CENTRE EUROPÉEN D`ÉTUDES BOURGUIGNONNES (XIV e

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CENTRE EUROPÉEN D`ÉTUDES BOURGUIGNONNES (XIV e
CENTRE EUROPÉEN D’ÉTUDES BOURGUIGNONNES (XIVe-XVIe SIÈCLE)
BULLETIN D’INFORMATION
Publication semestrielle
no 63 — Février 2012
Éditeur responsable — Jean-Marie Cauchies
[email protected]
Contact : Facultés universitaires Saint-Louis — Bd du Jardin botanique, 43 – B-1000 Bruxelles
RENCONTRES DE CALAIS (20-23 SEPTEMBRE 2012)
N
os prochaines rencontres se dérouleront à Calais, à l’invitation des Amis du Vieux
Calais, avec la collaboration de centres de recherche des Universités d’Artois, du
Littoral et Charles de Gaulle – Lille III. Le thème en sera : Négociations, traités et
diplomatie dans l’espace bourguignon (XIVe – XVIe siècles). Le programme devrait
comporter aussi réceptions (ville de Calais) et soirée musicale, ainsi qu’un « repas
médiéval » dans les salons de l’hôtel de ville. Les séances se tiendront du jeudi matin au
samedi après-midi. La journée du dimanche 23 septembre sera consacrée à une excursion à
Saint-Omer, avec visite de la ville et du Musée Sandelin.
Ces informations sont à substituer à celles qui figuraient en tête de notre bulletin
d’octobre dernier (no 62).
Le renvoi du formulaire ci-joint (par courrier postal ou électronique) est
INDISPENSABLE pour obtenir les informations ultérieures (liste d’hôtels, modalités
d’inscription et – fin août – programme).
Voici la liste des communications (par ordre alphabétique des orateurs) :
Andrea BERLIN, Die schützende Hand des Herzogs von Burgund. Zur Unterdrückung des
Zaubereifalles des Grafen von Etampes durch Philipp den Guten (1463)
Georges BISCHOFF, Un « faiseur de roi » : Paul d’Arnstorff († 1521), de Maximilien à Charles
Quint
Nils BOCK, Henri SIMONNEAU et Bastian WALTER, L’information et la diplomatie dans
l’espace bourguignon à la fin du Moyen Âge
Jean-Marie CAUCHIES, Un épisode tragi-comique ? Repenser l’entrevue de Péronne entre le roi
Louis et le duc Charles (1468)
Loïc COLELLA-DENIS, Les réconciliations entre Philippe le Bon et ses sujets révoltés dans les
« Mémoires » de Jacques du Clercq (1448-1467)
Stéphane CURVEILLER et Philippe CASSEZ, Calais et les ducs de Bourgogne (1384-1477)
Michael DEPRETER, Le prince et les États de Flandre wallonne : des diplomaties concurrentes ?
Modalités et enjeux du traité de Wavrin (14 décembre 1488)
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Jean DEVAUX, Entre neutralité et guerre larvée : grandeur et misère de la diplomatie
tournaisienne dans le « Journal » de Jean Nicolay (1477-1479)
Gilles DOCQUIER, Les traités de Calais (1507) : « Pour le bien de nostre trés redoubté seigneur et
prince et nous tous » ?
