La dynamique de la pauvreté en Algérie

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La dynamique de la pauvreté en Algérie
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La dynamique de la pauvretéen Algérie
Par Bachir Boulahbel1
INTRODUCTION
Le phénomène de la pauvreté est devenu une préoccupation
universelle. Au point oùil est inscrit comme la première priorité
dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD).
Ce grand intérêt pour cette question, qui n’est pas nouvelle, est
lié, notamment, à l’échec dans la plupart des pays du Sud des
stratégies de développement adoptées au cours des dernières
décennies, et mises en œuvre à travers les programmes
d’ajustements structurels. Globalement, les objectifs de
croissance qui devaient résulter de ces programmes, pour ensuite
permettre un développement social, n’ont pas été atteints. Les
conséquences ont été la détérioration des conditions de vie de
larges couches des populations, le creusement des inégalités et
l’extension de la pauvreté. Les politiques de développement, en
accordant une prioritéimportante àce dernier paramètre, se sont
mues en politique de lutte contre la pauvreté, induisant un
besoin croissant de connaissance du phénomène. La recherche
dans ce domaine s’est développée de façon vertigineuse à cause
à la fois de son expansion et du caractère, admis, de sa
multidimensionnalité.
Ce mouvement général a concerné, évidemment, l’Algérie.
Les réformes engagées àpartir du milieu des années 80, visant
l’instauration d’une économie de marché, se sont traduites au
milieu des années quatre vingt dix, en particulier, par une
dégradation du niveau de vie général de la population. Le besoin
de connaî
tre la nature et la mesure de l’impact social de ces
réformes a justifié la première étude d’envergure nationale sur la
pauvreté publiée en 1999 2 . L’organisation d’une conférence
1
2
Ingénieur Economiste.
Elle a été menée par la Banque Mondiale sur la base de l’enquête Consommation
des ménages de 1988 et d’une enquête ménages de type LSMS de 1995 réalisées par
2
nationale sur la pauvreté en 2000 a confirmé l’inscription de la
pauvreté dans les priorités nationales. Depuis, des actions de
lutte contre la pauvreté ont été mises en œuvre, et différentes
études et analyses, selon des méthodologies variées, ont été
effectuées sur ses caractéristiques et sur son évolution.
Ce document restitue les travaux sur la pauvreté dont les
résultats sont utilisés par les pouvoirs publics pour évaluer leurs
politiques économique et sociale, et pour répondre aux besoins
en statistiques des institutions internationales. C’est le cas
principalement du PNUD pour son Rapport Mondial sur le
Développement Humain (annuel) et les rapports annuels sur le
suivi des OMD.
Les études prises en considération sont celles menées par la
Banque Mondiale en 1999 et portant sur les années 1988 et 1995,
et par le Commissariat Général à la Planification et à la
Prospective (CGPP) pour l’année 2006.
Le document s’articule autour de six sections.
Une première section retrace l’évolution du contexte macroéconomique. Il constitue le cadre général explicatif de
l’évolution de la pauvreté. Une deuxième section présente une
analyse rapide de l’évolution de la consommation des ménages
entre 1988 et 2000, qui constitue un bon indicateur de niveau de
vie. Une troisième section synthétise le concept de pauvreté
ainsi que les approches habituellement pratiquées en matière de
mesure et d’analyse du phénomène. Dans une quatrième section,
l’approche suivie en Algérie pour mesurer la pauvreté, avec la
justification des choix opérés, est explicitée. Les principaux
éléments relatifs à l’évolution entre 1988 et 2000 des mesures et
du profil de pauvreté forment une cinquième section et une
sixième section présente la mesure de la pauvretéen 2006.
Une courte conclusion termine le document.
l’ONS.
3
1 - L’évolution du contexte macro-économique
L’Algérie a entamé, à la suite de la crise des hydrocarbures de
1986, des réformes d’ordre systémique qui ont visé l’abandon
du système de gestion économique et social de type dirigé au
profit d’un système à orientation libérale. Trois périodes,
choisies surtout en raison de la disponibilité de données sur la
pauvreté, peuvent être retenues pour caractériser l’évolution du
contexte macroéconomique.
1.1- La phase 86-94.
Cette phase est marquée par la mise en œuvre de trois
programmes de stabilisation avec le FMI (en 1989, 1991 et
1994), qui ont abouti à un rééchelonnement de la dette
extérieure en 1994. Pour faire face aux déséquilibres tant
internes qu’externes, un ajustement structurel soutenu par les
institutions financières internationales est mis en application.
Les principaux indicateurs économiques et sociaux ont connu,
au cours de cette période, une évolution négative.
La croissance du PIB a été négative sur la période en termes
réels (-3.4%), le revenu par habitant ayant donc sensiblement
baissé(-15.7%);
◊ Le solde global du Trésor a été constamment négatif,
exception faite pour les années 1990 et 1991.
◊ l’inflation a beaucoup augmenté, du fait particulièrement de la
libéralisation des prix et des dévaluations du Dinar effectuées
(+23% en moyenne annuelle entre 1987 et 1994).
◊ le chômage s’est fortement accru, du fait notamment des
pertes d’emplois du secteur public économique engendrées par
sa restructuration, et du ralentissement de l’activité économique:
le taux de chômage est passéde 17 àprès de 25% sur la période
et à28% en 1995.
◊ Le revenu disponible des ménages a baisséde 20% en termes
réels, en raison principalement d’une forte contraction des
revenus salariaux (-38.7%).
4
◊ Les dépenses sociales de l’Etat ont été fortement contenues,
comparativement àla période précédente.
◊ La situation sécuritaire du pays, fortement dégradée, a été
également un des facteurs les plus contraignants.
Ce contexte a entraîné une détérioration des conditions de vie
des ménages, et le phénomène de pauvreté est devenu plus
visible, la pauvretéayant plus que doubléentre 1988 et 1995.
