Ce n’est pas comme si j’avais déjà su,
avant même de prendre la route, tout ce qu’il était possible de savoir
sur moi-même et sur la personne que j’allais devenir. Comme la plupart des apprentis anthropologues, je suis moi aussi parti pour une
région assez lointaine afin d’y mener un travail de terrain, qui impliqua dans mon cas un séjour prolongé parmi les Same Skolt à l’extrémité nord-est de la Finlande. À l’époque, cependant, je n’avais pratiquement aucune idée de qui j’étais, d’où je venais et encore moins
où j’allais. J’avais un nom et une adresse, un passeport, un parent
proche à contacter en cas d’urgence. J’avais même un diplôme d’une
université respectée et une bourse pour m’aider dans mes recherches.
Mais la voix avec laquelle je parlais, la main avec laquelle j’écrivais
et même l’esprit avec lequel je pensais – ce n’était pas encore moi ;
ce n’étaient que des habitudes ou des attitudes que j’avais, à un
moment ou à un autre, cherché à imiter ou que l’on m’avait incité
à imiter. Au cours de ce séjour en Laponie, cependant, et à travers
l’éducation morale qu’il m’offrit, je fis mes premiers pas hésitants
sur le chemin du retour. La route fut longue et tortueuse. Je ne suis
d’ailleurs pas encore arrivé, et je n’arriverai probablement jamais.
Mais je suis désormais convaincu que c’est bel et bien ma voix qui
parle, ma main qui écrit et mon esprit qui pense. Et c’est avec ma
voix, ma main et mon esprit que j’affirme à présent : voilà qui je suis.
7
préface
préface
Qui est cette personne que je me découvre être peu à peu ? Il
semble que ce soit un enfant. Élevé dans une famille heureuse, où
sa mère l’autorisait à donner libre cours à sa passion pour les trains
miniatures tandis que son père menait des recherches scientifiques
sur les mécanismes de la dispersion des spores chez les champignons aquatiques, cet enfant allait passer de longues heures plongé
dans les pages de l’imposant chef-d’œuvre de D’Arcy Wentworth
Thompson, Forme et croissance, dont son père possédait une copie de
l’édition originale de 1917, ou à étudier la mathématique des bulles
de savon et les trajectoires des toupies. Il arrivait également à cet
enfant de partir marcher dans la campagne, sans prêter la moindre
attention à son père lorsque celui-ci identifiait et égrenait les noms
latins de toutes les plantes et de tous les champignons devant lesquels ils passaient. Il les connaissait tous ! À l’âge de 12 ans, la mère
de l’enfant lui offrit un violoncelle et s’arrangea pour qu’il puisse
prendre des leçons. À l’école, sous l’égide de professeurs inspirés, il
se tenait assis sur le bord de sa chaise, émerveillé par les mystères
de l’univers tels que la science était en train de les démêler. Il expérimentait les chambres à brouillard et étudiait la croissance des
cristaux plongés dans des solutions chimiques. Il était évident qu’il
deviendrait mathématicien et scientifique.
Que se passa-t-il ? Après avoir étudié les sciences naturelles à l’université de Cambridge pendant un an, le jeune homme perdit ses illusions. Après l’enthousiasme qu’avait suscité en lui l’enseignement
scolaire de la science, les cours de Cambridge furent une immense
déception. Il eut le sentiment que l’essentiel de ce qui était enseigné était intellectuellement étriqué, consacré à la recherche systématique et bornée d’objectifs qui semblaient éloignés de l’expérience.
À la différence de nombre de ses camarades étudiants, révoltés par
la façon dont la science avait renoncé à ses principes démocratiques
et par le compromis abject qu’elle avait passé avec les mastodontes
du pouvoir industriel et militaire, il ne devint pourtant jamais radicalement hostile au projet scientifique. Il n’y voyait tout simplement
pas de futur pour lui-même. Il voulait étudier une discipline au sein
de laquelle il aurait plus de marge de manœuvre, qui lui permettrait
à la fois de découvrir le monde et de se découvrir lui-même. C’est
ce qui le conduisit à l’anthropologie. Ce qui l’attira (un peu comme
la biologie de D’Arcy Thompson auparavant), c’est qu’il y avait en
elle quelque chose comme une mathématique pure de la vie réelle
où l’expérience et l’imagination pouvaient s’unir. C’est ainsi que
commença son odyssée, son voyage de retour vers sa terre natale.
Plus il avançait, plus il prenait conscience que loin de s’éloigner
chaque jour un peu plus des vérités qu’il avait assimilées pendant
son enfance, il ne cessait au contraire d’y revenir et, en outre, de les
défendre avec toute sa force de conviction face aux assauts oppressants de la discipline des adultes. Les essais réunis ici, le premier
ayant été publié en 1990 et le dernier en 2013, sont autant de combats
menés au cours de cette campagne, dans les territoires de l’évolution
biologique et culturelle, des environnements humains et animaux,
des royaumes de la pensée et de l’action, et des discours rivaux de
l’art et de la science.
Pourquoi l’enfant que je suis, ou que je suis redevenu, écrit-il
désormais pour s’opposer à une forme de pensée qui, en arrachant
la culture à la biologie, nous sépare, nous autres êtres humains, de
nous-mêmes ? Parce que cette pensée ne peut s’empêcher de considérer l’enfant comme une créature dont la valeur est moindre que celle
de l’adulte, plus cultivé, un peu à la manière dont le primitif était
tenu pour inférieur au civilisé à une époque antérieure de l’anthropologie. À l’évidence, tout être né d’un homme et d’une femme est
un humain. Mais la pensée moderne allait soutenir que si tous sont
humains, certains sont plus humains que d’autres : l’adulte plus que
l’enfant, le scientifique plus que le sauvage. Les enfants, au cours de
leurs « premières années », comme les « premiers hommes » dans les
manuels consacrés à l’évolution humaine, sont décrits comme des
êtres chez qui la part de biologie est plus importante ; des êtres plus
proches de leurs origines dans la nature que les hommes d’époques
« ultérieures », chez qui la part de culture est en revanche plus importante. Cela n’est pas acceptable à mes yeux. Bien sûr, l’enfant que je
suis, comme l’enfant que je fus, est ni plus ni moins un organisme
de part en part. Mais à aucun moment, du berceau à la tombe, l’enfant ne commence ni ne cesse de tisser sa vie avec d’autres vies, à
partir desquelles ces modèles que nous appelons « culture » sont
continuellement produits. Et si cela est vrai des vies individuelles,
cela doit également l’être de l’histoire humaine. De même qu’il n’y
a pas de séparation radicale entre la biologie et la culture dans la vie
d’un enfant, il ne peut y avoir de séparation radicale entre l’évolution
et l’histoire dans la vie des espèces. Nous sommes tous – et avons
toujours été – des organismes-personnes.
Pourquoi alors ne pas écrire sur ces organismes-personnes en
les décrivant non comme des entités délimitées, mais au contraire
comme des nexus composés de fils noués dont les extrémités
détendues se répandent dans toutes les directions en se mêlant à
d’autres fils dans d’autres nœuds ? Étant enfant, j’ai probablement
été davantage influencé que je ne l’avais réalisé par les recherches
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préface
préface
en mycologie de mon père. Ma description de l’organisme-personne
pourrait en effet tout aussi bien s’appliquer au mycélium fongique.
D’ailleurs, les mycologues sont en grande partie aux sciences biologiques ce que les anthropologues sont aux sciences sociales : ils en
constituent le groupe le plus gênant, les bouffons, les idiots, ceux
qui se glissent furtivement dans les fondations du pouvoir et en
sapent progressivement les prétentions. Les champignons, voyezvous, ne se comportent tout simplement pas comme des organismes
devraient se comporter. Ils coulent, ils suintent, leurs limites sont
indéfinissables ; ils emplissent l’air de leurs spores et infiltrent le
sol avec leurs sinuosités, leurs fibres ne cessant de se ramifier et
de s’étendre. Ce que nous voyons à la surface du sol, ce sont simplement des organes de fructification. Mais il en va également
ainsi avec les hommes. Ils ne vivent pas à l’intérieur de leurs corps,
comme les théoriciens de la société se plaisent à l’affirmer. Leurs
traces s’impriment sur le sol, via leurs empreintes, leurs sentiers et
leurs pistes ; leur souffle se mêle à l’atmosphère. Ils ne restent en vie
qu’aussi longtemps que subsiste un échange continu de matériaux à
travers des couches de peau en extension et en mutation constante.
C’est pourquoi j’en suis venu à interroger ce que nous entendons
par « environnement », pour finalement ne plus le concevoir comme
ce qui entoure – ce qui est « là-dehors » et non « ici dedans » – mais
comme une zone d’interpénétration à l’intérieur de laquelle nos vies
et celles des autres s’entremêlent en un ensemble homogène.
C’est également pour cela que j’écris contre la culture matérielle,
et contre l’idée selon laquelle c’est par ce qu’ils font avec les objets
que les êtres humains créent du sens. Pour moi, il n’y a pas d’objets.
L’enfant que je suis voit un monde en construction, non un monde
déjà construit. Fabriquer des choses ne consiste pas à imposer une
forme à la matière, comme si la finalité de nos actions était déjà
établie avant même que ne commence leur exécution. Comment
la forme peut-elle précéder le processus qui lui donne naissance ?
Comment le futur peut-il précéder le présent et le passé ? Dans mes
yeux d’enfant ne sachant pas ce que l’avenir nous réserve, fabriquer
des choses consiste continuellement à tisser le monde, à établir
une correspondance entre le mouvement matériel et la vision environnante. Le réseau de train miniature que je construisis lorsque
j’étais petit ne fut jamais achevé. Le chantier resta en cours – un
peu comme les chantiers des véritables voies ferrées – jusqu’au jour
où il fut abandonné lorsque d’autres choses, comme la musique,
devinrent plus importantes à mes yeux. Ce n’est qu’occasionnellement, et non sans danger, que des trains circulèrent sur ma ligne
ferroviaire. Ce n’est d’ailleurs pas cela qui me procurait le plus de
plaisir ; je préférais placer les yeux à hauteur de la maquette de sorte
que mon regard pénètre à l’intérieur du petit monde que j’avais
créé, vagabonde parmi les silhouettes miniatures disposées sur le
quai de la gare, se faufile aux abords et à l’intérieur des bâtiments et
des hangars de la gare, ainsi qu’à travers les forêts et les prairies qui
s’étendaient au-delà des rails. Le sol était composé de papier mâché
posé sur un grillage, l’herbe était en fils de coton, et les arbres composés de lichens que j’avais ramassés en forêt. Il n’y avait là aucun
objet ! Rien d’autre qu’un assemblage de matériaux dont les racines
sont aussi diverses que celles que nous tissons dans nos vies quotidiennes lorsque nous lisons les journaux, cousons nos vêtements,
nourrissons les poules ou errons en forêt.