Laetitia GORTER-VAN ROYEN et Jean-Paul HOYOIS, De la paix de Cambrai (1529) à la
trêve de Bomy (1537) : négociations diplomatiques officielles et officieuses entre les Pays-Bas
et la France
Alexandre GROSJEAN, Action diplomatique et relation historiographique : les missions anglaises
de Toison d’or dans ses « Mémoires » (1430-1435)
Gaël GUIHARD, Les moyens de la diplomatie : l’exemple des relations diplomatiques entre deux
principautés alliées, la Bourgogne et la Bretagne (1465-1475)
Benoît LETHENET, Recrutement et carrière des plénipotentiaires d’une petite ville de Bourgogne
du sud, Mâcon, à la fin de la guerre de Cent ans
Samuël LUCAS, L’Ordre teutonique et ses faucons : un moyen pour servir la diplomatie
Christophe MASSON, Des ambassadeurs entre Liège et Bourgogne. Pour une étude des relations
diplomatiques des ducs Valois et des pouvoirs liégeois
Gisela NAEGLE, Ecrire au père, écrire au prince : relations diplomatiques et familiales dans la
correspondance de Maximilien Ier et Marguerite d’Autriche
Jean-Baptiste SANTAMARIA, Chantage maternel, patriotisme capétien ou réalisme
diplomatique ? Le rôle de Marguerite de France, comtesse d’Artois et de Bourgogne, dans le
mariage de Marguerite de Male et Philippe le Hardi
Alain WIJFFELS, Le déclin de la Hanse au fil de ses négociations avec l’Angleterre (1474-1604)
COTISATIONS
U
ne trentaine de nos membres n’ont pas encore acquitté le montant de la cotisation
pour 2011. Nous les invitons à le faire sans retard et à tenir compte (ce que
plusieurs n’ont pas fait...) du NOUVEAU MONTANT fixé avec l’accord de l’assemblée
générale de septembre dernier Les cotisations demeurent la ressource principale du
centre, en ces temps où les subventions se font de plus en rares et difficiles à obtenir. Des
moyens insuffisants ne pourraient, à terme, que compromettre la continuité de nos
publications : ce risque n’a rien de « virtuel »…
A LIRE AVEC ATTENTION !
Notre trésorière, Myriam Cheyns-Condé, invite tous nos membres de la zone Euro à verser
leur cotisation (20 € pour 2011, 25 €/35CHF pour 2012) sur le compte belge du Centre, par
virement européen électronique ou papier. Prière de l’utiliser quel que soit le pays de
résidence. Il suffit de le remplir, de le signer et de le déposer auprès de son organisme
financier habituel. Cette invitation s’adresse tout particulièrement à nos nombreux
membres français qui risquent, sans cela, de subir les conséquences fâcheuses des
difficultés que nous rencontrons malgré nous dans la gestion des paiements de cotisations
en provenance de France.
- Centre européen d’études bourguignonnes - UBS, CH 2001 Neuchâtel - 290-F0142567.0
(BIC = UBSWCHZH80A / IBAN = CH98 0029 0290 F014 2567 0) (0=zéro et pas lettre O).
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- Centre européen d’études bourguignonnes – rue des Postes, 106, B 7090 Braine-le-Comte
– 370-1178782-28 (BIC = BBRUBEBB / IBAN = BE37 3701 1787 8228).
- Compte postal du Centre européen d’études bourguignonnes - Dijon 04 745 45 Y 025 rue Pelletier de Chambure, 12, F 21000 Dijon (BIC = PSSTFRPPDIJ / IBAN = FR80 2004
1010 0404 7454 5Y02 555). (ATTENTION ! À ne plus utiliser actuellement sauf nécessité.)
- Mw ten Raa - van Dijk t.g.v. Centre européen d'études bourguignonnes - n° 615866
(postrekening) - Söderblomplaats, 684, NL 3069 ST Rotterdam.
En cas de paiement par mandat de poste international, indiquer seulement : Centre
européen d’études bourguignonnes - Jean-Marie Cauchies.
NOUVEAUX MEMBRES
Dra Julia Crispin (Münster)
Mme Laurence Delobette (Besançon)
M. Theo Van Roy (Hever, B)
Dr Bastian Walter (Wuppertal)
PROMOTIONS
Ludovic Nys, 25 novembre 2011, Université Paris IV – Sorbonne : habilitation à diriger des
recherches « Art et vie de cour en Hainaut sous les Avesnes et les Bavière (1280-1417) ».
Renaud Adam, 23 juin 2011, Université de Liège : thèse de doctorat « Imprimeurs et société
dans les Pays-Bas méridionaux et en principauté de Liège (1473-ca 1520) ».
