Corps étranger intr..
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Corps étranger intr..
P RAT I Q U E E N I M A G E S FMC Corps étrangers intrabronchiques : regardez ! C’est le cas typique, le plus souvent au cours d’un apéritif au cours duquel l’enfant est grondé par ses parents ou bousculé par d’autres enfants alors qu’il a des aliments en bouche : inspiration brutale et inhalation. Les fruits secs (amandes, pistaches, cacahuètes, etc.) sont surtout en cause. cracher), dilatations bronchiques localisées et même destruction pulmonaire pouvant affecter un lobe ou même tout le poumon (corps étrangers anciens méconnus). Sur une expérience de trois cents cas de corps étrangers bronchiques, nous avons observé quelques particularités représentées ci-dessous. UN ACCÈS BRUTAL DE SUFFOCATIONS AVEC TOUX EXPULSIVE POUR FAIRE LE DIAGNOSTIC > Après le syndrome de pénétration, les symptômes peuvent se calmer au bout de quelques minutes : c’est l’intervalle libre. Mais l’accalmie est trompeuse, vite suivie d’une toux sèche persistante, avec gêne respiratoire et fièvre (syndrome de séjour). > Il existe beaucoup d’autres situations qui peuvent cacher un corps étranger bronchique : gêne respiratoire sifflante étiquetée crise d’asthme, asthme mal maîtrisé, bronchites à répétition, pneumopathies survenant dans le même territoire, encombrement bronchique et surtout expectoration (l’enfant ne sait pas > Il faut d’abord bien ausculter l’enfant. Le corps étranger provoque une obstruction totale ou partielle (le plus souvent) de la lumière bronchique. La diminution du flux aérien se traduit par une asymétrie auscultatoire : diminution unilatérale du murmure vésiculaire, sibilances d’un seul côté. Important : tout ce qui siffle n’est pas de l’asthme. Se souvenir que, dans la crise d’asthme, les sibilances sont diffuses et bilatérales. > Ensuite, au moindre doute, il faut demander un cliché thoracique de face en inspiration et en expiration. Le cliché expiratoire sert à visualiser l’air piégé à l’expiration, qui témoigne de l’obstacle à l’écoulement expiratoire de l’air. On observe le plus souvent un emphysème obstructif (60 à 80 %). L’atélectasie est plus rare, le plus souvent pulmonaire totale (surtout gauche), plus rarement lobaire car les corps étrangers ne sont pas suffisamment petits pour migrer dans une bronche de petit calibre. > Dans l’immense majorité des cas, la radiographie thoracique de face suffit au diagnostic. Les indications du scanner et, encore plus, celle de la scintigraphie sont exceptionnelles. Le plus souvent, les corps étrangers sont végétaux et radiotransparents (80 %). La variété des corps étrangers non végétaux défie toute description. Tout est possible : os, objet en plastique, projectile de sarbacane, caillou, écorce, coquille d’œuf, coton-tige, insecte, bague, bille métallique, goupille de grenade, œil d’ours en peluche, etc. DEUX CAS PARTICULIERS Lorsque le corps étranger reste bloqué dans le larynx, les symptômes, beaucoup plus graves, sont ceux d’une détresse respiratoire aiguë avec dyspnée laryngée. Si le corps étranger est enclavé dans la sous-glotte, sa conformation peut être compatible avec le passage de l’air. S’il est obstructif (morceau de pain ou de viande), on est placé devant une asphyxie aiguë qui FMC PAR LE P R GUY DUTAU, ancien chef de service de pédiatrie (hôpital Purpan, Toulouse) requiert la réalisation de la manœuvre de Heimlich (application de surpressions abdomino-thoraciques pour augmenter le flux expiratoire et faciliter l’expulsion du corps étranger). Lorsque le corps étranger est mobile dans la trachée, il n’y a pas d’intervalle libre et les symptômes sont intenses. Il n’existe pas d’asymétrie auscultatoire : on perçoit en revanche un bruit de drapeau caractéristique dû au choc du corps étranger mobile sur la carène et dans la sous-glotte. La radiographie thoracique ne montre pas de trouble de la ventilation. LES PIÈGES Attention à certains pièges : – 30 % des corps étrangers bronchiques sont étiquetés comme des « asthmes » ; – l’ancienneté du syndrome de pénétration est supérieure à trente jours dans 10 % des cas ; – des corps étrangers méconnus ont été découverts dans des pièces de lobectomie pour bronchectasies suppurées ; – les corps étrangers de la bronche principale (surtout à gauche) peuvent provoquer une atélectasie pulmonaire totale conduisant vite à la perte définitive du poumon par rétraction ; – pneumothorax et pneumomédiastin ; – abcès du poumon. PHOTOS GUY DUTAU quelques modes de présentation insolites > Corps étranger de la branche lingulaire Sur un cas douteux, le cliché expiratoire montre un défaut d’obscurcissement de la partie inférieure du poumon gauche (air piègé). Il s’agissait d’un petit morceau d’amande situé à l’entrée de la branche lingulaire. > Obstruction partielle de la bronche principale gauche Important emphysème obstructif du poumon gauche avec déviation médiastinale vers la droite (inspiration). À l’expiration, la déviation médiastinale s’accentue par expulsion de l’air du poumon droit (obscurcissement expiratoire), tandis que l’air piégé à gauche est majoré. Il s’agissait d’une obstruction partielle de la bronche principale gauche par projectile de sarbacane. > Un Diagnostic trop tardif Atélectasie du poumon gauche avec importante rétraction pulmonaire (l’axe vertébral n’est plus masqué par le bord droit du cœur). Il s’agissait d’un corps étranger bronchique méconnu inhalé trois mois plus tôt. Extraction en totalité, mais beaucoup trop tardive. Au-delà de quinze jours d’inhalation, les corps étrangers situés dans la bronche principale gauche exposent à une destruction parenchymateuse. Le scanner thoracique de cette patiente montre une rétraction pulmonaire avec images claires de bronchectasies en son sein. Avec un recul de quinze ans, cette enfant a développé une hypoplasie de l’hémithorax gauche et une scoliose. 66 numéro 223 2 vendredi 17 janvier 2 0 03 > La cacahuète Chez un enfant de 4 ans ayant présenté un syndrome de pénétration typique au cours d’un apéritif familial. Sur la radiographie en inspiration, strictement de face, il existe une petite asymétrie de transparence : hyperclarté pulmonaire droite sans distension. Même patient (à droite) : il s’agissait d’un gros morceau de cacahuète situé à l’entrée de la bronche principale droite. Hypersécrétion bronchique réactionnelle. > Piège Un trombone sur la table de radiographie se projette dans la région trachéale sous-glottique. > Quand un corps étranger mime un asthme Examen tomodensitométrique du thorax chez une enfant de 8 ans, traitée sans aucun succès depuis neuf mois pour asthme par association de corticoïdes inhalés et de bêta2-stimulants de longue durée d’action. Le pneumologue consulté décèle une asymétrie auscultatoire au niveau de la base gauche : murmure vésiculaire diminué et petit wheezing. Il pense avec raison à un corps étranger mais demande un scanner : hyperclarté avec distension du lobe inférieur gauche. L’endoscopie lui donne raison : projectile de sarbacane troué qui permettait une ventilation. numéro 223 2 vendredi 17 janvier 2 0 03 7