Comment suis-je passer de la science à l’art ? Le premier cours que
je donnai, après avoir décroché un poste de maître de conférences à
l’université de Manchester, était intitulé « Environnement et technologie ». C’était un cours fortement axé sur la science. Je voulais montrer que toute anthropologie digne de ce nom devait au moins être
compatible avec ce que les sciences biologiques nous avaient appris
sur l’évolution et l’écologie de l’espèce humaine. Mes collègues du
département d’anthropologie étaient méfiants : c’était l’époque des
querelles autour de la sociobiologie, et le simple fait d’aborder le
sujet suffisait parfois à se voir accusé de déterminisme génétique,
voire pire. Ce cours fut toujours considéré comme un enseignement
à part, aux marges des territoires connus de l’anthropologie. Ce n’est
pas un hasard si « Environnement et technologie » fut abrégé en e.t.,
inspirant ainsi des comparaisons moqueuses avec le film de Steven
Spielberg. Au fur et à mesure de l’évolution du cours et de ma propre
évolution, je commençai cependant à prendre conscience de ce que
mon père avait toujours su sans jamais avoir besoin de le dire, parce
qu’il le vivait à travers la pratique scientifique dans laquelle j’étais
plongé à la maison : il y a de la poésie dans la science. La poésie ne
vient pas après la science, pour célébrer le triomphe de la raison sur
la nature. Elle vient avant la science, lorsqu’avec davantage d’humilité, nous reconnaissons que nous devons notre existence au monde
que nous cherchons à connaître. Le glissement de la science vers
l’art qui s’est opéré dans ma pensée et dans ma façon d’enseigner
ne m’a donc pas éloigné de la science, il m’a au contraire permis
d’approfondir la connaissance que j’en avais, de m’interroger sur ses
conditions de possibilité. Une fois encore, c’est en allant de l’avant
que j’ai retrouvé le chemin du retour. Pour moi, l’art, comme la poésie et plus particulièrement la musique (en tant que violoncelliste)
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préface
est une manière de redonner vie aux sens et de permettre au savoir
de se développer, depuis l’intérieur de l’être, dans le déploiement de
la vie. Sans cette renaissance, et sans la connaissance qui en découle,
il ne pourrait pas y avoir de science.
Voilà donc ce que j’ai découvert ces dernières années, en enseignant non pas l’anthropologie de l’art, comme si l’art était un
objet de l’analyse anthropologique, mais l’art de l’anthropologie.
Quelques années avant sa mort, je dis à mon père à quel point je
m’amusais avec les étudiants qui suivaient mes cours. Il nous arrivait par exemple d’apprendre à fabriquer des paniers en saule ou de
partir marcher dans les collines. Je ne faisais que suivre une tradition familiale, car je me souviens bien qu’au cours de mon enfance,
mon père avait l’habitude d’emmener ses étudiants pour chercher
des champignons dans la forêt. Mais il n’en fut pas impressionné.
« S’agit-il d’une université », grommela-t-il, « ou d’un jardin d’enfants ? » Question à laquelle je répondis : « les deux ». Et plus j’y pense,
plus il me semble que c’est dans cette ambivalence que se trouve l’essence de l’enseignement supérieur. Il s’agit de faire revivre l’émerveillement, l’espièglerie et l’insatiable curiosité de la petite enfance,
mais à travers une profondeur de connaissance, un fonds d’expérience et une rigueur intellectuelle auxquels il n’est possible de parvenir qu’à l’issue de nombreuses années de vie et d’étude. Mais la
noble profession de chercheur – la quête personnelle du savoir et de
la vérité – a été détournée par nos responsables politiques en charge
des finances, dans l’esprit borné desquels la recherche est devenue
un processus industriel de recueil de données et de traitement de
l’information. Les arts sont supposés palier à cette situation en la
recouvrant d’une façade séduisante, en rendant hommage à la créativité, et en étant les dépositaires d’un esprit critique qui joue le rôle
de la mauvaise conscience pour l’esprit bien-pensant. L’érudition
et la poésie, de même que la science et la foi, ont été alignées des
deux côtés d’une division entre réalité et imagination. Cette division
a causé un tort considérable et doit être effacée. La tâche de l’anthropologie, plus que toute autre, est de l’éliminer.
J’ai marché avec les dragons, mais je suis désormais de retour à la
maison.
Tim Ingold,
Aberdeen, septembre 2013.
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xiv
marcher avec les dragons
Une excursion anthropologique du côté sauvage
Se confronter aux faits
En 1620, le philosophe et homme d’État anglais Francis Bacon
exposa le plan de ce qui devait être une œuvre scientifique de grande
envergure, intitulée Instauratio magna 1. Dédiée au roi Jacques ier,
qui avait peu de temps auparavant nommé Bacon au poste de lord
Chancelier, cette œuvre ne fut jamais achevée. Dans ses prolégomènes, cependant, Bacon peste contre les formes traditionnelles
du savoir, qui ne cessent de confondre la réalité du monde avec ses
représentations dans les esprits des hommes. Selon Bacon, l’esprit
pourrait « refléter les rayons de la réalité » seulement s’il était lisse et
régulier comme un miroir parfait. Mais ce n’est pas le cas. Fissuré
et déformé par des imperfections innées et acquises par l’instinct
comme par l’endoctrinement, l’esprit, biaisé par les sens, déforme
les images qui sont projetées à sa surface ; s’il est livré à lui-même,
l’on ne peut donc pas s’appuyer sur lui pour représenter les choses
telles qu’elles sont. Il n’y a selon Bacon qu’une seule manière de sortir de cette situation difficile : faire appel aux faits. « Mais », écrivaitil, « quant à ceux dont le dessein n’est pas de conjecturer, de faire les
devins, mais d’inventer, de savoir, qui ne se contentent pas de rêver
des mondes imaginaires, espèces de singes du grand, mais dont le
dessein est de pénétrer dans la vraie nature de ce monde que voilà, et
de le disséquer pour ainsi dire, ceux-là doivent tout puiser dans les
choses mêmes » (Bacon 1800-1803 [1620], p. 55-56).
1. Ce texte a paru pour la première fois dans Animals as religious subjects:
transdisciplinary perspectives, éd. par C. Deane-Drummond, D. Clough et
R. Artinian-Kaiser, Londres, Bloomsbury, 2013, p. 35-58.
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épilogue
marcher avec les dragons
Il y a incontestablement quelque chose de contemporain dans les
mots de Bacon. La science d’aujourd’hui continue à fonder sa légitimité sur son recours aux données, qui sont à maintes reprises vérifiées et revérifiées dans une interminable recherche de la vérité2. Et,
pour l’essentiel, les sciences de l’esprit et de la culture, la psychologie et l’anthropologie, reposent elles aussi sur cette même entreprise. Autrement dit, elles ont toutes deux accepté la division entre
ce que Bacon appelait le monde « lui-même », la réalité de la nature
qui ne peut être découverte que par une recherche scientifique systématique, et les différents mondes imaginaires que les hommes,
en des lieux et à des époques différentes, ont inventé, et qu’ils ont
pris pour la réalité elle-même parce qu’ils ignoraient la science et
ses méthodes. Alors que les anthropologues se consacrent à l’analyse comparative de ces mondes imaginaires, les psychologues prétendent étudier les mécanismes, supposés universels, qui président
à leur construction. Tous s’accordent à penser que les royaumes de la
réalité et de l’imagination ne devraient en aucun cas être confondus,
car l’autorité de la science repose sur sa prétention à révéler, derrière
les produits de notre imagination qui voilent notre regard, les faits
du monde tel qu’il est réellement. On peut bien sûr étudier les produits de l’imagination et les faits afin d’apporter des explications
que beaucoup d’anthropologues continuent à appeler « émiques »
(par opposition à « étiques »), mais mélanger ces deux types d’explications, c’est accepter que nos jugements soient obscurcis par l’erreur
et l’illusion. « Car Dieu sans doute ne permettroit pas », comme le dit
Bacon, « que nous donnassions pour une copie fidelle du monde, un
pur rêve de notre imagination » (Bacon 1800-1803, p. 70).
Je veux montrer dans ce texte que l’injonction de Bacon, que l’on
retrouve au cœur de la science moderne, a eu des conséquences catastrophiques sur la vie humaine et sur son rapport au monde, en détachant l’imagination de ses liens terrestres et en la laissant flotter
tel un mirage au-dessus de la voie que nous suivons dans nos vies
matérielles3. Une fois nos espoirs et nos rêves noyés dans l’éther de
l’illusion, c’est la vie elle-même qui semble amoindrie. Réduite à sa
fonction biochimique, elle n’est plus source ni d’émerveillement ni
d’étonnement. En fait, pour ceux d’entre nous qui ont été éduqués
dans les valeurs d’une société où l’autorité du savoir scientifique règne
sans partage, la division de la réalité en deux domaines mutuellement
exclusifs, celui du fait et celui de la fable, est à ce point enracinée
qu’elle en est devenue évidente. S’est alors posé le problème suivant :
comment établir une passerelle entre ces deux domaines ? Comment
faire une place à l’art et à la littérature, à la religion ou aux croyances
et pratiques des peuples indigènes dans une économie de la connaissance au sein de laquelle la véritable nature des choses est devenue la
prérogative exclusive de la science rationnelle ? Nous acceptons que
l’imagination subsiste parmi nous et nous tolérons son penchant à la
fantaisie, mais n’est-ce pas simplement pour satisfaire un besoin d’enchantement dans un monde qui a par ailleurs cessé de nous émerveiller ? Nous la conservons comme un symbole de créativité et de civilisation, mais n’est-ce pas simplement par respect envers la diversité
culturelle, ou même uniquement pour notre divertissement4 ? Ces
questions sont inévitables, mais en les posant, nous oublions à quel
point il est difficile de détacher la réalité de notre vie dans le monde,
et du monde dans lequel nous vivons, des élans méditatifs de notre
imagination. Le problème n’a en fait rien à voir avec la manière dont
nous le posons : il ne s’agit pas de se demander comment réconcilier
les rêves de notre imagination avec les caractéristiques du monde,
mais de s’interroger sur le moyen de les séparer.