Florence Berland, 26 novembre 2011, Université Charles-de-Gaulle – Lille III : thèse de
doctorat « La cour des ducs de Bourgogne à Paris ».
Céline Berry, 12 décembre 2011, Université Paris-Est : « Les Luxembourg-Ligny, un grand
lignage noble de la fin du moyen âge ».
CHRONIQUE BIBLIOGRAPHIQUE
Auteurs des recensions : J.-M.C. = Jean-Marie Cauchies ; M.C.-C. = Myriam Cheyns-Condé ;
J.D. = Jean Devaux ; E.F. = Emmanuël Falzone ; J.-D.M. = Jean-Daniel Morerod ; B.S. =
Bertrand Schnerb ; M.S. = Monique Sommé.
J. RAUZIER, La Bourgogne au XIVe siècle. Fiscalité, population, économie, Dijon, EUD, 2009,
464 p. (collection Sociétés).
Ingénieur, l’auteur a entamé une formation de médiéviste à sa retraite. Docteur en
Sorbonne sous la direction d’Henri Dubois, il avait publié sa thèse en 1998 sous le titre de
Gestion et finances d’une principauté au XIVe siècle : le duché de Bourgogne de Philippe le Hardi.
Ce second livre recouvre la même période, avec une technicité bien plus grande. Il analyse
les résultats de l’imposition de 12 deniers la livre introduite par l’administration valois à la
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faveur de l’extinction de la dynastie locale (1361) ; l’imposition du vin vendu offre des
données de comparaison et de complément. L’auteur, qui présente certes les limites et les
lacunes de sa documentation (par exemple, les données pour le Chalonnais manquent,
alors que les foires jouent un rôle majeur dans l’économie régionale), ne se trouve pas
moins en mesure de suivre l’évolution économique du duché jusqu’à la mort de Philippe le
Hardi, d’abord lieutenant général (1363-1364), puis duc de Bourgogne (1364-1404). Cette
imposition qui touche tous les produits objet de transactions (mis en ferme) permet d’en
suivre le rapport et donc le destin, qu’il s’agisse de l’habillement, des matériaux de
construction, de la nourriture, etc. L’A. met notamment en évidence les éléments
constitutifs d’une période de déflation ; ainsi, le marasme économique et démographique
de ces temps de peste trouve ici une mise en chiffres précise et se révèle très variable d’une
région à l’autre. Des événements locaux peuvent agir, Dijon, par exemple, connaissant un
déclin accéléré par la peste de 1400. Mais, à l’échelle du duché, « quelque chose » s’est
cassé vers 1390. On peut relever également l’intérêt des analyses comparées des économies
rurale et urbaine, la modestie démographique des villes n’empêchant pas leur activisme.
L’auteur use à ce propos d’un outil d’analyse révélateur, le rapport volume des
transactions/nombre de feux. Le vingtième taxant les transactions, son montant révèle
l’activité économique totale, qui peut ensuite être divisée par le nombre de feux, donnant
ainsi un tableau de la vitalité relative des régions étudiées.
J.-D.M.
Women at the Burgundian Court : Presence and Influence. Femmes à la cour de Bourgogne :
Présence et influence, éd. par D. EICHBERGER, A.-M. LEGARÉ et W. HÜSKEN.
Turnhout, Brepols, 2010, XXI-182 p., 26 pl., ill. (Burgundica, XVII).
Parmi les onze communications présentées lors de ce colloque tenu à Malines en 2005, six
sont l’œuvre de nos membres :
Bertrand SCHNERB (p. 3-9) livre quelques réflexions historiographiques sur la présence
et l’influence des femmes à la cour de Bourgogne. Un apport partiel mais non négligeable
est constitué par les monographies des grandes dames, d’abord essentiellement axées sur
les événements puis, plus récemment, orientées davantage vers la personne de la princesse
elle-même. Différentes études et colloques permettent de mieux évaluer la place tenue par
ces grandes dames et l’influence qu’elles exercent dans les domaines tant politique
qu’intellectuel, familial, religieux et artistique. D’autres questions méritent aussi d’être
posées, même si une plus grande discrétion des sources rend les réponses plus difficiles :
elles concernent l’identité des femmes de la cour, leur mode de recrutement, leur
organisation, leur influence secrète, les liens affectifs qu’elles tissaient entre elles aux
différents niveaux, supérieurs et subalternes, de la hiérarchie de l’hôtel ducal.