1.2 - La deuxième phase concerne les années 1995 à2000.
Elle se caractérise par une évolution plus favorable des
principaux indicateurs socio-économiques.
Une stabilisation macroéconomique est retrouvée, avec le
rétablissement des équilibres internes et externes. La chute du
baril du pétrole de 1998, d’une ampleur équivalente à celle de
1986, est intervenue comme un test, réussi, de la soliditéde la
stabilisation. Les effets de ce choc de 1998, notamment sur les
équilibres internes et externes, ont pu être contenus grâce aux
résultats acquis à travers le programme de stabilisation, mais
aussi àla réponse de la croissance, et àdes niveaux relativement
importants des volumes d’exportation d'hydrocarbures.
La croissance économique annuelle moyenne est devenue
supérieure au croît démographique. Tous les secteurs d’activités,
dont particulièrement l’agriculture (se rappeler que la pauvreté
était localisée en 1995 à70% dans le secteur rural), le BTP et les
services, qui sont de grands pourvoyeurs en emplois, ont
contribuéàcette croissance.
L’inflation est maîtrisée (+6.3% en moyenne annuelle entre 95
et 2000, mais seulement +2.6% entre 98 et 2000). Parallèlement,
le SNMG a étérelevé3. Les fonctionnaires ainsi que les salariés
3
Le SNMG est passé de 4 000 à 6000 DA entre 1995 et 2000, en augmentation
moyenne annuelle de 13.3, 23.5 et 7.1% en 1997, 1998 et 1999. Relativement à
l’évolution de l’indice des prix à la consommation, le pouvoir d’achat du SNMG
s’est amélioré de 10.5% entre 1995 et 2000. Cette évolution favorable s’est
certainement répercutée sur les bas revenus indexés sur le SNMG, comme les
pensions de retraite inférieures à 75% du SNMG, les indemnités de l’assurance
5
des secteurs à forte activité économique (énergie, banques et
assurances, services aux entreprises et aux ménages, différentes
branches industrielles, notamment appartenant au secteur privé)
ont également bénéficié de variations des revenus salariaux
supérieures à l’évolution du coût de la vie. Les entrepreneurs
individuels ont aussi tiréavantage des retombées de la reprise de
la croissance; tout cela a permis de contenir la dégradation du
pouvoir d’achat de la population4.
Le taux de chômage, officiel, s’est stabilisé, malgré les
nombreux licenciements en milieu de période dus à la
restructuration du secteur public économique, mais il amorce
une baisse en fin de période; cette stabilisation résulte, en partie,
de l’impact en termes de créations d’emplois du budget
d’équipement de l’Etat5 qui a toujours visé la réduction des
disparités existantes en matière d’équipements collectifs ainsi
que, pour ces dernières années, la réparation des dégâts causés
par le terrorisme (celui-ci a touchéplus durement les zones les
plus pauvres). La reprise de la croissance et les programmes
d’activités tournées vers la création d’emplois au profit de
populations particulières (jeunes, familles sans revenus) et ou de
chômage, les salaires fixés au niveau du SNMG (en particulier ceux servis par le
secteur privé structuré). L’impact du relèvement est donc probablement positif sur
les plus pauvres.
4
Les revalorisations des allocations familiales et de la prime de scolarité en 1996,
conséquentes pour les salariés touchant moins de 15 000 DA/mois, l’augmentation
moyenne annuelle de 6.7% des salaires pour chacune des années 1997 et 1998, l’effet
report et les dispositions prises dans la loi de finances pour 1999 en matière de
réduction sur l’IRG, associées à la baisse importante de l’inflation (+0.34% en 2000)
ont permis un certain rattrapage du pouvoir d’achat des personnels de la fonction
publique (au nombre de près de 1 400 000).
Le revenu des entrepreneurs individuels a progresséde 25% en termes réels entre
1995 et 2000. Même si la variation des effectifs n’est pas bien cernée, il est certain
que la situation économique de cette catégorie de citoyens a évolué positivement.
Pour les travailleurs du secteur public économique (au nombre moyen de 400 000
en 2000), un rapport des holding soumis àla tripartite de novembre 2000 fait état
d’une variation de 30% du salaire moyen entre 97 et 2000, largement supérieure
àcelle de l’IPC sur la même période (+8%).
5
Le budget d’équipement de l’Etat a augmenté de 10% en volume en moyenne
annuelle entre 95 et 2000 (déflateur utilisé: le déflateur de la VA de la branche
BTP en raison de la prédominance des projets de BTP dans les programmes
d’équipements de l’Etat)
6
zones particulièrement défavorisées ont également influésur le
niveau de l’offre de l’emploi.
Le revenu disponible des ménages est en hausse en termes réels
de 20% sur la période; la dépense de consommation par tête des
ménages s’en est améliorée, comme cela est analysé ci-dessous;
Les ressources budgétaires destinées aux secteurs sociaux sont
en progression (+105% sur la période en termes réels)6;
Au plan global, l’état de santé de la population est en
amélioration. La plupart des indicateurs y afférents ont évolué
positivement entre 1995 et 2000.
Ainsi, l’espérance de vie à la naissance a augmenté, passant de
71.7 en 1998 à72.5 en 20007.
Le taux de mortalitéinfantile a continuésa tendance àla baisse
(37.4 décès pour mille naissances vivantes en 1998 et 36.9 en
2000).
En matière de nutrition, une réduction des prévalences de
l’insuffisance pondérale (poids/âge) et de l’émaciation
(poids/taille) s’est opérée entre 1995 et 2000. Par contre, la
prévalence du retard de croissance (taille/âge) s’est détériorée
sur cette période (11% en 1995 et 18% en 2000); cette
détérioration provient du milieu urbain dont la prévalence a
augmenté de près d’un tiers, alors qu’elle a baissé de 15% dans
le rural.