Historiquement, cette séparation émergea lentement et péniblement au cours des bouleversements religieux liés à la Réforme et des
débuts agités de la première science moderne, pour laquelle Bacon
– ainsi que son contemporain Galilée – joua un rôle crucial. Mais ce
processus se répète aujourd’hui dans l’éducation de chaque écolier
à qui l’on apprend, sous peine de rater ses examens, à se méfier des
sens, à valoriser l’intellect au détriment de l’intuition, et à considérer
l’imagination comme une fuite et non comme un moteur de la vie
2. Alors que j’écrivais ce texte, une équipe de scientifiques menée par le professeur Antonio Ereditato a rapporté que les neutrinos qu’ils avaient propulsés à travers un tunnel des Alpes avaient atteint des vitesses supérieures à
celle de la lumière. Les découvertes de l’équipe, qui s’appuient sur environ
15 000 observations distinctes, ont alors semé la panique (avant que les résultats ne soient démentis six mois plus tard). Commentant le tollé, l’éditorialiste du Guardian (24 septembre 2011) fit remarquer que « la première tâche
de la science est de se confronter aux faits ; ce n’est que dans un deuxième
temps qu’elle doit en dégager le sens ». Plus ça change…
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3. Ici, je développe un argument que j’avais initialement présenté dans un
article intitulé « Life beyond the edge of nature? Or, the miracle of society »
(in Greenwood 1997, p. 231-252).
4. Cette dernière position est illustrée par les déclarations des décideurs des
politiques scientifiques, qui soutiennent le financement public des bourses
dans les arts et les sciences humaines sous prétexte qu’elles contribuent
directement ou indirectement aux « industries créatives ».
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épilogue
marcher avec les dragons
réelle. Il semble que l’imaginaire soit irréel presque par définition :
c’est notre mot pour désigner ce qui n’existe pas. Prenons l’exemple
des dragons : comme le savent tous les parents d’aujourd’hui, les
dragons n’existent pas. En tant qu’adultes, nous sommes convaincus que les dragons sont des créatures imaginaires. Toutefois, la
plupart d’entre nous n’auraient aucun mal à en décrire un. Ayant
vu des images de dragons dans les livres que nous lisions lorsque
nous étions enfants, et dans ceux que nous lisons à notre tour à nos
propres enfants, nous sommes familiarisés avec leur apparence globale : des corps verts couverts d’écailles, de longues queues fourchues, des naseaux dilatés, des dents aux allures de sabre et des
bouches enflammées. Ces monstres parcourent le terrain imaginaire
de la littérature pour enfants aux côtés d’une foule d’autres créatures
tout aussi fictives. Certains d’entre eux, bien sûr, ont de véritables
équivalents zoologiques. Le tyrannosaure rex – peut-être la créature
la plus proche d’un dragon qui ait jamais existé – s’est éteint, ce qui
arrange tout le monde, mais d’autres animaux (des cobras aux crocodiles et des ours aux lions) vivent encore, et il leur arrive même de
tuer des hommes5. Et c’est à raison que nous les craignons lorsque
nous les rencontrons en chair et en os.
Leurs cousins fictifs, en revanche, n’inquiètent personne, car les
seuls hommes qu’ils mangent sont aussi imaginaires qu’eux. Tout
comme la matière des cauchemars, ces créatures sont isolées dans
une zone d’apparitions et d’illusions rigoureusement dissociée du
domaine de la vie réelle. Nous calmons le dormeur qui se réveille terrifié, sur le point d’être dévoré par un monstre, en utilisant ces mots
rassurants : « Ne t’inquiète pas, ce n’était qu’un rêve. » Ainsi, la frontière entre le fait et le fantasme, qui avait semblé temporairement
mise en doute au moment du réveil, est immédiatement restaurée.
Que dire alors du récit qui provient de la Vie de saint Benoît de Nursie
écrite par Grégoire le Grand en 594 ? C’est l’histoire d’un moine qui
rencontra un dragon. Ce moine était agité : son esprit ne cessait de
s’égarer et l’idée d’échapper à la réclusion et au confinement de la
vie monastique le démangeait. Finalement, le vénérable frère Benoît,
qui en avait assez des plaintes du moine, lui intima l’ordre de partir.
Mais aussitôt qu’il eut franchi les limites du monastère, le moine fut
horrifié en découvrant que son chemin était bloqué par un dragon
aux mâchoires béantes. Convaincu que le dragon était sur le point de
le dévorer, tremblant de peur, il appela les frères à l’aide. Ceux-ci arrivèrent en courant, mais aucun d’entre eux ne vit le moindre dragon.
Ils laissèrent néanmoins le renégat – toujours sous le choc de son
expérience – réintégrer le monastère. À partir de ce jour, le moine
ne s’égara plus jamais, il n’en eut même plus la pensée. Selon l’épilogue de l’histoire, « les prières du saint [Benoît] lui avaient fait voir
le dragon qui le menaçait : ce dragon qu’il avait suivi jusque-là sans
le voir 6 ».
La forme de la peur
Peut-être le moine de ce conte moral souffrait-il simplement de
cauchemars. Mais les hommes du Moyen Âge n’auraient pas été
aussi facilement rassurés que les hommes modernes s’ils avaient réalisé qu’en rencontrant des dragons et d’autres monstres, ils n’avaient
fait que rêver. Ils n’étaient évidemment pas assez crédules pour penser que les dragons existaient, au sens précis du terme exister qu’invoquent les hommes modernes lorsqu’ils affirment, au contraire,
que les dragons n’existent pas. Ce n’est pas comme si le moine, dans
notre histoire, s’était retrouvé face à une autre créature que nous,
hommes modernes, rétrospectivement et grâce à nos connaissances
scientifiques, pourrions identifier, par exemple, comme une espèce
de reptile. Souvenons-nous que les frères qui vinrent à son secours ne
virent aucun dragon. Ils ne virent rien du tout. En revanche, comme
en témoigne à plusieurs reprises le récit de Grégoire, ils virent que
le moine tremblait. Il ne fait donc pas de doute qu’ils virent la terreur gravée sur son visage. Et pourtant, quand le moine appela pour
être sauvé des mâchoires du dragon, les frères comprirent immédiatement la situation difficile dans laquelle il se trouvait. Ils ne réagirent cependant pas à sa crise – alors qu’un psychiatre réagirait
aujourd’hui aux divagations d’un fou échappé d’un asile –, comme si
elle avait exprimé des hallucinations, peut-être causées par la drogue,
caractéristiques d’un esprit fiévreux et perturbé qu’il vaudrait mieux
enfermer et condamner à la réclusion solitaire pour prévenir toute
contagion. Au contraire, ils reconnurent tout de suite dans la vision
du dragon l’expression du trouble du moine et se mirent eux-mêmes
en danger pour répondre, affectivement autant que physiquement,
à sa détresse7. Le moine était sur le point d’être consommé par la
5. À cette liste pourrait s’ajouter le dragon de Komodo, la plus grande espèce de
lézard encore en vie dans le monde, qui habite les îles du sud-est de l’Indonésie. Bien qu’ils soient rares, ces animaux sont extrêmement dangereux, et les
attaques contre des humains ont augmenté au cours de ces dernières années.
6. Selon Vie et règle de saint Benoît, traduit par Daniel Demongeot,
Médiaspaul Éditions, Paris, 2006.
7. Je suis reconnaissant à Godelieve Orye pour cette idée.
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épilogue
marcher avec les dragons
peur et il sentait déjà les symptômes qui accompagnaient la désintégration de la personne. Le dragon n’était pas la cause objective de la
peur, il était la forme même de la peur.
Pour les frères des communautés monastiques, cette peur était
tout à fait normale et bien connue de tous, elle était gravée en eux
par une rigoureuse discipline spirituelle et corporelle. Pendant
leur formation, des histoires et des images de dragons et d’autres
monstres tout aussi terrifiants étaient utilisées, non pas comme
nous le ferions aujourd’hui, pour créer une zone de confort et de
sécurité en reléguant tout ce qui pourrait être effrayant dans l’imaginaire, mais en insufflant la peur dans l’esprit des novices pour qu’ils
en fassent l’expérience, sachent en reconnaître les manifestations et
– par une discipline stricte d’exercices mentaux et corporels – la surmonter. En tant que forme manifeste d’un sentiment fondamental
chez l’homme, le dragon était l’incarnation tangible de ce que signifiait « connaître » la peur. Ainsi, dans l’ontologie médiévale, le dragon
existait pour autant que la crainte existe, non comme une menace
extérieure mais comme une souffrance imprimée au cœur même de
la personne qui la subissait. En tant que tel, il était aussi réel que
l’expression de son visage ou l’insistance de sa voix. Mais il ne pouvait être vu ou entendu que par celui qui en était lui-même effrayé.
Voilà pourquoi les sauveurs du moine ne virent eux-mêmes aucun
dragon. Ils étaient probablement motivés par un sentiment de compassion, qui pouvait leur faire penser – dans le langage de l’époque –
à l’image de la sainteté, d’une lumière irradiante. Dans l’imagination
monastique, les saints – comme les dragons – étaient fabriqués à partir de fragments de textes et d’images montrées aux novices au cours
de leur formation. En ce sens, pour utiliser la formule employée par
Mary Carruthers, les saints comme les dragons étaient des « produits
de l’imagination » (Carruthers 1998, p. 187). Mais pour les penseurs
médiévaux, ces produits, loin d’être isolés à l’écart de la « vie réelle »,
étaient des expressions de l’expérience humaine, qui était vécues
dans un espace de rupture entre le Paradis et l’Enfer.
Le moine de l’histoire était évidemment déchiré entre les deux.
Renvoyé du monastère par Benoît, un homme proche de la sainteté,
le diable – sous la forme du dragon – l’attendait à l’extérieur. Secouru
juste à temps, il fut reconduit à l’intérieur du monastère. L’histoire
se déroule donc en suivant un mouvement : de l’intérieur vers l’extérieur, puis de nouveau vers l’intérieur. Mais dès le début, nous
dit-on, l’esprit du moine avait tendance à s’égarer. D’ailleurs, dans
un curieux rebondissement à la fin du récit, Grégoire raconte que,
pendant tout ce temps, le moine avait suivi le dragon sans le voir
réellement. Lorsqu’il sortit du monastère, il perdit complètement ses
moyens, faisant l’expérience d’une forme de désorientation corporelle qui survient quand une personne est jetée dans un environnement totalement inconnu. C’est comme si le sol s’était dérobé sous
ses pieds. Au moment où le dragon se cabra sous ses yeux, obstruant
son chemin, il paniqua. Il découvrit qu’il ne pouvait pas aller plus
loin. En réalité, conclut l’histoire, Benoît rendit un grand service au
moine en le jetant à l’extérieur, car il lui permit de voir – et ainsi de
connaître – le dragon qu’il avait auparavant suivi aveuglément. Pour
les écrivains de la tradition monastique, comme le souligne très clairement le récit, il fallait voir pour savoir, et ces deux activités suivaient des trajectoires en mouvement. Pour comprendre le sens de
leurs propos, nous devons penser la connaissance, comme l’explique
Carruthers, en « termes de chemins et de “voies” ». Le penseur médiéval, en un mot, était un voyageur accomplissant un trajet dans son
esprit de lieu en lieu, élaborant sa réflexion au fur et à mesure de
sa progression (Carruthers 1998, p. 70 ; voir aussi Ingold 2011a [2007],
p. 25-27 et 126-127).
