Forum Nature et Progrès

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Forum Nature et Progrès
26/08/2014
Forum Nature et Progrès
Nature & Progrès et l'autonomie
L'autonomie dans la vie de chacun
Les exemples de collectifs ou de systèmes mettant déjà en œuvre des formes d'autonomie
Tour de présentation
« Qu'est-ce que l'autonomie pour vous ? »
« En tant que producteur, l'autonomie, avant toute chose, c'est l'autonomie financière. Ensuite, on
peut aller vers d'autres formes d'autonomies. Si on reste dans le système bancaire, il est impossible de
s'en sortir.
-L'agroécologie paysanne est un terme à utiliser, il renvoie directement à la notion d'autonomie.
-Dans Nature et Progrès, au-delà du cahier des charges, il y a une charte qui prend en compte le
fonctionnement global de la ferme : origines des matières premières, organisation, conditions de
travail,...
-Pour les visites dans les fermes, il y a la boussole NEZO.
-Ne confondons pas autonomie et autarcie. L'autonomie, c'est la possibilité de choisir, et non pas
une indépendance totale comme l'autarcie. Aux débuts de Nature et Progrès et jusque dans les années
1990, l'objectif de l'organisation n'était pas l'autonomie, mais d'inventer un mode de production qui
n'existait pas (ce qui était en soi un acte d'autonomie). Il s'agissait de répandre ce mode de production.
Depuis la création du label européen Agriculture Biologique (AB), le questionnement ne se pose plus
de la même manière. Maintenant, il ne s'agit plus principalement de répandre ce mode de production,
mais de se positionner par rapport à d'autres labels bio. Il y a une problématique réglementaire et
institutionnelle. Quels sont les rapports entre Nature et Progrès et les autres ? Est-ce que ces derniers
incarnent d'autres types d'autonomies qui pourraient être complémentaires ? Il y a donc un
renversement de la focalisation sur l'invention et la diffusion d'un mode de production, vers des débats
sur son implantation politique, et des enjeux fonciers.
-La SCIC (Société Coopérative d'Intérêt Collectif) « alter conso » de Lyon travaille sur le lien entre
producteurs et consommateurs. Ses membres ont un fonctionnement intéressant.
-Avec le changement qui a eu lieu dans Nature et Progrès il y a 30 ans, au niveau des contrôles, on a vu
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se mettre en place des réseaux d'interconnaissance et d'entraide.
-Pour précision, Nature et Progrès met en place un système participatif de garantie. C'est un système de
contrôle autonome où il n'y a pas d'échange marchand.
-Il y a un paradoxe : à son origine le label européen AB s'est inspiré du cahier des charges de Nature et
Progrès, et aujourd'hui, tous les produits Nature et Progrès ne sont pas autorisés à être vendus en
biocoop.
-Est-ce que vous avez l'intention d'augmenter les ventes de produits Nature et Progrès ? Parce que je
trouve que le logo n'est pas très visible, le label pas facilement identifiable par les consommateurs.
-En 2010, Nous avons décidé de l'abandon de Nature et Progrès AB pour la discrétion. Effectivement
si les produits Nature et Progrès ne sont pas également certifiés AB, d'après des réglementations ils ne
peuvent pas être vendus en biocoop.
-L'autonomie, c'est pour moi la capacité sur un territoire à se faire à manger. Donc il faut des
producteurs. L'autonomie alimentaire sur un territoire passe d'abord par l'installation de paysans.
C'est pour ça qu'il n'y a pas plus de produits Nature et Progrès.
-Au cours de l'évolution de Nature et Progrès, il y a eu beaucoup de départs d'adhérents, notamment les
producteurs laitiers. Avec la création du label européen AB, les producteurs qui avaient les certifications
Nature et Progrès et AB avaient une surcharge de contrôle, donc beaucoup ont quitté Nature et
Progrès. On a perdu 1500 adhérents en 2, 3 ans.
-Le problème, c'est que la plupart des gens ne savent pas que Nature et Progrès est une certification
d'agriculture biologique.
-Aujourd'hui, on a quand même jamais été un aussi grand nombre de producteurs dans Nature et
Progrès. Il y a beaucoup de groupes locaux.
-En Auvergne, en 4, 5 ans, on est passé de 6 ou 7 à 46 ou 47 producteurs avec la mention Nature et
Progrès. Après, il y a l'agriculture, mais il faudrait aussi prendre en compte l'artisanat rural, les
transformateurs : brasseurs, savonniers,... Il faut que l'on ait une nouvelle approche de la ruralité.
