Management L`approche du risque : raison et sentiments

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Management L`approche du risque : raison et sentiments
Thématique RH - Management
L’approche du risque : raison et sentiments
Entreprendre, c’est risquer : chacun le sait. Surtout en des temps où les marchés sont de plus en plus
tendus ; où les situations financières et professionnelles présentent un caractère fragile ; où les
déréglementations internationales affectent tous les niveaux d’entreprises dans certains secteurs.
Le risque : une notion commune un peu vague
La difficile question de la prise de risque a ainsi acquis un relief tout particulier, au fil du temps. Du "risque
industriel" aux réflexions actuelles sur le développement durable, du risque économique aux pratiques
devenues courantes de "capital risque", de la création d’entreprise au difficile "choix des hommes", des
questions d’assurances à celles des portefeuilles boursiers, la notion de risque est aujourd’hui employée
en des sens fort différents ; elle a cependant, dans tous les cas, acquis une spécificité que son étymologie
– resecum : ce qui coupe, d’où écueil – ne suffit plus à expliquer.
Dans le sens traditionnel – qui prévaut encore dans l’usage courant que l’on en fait en privé – le "risque"
est un danger, un péril "dans lequel entre l’idée de hasard", comme le fait remarquer le dictionnaire Littré. Il
est donc inévitablement lié à une certaine appréhension, une certaine peur, même si une connaissance
plus approfondie d’un domaine fait parfois parler de "risque calculé". En fait, dans une approche
psychologique, c’est donc le sens d’une incertitude et d’un inconnu qui nous fait parler de "risque", agitant
en nous des sentiments plus ou moins contradictoires.
Business et risque : de l’effort rationnel au talent
Dans le business, en revanche, la notion de "risque" se rapporte à une situation intégrant un certain
nombre d'éléments aléatoires, mais dans laquelle il est possible d'identifier les différentes éventualités et
leur affecter des probabilités objectives.
Cette notion de risque, ainsi définie, se distingue évidement de celle d'incertitude. L’incertitude se rapporte,
d'une manière générale, à des circonstances dans lesquelles on ne peut discerner raisonnablement
l'ensemble des possibles, ni par conséquent leur attribuer de probabilités objectives. Maladie ou accident
par exemple, ne relèvent pas habituellement d'un calcul de "risque", en ce sens.
L’incertitude existe cependant ; mais un décideur va tenter de ramener l'incertitude au "risque", en
s'appuyant sur une appréciation plus subjective des circonstances de son action. Il peut alors encore
distribuer des probabilités sur les conséquences qu'il envisage. La juste mesure du risque fait ainsi partie
intégrante de son talent, et lui vaudra la reconnaissance d’une compétence rare.
Ce talent repose notamment sur la qualité des informations dont il dispose et sur l'équilibre optimal qu'il
opère entre le gain espéré et le risque encouru, soit en maximisant le gain pour un risque donné, soit en
minimisant le risque pour un gain donné. Etant partie prenante de la décision, le décideur ajoute de la sorte
à son calcul décisionnel des probabilités subjectives lui permettant d'évaluer les situations de risque en
fonction de son propre positionnement.
Il convient d'ajouter ici que tous ces éléments se nouent de manière sensiblement différente en fonction du
type de risque dont il s'agit Dans certains cas, le décideur pourra disposer de ratios déjà établis ; dans
d'autres cas, il devra utiliser les techniques de modélisation matricielles d'aide à la décision pour construire
son propre calcul.
L’anticipation du risque
En réalité, dans la plupart des décisions complexes, la distribution des probabilités porte sur des
évènements futurs et ne peut par conséquent être connue à-priori. Nous nous trouvons alors le plus
souvent dans des situations dans lesquelles l’interaction complexe des environnements ne permet pas
d’expérimenter le caractère reproductible d’une décision ; la mesure en est alors essentiellement
subjective.
On pourrait penser que l’expérience acquise, ainsi que l’histoire, permettent d’établir l’observation de
principes propres à déterminer des critères extrapolables au futur. Mais il reste que cela ne permet pas la
répétition d’une expérience aléatoire, puisque aucune de ces expériences et de ces évènements, par
définition, ne sont reproductibles dans les circonstances exactes de leur déroulement originel. Les rapports
des moyens aux fins peuvent, certes, supporter une certaine comparaison, mais la variété et la complexité
indéfinie des circonstances de tous ordres en rend l’adaptation indécidable à priori.
Risque et stratégie
Le processus de décision peut alors encore intégrer un calcul rationnel des risques, à condition de ramener
le champ de réflexion aux seules conséquences envisagées de la décision – ce que permet uniquement
une analyse stratégique pertinente – et de construire une distribution de probabilité sur ces conséquences.
Cette distribution ne pouvant s’appuyer sur une base statistique objective, le décideur définit lui-même la
distribution de probabilité sur les résultats possibles de son action ; il la définit en fonction de ses
informations et de son intuition ; il la définit même en tenant compte de l’influence de son propre
positionnement et des perturbations qu’il introduit dans la réalité observée.
Une fois de plus, nous sommes en mesure de constater que le véritable nerf de la guerre, c’est
l’information, le renseignement. Les systèmes de gestion de l’information et de management des
connaissances sont à cet égard déterminants, même s’ils ne suffisent pas en eux-mêmes.
La décision ultime : une affaire d’homme
La juste mesure du risque ne saurait en effet faire abstraction de la variété des comportements des
décideurs face au risque ; ils doivent être pris en compte comme facteurs psychologiques et sociologiques
de la décision. La palette va de l'aversion, qui consiste à moins craindre l'erreur que le risque, à la
propension, qui consiste à vouloir tout ou rien.
Mais une fois sorti du raisonnement, une fois "reconnecté" à sa réalité psychologique, il reste l’incertitude et
l’appréhension, quoi qu’on y fasse. C’est alors la maturité et la solidité des hommes qui sont, en derniers
ressorts, les facteurs déterminants de l’absorption – ou non – des risques.

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