Monique SOMMÉ (p. 27-36) voit dans la correspondance d’Isabelle de Portugal le reflet
du pouvoir d’une duchesse de Bourgogne au XVe s. Des 42 années qui s’écoulent entre
son mariage avec Philippe le Bon et son décès en 1471, sont conservées 255 lettres closes –
c’est peu en comparaison de ce qui fut écrit – échangées avec près de 80 correspondants.
Sont d’abord étudiées la nature et les caractéristiques de ces lettres. Puis leur contenu
nous dévoile la personnalité d’Isabelle, à l’esprit parfois soupçonneux, et le rôle influent
qu’elle exerça, avec ou sans délégation de pouvoir, du vivant de son époux, dont elle avait
la confiance, puis seule, pendant son veuvage, aussi bien dans les domaines politique,
diplomatique, militaire, administratif et financier que dans la sphère religieuse et familiale,
spécialement ici avec son époux et son fils Charles.
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Anne-Marie LEGARÉ (p. 43-55) analyse le programme iconographique au féminin que fut
l’entrée de Jeanne de Castille à Bruxelles. Sont en effet considérés ici les aspects
iconographiques de miniatures illustrant un manuscrit sur papier conservé aujourd’hui à
Berlin, et témoignant de cet événement. Après un bref résumé des moments principaux de
cette Entrée du 9 décembre 1496, l’accent est mis sur la féminisation du programme. Celleci transparaît dans les thèmes abordés, comme le Jugement de Pâris (tendant à voir en
Jeanne la princesse idéale et universelle, puiqu’elle possédait à elle seule les dons que les
trois déesses possédaient séparément), dans les personnages choisis (comme ces huit
femmes héroïques de l’Ancien Testament ou les Neuf Preuses ici représentées en
Amazones, et sans leurs pendants masculins habituels) et enfin dans les décors, telle cette
maison des délices et des jeux à l’art de vivre bien féminin.
Mario DAMEN (p. 57-71) se penche sur les relations entre Marguerite d’York et l’île de
Voorne entre 1477 et 1503. Voorne est constituée en fait de quatre petites îles au sol fertile,
situées dans l’estuaire de la Meuse, qui faisaient partie du douaire de la duchesse. Les
relations entre Marguerite d’York et Voorne concernent surtout des activités économiques :
Voorne était notamment un réservoir inépuisable de harengs salés pour les besoins de la
maison ducale. Mais elles comprennent également un soutien moral et une grande
générosité à l’égard des institutions religieuses, plus spécialement les Pauvres Claires et les
Brigittines, et perpétuent la tradition, instaurée par les seigneurs de Voorne, d’offrir des
vitraux aux églises nouvellement édifiées ou reconstruites.
Jacqueline KERKHOFF (p. 109-121) évoque Marie de Hongrie et son train en 1531. Le
train de Marie, nouvelle régente des Pays-Bas, débute officiellement le 1er octobre 1531 ; il
comptait près de 300 personnes et avait été composé avec plus de liberté qu’on ne le
pensait à l’origine. Il prolonge essentiellement les traditions bourguignonne et
habsbourgeoise à travers la structure et le fonctionnement des différents offices, principaux
et subordonnés. Après la description de ces différents offices, une première annexe
présente un tableau comparatif des trains de Marguerite d’Autriche et de Marie de
Hongrie ; elle est suivie d’une seconde annexe, qui détaille la composition des offices du
train de Marie.