Pour ces trois indicateurs, la sévérité de la malnutrition est, au
regard des critères habituellement adoptés8, considérée comme
basse.
Des disparités entre l'urbain et le rural continuent d’être
observées, ce dernier accusant en général un retard. La tendance
générale est cependant àsa réduction.
Au niveau du secteur de l'éducation, l'autre grand secteur social,
6
Source: Les transferts sociaux. Evolution des dispositifs régissant les principales
actions sociales de l’Etat. Ministère des Finances. Février 2002.
7
In «Données statistiques». N°375. Démographie Algérienne 2002. ONS.
8
La sévéritéde la malnutrition est jugée basse quand la prévalence de ces indicateurs
est inférieure à 20% pour le retard de croissance, à 10% pour l’insuffisance
pondérale et à 5% pour l’émaciation. In EDG 2000.INSP.Ministère de la Santé.
7
les principaux indicateurs ont également évoluéàla hausse. Il en
est ainsi du taux de scolarisation des 6-15 ans qui est passéde
87.6% à près de 90% entre 1995 et 2000. Cette progression
découle, en grande partie, de l'effort de construction
d'infrastructures éducatives dont le nombre a cru de 9% sur la
période, d'une part, et, d'autre part, d'une plus grande prise en
charge en matière de cantines scolaires (le nombre de
bénéficiaires a quasiment doublé (93% d'accroissement)),
d'octroi de bourses et de transport scolaire. Les efforts ont été
principalement faits en direction des zones et populations les
plus défavorisées. Néanmoins, des disparités régionales
subsistent encore.
Ces progrès sont étroitement corrélés aux ressources financières
en investissement et fonctionnement octroyées au secteur de
l'éducation qui, bien qu'ayant augmenté beaucoup moins vite
que le PIB (le ratio Dépenses de l'éducation / PIB a déclinéentre
95 et 2000), ont enregistré, en moyenne annuelle, une hausse de
3% en volume (rythme largement supérieur à celui de la
population).
L’équilibre financier du système de sécurité sociale, qui reste le
pilier central de la protection sociale, s’est consolidé, en partie
grâce à la prise en charge par l’Etat des dépenses relevant de la
solidariténationale, précédemment imputées au système.
1.3 - La période 2000-2006.
Elle se caractérise par une poursuite du redressement
économique global. Le programme de soutien à la relance
économique (PSRE), étalé sur la période 2001-2004, et le
programme Consolidé du Soutien à la Croissance (PCSC)
envisagé pour 2005-2009 ont constitué les deux piliers de la
politique économique et sociale de la période. Articulés autour
d'actions destinées à la dynamisation des activités productives
agricoles et autres, au renforcement des services publics dans les
domaines de l'hydraulique, des transports et des infrastructures
et àl'amélioration du cadre de vie, au développement local et au
8
développement des ressources humaines, il s’est soldé par un
taux de croissance en moyenne annuelle du PIB de 4.4%. Ce
résultat est obtenu dans un contexte fortement favorable, avec
une stabilisation macroéconomique confirmée (équilibres
internes et externes consolidés, inflation inférieure à 3% en
moyenne annuelle, réserves de changes record notamment). Un
repli du chômage tangible s’est opéré : le taux de chômage est
évaluéà12.3% en 2006, contre près de 29% en 2000 (une partie
de cette baisse spectaculaire a probablement pour origine une
meilleure captation de l’emploi informel). La consommation des
ménages, traduction d’une évolution très favorable du revenu
disponible des ménages (près de 46% sur la période en volume),
a progressé en moyenne annuelle de près de 4.0%, rythme le
plus élevé depuis le milieu des années quatre vingt. En outre,
tous les indicateurs suivis dans le cadre des ODM ont évolué
favorablement,
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il paraît indéniable que la
situation économique et sociale globale du pays s’est améliorée
depuis 1995, et que les retombées sur le phénomène de pauvreté
ne peuvent être que positives, comme cela va être confirmécidessous.
Evidemment, la demande sociale non satisfaite est encore
importante, avec un taux de chômage, officiel, encore élevé et
associé à un sous-emploi étendu, un déficit en logements
toujours préoccupant, des disparités régionales et entre
catégories de population en matière de bien être souvent assez
creusées.
Tableau 1 Evolution des principaux indicateurs macroéconomiques de
niveau de vie en (%) selon les périodes 87-94, 95-2000 et 2000-2006
PIB
PIB/habitant
Variation
en
volume
en
moyenne
annuelle sur la
période 87-94
Variation
en
volume
en
moyenne
annuelle sur la
période 95-2000
-0.5
-2.4
+3.1
+0.9
Variation
en
volume
en
moyenne
annuelle sur la
période
20002006
4.4
+2.8
9
Consommation -4.6
+1.3
2.4
des ménages /
tête
Revenu
-5.5
+3.7
+6.5
disponible
des ménages /
habitant
Revenus
0,5
+1,1
5,4
salariaux
Inflation
+19.6
+6.3
2.6
Source: Notes de conjoncture du CGPP et Comptes économiques de l’ONS.
2 - Dépenses de consommation.
Les dépenses de consommation des ménages constituent un
indicateur de la distribution de la richesse nationale. Il est en
général admis que leur augmentation, si elle est associée àune
réduction de l’inégalitédans leur répartition entre les ménages,
entraîne une baisse de la pauvreté. Ce paragraphe procède à
cette analyse pour l’année 2000.
Les dépenses de consommation des ménages se sont élevées en
2000 à 1.531 milliards de DA et représentent près de 38% du
PIB.
Les ménages urbains accaparent 65% de ces dépenses mais la
population urbaine constitue 58,3% de la population totale. Ces
proportions étaient respectivement de 52,6 et 47,3% en 1988.