Rêves et réalité
Je reviendrai en temps voulu sur cette notion de trajet. Pour le
moment, permettez-moi d’introduire un autre exemple. Parmi les
Ojibwas, des chasseurs et trappeurs indigènes du Nord canadien, on
dit qu’il existe un oiseau dont le bruit, lorsqu’il fend le ciel, ressemble
à celui d’un coup de tonnerre. Peu d’hommes l’ont vu, mais on attribue à ceux qui l’ont vu des pouvoirs visionnaires exceptionnels.
Selon l’ethnographe Alfred Irving Hallowell, parmi ces quelques personnes se trouvait un garçon d’environ douze ans. Hallowell raconte
qu’au cours d’un violent orage, le garçon sortit en courant de sa tente
et vit un oiseau étrange posé sur les rochers. Il revint en courant
pour appeler ses parents, mais lorsqu’ils arrivèrent, l’oiseau avait
disparu. Le garçon était certain qu’il s’agissait de Pinesi, l’Oiseau
Tonnerre, mais ses aînés n’étaient pas convaincus. C’est seulement quand un homme qui avait rêvé de l’Oiseau confirma la description du garçon que la question fut tranchée et le récit du jeune
homme accepté (Hallowell 1960b, p. 32). À l’évidence, Pinesi n’est pas
un oiseau ordinaire, tout comme le dragon n’est pas un reptile ordinaire. Comme le son du tonnerre lui-même, la présence de l’Oiseau
Tonnerre se fait sentir non comme un objet du monde naturel, mais
comme un phénomène de l’expérience (Ingold 2000a, p. 278-279).
C’est la forme incarnée d’un bruit qui résonne à travers l’atmosphère
et submerge la conscience de tous ceux qui l’entendent. De la même
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341
épilogue
marcher avec les dragons
manière que les moines, au moment où ils accoururent pour secourir leur confrère, ne virent aucun dragon, les parents du garçon n’observèrent aucun Pinesi. Mais s’ils l’avaient vu, l’image de l’oiseau,
comme celle d’une puissante sensation auditive, leur aurait été parfaitement familière. L’Oiseau Tonnerre est peut-être un produit de
l’imagination, mais c’est une imagination qui imprègne toute l’expérience phénoménale.
Souvenons-nous que l’observation du garçon, avait été confirmée par un rêve. Bacon aurait été mortifié. Pour nous modernes, il
est plus courant et bien entendu plus acceptable que les rêves soient
confirmés par l’observation. En voici un exemple célèbre : l’histoire
racontant la façon dont le chimiste Friedrich August Kekulé découvrit la structure de la molécule de benzène, composée d’un anneau
de six atomes de carbone. Selon le récit, certes rétrospectif et probablement embelli, de Kekulé lui-même – prononcé lors d’un discours
au Berlin City Hall célébrant le vingt-cinquième anniversaire de sa
découverte –, celle-ci eut lieu une nuit de 1865, alors qu’il se trouvait
dans la ville belge de Gand. Il avait veillé tard dans son bureau, étudiant un manuel. Comme il n’avançait pas beaucoup, il avait tourné
sa chaise en direction du feu et s’était assoupi. En rêvant, il vit alors
des atomes gambader devant ses yeux et s’entortiller en un mouvement évoquant l’ondulation d’un serpent.
Peu importe ce que Kekulé a pu sentir au moment de son réveil,
nous pouvons être sûrs qu’une fois évanoui l’éclair qui l’avait arraché à son sommeil, le serpent tournoyant de son rêve ne fut plus
une apparition mais une figure abstraite de la pensée – un serpent
avec lequel « il était bon de penser » – susceptible de l’aider à déchiffrer la structure d’une réalité donnée. Le serpent et l’anneau de benzène peuvent donc être rangés d’un côté ou de l’autre d’une division
ontologique imperméable entre l’imagination et la réalité. C’est ce
qui permet à l’un de représenter l’autre de façon métaphorique. La
convergence du serpent et de l’anneau renforce la division au lieu de
la faire éclater.
L’hypothèse suscitée par le rêve n’est donc qu’une chimère
tant qu’elle n’est pas soumise à une vérification empirique. C’est
précisément dans cette veine que Kekulé poursuivit son discours, en
donnant à son audience le conseil suivant : « Laissez-nous apprendre
à rêver, messieurs, peut-être ainsi trouverons-nous la vérité […] Mais
prenons garde à ne pas publier nos rêves tant qu’ils n’ont pas été
confirmés par une réflexion consciente » (Benfey 1958). De fait, des
expérimentations ultérieures réalisées en laboratoire prouvèrent
que l’hypothèse de Kekulé était en grande partie fondée, à tel point
qu’elle devint une pierre angulaire du champ émergent de la chimie
organique, au contraire du rêve lui-même. À la lumière crue du jour,
le rêve tomba dans l’oubli. La science concède donc à l’imagination
le pouvoir de faire des hypothèses – ou, comme nous le disons, de
« sortir des sentiers battus » –, mais seulement en la bannissant de
la réalité même dont elle nous offre un aperçu. Pour les Ojibwas,
en revanche, c’est le contraire. Pour eux, la vérité des choses n’est
pas seulement découverte mais également vérifiée par l’expérience
onirique personnelle, raison pour laquelle l’observation du Pinesi
par le garçon pouvait être corroborée par le rêve de son aîné. Dans
cette quête d’un savoir passant par l’expérience, les puissantes créatures non humaines qui habitent le cosmos ojibwa, dont l’Oiseau
Tonnerre, ne sont pas des ressources analogiques mais des interlocuteurs vivants. Ce cosmos est polyglotte, un mélange de voix par lesquelles différents êtres, dans leurs différentes langues, annoncent
leur présence, se font sentir et ont des effets. Pour mener votre vie
comme une personne ojibwa vous devez être attentif à ces voix, les
écouter et répondre à ce qu’elles vous disent.
Une autre histoire d’Oiseau Tonnerre relatée par Hallowell – qui,
il est vrai, lui a été racontée par un informateur – illustre parfaitement ce point. L’informateur était assis dans une tente avec un vieil
homme et sa femme. Un coup de tonnerre retentit. Le vieil homme
se tourna immédiatement vers sa femme. « As-tu entendu ce qui a été
dit ? », lui demanda-t-il. « Non, je n’ai pas bien saisi », lui répondit sa
femme. Commentant cette discussion, Hallowell remarque que le
vieil homme « a réagi à ce bruit de la même manière qu’il aurait réagi
à un être humain dont il n’aurait pas compris les paroles » (Hallowell
1960b, p. 34). Mais il ne s’agissait pas d’un simple échec de traduction.
Ce n’était pas comme si l’Oiseau Tonnerre avait eu un message pour
le vieil homme, et que celui-ci n’avait pas réussi à le saisir à cause
de sa maîtrise imparfaite du langage des Oiseaux. « Dans l’ensemble »,
observe Hallowell, « les Ojibwas ne s’attendent pas à recevoir un
message chaque fois qu’un coup de tonnerre retentit. » Il s’est avéré
que cet homme, dans sa jeunesse, s’était familiarisé avec l’Oiseau
Tonnerre grâce aux rêves qu’il avait fait lors de sa puberté,
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« Mais regardez ! Qu’est-ce que c’était ? L’un des serpents s’était emparé
de sa propre queue, et la forme s’était mise à tourbillonner de façon
moqueuse sous mes yeux. Je me suis réveillé comme si j’avais été saisi
par un éclair […]. J’ai passé le reste de la nuit à dégager les conséquences
de l’hypothèse » (Benfey 1958, p. 22 ; voir aussi Roberts 1989, p. 75-81).
épilogue
marcher avec les dragons
développant peu à peu une étroite relation de tutelle avec Pinesi
(Hallowell 1966, p. 459). Dans le contexte de cette relation, écouter et
répondre au tonnerre ne relevait pas de la traduction mais de l’empathie ; il s’agissait d’établir une communion de sentiment et d’affect,
ou, en résumé, de s’ouvrir soi-même à l’être d’un autre (Ingold 2000a,
p. 106 ; voir aussi Gieser 2008) ; et c’est surtout dans le rêve, lorsque
les frontières qui entourent le moi dans la vie consciente se dissolvent, que cette ouverture survient.
Mais un scientifique aussi sérieux que Kekulé n’aurait même pas
pu envisager une telle ouverture. Pour lui, la voie menant à la véritable connaissance ne reposait pas sur un dialogue avec les êtres
du monde non humain, mais sur une interprétation précise et littérale des faits qui y étaient consignés. Le chercheur qui « suivrait les
voies de l’Éclaireur », avertissait Kekulé, « doit prendre note de chaque
empreinte, de la courbure de chaque brindille, de chaque feuille sur
le sol. Alors, se tenant à l’extrémité atteinte par ses prédécesseurs,
il n’aura aucun mal à percevoir où le pied d’un pionnier ultérieur
pourra s’appuyer sur un sol solide » (Benfey 1958, p. 23). Le but, tel
que Bacon l’avait exposé, était d’offrir « la véritable vision des vestiges
et des caractères que l’auteur des choses a imprimés dans ses créatures » (Bacon 1800-1803 [1620], p. 71). Il s’agissait de révéler les secrets
de la nature. Pour cela, il vous faut une clé, ou plutôt plusieurs clés,
afin d’ouvrir les portes les unes après les autres. Le serpent de Kekulé
offrait l’une de ces clés, sous la forme d’un anneau. Dans L’Essayeur
(1623), Galilée trouva ses propres clés dans les caractères mathématiques, dans les « triangles, cercles et autres figures géométriques »
qui composent le langage propre aux mathématiques. « La philosophie », écrivait Galilée, « est écrite dans ce vaste livre constamment
ouvert devant nos yeux ( je veux dire l’univers), et on ne peut le comprendre si d’abord on n’apprend à connaître la langue et les caractères dans lesquels il est écrit » (Chauviré 1980, p. 141).
je l’ai déjà observé – la pratique méditative de la lecture des textes
liturgiques s’apparentait à une sorte de trajet. Encore et toujours, ils
comparaient leurs textes à un terrain à travers lequel il leur fallait
se frayer un chemin comme des chasseurs sur une piste, puisant ou
s’arrêtant sur les choses sur les choses auxquelles ils se trouvaient
confrontés, ou sur les événements dont ils étaient témoins au cours
de leur voyage. Le mot latin employé pour décrire les étapes de ce
trajet était tractare, dont provient le mot anglais « treatise », au sens
de texte écrit. À mesure que les moines avançaient, les différents personnages qu’ils rencontraient sur leur chemin, dont les histoires
étaient inscrites sur les pages qu’ils lisaient, leur parlaient avec des
paroles de sagesse qu’ils écoutaient et dont ils tiraient les enseignements. Ces paroles étaient nommées voces paginarum, les « voix des
pages » (Leclercq 2008, p. 21 ; Olson 1998 [1994], p. 211 et Ingold 2011a
[2007], p. 23-25). D’ailleurs, lire était en soi une pratique vocale et
les bibliothèques monastiques bourdonnaient des bruits de la lecture. Les moines murmuraient les voix des pages, ils engageaient
la conversation avec elles comme si elles avaient été audibles. Lire,
en son sens médiéval originel, c’était être conseillé par ses voix, ou
prendre conseil auprès d’elles, tout comme le vieil Ojibwa aurait été
conseillé par la voix de son mentor l’Oiseau Tonnerre si seulement il
avait entendu ce qu’il disait8 !