Dagmar EICHBERGER (p. 123-139) s’intéresse aux jeux de société, et plus
particulièrement au trictrac réalisé par Hans Kels le Vieux pour le roi Ferdinand Ier (15031564) et son épouse Anne de Hongrie. Cette œuvre, signée et datée de 1537, témoigne de
l’art renaissant germanique par la décoration extérieure de son tablier aux motifs à
caractère dynastique et héraldique relevant de la sphère masculine (force et puissance), et
par le programme iconographique de ses pions, qui met à l’honneur, dans des miniscènes
réalistes d’inspiration littéraire, la gent féminine dans ses rencontres intimes (charme des
dames et dangers de l’amour).
M.C.-C.
Le Prince en son « miroir ». Littérature et politique sous les premiers Valois, édit. J. DEVAUX et A.
MARCHANDISSE, Le Moyen Âge . Revue d’histoire et de philologie, t. CXVI, 3-4, 2010, pp.
531-705.
Cinq membres du Centre européen d’études bourguignonnes, à côté d’autres auteurs, ont
collaboré à ce numéro thématique, livrant les actes d’une journée d’étude organisée à
Dunkerque. Les « miroirs » sont des reflets du savoir et quand ils concernent les princes,
ils en reflètent les devoirs et les vertus. Ils s’inscrivent dans une littérature destinée à servir
le « bon gouvernement », à laquelle le temps de Charles V et Charles VI de France donne
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une impulsion et qu’il incite à faire usage d’une théorie du pouvoir pour encourager au
redressement, à la manière de Christine de Pizan (Jean DEVAUX, Introduction. Littérature et
politique sous les premiers Valois, pp. 533-541). Bertrand SCHNERB (Charles V au miroir du
« Songe du Vergier », pp. 545-559) se penche sur une œuvre de commande royale (1376/78)
due à Evrart de Trémaugon, professeur de droit et prélat. Y sont envisagées les relations
entre les pouvoirs de l’Eglise et de la royauté, à travers un débat entre un clerc et un
chevalier, arbitré par le roi siégeant en majesté. Il s’agit ici d’exalter l’œuvre de paix et de
défense d’un monarque, dont le caractère sacré est affirmé à travers la dualité des pouvoirs
en cause : droits royaux imprescriptibles, aide divine. Christine de Pizan est présente à
travers deux de ses écrits (vers 1404-1405). Alexandra VELISSARIOU (« Discrete dissimulacion
et prudent cautele » : les stratégies comportementales de la princesse dans le « Livre des Trois
Vertus » de Christine de Pizan, pp. 577-590) la montre s’adressant à un public féminin de
toutes conditions, autour du thème du comportement de la femme, dans des pages
commandées par Jean sans Peur pour sa fille Marguerite, épouse du dauphin Louis. Dans
un souci didactique, Christine consacre aux reines et duchesses, dans leurs sphères
politique et familiale, la moitié des chapitres de l’ouvrage, prônant en tout, notamment en
paroles, la mesure et la prudence, non sans exclure une certaine dose de ruse tout en
gardant toujours la soumission, en vue de s’assurer la double affection du prince et du
peuple. L’œuvre de commande, elle aussi, émanée personnellement de Philippe le Hardi
en hommage à son père, qu’analyse Jean Devaux (De la biographie au miroir du prince : le
« Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V » de Christine de Pizan, pp. 591-604),
combine le genre biographique et le traité de « bon gouvernement » tout en ancrant dans le
vécu réflexion théorique et morale : il est vrai qu’en incitant ici encore à la sagesse et à la
modération au quotidien (« ordenence »), la célèbre femme de lettres atteste une intention
d’apaiser les tensions imprégnant la cour, autour des partis de Bourgogne et d’Orléans.