-Sur la relation entre AB et Nature et Progrès, il y un enjeu financier. Comme Nature et Progrès n'est
pas reconnu officiellement comme mention d'aliments biologiques, il faut s'allier avec AB pour obtenir
les subventions dédiées aux producteurs d'agriculture biologique.
-L'autonomie, en grec cela signifie « celui qui fait lui-même ses lois ». C'est intéressant de voir qu’un
collectif crée ses règles pour faire ensemble.
-Mais comment peut-on arriver à vivre cette autonomie dans cette société ? Je ne me donne pas le droit
de retirer mes enfants de la société. Mon choix est de vivre dans un lieu collectif auto construit. Je
produis mon alimentation. Est-ce qu'on peut appeler agriculteur une personne qui produit juste pour
l'autonomie de sa famille ? Pour ce qui est de l'autonomie alimentaire en général, beaucoup de
personnes n'ont pas le temps de faire leur jardin, et d'ailleurs ne savent pas faire. Il y a eu une perte de
savoir-faire.
-Je vais parler de l'autonomie en Vallée Française. Moi, je suis autonome quand je respire. Aujourd'hui,
l'air est gratuit. Même l'eau est payante ! J'ai encore l'autonomie sur ma vie, ma conscience. Je n'ai pas
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l'autonomie pour le jardinage. Pour l'électricité non plus : j'ai des panneaux solaires, mais c'est pas moi
qui les fabrique. Tous les lundis, on se réuni, on va chez les uns et les autres et on donne un coup de
main. Ce sont des chantiers participatifs. Le lien social, c'est super important .
-L'autonomie, c'est le droit de choisir. Le consommateur a le droit de choisir par lui-même (pas de
harcèlement publicitaire de la part de Nature et Progrès par exemple). Mais ce n'est pas l'autarcie. Tout
le monde ne peut pas cultiver.
-Les grandes villes, et notamment le projet Grand Paris, concentrent beaucoup de personnes, ce qui
entraîne selon moi de la violence. Il est nécessaire de construire des villes à la campagne. Il y a
beaucoup de friches industrielles, de maisons abandonnées, … Pourquoi ne pas reprendre ce qui a été
abandonné, plutôt que de construire encore ?
-Concernant les petits paysans, l'idéal est de réduire sa production et son temps de travail pour vivre
mieux.
-Nous occupons une ferme près de Rouen. Il y a plein de sites, plein de zones de lutte. Il y a des zones
vivables et cultivables disponibles. On attend des gens pour redonner vie à ces zones laissées pour
compte.
-Le mot 'autonomie' me dérange. J'ai vu beaucoup de solitude chez les producteurs dans les
Cévennes. J'ai envie d'être dépendant, mais de choisir ma dépendance. 'L'autonomie c'est savoir qu'on a
besoin des autres'.
-J'ai participé à une rencontre à Dardilly, qui a donné lieu à l'écriture d'un manifeste. Théorie politique
et économique sur la mutualisation (pour plus de précisions, demander à Arnaud).
-L'autonomie, c'est d'abord dans la tête. C'est progressif. Au niveau matériel : Je vois quand je jette mes
poubelles, que la mienne est très réduite, parce que je fais un compost, je réutilise les cartons, … Mais
beaucoup de personnes ont énormément de déchets. Au niveau intellectuel : je ne regarde pas les
émissions que tout le monde regarde à la télé, et je participe à plusieurs revues. Nous manquons de
collaborateur bénévoles. C'est là qu'est l'autonomie : se détacher du modèle dominant, et s'engager
concrètement, par exemple en devenant collaborateur bénévole sur le long terme.
-En Afrique ou dans d'autres sociétés ailleurs, il y a le droit coutumier sur la terre. En créant une
nouvelle organisation rurale (par exemple avec la mutualisation qui a été évoquée, ou la propriété
d'usage et l'abolition de la propriété telle qu'elle existe aujourd'hui), on avance vers ça, un droit
coutumier sur la terre.
-En Espagne, il y a de beaux exemples d'autonomie avec les coopératives intégrales. Ce sont des
collectifs où il y a mutualisation financière et foncière. Avec la complémentarité des spécialités de
chacun, on arrive à l'autonomie. Il faut aussi reprendre les formes de culture et de dynamisme de la ville
à la campagne. Ça évite la solitude, ça fait vivre cette nouvelle campagne à travers des échanges, des
réseaux, des liens sociaux.
-Dans le futur, ce serait bien qu'il y ait plus de liens entre ville et campagne. Les personnes habitants
dans les villes pourraient venir aider les campagnes, et celles-ci pourraient offrir l'accueil. Il pourrait y
avoir des échanges à travers des chantiers collectifs.