Les dépenses consacrées par les ménages aux produits
alimentaires représentent près de 45% des dépenses totales,
contre 52.5% en 1988. Ce recul de la part des dépenses
alimentaires, qui équivaut en corollaire àune augmentation de la
part des dépenses non alimentaires, pourrait traduire une
amélioration du niveau de vie général de la population.
Par rapport à 1988, la dépense par tête au niveau national, en
termes réels, c’est-à-dire en éliminant l’effet inflation, a baissé
de 3,7%. Cette baisse est toutefois le résultat de deux évolutions
contrastées : une détérioration entre 1988 et 1995 de 7,8%,
toujours en termes réels, et une amélioration de 4,4% entre 1995
et 2000.
10
En termes de distribution des dépenses de consommation,
l’enquête a montré une réduction globale des inégalités entre
1988 et 2000: l’indice de GINI, qui est l’indice le plus calculé
pour évaluer l’inégalité, est ainsi passé de 0,4036 en 1988 à
0,3690 en 2000 (il peut être utile de rappeler que moins l’indice
est élevé et plus l’inégalité est réduite).
Cette amélioration au plan des inégalités est plus prononcée en
milieu rural dont l’indice de Gini est passé de 0.4067 à 0.3409 (6%), que dans l’urbain où il a varié de 0.3840 à 0.3774 (-1.7%).
De même, et s’agissant des dépenses moyennes par habitant, il
est ànoter:
le rapport de la dépense moyenne du 1er décile à la moyenne
nationale est d’environ 1/3 en 2000, contre 0,26 en 1988 ; par
contre, celui du 10ème décile à la moyenne nationale s’établit à
2,85 en 2000, contre 3,3 en 1988 ;
le rapport de la dépense moyenne par tête des 10% les plus
favorisés de la population (décile 10) àcelle des 10% les moins
favorisés (décile1) est de 9 en 2000, alors qu’il était de près de
13 en 1988.
La réduction des inégalités qui ressort de ces éléments peut
s’expliquer, du moins en partie, par le fait que le système des
subventions généralisées qui prévalait encore en 1988 était
porteur aussi d’inégalité dans la mesure où l’accès aux biens de
consommation était meilleur pour les ménages les moins
défavorisés. Par exemple, pour certains produits alimentaires,
les ménages du décile dix (10) bénéficiaient de quatre (04) DA
de subvention, contre un seul DA pour les ménages du décile un
(01) 9 , et probablement faisaient un plus grand gaspillage. La
suppression des subventions et les augmentations de prix qui ont
suivi àpartir du début des années quatre vingt dix auraient ainsi
contraint les premiers àréduire davantage leurs dépenses.
A la lumière de ces données sur l’évolution des dépenses de
consommation et des inégalités, il ressort que le niveau de vie
9
Voir à ce sujet l’étude réalisée par le CREAD intitulée «Etude de l’incidence de la
subvention aux consommateurs»pour le compte du CNP.
11
des ménages en 2000 s’est amélioré par rapport à 1995, tout en
restant légèrement en deçàde la situation de 1998.
La pauvreté ne peut, dans ces conditions, que se réduire. C’est
ce qui va être confirmédans ce qui suit.
Auparavant, il est nécessaire de définir les choix faits en matière
de définition du concept de pauvreté et des méthodes de sa
mesures.
3 - Le concept de pauvretéet les méthodes de mesures
Le caractère multidimensionnel de la pauvreté fait l’objet d’un
consensus très large. En reprenant les experts du Comitéd’aide
au développement de l’OCDE, on peut en effet dire que le
phénomène peut être appréhendésoit:
♦ en termes monétaires, en prenant en compte les dépenses de
consommation et de revenu des ménages. La pauvretése définit
alors par rapport àun seuil de pauvreté;
♦ en termes d’accès à la satisfaction des besoins sociaux de base
(en matière d’éducation, de santé et de nutrition). C’est cette
approche qu’utilise notamment le PNUD en calculant l’indice de
développement humain (IDH) ou l’indice de pauvreté humaine
(IPH);
♦ en termes de possession d’actifs par les ménages: capital
naturel (terre, eau, ressources environnementales), capital
humain (les connaissances, l’aptitude au travail, la santé), capital
physique (patrimoine des ménages, accès aux infrastructures de
base et aux moyens de production), capital social (liens de
solidaritéentre membres de groupes sociaux);
♦ en termes de fonctionnement social: capacité d’agir,
d’exprimer ses opinions et de faire face aux obligations sociales
et culturelles notamment.
On retrouve bien dans ces aspects trois dimensions: économique
(pauvretémonétaire, pauvretédes conditions de vie et pauvreté
des potentialités ou de capacités), sociale et politique. Ces
différents aspects restent articulés entre eux.
Le recours à l’un ou l’autre de ces niveaux de définition de la
12
pauvreté, séparément ou simultanément, est évidemment
directement lié à la disponibilité de sources d’information
adéquates et aux objectifs poursuivis en matière de stratégie de
lutte contre la pauvreté. Ainsi, en général, les pays en
développement, qui disposent de systèmes d’information plus ou
moins élaborés et qui ont des niveaux de pauvretéétendus, ont
davantage tendance à analyser la pauvreté à travers une
approche monétaire. Celle-ci constitue l’approche la plus facile
à mettre en oeuvre (ceci est le cas de l’Algérie). Différentes
méthodes sont utilisées dans ce cadre et elles reposent le plus
souvent sur les concepts de pauvreté absolue et de pauvreté
relative10.
Le premier concept (pauvreté absolue) fait référence à un
indicateur de niveau de vie censé traduire le bien-être des
individus. Un besoin nutritionnel minimum expriméen nombre
de calories par jour et par personne est l’indicateur le plus utilisé.
Les études citées ci-dessus sur la pauvreté en Algérie sont
basées sur un besoin nutritionnel de 2100 calories/jour/personne.