Place ensuite à une autre plume productive : Philippe de Mézières. Avec Alain
MARCHANDISSE (Philippe de Mézières et son « Epistre au roi Richart », pp. 605-623), on le voit,
en 1395, encourager Richard II d’Angleterre à assurer la paix avec la France, prôner une
union matrimoniale entre les deux monarchies, sans négliger la déploration du Grand
Schisme et la nécessité de la croisade. Miroir à part entière, exposant les vertus du bon
souverain à l’adresse d’un roi auquel cette « lettre » a été réellement offerte par son auteur,
l’écrit, agrémenté de la double métaphore du verger de paix et du jardin de guerre, laisse
deviner en arrière-fond le rêve persistant de Philippe de Mézières : la fondation d’un ordre
de chevalerie. Son célèbre Songe du Vieil Pelerin (entre 1386 et 1389) fait l’objet d’un
examen par Gisela NAEGLE (« Resveillier ceulx qui dorment en pechié » : Philippe de Mézières et
la tradition des miroirs du prince, pp. 625-643). Le troisième livre de ce tour du monde
imaginaire lié à la situation politique française relève spécifiquement du genre du miroir,
adressé en l’occurrence à Charles VI et à son frère Orléans : le poids des fautes d’un roi
surpasse celui de toutes les autres. C’est là un appel à la réformation du royaume, de
l’Eglise, voire du monde entier sous l’égide du christianisme ; une dimension théologique
bien présente tend même à concilier messianisme et pragmatisme.
J.-M.C.
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E. FALZONE, Juger et gérer à Cambrai : le compte de la chapelle de l’officialité pour l’année
1435/36, dans Commission Royale pour la publication des anciennes lois et ordonnances de
Belgique, Bulletin, t. XLIX , 2008, pp. 11-92.
Ce compte, conservé à Lille aux Archives départementales du Nord, est le seul document
de la période médiévale concernant la chapelle de l’officialité de Cambrai. Une analyse
critique de ce cahier de 12 folios, publié en annexe, est d’abord présentée : auteur, fonction
et destinataire, rédaction, structure, balance des recettes et des dépenses (négative). La
chapelle apparaît comme un auxiliaire de l’officialité, avec des recettes constituées de dons
pour le renoncement à une instance en cour [concernant des femmes qualifiées de
« veuves »], et des livraisons de cire, forme originale de peine pécuniaire en nature. La
principale source de revenus provenait du patrimoine immobilier : rentes et cens sur des
maisons, un moulin et quelques terres, parfois payés avec retard en raison d’une situation
économique difficile dans le Cambrésis durant les années 1430. L’édition du compte met
en relief l’existence d’une institution peu connue.
M.S.
E. FALZONE, Ut peccata sua deflere et amplius talia non committat. L’emprisonnement dans la
pratique des officialités du diocèse de Cambrai et la réception de la doctrine canonique au
XVe siècle : châtier et sauver ?, dans Histoire du droit et de la justice. Une nouvelle génération
de recherches, Actes des dix-neuvièmes journées belgo-néerlandaises d’histoire du droit et de
la justice (10-11-12 décembre 2008, UCL, Louvain-la-Neuve), éd. D. HEIRBAUT,
X. ROUSSEAUX et A. WIJFFELS, Louvain, 2009, pp. 273-284.
La nature juridique de l’emprisonnement, condamnation prononcée par les juges
ecclésiastiques, est définie en dégageant deux dimensions complémentaires : punitive et
pénitentielle. L’analyse porte d’abord sur la signification de l’emprisonnement en tant que
peine infligée aux clercs gravement délinquants. Ensuite est envisagée la dimension
pénitentielle de la peine en considérant les conditions de l’emprisonnement, avec
notamment la contrainte du jeûne.
M.S.
M. NEJEDLY, Le projet d’union entre pays européens conçu en Bohême dans les années 1463-1464 :
un projet de croisade contre les Turcs ?, dans Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Comptes rendus des séances de l’année 2009 avril-juin, 2009, pp. 877-899.