Entouré par les voix des pages à la manière dont le chasseur est
entouré par les voix de la terre, le lecteur médiéval suivait une tradition. Dans son étude encyclopédique sur la présence des animaux dans les mythes, les légendes et la littérature, Boria Sax souligne que le mot « tradition » provient du mot trade, qui signifiait à
l’origine « trace ». « Étudier une tradition », écrit Sax, « c’est suivre les
traces d’une créature, comme si l’on était un chasseur, dans un lointain passé » (Sax 2001, p. x ; je remercie Maan Barua d’avoir attiré mon
attention sur cette étude). Chaque créature est son histoire, sa tradition, et la suivre, c’est à la fois accomplir un acte de mémoire et
s’ouvrir au futur, tout en s’inscrivant dans la continuité des valeurs
du passé. Souvent, le nom de la créature est lui-même une histoire
condensée ; il suffit alors de le prononcer pour que l’histoire se révèle.
Mais elle se révèle également dans les appels ou les vocalisations des
créatures elles-mêmes – si elles ont une voix – tout comme dans leur
présence et leur activité manifeste et visible (Ingold 2011b, p. 165-175).
En tant que nœud dans un écheveau de représentations, d’histoires,
d’appels et d’observations, dont aucune n’est ontologiquement
Des mots et des œuvres
L’idée du livre de l’univers, ou de la nature, est extrêmement
ancienne – elle était aussi courante parmi les penseurs médiévaux
qu’elle le fut par la suite pendant l’essor de la science moderne. Elle
reposait à l’origine sur une homologie entre le verbe de Dieu (verbum dei), s’exprimant dans la rédaction des écritures, et les œuvres
de Dieu, se manifestant dans la création du monde et de ses créatures. La question était : « Comment les humains pourraient-ils lire
ces livres jumeaux ? » (Bono 1995, p. 11). Cette question nous permet
de revenir aux moines de l’époque médiévale, pour qui – comme
344
8. Sur le sens de la lecture au début du Moyen Âge, voir Howe 1992.
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épilogue
marcher avec les dragons
première ou plus « réelle » qu’une autre, toute créature – pourrionsnous dire – n’est pas tant un être vivant que l’illustration d’une certaine manière d’être vivant, chacune de ces manières d’être ouvrant
pour le penseur médiéval une voie vers l’expérience de Dieu. Il en
allait également de même des lettres et des symboles du manuscrit
écrit au VIIe siècle qui, selon Isidore de Séville, permettait au lecteur
de réécouter et de garder en mémoire les voix de ceux qui n’étaient
pas physiquement présents (Carruthers 2002 [1990], p. 137). Le livre
de la nature se reflétait donc dans la nature du livre : une seconde
nature composée non d’œuvres mais de mots (Clingerman 2009).
Pour Isidore, la lecture devait se faire en silence. Elle ne pouvait
toutefois être entièrement silencieuse puisqu’elle dépendait des
mouvements de la bouche et de la gorge : il n’y avait à l’époque pas
d’espaces entre les mots d’un manuscrit (Saenger 1982, p. 384). La
seule manière de lire était donc de lire à voix haute, de suivre les
lignes des lettres à la manière dont on suit les lignes d’une partition,
laissant les mots émerger à travers la lecture elle-même. Au xiie et
au début du xiiie siècle, un changement eut lieu : le lecteur se mit
peu à peu à lire uniquement avec les yeux, sans accompagner sa lecture ni par la voix ni par les gestes. Cette transition fut rendue possible par la division de la ligne du texte en mots segmentés, chacun
d’entre eux pouvant être saisi au premier regard grâce aux espaces
entre chaque mot. Le médiéviste et paléographe Paul Saenger a montré comment, suite à l’adoption de cette lecture silencieuse, les voix
des pages sont effectivement devenues muettes (Saenger 1982, p. 378
et 397). Tant que toutes les personnes présentes dans une bibliothèque monastique lisaient à voix haute, le son de sa propre voix suffisait à occulter le son des autres voix. En revanche, comme le sait
tout étudiant actuel, lorsqu’une personne essaie de lire en silence, le
moindre bruit peut être source de distraction. Le silence en vint à
régner à l’intérieur des monastères. À l’extérieur, par contre, dans la
société laïque, la lecture orale continua à prédominer jusqu’aux xive
et xve siècles. Comme l’a souligné l’historien des sciences cognitives
David Olson, c’est la Réforme qui annonça la transition décisive des
formes de lecture, de la lecture entre les lignes à la lecture de ce qui
est sur les lignes, de la recherche de révélations ou d’« épiphanies » à
la découverte du sens littéral unique déposé dans le texte et accessible à toute personne disposant de la clé nécessaire pour le dégager
(Olson 1998 [1994], p. 168).
Lire le nouveau livre de la nature
Au début du xvie siècle, Martin Luther exhorta ses lecteurs à
abandonner les rêves et les fantaisies qui étaient nés chez leurs prédécesseurs lorsque ceux-ci essayaient de s’accorder aux voix qui, pensaient-ils, leur parlaient à travers les pages des manuscrits. Il les
incita également à distinguer clairement le sens littéral des mots et
leurs interprétations ultérieures (Olson 1998 [1994], p. 177-180). Il n’y
avait dès lors plus qu’un pas à franchir pour étendre ce raisonnement des mots aux œuvres, c’est-à-dire au livre de la nature. C’est
ce que fit Bacon, un siècle plus tard, en insistant sur une distinction
absolue entre les rêves de l’imagination et les caractéristiques du
monde. Je voudrais attirer l’attention sur trois corollaires découlant
de cette transition. Le premier est lié à l’anticipation du futur. Les
hommes du Moyen Âge étaient conseillés par les voix de la nature
et du monde non humain ; ils suivaient ces conseils et s’appuyaient
sur leur propre expérience pour se frayer un chemin dans le futur.
Grâce à une sensibilité fondée sur des liens de perception intimes
avec leurs environnements, ils pouvaient non seulement parler du
passé, mais également prédire le futur. Mais un tel présage, comme
le montre Olson, doit être clairement distingué du type de prédiction
à laquelle aspire une lecture scientifique du livre de la nature (Olson
1998 [1994], p. 195-196). Car prédire, ce n’est pas ouvrir une voie à travers le monde mais fixer à l’avance un point final. Alors que le présage est guidé par un dialogue avec la nature, la prédiction se livre à
des extrapolations à partir de faits observables. Faire appel à ces faits,
c’est spéculer sur le futur mais pas voir en lui.
Le deuxième corollaire concerne l’acte. J’ai montré comment,
pour les lecteurs du Moyen Âge, l’activité vocale et gestuelle de la lecture à voix haute produisait le sens. L’action et la connaissance, dans
ce cas précis, étaient tout aussi indissociables que la mastication
et la digestion – une analogie que l’on retrouve explicitement dans
l’ancienne caractérisation de la pensée comme processus de rumination. Ruminer, c’est cogiter sur les choses – à la manière dont le
bétail rumine l’herbe – et digérer leurs significations (Carruthers
2002 [1990], p. 216 ; Ingold 2011a [2007], p. 28). Comme nous l’avons
vu, c’est en abordant la lecture sous forme de trajet que les hommes
du Moyen Âge lisaient le livre de la nature. La connaissance de la
nature se forgeait donc en mouvement, dans le processus même de
la recherche. Ce savoir était performatif au sens strict ; il se formait
à travers les allées et venues de ceux qui l’habitaient. La lecture en
tant qu’acte donnait donc forme à la fois à des mots et à un monde.
Comme le démontre clairement le cas des Ojibwas et de l’Oiseau
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épilogue
marcher avec les dragons
Tonnerre, dans une forme de connaissance performative – qui suit
un processus –, les frontières entre le soi et l’autre, ou entre l’esprit et
le monde, ne sont pas figées, elles sont provisoires et foncièrement
instables. Dans une science construite dans l’esprit de Bacon, en
revanche, connaître n’est plus se joindre au monde par un acte, mais
être informé par ce qui est déjà présent face à nous. Plutôt que de
chercher à suivre les pistes d’un terrain familier qui se dévoile continuellement, le scientifique cherche à cartographier une terra incognita, c’est-à-dire à découvrir, à travers des processus de décodage
et de déchiffrement, ce qui existe déjà dans la réalité. Le livre de la
nature ayant été ins-crit par le Créateur dans le langage des choses,
la tâche du scientifique – pour Bacon comme pour Galilée – était de
dés-ins-crire, ou pour le dire en un mot, de « décrire » ce qui y était
écrit (Bono 1995, p. 244). C’est une manière d’acquérir la connaissance non par une lecture à voix haute mais par un processus d’intériorisation. Et au moment où la lecture à voix haute laissa place
à l’intériorisation, le monde cessa d’être un conseiller et devint un
entrepôt de données qui, en elles-mêmes, n’aidaient en rien à savoir
ce qu’il faudrait en faire. Les faits sont une chose, les valeurs en
sont une autre, et la source de ces dernières n’est pas dans la nature
mais dans la société humaine. La sagesse fut dès lors subordonnée à
l’information.