La conversion monétaire du panier de biens alimentaires
permettant d’atteindre cet indicateur donne le seuil de pauvreté.
Sont alors considérées pauvres toutes les personnes qui
dépensent moins que ce seuil.
Le concept de pauvreté relative prend en considération la
distribution d’un indicateur choisi pour refléter le niveau de vie
des ménages. La dépense et ou le revenu sont les plus
fréquemment utilisés. Le seuil de pauvretéest dans ce cas défini
comme le niveau au-dessous duquel se trouve une proportion
donnée (généralement fixée «politiquement») de la population.
L’indicateur peut être:
 la dépense totale par tête (ou par ménage);
 la dépense alimentaire par tête (ou par ménage);
 la dépense par unité de consommation qui intègre le
principe d’économie d’échelle liée à la taille des
10
D’autres approches sont pratiquées, essentiellement dans les pays développés: pauvreté
subjective et pauvretétransitoire/structurelle notamment,
13
ménages et la différence de niveaux de consommation
des membres du ménage selon l’âge; le revenu par tête
ou par ménage.
Les proportions généralement utilisées sont:
 50% de la moyenne des dépenses par habitant;
 50% de la médiane des dépenses par habitant;
 les deux ou trois premiers déciles.
Malgrédes avancées continuelles, notamment au cours des deux
dernières décennies, des faiblesses conceptuelles demeurent
toutefois dans chacun des domaines cités. C’est en cela qu’il est
nécessaire de multiplier les travaux sur les mesures et analyses
de la pauvreté selon la (ou les) approche(s) que le contexte
national permet (ressources allouées aux enquêtes, capacités de
traitement et d’analyse...).
4 - Approche suivie pour la mesure de la pauvretéen Algérie.
Cela concerne la définition de l’indicateur de bien-être, la
détermination du seuil de pauvreté, les indicateurs de mesures
de la pauvreté et le choix de l’approche suivie. Les sources
statistiques sont aussi précisées.
4.1 - L’indicateur de bien être.
Pour les trois études,
consommation/tête.
il
s’agit
de
la
dépense
de
Les dépenses de consommation prises en considération
comprennent toutes les dépenses:
 en produits alimentaires acquis aux fins de
consommation collective;
 d’acquisition d’effets vestimentaires, de meubles, en
moyens de transport, destinés à l’utilisation du ménage,
d’équipements ménagers;
 de transport, de communication, de soins et d’hygiène,
d’éducation, de loisir et de culture;
14


relatives aux services reçus par le ménage
(aménagements et réparations de logement, eau,
électricité, gaz, loyer...). Un loyer fictif est estimé pour
les ménages ayant en propriétéleur habitation;
non alimentaires de cérémonie;
L’autoconsommation des ménages, définie comme l’ensemble
des produits (alimentaires et non alimentaires) prélevés de la
production du ménage pour sa propre consommation ainsi que
les dépenses effectuées à l’extérieur du ménage, sont également
prises en compte.
4.2 - Les sources statistiques :
Les études portant sur 1988 et 2000 se sont basées sur les
données des enquêtes Consommation des ménages de 1988 et
2000, celle de 1995 sur une enquête niveau de vie réalisée en
1995, alors que pour 2006, les données (relatives à la
consommation des ménages) des comptes nationaux ont été
utilisés.
Les trois enquêtes ont traité les volets suivants: les
caractéristiques générales des ménages-les conditions d’habitatl’activité (emploi et chômage)-les revenus (salariaux, transferts,
d’activité et de patrimoine)-l’épargne-les prêts et empruntsl’équipement domestique.
Les volets relatifs aux revenus, épargne, prêts et emprunts n’ont
pas fait l’objet d’analyse.
La comparabilitédes données est élevée pour les trois enquêtes
de consommation de 1988 et 2000 (structure des questionnaires
équivalente), mais elle est relativement plus réduite pour celles
fournies par LSMS. Cela concerne essentiellement :
 la non prise en compte par LSMS de
l’autoconsommation des ménages (ce qui tend à sous
estimer la dépense des ménages et, en corollaire, à
surestimer la pauvreté); par contre, à l’inverse des deux
autres enquêtes, LSMS intègre en plus un modèle sur
15

l’éducation et un autre sur la santé; - la durée de
l’enquête : deux mois de l’été 95 pour LSMS (avec, par
conséquent, un risque d’effet saisonnier non négligeable),
contre une année pour les deux autres enquêtes;
les produits enquêtés ont fait l’objet de regroupements
avec LSMS: 76 groupes produits contre plus de 900
produits pour 88 et 2000.
4.3 - Le seuil de pauvreté
Plusieurs méthodes permettent de le déterminer. Afin de
s’assurer d’une robustesse suffisante du choix de la méthode à
appliquer, neuf (09) modèles, parmi les plus usités, ont étémis
en oeuvre.
► Le seuil est fixé à 50% de la médiane des dépenses par
habitant;
► une proportion de 20% des personnes (correspondant au
deuxième décile) est considérée comme pauvre;
► le seuil de pauvreté pour 2000 est obtenu par une
actualisation du seuil de pauvreté obtenu en 1988 dans l’étude
Banque Mondiale sus-indiquée, en prenant en compte la
variation de l’indice des prix à la consommation des ménages
entre les deux dates;
► l’actualisation du seuil de 1995 est opérée, comme au point 3
précédent;
► le seuil est obtenu par la méthode dite directe (notée M1 dans
la suite du document) qui se base sur un besoin nutritionnel de
2100 calories/jour/personne (ainsi que cela a étéfait pour 1988
et 1995, ce qui renforce la comparabilité des résultats aux
différentes périodes). Deux seuils sont calculés : alimentaire et
de pauvretégénérale.
Le seuil alimentaire est défini comme le niveau de dépenses en
produits alimentaires qui permet àune personne de consommer
2100 calories par jour. Il est obtenu par référence au décile dont
les dépenses alimentaires procurent ce besoin.