Pour moi l'autonomie, ça a été notamment de choisir de ne plus recevoir d'aides sociales de l’État. On
peut minimiser à fond nos besoins, et cela nécessite de se lier de plus en plus aux autres. On peut
aussi aller aider directement les agriculteurs, y aller en groupe.
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-Pour parvenir à l'autonomie, y a le problème du déplacement : on est tous en voiture, camion …
Pourquoi ne pas fabriquer une voiture qui nous ressemble ? Ça pourrait être un gros projet pour les 50
prochaines années.
En ce qui concerne les agriculteurs, ils n'ont pas que ça à faire de se construire un rocket stove, … Il
faudrait créer une liste avec les personnes à contacter pour tel ou tel problème. On pourrait équiper les
paysans en matériel autonomisant, parce qu'ils n'en ont pas le temps. Les gens sont prisonniers du
système, dans la tête, mais aussi matériellement. Fournir aux paysans du matériel autonomisant, ce
serait une grande avancée.
-On a de belles images dans d'autres sociétés, d'autres théories politiques. Par exemple, l'éco
sociétalisme. Il n'y a jamais de rémunération de la matière première, seulement le travail est rémunéré.
-En tant que consommateur, il est important de se dégager de l'idéologie de consommation et de
gaspillage. En zone urbaine, on voit le développement de jardins partagés. En terme d'autonomie, les
gens font leur compost, échangent des semences. Peut-être qu'il y aurait un lien à développer entre
Nature et Progrès et ces jardins partagés. Il faut aussi continuer la réflexion sur la souveraineté
alimentaire. Elle demande une relocalisation de la production. Selon les lieux, il y a des manques
dans la production.
-Oui, aujourd'hui il y a une forte spécialisation des territoires (par exemple la viticulture). Il faut
diversifier la production locale.
-Pour moi, l'autonomie est aux niveaux : >personnel : produire sa nourriture et cuisiner, réduire ses
besoins, réduire ses déchets. > en groupe : s'associer pour diversifier la production locale. Favoriser les
nouvelles installations. > en société
-En éducation populaire sur l'alimentation auprès d'adultes, on observe que les gens ne se rendent pas
compte du pouvoir qu'ils ont dans le choix de ce qu'ils achètent. S'interroger sur comment aborder les
'questions socialement vives', les OGM par exemple, auprès des ados, pour les amener à s'interroger.
-En ce qui concerne les échanges entre villes et campagnes, il y a le woofing, qui est en danger et qui est
un système d'échanges qui marche bien.
-En France on voit la création de nombreux nouveaux collectifs de paysans. Il y a un besoin de
réapprendre les savoir-faire de la production de semences.
-Pour rappel à propos de l'autonomie alimentaire, il y avait des échanges de denrées alimentaires à
grandes échelles même avant Jésus-Christ.
Il y a une différence de mondes, de façons d'être et de vivre incroyable. L'autonomie, c'est la
possibilité de choisir. Alors pourquoi pas ne pas laisser ceux qui ne veulent pas vivre comme nous faire
leur propre choix ?
-Chaque producteur essaie de répondre à ses besoins. La mutualisation permet aux producteurs de
répondre ensemble à leurs besoins. Mais cela peut devenir trop contraignant : réunions, chantiers
participatifs, etc... On n'a plus de temps pour soi, pour sa famille. Il y a nécessité de se coordonner : et
que certaines personnes s'engagent à gérer tel ou tel aspect des échanges et des réponses aux besoins.
-Il y a des savoir-faire qui se perdent. Par exemple la traction animale pour le labour. Il reste 2 joûtiers
en France, il faut sauvegarder le patrimoine du joût de travail en France.
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-Nature et Progrès pourrait travailler sur la question de fournir du matériel autonomisant aux paysans, à
travers le travail d'artisans. Il y a besoin de bricoleurs.
-En France, il y a environ 2000 adhérents à Nature et Progrès. En Belgique, il y en a 6000. Pourquoi et
écart ?
-Peu de producteurs parlent de Nature et Progrès et proposent des plaquettes lorsqu'ils vendent leurs
produits.
-La Belgique est un petit territoire, les personnes sont plus aisément en lien grâce à la proximité. Il y a
multiplication des expériences collectives. En France, nous sommes répartis sur un plus grand territoire.
C'est pour cela qu'il y a besoin d'une vie fédérale, de dynamisme dans les groupes locaux, puis ensuite
de liens entre les groupes. Il faut aussi avancer ensemble, et mener des actions collectives qui nous
réunissent tous.
-Pour accéder à l'autonomie, il faut être dans l'action. Être en collectif, mener des actions associatives.
On peut acquérir une force sociétale, et mener aussi des actions de lutte et de résistance. »
Rapporté par Amandine
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