Le troisième corollaire nous ramène à l’idée que les animaux et
les autres êtres du monde non humain étaient connus à l’époque
médiévale par leurs traditions, que l’on conçevait comme des écheveaux d’histoires, de représentations et d’observations. Suivre la
trace d’un animal dans le livre de la nature, c’était comme suivre la
ligne d’un texte. Mais de la même manière que l’introduction de l’espace entre les mots fragmenta la ligne en différents segments, les
créatures – dans le livre de la nature – apparurent de plus en plus
comme des entités séparées et limitées et non comme des lignes de
devenir en extension permanente. Il n’était dès lors plus question de
suivre la nature comme l’on suit une trace. La nature fut au contraire
peu à peu soumise à un processus de classification. Les lignes furent
brisées, mais les objets qui prirent leur place pouvaient être classés
et ordonnés dans les compartiments de la taxinomie selon la perception que l’on avait de leur ressemblance ou de leur différence. Il était
pour la première fois possible de parler des composantes de base
de la nature, et non plus de son tissage ou de son architecture. Pour
résumer, la nature n’était plus tissée par des lignes, elle était constituée par des éléments. Et les créatures de ce monde naturel n’étaient
plus des traditions mais des espèces. Ces créatures qui n’étaient
connus que par leurs traditions, et dont il n’existait aucune preuve
dans la nature, furent tout simplement délaissées. Il n’y a ni dragons
ni Oiseau Tonnerre dans les taxinomies scientifiques. Non seulement ils n’existent pas dans le nouveau livre de la nature, mais ils ne
peuvent pas y exister, car leur constitution imaginaire est fondamentalement incompatible avec un projet de classification. Les dragons,
parmi d’autres êtres qui se cabrent et font sentir leur présence sur
les routes du monde, peuvent être racontés mais ils ne peuvent pas
être catégorisés. Ils ne peuvent évidemment pas non plus être localisés de façon précise, comme sur une carte. De la même manière
qu’ils furent délaissés par la taxinomie, les dragons furent, comme
le dit Michel de Certeau, « rejetés comme dans les coulisses » d’une
cartographie scientifique où il n’y avait pas de place pour les mouvements et les itinéraires de la vie (de Certeau 1990 {1980}, p. 179). Cela
s’applique évidemment aussi aux aux bruits du tonnerre et aux phénomènes impliquant la peur qui ne peuvent pas non plus être classés ou cartographiés, même si cela ne les rend pas moins réels pour
une personne effrayée ou piégée au cœur d’une tempête.
Science et silence
Manifestement, à mesure que les pages perdaient leur voix avec
l’avènement de l’époque moderne, le livre de la nature était lui aussi
plongé dans le silence. Et de fait, il ne nous parle plus et ne nous dit
plus rien. Et pourtant, cette nature prétendument silencieuse peut
être, et est souvent, un lieu assourdissant. Comme l’observe le philosophe Stephen Vogel (2006), le monde de la nature est extrêmement
mouvant, et une grande partie de ce mouvement se manifeste en tant
que sons : pensez au grondement du tonnerre et au hurlement du
vent, au craquement de la glace et au grondement d’une cascade, au
bruissement des arbres et aux chants des oiseaux. Nous pouvons également admettre que d’un certain point de vue, la parole humaine
peut être comprise comme une gestuelle vocale, et que la voix manifeste la présence humaine dans le monde de la même manière que
le chant manifeste la présence de l’oiseau et le grondement celle du
tonnerre. À ce niveau, la voix, le chant et le tonnerre sont ontologiquement équivalents : tout comme la voix est l’être humain dans son
expression sonore, le chant est l’oiseau et le grondement est le tonnerre. Mais Vogel soutient que tous ces éléments ne permettent pas
de conclure que les entités naturelles conversent réellement avec les
êtres humains, et encore moins les unes avec les autres, ceci principalement pour deux raisons. Premièrement, pour qu’il y ait conversation, les participants doivent être attentifs et se répondre les uns aux
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épilogue
marcher avec les dragons
autres. Les humains sont d’ailleurs attentifs et sensibles aux bruits
de la nature ; ils guettent les chants d’oiseaux et sont émus, parfois
même terrifiés, par le tonnerre. Mais, s’interroge Vogel, la nature
répond-elle aux êtres humains ? « Arrive-t-il que les entités expressives de la nature auxquelles nous sommes attentifs et sensibles
nous accordent pleinement leur attention […], discutent avec nous
et répondent à nos attentes ? » (Vogel 2006, p. 148). Il est convaincu
que la réponse est « non ». Les bruits de la nature, suggère-t-il, ressemblent davantage aux ordres d’un monarque indifférent à ses
sujets mais les obligeant à obéir. Deuxièmement, une conversation
porte nécessairement sur quelque chose (Vogel 2006, p. 151-152). Elle
permet à ceux qui y participent de comparer leurs différentes perceptions du monde dans le but commun de comprendre comment il
est réellement. Les interlocuteurs humains le font, mais ce n’est pas
le cas des oiseaux, des arbres, des rivières, du tonnerre et des vents.
Ce n’est pas qu’ils soient des interlocuteurs indifférents, mais plutôt
qu’ils ne sont pas des interlocuteurs du tout (Vogel 2006, p. 157).
Pour Vogel, quels que soient les bruits que l’on peut y entendre,
la nature est silencieuse car elle ne prend pas part aux conversations que nous tenons à son propos. Nous pourrions avoir l’impression que la nature parle, mais c’est une illusion. « J’ai écouté attentivement », écrit Vogel, « et je n’ai rien entendu » (Vogel 2006, p. 167).
Souvenez-vous du vieil homme Ojibwa et de l’Oiseau Tonnerre.
Il pensait que le tonnerre lui parlait, mais n’arrivait pas à comprendre ce qu’il lui disait. Était-ce du à un problème de traduction,
comme semble le suggérer Hallowell ? J’ai soutenu que cela était plutôt du à un manque d’empathie. Mais pour Vogel, même si le vieil
homme avait compris la parole du tonnerre, il n’aurait réussi ni à la
traduire ni à s’y identifier. Il aurait plutôt accompli un acte de ventriloquie. Tandis que le traducteur exprime la parole d’un autre mais
dans sa propre langue, le ventriloque projette ses propres mots sur
un objet muet tout en créant l’illusion que c’est l’objet lui-même qui
parle (Vogel 2006, p. 162). Cette accusation de ventriloquie est évidemment au fondement de l’horreur qu’inspire à la science l’anthropomorphisme, qui amène certaines personnes à affirmer leur
empathie pour des créatures non humaines, ou à prétendre qu’elles
savent ce qu’elles ressentent. Ces personnes sont accusées de projeter leurs pensées et leurs sentiments sur leurs sujets inconscients.
Mais le bien-fondé de cette accusation a été contesté. À l’occasion
d’un important débat mené dans les pages de la revue Environmental
Values, Nicole Klenk a adopté une position contraire. Elle affirme
que les animaux peuvent répondre et répondent de fait à la voix, aux
gestes et à la présence humaine dans des formes significatives pour
eux comme pour nous (Klenk 2008).
Il est vrai que les non-humains ne peuvent pas comparer leurs perceptions de l’environnement avec les humains dans le but commun
d’établir la vérité de ce qui est « là-dehors ». Mais insister sur le fait
que les conversations ne peuvent prendre que cette forme, soutient
Klenk, c’est adopter une conception de la conversation si étroite
qu’elle exclurait presque tout ce que nous avons l’habitude d’appeler conversation dans le monde humain. Pour la majorité d’entre
nous, la plupart du temps, converser, c’est essayer de comprendre
ce que les autres nous disent, de « saisir l’histoire correctement », et
non de vérifier si cette histoire est vraie (Klenk 2008, p. 333). Les êtres
humains qui s’efforcent de rendre par des mots ce que dit la nature
sont donc des traducteurs et non des ventriloques. Pour Klenk,
c’est précisément ce qui se passe dans la recherche scientifique. Si
ce n’était pas le cas, conclut-elle, les interprétations scientifiques
seraient de simples fictions créées par le dialogue des hommes
entre eux, et non les résultats d’une interaction et d’une observation
minutieuse des éléments du monde naturel. Sur ce point, je pense
néanmoins que Klenk se trompe. Ou, pour être plus précis, elle se
trompe tant que nous restons attachés aux protocoles méthodologiques de la science traditionnelle. En tant que pratique spécialisée
de la connaissance, l’ambition de la science est de chercher à vérifier si l’histoire est vraie, et non seulement de la saisir correctement.
Depuis Bacon, la science a toujours insisté sur la nécessité de découvrir la réalité en elle-même, et donc également sur une stricte séparation entre fait et interprétation. En lisant sur les lignes du livre de la
nature, et non entre les lignes, les scientifiques insistent particulièrement sur le fait qu’ils n’écoutent pas « les voix de ces êtres avec lesquels ils interagissent », contrairement à Klenk qui pense qu’il s’agit
de leur priorité numéro un (Klenk 2008, p. 334)9. Il est au contraire
probable que les scientifiques font tout ce qu’ils peuvent pour éviter d’écouter, de peur que cela n’interfère avec leurs résultats et n’en
compromette l’objectivité.
350
351
9. À l’exception des défenseurs de la science goethéenne, pour qui s’engager dans une recherche scientifique, c’est « entrer en conversation avec la
nature et écouter ce qu’elle a à dire » (Holdrege 2005). Le mépris dans lequel
est tenue l’approche goethéenne par le courant dominant de la science tend
néanmoins à en faire l’exception qui confirme la règle.
épilogue
marcher avec les dragons
Connaître en étant
J’affirme qu’il y a dans la vision moderne du monde une véritable
ressemblance entre le livre de la nature et la nature du livre : l’un
comme l’autre sont des œuvres achevées dont les contenus peuvent
être lus par ceux qui ont les clés pour les déchiffrer. Cette ressemblance repose sur l’idée suivante : ils peuvent tous deux être lus en
silence, non pas au cours d’une conversation où les différents participants ne cessent de s’ouvrir les uns aux autres et dont les histoires s’entrelacent, mais comme un ensemble de résultats qui – rendus inertes et impassibles, dans des formes objectives et objectivées
– nous ont tourné le dos, n’offrant à notre examen que ce que MaeWan Ho a appelé une « surface de littéralité opaque, plate et gelée »
(Ho 1991, p. 348). Pour la science, les faits correspondent à ce que
nous appelons les « données ». Mais le monde ne fait pas don de luimême à la science comme s’il y était obligé par une forme d’engagement. Ce qui est « donné », dans la science, c’est précisément ce qui
est sorti de la circulation pour devenir une sorte de résidu, débarrassé du mouvement de la vie. C’est ce résidu – pressé, trié et purifié
– qui est soumis à un processus d’analyse, dont les résultats finaux
apparaissent sur une page écrite sous la forme de mots, de figures et
de diagrammes. La connaissance se crée ainsi sous la forme d’une
couverture, à l’extérieur de l’être. Après avoir plongé le monde dans
le silence, nous puisons nos connaissances dans le silence du livre.
Le concept même d’homme, dans sa forme moderne, exprime le
dilemme d’une créature qui ne peut connaître le monde dont elle
fait partie qu’en le quittant. Pourtant, nous habitons le monde en
nous déplaçant à travers lui et non en parcourant sa surface extérieure. Dans cette expérience, notre connaissance ne résulte pas
d’une accumulation extérieure ; elle se développe et se déploie de
l’intérieur même de notre être terrestre. Nous nous développons
dans le monde de la même manière que le monde se développe en
nous. Il est possible que cette fondation de la connaissance à l’intérieur de l’être soit au cœur de la sensibilité que nous avons tendance
à appeler « religieuse ».