Pour le besoin de régionalisation de la pauvreté, comme cela se
16
pratique très souvent, la différenciation entre les deux seules
strates considérées (urbaine et rurale) a été effectuée en tenant
compte de l’écart des prix entre ces strates.
Quant au seuil de pauvretégénérale, il est obtenu en ajoutant à
chaque seuil alimentaire déterminé ci-dessus (urbain, rural et
national) une composante non alimentaire qui soit minimale. Il
est de pratique courante d’évaluer celle-ci en définissant un bien
non alimentaire de base comme étant un bien qu’un ménage
choisit d’acquérir au détriment de la satisfaction de ses besoins
alimentaires de base. La composante non alimentaire représente
donc le niveau de dépenses non alimentaires qu’un ménage, qui
a la capacité de satisfaire au besoin nutritionnel de 2100
calories/jour/personne, accepte de substituer à ses dépenses
alimentaires de base.
L’estimation de la dépense non alimentaire minimale peut se
faire de différentes façons. Elle peut correspondre, à titre
d’exemple, à la moyenne des ratios dépenses nonalimentaires/dépenses alimentaires pour une catégorie de
ménages autour du seuil de pauvreté. Plus habituel est le recours
àun modèle économétrique qui établit une relation entre la part
des dépenses alimentaires dans la dépense totale de chaque
ménage, le logarithme du ratio dépense totale (alimentaire et
non alimentaire) / seuil alimentaire et la composition du ménage
en groupes d’âges. C’est cette deuxième technique qui a été
utilisée pour 88, 95 et 2000.
► Les modèles utilisant les échelles d’équivalence
Ces modèles reposent sur le principe de différenciation des
besoins nutritionnels d’un ménage selon sa composition en
groupes d’âge (les besoins des enfants sont supposés moindres
que ceux des adultes) et sur l’existence d’économies d’échelle
dans le ménage (les besoins ne sont pas proportionnels au
nombre de personnes). L’indicateur de bien être considéré est la
dépense par équivalent adulte (ou par unitéde consommation).
Trois modèles ont ététestés pour 2000:
17
Le modèle (noté M2 ci-dessous) utilise une échelle
d’équivalence dite d’Oxford. Il procède de la même démarche
que la méthode directe ci-dessus, mais considère qu’un individu
âgéde moins de 14 ans a des besoins nutritionnels inférieurs de
50% à ceux du chef de ménage et que ceux d’un adulte
supplémentaire (âgé de 14 ans et plus) en constituent 70%; il
stipule en outre une absence d’économie d’échelle (la taille des
ménages n’intervient pas dans le niveau des dépenses);
Le deuxième modèle, notéM3, est analogue àM2; les groupes
d’âge pris en compte sont 0-4 ans, 5-9 ans et 10-14 ans et leurs
poids ont été estimés de façon endogène à l’enquête 2000;
A l’inverse des modèles M2 et M3, le troisième modèle, noté
M4, intègre, en plus de la différenciation de la consommation
selon les groupes d’âge définis pour M2, un facteur d’économie
d’échelle (le niveau des dépenses des ménages est influencé par
la taille des ménages).
4-4 - Les mesures de la pauvreté.
Elles seront faites en utilisant la famille bien connue des
mesures FGT (Foster, Greer et Thorbecke) qui se présentent
sous la forme générale suivante:

q
1
 Z  X i  
P   
 (1) avec :
n
Z


i 1
i = 1... .q ; q = nombre de pauvres au regard du seuil de pauvreté
Z; n = population totale considérée; Xi = dépense totale de
chaque personne pauvre; Į reflète le degré d’aversion pour la
pauvreté.
Trois mesures principales, liées àla valeur de α, sont effectuées:
Po, P1 et P2, appelées respectivement incidence, profondeur et
sévéritéde la pauvreté.
L’incidence P0 (α = 0), ou ratio ou taux de pauvreté: c’est le
rapport du nombre de pauvres q àla population totale n.
La profondeur de la pauvreté (α = 1) P1 est donnée par
18
l’expression:
P1= (1/n) ∑ [(Z –Xi) / Z]. Cette expression prend en compte l’écart
des dépenses des pauvres par rapport au seuil de pauvreté. C’est
en ce sens qu’elle reflète l’étendue ou la profondeur de la
pauvreté. La profondeur est aussi égale à:
P1=H*I avec I=(1/q) ∑ [ (Z –Xi) / Z ] . I est souvent appelé
intensitéde la pauvreté.
La sévérité de la pauvreté (α = 2) :
P1 informe sur l’écart moyen des dépenses des pauvres par
rapport au seuil, mais ne fournit pas d’indication sur la
distribution des dépenses entre les pauvres. C’est ce à quoi
répond l’indice de sévérité de la pauvreté (appelé aussi indice
d’inégalité) qui est obtenu en donnant à Į la valeur 2 dans
l’équation générale (1).
P2 = (1/n) ∑ [(Z –Xi) / Z]²
Plus l’indice de sévérité P2 est élevé et plus l’inégalité est
grande entre les pauvres. Cette caractéristique rend utile cet
indice dans le ciblage des plus pauvres dans les politiques de
lutte contre la pauvreté.
4-5- Résultats obtenus et choix du modèle.