Les guerres hussites (ca 1419-1434) ont entraîné en Bohême une coexistence de deux
confessions appuyée par le roi hussite élu Georges Podebrady (1458-1471), entouré de
conseillers catholiques, au nombre desquels le français Antoine Marini. Celui-ci est
l’auteur d’un Mémorandum sur une croisade anti-turque dont le roi aurait pu prendre
l’initiative. L’intérêt du projet résulte surtout des visées plus larges qu’il comporte : une
paix entre les Etats européens chrétiens, associée à une guerre contre les infidèles, autour
d’un mot clef répété à satiété, l’« union », fondée sur un véritable traité, des structures
institutionnelles et administratives, une assemblée de délégués (congregatio), une cour de
justice (parlamentum), des armoiries, un sceau, une monnaie communs, une régulation des
prix...., bref un droit universel respectant l’égalité entre tous les membres, empereur
inclus. Certes ce grand dessein ne se concrétisera-t-il pas, mais il n’en sortira pas moins
une forme de postérité intellectuelle, à travers certains principes de règlement des conflits.
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J.-M.C.
H. WIJSMAN, Images between stories and history : Late medieval miniatures showing travelling
women, dans Itineraria, 8-9, 2009-2010, pp. 329-382.
Après avoir rappelé les problèmes méthodologiques posés au médiéviste pour l’utilisation
des images, l’A. justifie l’emploi des miniatures dont une liste classée de 175 figure en fin
d’article. Seule la Fuite en Egypte (trois exemples) montre un âne par tradition
iconographique. Après une comparaison entre le texte de la chronique de Froissart et les
miniatures représentant l’entrée d’Isabeau de Bavière à Paris en 1389, il décrit deux
miniatures de Dreux Jean qui reproduisent le même modèle. Une attention particulière est
portée sur les images, plus rares, où figurent un homme et une femme sur le même cheval,
et leurs significations. Des voyages en bateau sont également répertoriés. Quatre images
allégoriques, représentant les paraboles du charretier et de la pauvre femme, tirées du
Mortifiement de vaine plaisance (René d’Anjou), sont finalement analysées. Ces 16 images,
reproduites en noir et blanc, montrent la nécessité de les replacer dans leur contexte
iconographique et textuel pour interpréter leur valeur historique.
M.S.
J.-M. CAUCHIES, État bourguignon ou états bourguignons ? De la singularité d’un pluriel, dans P.
HOPPENBROUWERS, A. JANSE et R. STEIN (éd.), Power and Persuasion. Essays on the Art
of State Building in Honour of W. P. Blockmans, Turnhout, 2010, pp. 49-58.
Établissant un bilan historiographique sur la question des vocables utilisés pour désigner
l’édifice politique et institutionnel érigé par les ducs de Bourgogne de la Maison de Valois,
l’A. souligne que l’œuvre de ces princes fut surtout le rassemblement de territoires, de
seigneuries et de principautés diverses sous un régime d’union personnelle, la personne du
duc y étant donc le principal facteur d’unité. Ce caractère essentiel l’engage à préférer au
singulier « Etat bourguignon », le pluriel « principautés bourguignonnes » ou « états
bourguignons », expressions qui rendent mieux compte des caractères « fédératifs » de cette
construction politique, certes plurielle, mais aussi bien singulière.
B.S.
J. BRAEKEVELT, Jean Coustain en de hoge rechtsmacht te Lovendegem en Zomergem. Favoritisme,
schenkingen en afgunst aan het hof van Filips de Goede, dans Handelingen der
Maatschappij voor geschiedenis en oudheidkunde te Gent, t. LXIV, 2010, pp. 87-128.
A travers un dossier bien documenté, l’A. veut illustrer les conflits surgis à la cour et dans
l’administration ducales bourguignonnes entre proches du prince détenteurs de
seigneuries et avides de droits et fonctionnaires gardiens de l’inaliénabilité du domaine.