Mais n’était-ce pas au nom de la religion que les leaders de la
Réforme insistèrent sur la nécessité d’inverser la relation entre
la connaissance et l’être ? En mettant l’accent sur la vérité littérale des mots et des œuvres, la religion des réformistes cédait face
à la science alors même qu’elle prétendait s’en détacher. Car dans
toute dispute concernant les faits, il est inévitable que la science
gagne et que la religion perde. Une énigme demeure néanmoins :
pourquoi les hommes – y compris, il faut le dire, de nombreux
scientifiques – adhèrent-ils à des représentations de la réalité qui
sont manifestement fausses10 ? Mais lorsque nous nous demandons
si c’est la religion ou la science qui offre la meilleure représentation
du monde, nous faisons fausse route, car la véritable question se
situe à un autre niveau : nos processus de connaissance et d’imagination s’inscrivent-ils dans un engagement existentiel avec le monde
dans lequel nous nous trouvons ? Comparer la religion et la science
en interrogeant leur approche respective d’une réalité à laquelle
nous sommes nous-mêmes entièrement indifférents, c’est répondre
par la négative ; en d’autres termes, c’est supposer que lorsque nous
délibérons consciemment, que ce soit à un niveau religieux ou scientifique, le monde ne nous doit rien, et que nous ne lui devons rien
non plus. Mais si, d’un autre côté, nous devons notre existence au
monde, et si le monde, au moins dans une certaine mesure, nous
doit son existence, ne devons-nous pas plutôt nous interroger sur la
nature de ces engagements et de cette réciprocité ? De quelle manière
les savoirs et l’imagination nous permettent-ils, ainsi qu’aux créatures qui nous entourent, d’être ? Car c’est sûrement dans leur rejet
à l’intérieur de l’être – c’est-à-dire dans la reconnaissance, comme
le dit l’anthropologue Stuart McLean, d’une continuité essentielle
entre le « fonctionnement de l’imagination humaine » et « les processus qui forment et transforment l’univers matériel » – que l’on peut
trouver le fond commun entre la religion et la science (McLean 2009).
C’est sur ce point que Klenk pourrait, après tout, avoir raison.
Toute science repose sur l’observation, et l’observation elle-même
repose sur une association étroite et immédiate, dans la perception
et dans l’action, entre l’observateur et ces objets du monde qui sont
l’objet de son attention (Ingold 2011b, p. 75). La caractéristique la
plus frappante de la science moderne, c’est peut-être l’ampleur avec
laquelle elle a nié et occulté les engagements pratiques et observationnels sur lesquels elle repose. Mettre l’accent sur ces engagements
(être attentif aux pratiques de la science et non à ses prescriptions
formelles), c’est réhabiliter ces protocoles expérientiels et performatifs tacites et méconnus qui ont été délaissés ou « rejetés dans
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353
10. La littérature de plus en plus abondante consacrée à ce casse-tête pose
le problème en ces termes : pourquoi l’imagination humaine est-elle disposée à créer des représentations d’entités qui, si elles existaient – comme les
esprits –, violeraient les principes fondamentaux de la causalité physique
ou biologique (voir par exemple Boyer 2000). Selon la perspective que nous
défendons ici, cette littérature qui considère la religion comme une illusion
cognitive n’est absolument pas convaincante.
épilogue
marcher avec les dragons
les coulisses » par les conceptualisations scientifiques. N’oublions
pas le conseil d’August Kekulé : « suivre les voies de l’Éclaireur, c’est
prendre note de chaque trace, de la courbure de chaque brindille, de
chaque feuille sur le sol. » Dans leur pratique, les scientifiques sont
des éclaireurs autant que les hommes de foi, ils marchent inévitablement là où d’autres ont marché avant eux, toujours attentifs aux
bruissements et aux chuchotements de leur environnement. Les
scientifiques ne s’intéressent pas seulement aux formes finales des
choses, ils cherchent à pénétrer au cœur des processus de leur formation. Ce faisant, ils ne se contentent pas de recueillir ce que le
monde leur offre, ils l’acceptent. Ils peuvent, par égard pour les protocoles officiels, feindre de ne pas écouter les voix des êtres qui les
entourent, mais ils doivent cependant les écouter s’ils veulent aller
au-delà de la simple collecte d’informations et comprendre réellement le monde. Que cela nous plaise ou non, ils sont eux aussi redevables au monde. C’est dans cette pratique plus humble, et non
en s’arrogeant la capacité exclusive à représenter une réalité donnée, que la recherche scientifique se rapproche de la sensibilité religieuse comme une forme de connaissance dans l’être. C’est la voie
de l’imagination.
11. J’ai eu la chance de superviser le travail de Peter – avec mon collègue
David Anderson – et c’est en l’aidant à rassembler les chapitres de sa thèse
sur les liens entre la lecture, l’écriture, la vie et la terre que j’ai eu pour la première fois l’idée de cet article.
une mission pour transmettre la foi anglicane aux hommes de la
région de la rivière McKenzie. Tout au long des décennies suivantes,
McDonald travailla sans relâche à introduire les enseignements
chrétiens dans les communautés autochtones Gwich’in. Beaucoup
d’hommes et de femmes qu’il rencontra au cours de ses voyages l’aidèrent à transcrire les textes liturgiques dans leur propre langage,
connu à l’époque sous le nom de Tadukh. McDonald consacra sa vie
à la traduction de la Bible et n’acheva pas ce travail avant 1898.
La Bible Tadukh fut chaleureusement accueillie par les Gwich’in,
mais sa réception ne fut pas exactement celle que McDonald avait
souhaité. À la différence de ses rivaux de la mission catholique, qui
adoptaient une attitude plutôt détendue, McDonald était imprégné
des traditions de l’église réformée et pensait que la Bible devait être
lue au sens littéral, comme l’expression d’une vérité unique non susceptible d’être discutée. À son grand désarroi, cependant, beaucoup
d’hommes Gwich’in – parmi lesquels bon nombre de ses propres
élèves – commencèrent à avoir des visions au cours desquelles, leur
semblait-il, les pages de la Bible leur parlaient, délivrant des instructions et révélant des prophéties. Ces pages parlaient avec les
voix de leurs aînés, celles des personnes avec lesquelles McDonald
avait travaillé pour traduire le texte (leurs idiosyncrasies dialectales s’étaient même incorporées au texte), et même avec la propre
voix de McDonald. Pour les Gwich’in, lire la Bible, c’était engager la
conversation avec ces aînés, écouter leurs voix, leur enseignement, et
apprendre. McDonald était pour sa part extrêmement mécontent, et
il se sentit obligé de dénoncer les « fausses prophéties » qui étaient
débitées par certains (Loovers 2010, p. 117). Mais la discordance entre
ces différentes manières de lire ne se réduisait pas à la Bible. Elle a
continué à se manifester dans d’autres contextes, tout particulièrement dans l’interprétation des traités et des accords sur les revendications territoriales rédigés avec des représentants du gouvernement canadien. Dans ces cas-là, la consternation était du côté des
Gwich’in, qui étaient surpris de découvrir que des documents grâce
auxquels ils pensaient établir un dialogue avec ceux dont les voix y
étaient exprimées, étaient considérés par la bureaucratie comme des
textes figés, silencieux et inflexibles (Loovers 2010, p. 138).
Loovers montre avec élégance qu’une discordance identique
se retrouve dans les différentes manières de lire la terre. Pour les
colons, les explorateurs, les scientifiques et tous ceux qui sont venus
sur cette terre depuis l’extérieur, que ce soit pour la civiliser, la développer, y mener des recherches ou en apprécier la beauté naturelle, il
ne faisait aucun doute qu’elle soit une présence immuable et figée,
354
355
La Bible et la terre
Permettez-moi de conclure par un nouvel exemple issu de l’ethnographie du nord circumpolaire et provenant d’une récente étude
menée par Peter Loovers parmi les Teetl’it Gwich’in, peuple vivant à
et autour de Fort McPherson, dans les territoires du Nord-Ouest du
Canada (Loovers 2010)11. Cette étude est exceptionnelle car elle associe une description sensible de la manière dont les gens entrent en
relation avec leur environnement lorsqu’ils chassent, piègent et se
déplacent sur la terre et sur l’eau, à une histoire détaillée des relations des Gwich’in avec l’écrit – surtout à travers la traduction et la
réception de la Bible chrétienne. L’immense travail de traduction de
la Bible fut entrepris par Archdeacon Robert McDonald. Né en 1829
d’un père écossais – employé de la Compagnie de la baie d’Hudson – et d’une mère ojibwa, McDonald fut éduqué à l’école de la
mission anglicane du village de Red River. Il officia pendant près
d’une décennie parmi les Ojibwas avant de s’engager, en 1862, dans
épilogue
marcher avec les dragons
attendant d’être découverte, expliquée et peut-être transformée par
les mains et les esprits des hommes. La position des Gwich’in est en
revanche assez différente. Lire la terre, pour eux, c’est être attentif
aux multiples indices qui révèlent les activités et les intentions de
ses divers habitants humains et non humains. Ces indices, nous dit
Loovers, « comprennent les mouvements des animaux, les pistes, les
anciens et les nouveaux campements ou cabanes, les traces sur le sol,
le bois, les conditions de la neige et de la glace en hiver, les rives des
rivières en été, et des lieux où des événements ont eu lieu » (Loovers
2010, p. 300). Ou qu’ils aillent, les Gwich’in écoutent, assimilent,
apprennent, consultent la terre. C’est une enseignante, et pas seulement un dépôt dans lequel peuvent être extraits des matériaux destinés à la construction d’un savoir propositionnel. La terre s’adresse
donc aux hommes à travers de nombreuses voix, exactement comme
la Bible. Devons-nous alors suivre Archdeacon McDonald et conclure
comme lui que cette manière de lire la terre est fausse, ou soutenir
qu’elle repose sur des illusions auxquelles les peuples autochtones,
prétendument primitifs, ont toujours été soumis aux yeux des occidentaux ? Même McDonald, avec son éducation ojibwa, savait que les
interprétations indigènes ne se réduisaient pas à cela. C’est aussi, à
la lumière de ce que nous avons soutenu dans ce texte, notre cas.
et transportée dans la rue sur le dos du dragon. Le père de Billy, de
retour du travail, est surpris de découvrir que sa maison a disparu.
Mais un voisin lui vient en aide et lui indique la direction qu’elle a
suivie. Au moment où la famille finit par se réunir, la mère de Billy
a reconnu à contrecœur que le dragon, après tout, existait peut-être.
Le dragon commence alors immédiatement à rétrécir jusqu’à ce qu’il
ait retrouvé une taille raisonnable. « Les dragons de cette taille ne me
dérangent pas », reconnaît Mrs Bixbee alors qu’elle est confortablement assise dans un fauteuil en train de le caresser.