Pour la période 1988-2000 :
► La 1/2 médiane correspond au premier décile;
► La méthode d’actualisation des seuils de 1988 et 1995 donne
des seuils pas très éloignés de ceux obtenus avec M1 (écart
relatif, respectivement, de 4 et 6%11 pour les deux seuils). Ce
dernier offre l’avantage de tenir compte du mode de
consommation observé par l’enquête 2000, contrairement aux
deux autres modèles qui supposent implicitement le maintien
11
L’actualisation des seuils de 1995 fournit les résultats les plus élevés : cela tient à
leur surestimation, admise, comme cela a été indiqué au paragraphe 2-b de la
section I
19
pour 2000 du panier alimentaire de référence des deux années
concernées alors que, du fait particulièrement de la suppression
du soutien des prix, un réaménagement du panier est fort
probable;
► Les seuils obtenus avec les modèles ayant recours au concept
d’échelle d’équivalence (M2, M3 et M4) sont plus dispersés,
l’écart variant de 29 à 75%. Toutefois, une analyse des
caractéristiques des ménages pauvres selon ces modèles ne
montre pas d’impact significatif sur la sélection des ménages
pauvres opérée en utilisant l’indicateur de bien être «dépense/
tête».
A titre illustratif, si l’on prend en compte la taille des ménages,
au seuil de pauvreté générale, on observe bien que l’incidence,
pour les quatre modèles, est sensible àla taille des ménages. Elle
s’élève au fur et à mesure que celle-ci augmente. La sélection
des ménages pauvres àtravers la distribution selon la taille est
quasiment identique pour les quatre modèles.
Ces éléments, associés au fait que le modèle M1 a servi à la
mesure et à l’analyse de la pauvreté pour 1988 et 1995, rendent
favorable le recours àce même modèle M1 pour 2000. En outre,
il est bien admis que l’hypothèse de base de ce modèle, 2100
calories/personne/jour, revêt un caractère plutôt normatif qui ne
peut forcément traduire toute la réalité algérienne. Une dose
d’arbitraire est donc incorporée au modèle. C’est pourquoi il est
certainement plus utile de s’attacher à capturer une tendance de
la dynamique de la pauvreté, en maintenant la même démarche
dans le temps, qu’à essayer de trouver une solution aux mesures
de la pauvreté plus élaborée mais hypothétique en l’état actuel
des données disponibles.
Il reste cependant à tester la robustesse des résultats obtenus
avec le modèle à travers une analyse de sensibilité. Celle-ci
consiste àopérer une variation du seuil et àanalyser son impact
en termes de changement sur la mesure et les caractéristiques de
20
la pauvreté. Il est alors question non pas de pauvretéau regard
du besoin nutritionnel de base (2100 calories/jour/personne),
mais de vulnérabilitédes ménages.
Les estimations faites dans ce cadre montrent nettement que les
classements des catégories de population établis selon
l’incidence de la pauvreté au seuil de pauvreté générale et au
seuil de vulnérabilité pour toutes les caractéristiques analysées
sont identiques.
La robustesse du choix du modèle M1 est de cette façon
démontrée. L’analyse du profil de la pauvreté qui suit se fera
donc sur ses résultats.
Pour la période 2000 - 2006
L’estimation de la pauvreté est effectuée à l’aide d’un logiciel
de la Banque Mondiale12, conçu sur l’utilisation des propriétés
de la courbe de Lorenz qui associe le cumul simultané de la
population et des dépenses de consommation des ménages, et
permet donc de connaî
tre la part des dépenses en % détenue
par une fraction donnée de la population.
L’estimation de la courbe de Lorenz est réalisée par le recours à
une des fonctions de distribution les plus usitées (la fonction
Bêta 13 ), en utilisant des données relatives aux dépenses de
consommation des ménages groupées par déciles.
Selon une procédure bien établie scientifiquement, la dérivation
de la fonction Bêta permet d’obtenir les indices de mesure de la
pauvretéles plus couramment calculés (incidence de la pauvreté,
12
SimSIP pour Simulation for Social Indicators and Poverty. Disponible sur
le site de la Banque Mondiale.
13
Son équation a la forme générale suivante:
L(P)  P  P (1  P) avec P
représentant la distribution cumulée de la population et L la distribution cumulée
de la dépense, ,  et  étant des coefficients àestimer.
21
profondeur et sévérité, indices d’inégalités).
Quatre séries de données sont requises par le logiciel.
La 1ère série de données représente les bornes des intervalles
des dépenses de consommation au niveau national et aux
niveaux sectoriels. La 2éme série de données se rapporte aux
seuils de pauvreté. Deux seuils de pauvreté sont considérés.
Quant àla 3éme série, elle est relative aux dépenses moyennes
de consommation et à la répartition de la population dans
chaque décile. La dernière série de données concerne la
distribution de la population selon les secteurs.
En cas d’absence de nouvelles données d’enquêtes, le logiciel
permet d’estimer la pauvreté en utilisant la variation de la
dépense moyenne par tête obtenue à partir des comptes
nationaux. Les autres données de la dernière enquête disponibles
sont reconduites. Cela a étéle cas pour les années postérieures à
2000.
22
5- Mesures de la pauvretéet ses principales caractéristiques
Le tableau 2 reprend les résultats obtenus par le modèle choisi
(M1)
Tableau 2- Mesures de la pauvreté
2000
1995
Urbain Rural Total Urbain Rural
Seuils en DA/an / personne
SA
13946 13849 13905 10991 10895
SPG
19794 19692 19751 14706 14946
Taux P0 en (%)
SA
2.9
3.4
3.1
3.6
7.8
SPG
10.3
14.7
12.1
8.9
19.3
Distribution de la pauvretéen (%)
SA
54.9
45.1
100
31.3
68.7
SPG
49.5
50.5
100
31.3
68.7
Profondeur P1 en (%)
SA
0.44
0.54
0.5
0.4
1.0
SPG
2.16
2.85
2.5
1.0
2.5
IntensitéP1/P0 en (%)
SA
15.2
15.9
15.5
11.1
12.8
SPG
20.9
19.4
20.2
11.2
12.9
P1*Z*N en Milliards DA
SA
1.09
0.96
2.05
0.62
1.55
SPG
7.6
7.2
14.84 2.06
5.31
SévéritéP2 en (%)
SA
0.12
0.14
0.13
0.1
0.4
SPG
0.69
0.86
0.76
0.4
1.0
Nombre de pauvres en milliers
SA
523
429
952
504
1107
SPG
1842
1876
3719
1247
2739
SA : seuil alimentaire ; SPG : seuil de pauvretégénérale.
