Sculpture romane : document - edu.augustins.org
Transcription
Sculpture romane : document - edu.augustins.org
Secondaire Sculpture romane : document Saint Jean-Baptiste et Salomé Les évangiles de saint Matthieu (14, 6-9) et de saint Marc (6, 17-29) rapportent les circonstances de la mort de Jean-Baptiste, cousin du Christ et dernier des prophètes, mais ils ne mentionnent pas le nom de la belle-fille d’Hérode qui demanda, pour récompense de sa danse, la tête du Baptiste : elle est seulement « la fille d’Hérodiade ». C’est l’historien juif romanisé, Flavius Josèphe (1er s. ap. J.-C.) qui, dans les Antiquités Judaïques, donne pour la première fois son nom, Salomé. Cet épisode évangélique a donné lieu, du Moyen Age jusqu’au début du XXe siècle à une abondante iconographie. Elle apparaît dès le IXe siècle dans les enluminures des manuscrits (Evangéliaire de Chartres). Les sculpteurs romans l’ont représentée dansant à Notre-Dame de la Daurade et séduisant Hérode à la cathédrale Saint-Etienne. La danse de Salomé – 1er atelier, 1100-1110 Chapiteau de colonne simple, calcaire, 35 x 52 x 41 cm. Cloître du Prieuré Notre-Dame de la Daurade Attribué à Gilabertus, Hérode et Salomé, 1120-1140, Calcaire, 32 x 55,5 x 39 cm Cloître de la cathédrale Saint-Etienne On la retrouve de la cathédrale de Vérone à celle de Rouen (où ses contorsions ont sans doute inspiré Flaubert). Plus tard, elle se dégage de l’iconographie religieuse ; les peintres la représentent de plus en plus pour elle-même, ainsi Titien, Guido Reni, le Caravage, Rubens… © Ville de Toulouse, musée des Augustins, document réalisé par le service éducatif, (Céline Roques 2004). Secondaire Au XIXe siècle, elle est devenue l’incarnation de la femme fatale. Elle inspire Gustave Moreau (L’Apparition, 1876), Alphonse Mucha (Salomé, 1897) et Pablo Picasso (Salomé, gravure 1905). Salomé entre dans la littérature : o Stéphane Mallarmé, Hérodiade (drame lyrique inachevé) – 1871 o Gustave Flaubert, Trois contes, Herodias – 1876) o Joris-Karl Huysmans, A rebours – 1884 o Oscar Wilde, Salomé (drame en un acte écrit en français) – 1893 o Guillaume Apollinaire, Salomé (Alcools) – 1913 Les musiciens s’en emparent : o Jules Massenet, Hérodiade (opéra) – 1881 o Richard Strauss, Salomé (opéra) – 1905 > La danse de Salomé La mort de saint Jean-Baptiste : Le festin d’Hérode er Notre-Dame de la Daurade – 1 atelier La Mort de saint Jean-Baptiste : Présentation de la tête de saint Jean-Baptiste à Hérodiade Attribué à Gilabertus, cathédrale Saint-Etienne, 1120-1140 Les convives emplissaient la salle du festin. Elle avait trois nefs, comme une basilique, et que séparaient des colonnes en bois d’algumin, avec des chapiteaux de bronze couverts de sculptures. […] Les panneaux de la tribune d’or se déployèrent tout à coup ; et à la splendeur des cierges, entre ses esclaves et des festons d’anémone, Hérodias apparut, — coiffée d’une mitre assyrienne qu’une mentonnière attachait à son front ; ses cheveux en spirales s’épandaient sur un péplos d’écarlate, fendu dans la longueur des manches. […] Mais il arriva du fond de la salle un bourdonnement de surprise et d’admiration. Une jeune fille venait d’entrer. Sous un voile bleuâtre lui cachant la poitrine et la tête, on distinguait les arcs de ses yeux, les calcédoines de ses oreilles, la blancheur de sa peau. Un carré de soie gorgePage 2 sur 3 © Ville de Toulouse, musée des Augustins, document réalisé par le service éducatif, (Céline Roques, 2004). Secondaire pigeon, en couvrant les épaules, tenait aux reins par une ceinture d’orfèvrerie. Ses caleçons noirs étaient semés de mandragores, et d’une manière indolente elle faisait claquer de petites pantoufles en duvet de colibri. Sur le haut de l’estrade, elle retira son voile. C’était Hérodias, comme autrefois dans sa jeunesse. Puis, elle se mit à danser. Ses pieds passaient l’un devant l’autre, au rythme de la flûte et d’une paire de crotales. Ses bras arrondis appelaient quelqu’un, qui s’enfuyait toujours. Elle le poursuivait, plus légère qu’un papillon, comme une Psyché curieuse, comme une âme vagabonde, et semblait prête à s’envoler. […] Ensuite, elle tourna autour de la table d’Antipas1, frénétiquement, comme le rhombe2 des sorcières ; et d’une voix que des sanglots de volupté entrecoupaient, il lui disait : — « Viens ! viens ! ». Elle tournait toujours ; les tympanons sonnaient à éclater, la foule hurlait. Mais le Tétrarque criait plus fort : « Viens ! viens ! Tu auras Capharnaüm ! La plaine de Tibérias ! mes citadelles ! La moitié de mon royaume ! » Elle se jeta sur les mains, les talons en l’air, parcourut ainsi l’estrade comme un grand scarabée ; et s’arrêta brusquement. Sa nuque et ses vertèbres faisaient un angle droit. Les fourreaux de couleur qui enveloppaient ses jambes, lui passant par-dessus l’épaule, comme des arcs-en-ciel, accompagnaient sa figure, à une coudée du sol. Ses lèvres étaient peintes, ses sourcils très noirs, ses yeux presque terribles, et des gouttelettes à son front semblaient une vapeur sur du marbre blanc. Elle ne parlait pas. Ils se regardaient. Un claquement de doigts se fit dans la tribune. Elle y monta, reparut ; et, en zézayant un peu, prononça ces mots d’un air enfantin : — « Je veux que tu me donnes, dans un plat, la tête … » Elle avait oublié le nom, mais reprit en souriant : « La tête de Ioakanann »3 Le Tétrarque s’affaissa sur lui-même, écrasé. Gustave FLAUBERT, Trois contes, Hérodias, Paris, 1876. Crédits photographiques : © Toulouse, musée des Augustins – Clichés : Daniel Martin ; STC – Mairie de Toulouse. 1 er Antipas : Hérode Antipas, Tétrarque de Galilée (vers 20 av. J.C. – 39 ap. J.C.) fils d’Hérode 1 le Grand. Rhombe : toupie que l’on utilisait pour diverses pratiques magiques. 3 Ioakanann : Jean-Baptiste. 2 Page 3 sur 3 © Ville de Toulouse, musée des Augustins, document réalisé par le service éducatif, (Céline Roques, 2004).