La morale de cette histoire, bien entendu, est que des problèmes qui sont initialement sans importance – si nous avons peur
de les reconnaître ou de les désigner par leur nom, par peur d’enfreindre les normes de la conduite rationnelle – peuvent s’aggraver
au point de bouleverser notre vie sociale ordinaire. Je pense qu’il y
a aujourd’hui un dragon parmi nous, et qu’il grandit dans de telles
proportions qu’il devient de plus en plus difficile d’adopter un mode
de vie durable. Ce dragon habite la rupture que nous avons créée
entre le monde et notre imagination. Nous savons d’expérience que
cette rupture n’est pas viable, mais nous refusons de reconnaître
son existence car cela nous obligerait à remettre en cause la rationalité scientifique conventionnelle. J’estime que cette reconnaissance
aurait dû avoir lieu depuis longtemps. J’ai suggéré dans cet article
que l’étude du monachisme médiéval et de ce que l’on appelle les
ontologies indigènes pourrait nous aider à lire et à écrire autrement,
et ainsi à prendre à nouveau conseil auprès des voix des pages et de
celles du monde qui nous entoure, à écouter et à s’instruire de ce
qu’elles nous disent, et à réparer la rupture entre l’être et la connaissance. Cette réparation doit être une première étape vers l’adoption
d’un mode de vie plus durable. Alors, peut-être, le dragon se calmera.
Épilogue
Les dragons ça n’existe pas. C’est le titre d’un des grands classiques de la littérature pour enfants, écrit par Jack Kent (2011 [1976]).
Il raconte l’histoire d’un petit garçon, Billy Bixbee, qui se réveille
un matin et découvre un dragon dans sa chambre. Il est assez petit,
et remue sa queue de façon plutôt amicale. Billy va prendre le petit
déjeuner avec le dragon, qu’il présente à sa mère. « Les dragons ça
n’existe pas », déclare-t-elle d’un ton ferme tout en continuant à préparer des pancakes pour le petit déjeuner. Billy s’assied à la table du
petit déjeuner tandis que le dragon s’assied sur la table. Il n’est normalement pas permis de s’asseoir sur la table dans la maison des
Bixbee, mais il n’y a rien à faire, car si les dragons n’existent pas, vous
ne pouvez pas leur dire de descendre de la table. Le dragon a faim et
mange la plupart des pancakes, mais cela ne dérange pas Billy. Alors
que sa mère continue à ignorer le nouvel arrivant, le dragon commence à grandir. Il n’arrête plus de grandir. Il occupe bientôt toute
l’entrée, et la mère de Billy a du mal à nettoyer la maison car elle ne
peut plus aller d’une chambre à l’autre qu’en passant par les fenêtres.
Toutes les portes sont bloquées. Le dragon continue de grandir – il
est désormais aussi grand que la maison. Puis la maison est soulevée
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index nominum
Alberti, Leon Battista, 223-224,
235, 238, 242-243
Alexander, Christopher, 124,
174, 244
Aristote, 221-222, 242
Bacon, Francis, 335-337, 342, 344,
347-348, 351
Barnes, Barry S., 276
Bateson, Gregory, 19, 21-22, 2427, 195-196, 319
Berger, John, 233-235
Bergson, Henri, 109, 112, 197
Bloch, Maurice, 160, 323-324
Bloor, David, 276
Boas, Franz, 89-90, 209-210, 215,
309, 313
Bohm, David, 110-111, 144, 319
Boon, James A., 278
Bourdieu, Pierre, 61, 274, 277,
289, 298
Boyd, Robert, 66, 102, 117-118
Brookfield, Harold C., 141
Bryson, Norman, 234-235
Butler, Samuel, 127-128
Carruthers, Mary, 340-341,
346-347
Cassirer, Ernst, 109
Clark, Andy, 85, 196, 319
Clifford, James, 152, 179, 327
Cloak, Ted, 117, 127
Cohen, Anthony, 278
Cosmides, Leda, 83, 174
Darwin, Charles, 72, 75, 77-82,
84, 94-95, 104, 106-107, 112, 156,
191, 193
Dawkins, Richard, 106-107, 116,
153
de Certeau, Michel, 349
Deleuze, Gilles, 190-192, 195, 199,
221-223, 226, 229, 231-233, 253255, 257, 259
Descartes, René, 290
Descola, Philippe, 328
Dewey, John, 111
Douglas, Mary, 140
Durkheim, Émile, 102, 317-318
Elkins, James, 226-227, 234
Ellen, Roy, 141
Evans-Pritchard, Edward E.,
313-316
Fischer, Ronald A., 106
Flusser, Vilém, 229, 247-249, 251,
253, 255-256
Fortes, Meyer, 311
Frampton, Kenneth, 247-249,
256
Galilée, 337, 344, 348
Geertz, Clifford, 54, 67, 132, 152,
161, 179
Gell, Alfred, 227, 231, 295
377
index nominum
Gibson, James J., 28, 32, 133, 135,
137-138, 140-141, 143, 145, 151,
181-185, 189-190, 197, 204, 250,
272-273, 300
Gluckman, Max, 325
Godelier, Maurice, 161, 175
Goodwin, Brian, 63, 107-108,
111, 113, 213
Grégoire le Grand, 338-340
Guattari, Félix, 191-192, 195, 199,
221-223, 226, 229, 231-233, 253255, 257, 259
Hägerstrand, Torsten, 193
Hallowell, Alfred Irving, 147148, 319, 324, 341, 343-344, 350
Harris, Roy, 294
Heidegger, Martin, 151, 172-173,
186-190, 218-219, 229, 234, 251253, 259
Héraclite, 316
Hewes, Gordon, 292
Hinde, Robert A., 64, 122-123
Ho, Mae-Wan, 62, 65, 98, 107-108,
111, 151, 352
Hull, David, 116
Huxley, Julian, 72, 106, 308
Huxley, Thomas Henry, 72, 106,
308
Isidore de Séville, 346
Jacques i er, 335
Janáček, Leoš, 34-37, 39
Jung, Carl Gustav, 22
Kekulé, August F., 342-344, 354
Kent, Jack, 356
Klee, Paul, 221-222, 229, 231, 252
Klenk, Nicole, 350-351, 353
Kluckhohn, Clyde, 118, 263
Kroeber, Alfred L., 166, 263, 310314
Lamarck, Jean-Baptiste, 79, 103
Langer, Suzanne, 33-34, 286
Latour, Bruno, 193-195, 227
Lave, Jean, 300-301
Leach, Edmund, 127-128, 140,
277-278, 314-315, 317, 320
Lefebvre, Henri, 193
Lehrman, David, 91
Lévi-Strauss, Claude, 19, 22-26,
259, 315-317
Lewontin, Richard C., 28, 61-62,
91, 111, 133, 135, 182
Linné, Carl Von, 71-72
Loovers, Peter, 354-356
Lowie, Robert, 264-266, 268, 276
Luther, Martin, 347
Lutz, Catherine, 281
Malinowski, Bronislaw, 314
Marett, Robert Ranulph, 313-314
Marx, Karl, 75, 136, 142-143, 204205
Mauss, Marcel, 53, 88, 119, 154, 293
Mayr, Ernst, 93, 97, 103
McDonald, Archdeacon Robert,
354-356
McLean, Stuart, 353
Mead, George Herbert, 143, 278
Mendel, Gregor, 106
Merleau-Ponty, Maurice, 36,
151, 173, 290, 296
Miller, Daniel, 230
Mills, Charles Wright, 325-326
Monod, Jacques, 106, 109, 112
Montalenti, Giuseppe, 108
Morgan, Lewis Henry, 71, 154
Myers, Ronald, 291-292
Nadel, Siegfried, 311, 314
Neumann, John von, 57, 86
Olson, David, 345-347
Olwig, Kenneth, 243, 251
Oyama, Susan, 28, 62, 91, 151
Paine, Robert, 280
Radcliffe-Brown, Alfred R.,
119, 308-310, 313-318, 320-322
Rappaport, Roy, 141-142
378
index nominum
Reed, Edward S., 138, 145
Richerson, Peter J., 66, 102, 117118
Rickert, Heinrich, 309
Rybczynski, Witold, 245
Saenger, Paul, 346
Sahlins, Marshall, 102, 132, 142143, 179
Sanjek, Roger, 268
Saunders, Peter T., 107-108, 111,
151
Saussure, Ferdinand de, 31, 118
Sax, Boria, 345
Schama, Simon, 243
Semper, Gottfried, 246-249, 253,
255
Shannon, Claude, 57, 86
Shweder, Richard A., 160, 276
Siza, Alvaro, 225
Spencer, Herbert, 77-78, 81
Stanner, William E. H., 316
Steward, Julian H., 131-132, 146
Strathern, Marilyn, 123, 270
Thompson, D’Arcy W., 8, 110,
209-210, 214
Tönnies, Ferdinand, 279
Tooby, John, 83, 174
Tylor, Edward, 71, 264-266, 268
Vygotski, Lev, 120
Vogel, Stephen, 349-350
von Bertalanffy, Ludwig, 136,
275
von Glasersfeld, Ernst, 136
von Uexküll, Jakob, 134-135, 152,
156-159, 175, 181, 184-185, 187, 190
Wallace, Alfred Russell, 77, 8182, 84
Weismann, August, 104-106, 112
Weiss, Paul, 113, 320
Whitehead, Alfred N., 28, 127,
137, 176, 181, 317-318, 331
Wiener, Norbert, 57, 86
Willis, Roy G., 135-136
Wilson, Edward O., 114-117, 122,
127
Wilson, Peter J., 31, 115, 161-162,
165
Windelband, Wilhelm, 308-309
Wittgenstein, Ludwig, 285
Woodburn, James, 279
379
table des matières
Préface 7
prologue
1. Culture, nature, environnement.
Vers une écologie de la vie 13
par-delà biologie et culture
2. Tels que nous sommes. Le concept de l’homme
anatomiquement moderne 43
3. Par-delà biologie et culture. Le sens de l’évolution
dans un monde relationnel 77
4. Le regard d’un anthropologue sur la biologie 97
milieu animal et milieu humain
5. Culture et perception de l’environnement 131
6. Bâtir habiter vivre. Comment hommes et animaux
construisent-ils leur demeure dans le monde ? 149
7. Point, ligne, contrepoint. De l’environnement à l’espace fluide 179
tissage et fabrication
8. Tisser un panier 203
9. La textilité de la fabrication 221
10. La hutte conique au centre du monde terre-ciel 239
l’art de l’anthropologie
11. L’art de la traduction dans un monde continu 263
12. Poétique de l’usage des outils. De la technologie, du langage
et de l’intelligence à l’artisanat, au chant et à l’imagination 283
13. L’anthropologie n’est pas l’ethnographie 307
épilogue
14. Marcher avec les dragons.
Une excursion anthropologique du côté sauvage 335
Bibliographie 359
Index nominum 377