Les faits se déroulent dans une seigneurie flamande ressortissant à la châtellenie du
Vieuxbourg de Gand et se rapportent aux prétentions à la haute justice de plusieurs
détenteurs successifs. Bien que le Conseil de Flandre se soit prononcé à cet égard en
faveur des prérogatives ducales contre les agissements d’un seigneur défunt (1459), le
premier valet de chambre de Philippe le Bon Jean Coustain, un parvenu, acquéreur des
lieux, parvient à se faire octroyer la haute justice par des lettres du prince... qu’il a peutêtre fait fabriquer lui-même grâce à sa position et ses relations curiales. Il n’en tirera guère
profit puisque, accusé d’avoir conspiré contre Charles de Charolais, il périra sur l’échafaud
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en 1462. Cet article, qui illustre particulièrement aussi le poids des clans et des clientèles à
la cour, comporte l’édition d’un corpus de sept textes (mars 1459-octobre 1462).
J.-M.C.
J.-M. CAUCHIES, L’hommage de Philippe le Beau à Louis XII pour la Flandre et l’Artois (5 juillet
1499) : tradition, paix et bravade, dans Relations, échanges, transferts en Occident au cours
des derniers siècles du Moyen Âge. Hommage à Werner Paravicini. Actes du colloque de
Paris (4-6 décembre 2008), éd. B. GUENÉE et J.-M. MOEGLIN, Paris, 2010, pp. 407-426.
L’A. se propose de réévaluer la portée politique et symbolique de cet hommage à la
lumière du contexte international de l’événement, des tractations diplomatiques et des
échanges épistolaires qui y présidèrent, mais aussi du déroulement exact de la cérémonie,
où les gestes et paroles des protagonistes furent en tous points conformes aux pratiques
féodales issues de la tradition. Philippe le Beau entend par là se désolidariser, en sa qualité
de duc de Bourgogne, de l’attitude belliciste adoptée par son père Maximilien de
Habsbourg et s’engage résolument sur la voie de l’alliance française, affirmant
publiquement « le poids du lien de vassalité ». L’A. souligne à cet égard le rôle déterminant
joué par Philippe de Clèves, qui, dans deux missives capitales adressées à Philippe et à son
proche conseiller, François de Busleyden, souligne tout le profit que l’archiduc, ses pays et
subgetz pourront à coup sûr tirer d’un tel hommage. Le choix de la ville d’Arras, haut lieu
de la diplomatie franco-bourguignonne, la prestigieuse assemblée réunie pour la
circonstance, le rôle dévolu au chancelier de France, dépositaire du grand sceau royal,
« symbole même de la souveraineté », la teneur des lettres patentes établies, en son
absence, au nom de Louis XII, tout concourt à la solennité de cette « prestation féodale ».
Si pareille cérémonie fut pour Maximilien une grave atteinte à la solidarité dynastique qu’il
prétendait imposer à son seul fils, elle représenta par là même une étape décisive dans la
politique de concorde du jeune archiduc.
J.D.
J.-D. MOREROD, Le Grand Pardon de Lausanne, une reconstitution, dans Le Grand Pardon de
Chaumont et les Pardons dans la vie religieuse, XIVe-XXIe siècles, Actes du colloque
international d’histoire, Chaumont, Haute-Marne, 24-26 mai 2007, éd. P. CORBET,
Fr. PETRAZOLLER et V. TABBAGH, [Chaumont], 2011, pp. 133-154.
Souffrant du sinistre provoqué par l’invasion bernoise de 1536 et de la destruction d’une
part importante des archives ecclésiastiques de la ville, le Grand Pardon de Lausanne est
demeuré assez méconnu. Proposant une réinterprétation critique des sources internes (à
l’Église) et augmentant son corpus des sources externes (émanant de la ville),
essentiellement comptables, l’A. propose une reconstitution du cycle du Grand Pardon de
Lausanne entre 1450 et 1534. L’étude porte tant sur la critique de l’historiographie et la
problématique des sources que sur la définition de l’institution (dénomination, origine,
consolidation, durée, préparatifs, déroulement, impact) ; l’A. donne à la suite une édition
avec traduction des pièces du dossier qu’il a pu reconstituer.
E.F.
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