Total
1988
Urbain
Rural
Total
10943
14827
2181
2771
2165
2809
2172
2791
5.7
14.1
1.9
4.8
5.2
11.0
3.6
8.1
100
100
24.8
28.2
75.2
71.8
100
100
0.7
1.7
0.2
0.3
0.6
1.1
0.4
0.7
12.3
12.1
10.5
6.3
11.5
10
11.1
8.6
2.17
7.37
0.05
0.09
0.16
0.38
0.21
0.47
0.2
0.7
0.1
0.1
0.3
0.5
0.1
0.3
1611
3986
210
532
639
1353
850
1885
5.1- Incidence de la pauvreté:
Au seuil alimentaire, la population considérée comme très
pauvre représente 3.1% de la population totale, correspondant à
un nombre de personnes de 952 600. Ce ratio de pauvreté se
situe ainsi àun niveau inférieur àcelui de 1988 (3.6%) et àcelui
de 1995 (5.7%). Compte tenu du croît démographique, le
nombre de pauvres a cependant augmentéde 12% entre 1988 et
23
2 000.
Au seuil de pauvreté générale, l’incidence de la pauvreté est de
12.1% (3.7 millions de personnes pauvres). Elle était de 8.1%
en 1988 et de 14.1% en 1995: il y a donc eu une augmentation
de l’incidence de la pauvreté entre 1988 et 1995 mais un recul
entre 1995 et 2000. Ce recul n’a cependant pas été suffisant pour
retrouver le niveau de 1988.
La proportion de personnes dépensant moins de un (01) dollar
PPA est de 0.8%.
5-2- Localisation de la pauvreté:
L’incidence de la pauvretéa été, en 2000, plus élevée en milieu
rural qu’en milieu urbain.
Au seuil alimentaire, l’incidence de la pauvreté urbaine a
augmenté de plus de 50% entre 88 et 2000, alors qu’en milieu
rural elle a baisséde 35%.
Au seuil de pauvreté générale, ces évolutions sont,
respectivement, de 114.6 et 33.6%.
Si en 1988, 28.2% des pauvres vivaient en milieu urbain, en
2000, près de la moitié de la population pauvre (49.5%)
appartient àla strate urbaine.
La pauvretéest ainsi devenue plus urbaine.
5.3 - La profondeur de la pauvretéP1:
Cet indice prend en compte l’écart des dépenses des pauvres par
rapport au seuil de pauvreté.
La moyenne des dépenses des plus pauvres s’écarte de 15.5% du
seuil alimentaire (autrement dit, la dépense moyenne des
24
pauvres représente 84.5% du seuil), alors qu’au seuil de
pauvreté générale, l’écart est de 20.2%.
Les ressources nécessaires pour éradiquer la pauvreté, sous
réserve d’un ciblage parfait, s’élèvent à 2 milliards de DA au
seuil alimentaire et à près de 15 milliards DA au seuil de
pauvreté générale, correspondant respectivement à 0.05 et
0.35% du PIB 2000.
Au seuil alimentaire, la profondeur de la pauvretéa baisséentre
1995 et 2000, mais elle reste plus élevée qu’en 1988, épousant
ainsi l’évolution de l’incidence observée sur la même période
(détérioration entre 88 et 95 et amélioration entre 95 et 2000).
Par contre, au seuil de pauvretégénérale, la tendance àla hausse
de P1 décelée entre 1988 et 1995 s’est poursuivie en 2000. Elle
provient surtout du secteur urbain oùla profondeur est passée de
0.3 en 88 à1 en 1995 et à2.16 en 2000.
Comme en 1995 et 1988, la profondeur de la pauvretéen 2000
est plus élevée en milieu rural pour les deux seuils.
5-4 - La sévéritéde la pauvreté.
Cet indice renseigne sur les inégalités au sein de la population
pauvre (plus il est élevé et plus l’inégalité entre les pauvres est
accentuée).
En 2000, les observations faites ci-dessus sur la profondeur de la
pauvretésont valables pour la sévérité.
En effet, la sévérité en 2000 est moins élevée au seuil
alimentaire (0.13) qu’au SPG (0.76). Elle est plus accentuée
dans le rural pour les deux seuils et la tendance à la hausse
enregistrée entre 88 et 95 s’est prolongée jusqu’en 2 000, à un
rythme cependant beaucoup moins soutenu.
5.5 - Pauvretéet taille des ménages.
25
Pour les deux seuils, l’incidence en 2000 augmente avec la taille
des ménages: au seuil alimentaire, elle est quasiment nulle pour
les ménages composés d’une à deux personnes mais 5.8% de
personnes extrêmement pauvres dans les ménages oùvivent plus
de 11 personnes (22.25% au seuil de pauvretégénérale, contre
1% quand la taille est de 1 à 2 personnes) sont extrêmement
pauvres.
Relativement à1988, au seuil de pauvretégénérale, la pauvreté
au niveau national en 2000 s’est accentuée pour les ménages
composés de plus de 5 personnes et s’est réduite pour ceux de
taille inférieure.
5.6 - Pauvretéet emploi.
Au niveau des deux seuils, les ménages ayant zéro (0) occupé
enregistrent l’incidence de la pauvreté la plus élevée (5.17 et
18.61%). Celle-ci baisse substantiellement quand le nombre
d’occupés augmente. La présence de personnes occupées dans
les ménages se présente donc comme un facteur de réduction du
risque de pauvreté.
Selon la localisation, en urbain comme en rural, les ménages
ayant moins de deux occupés présentent les taux de pauvretéles
plus élevés. En outre, les ratios sont plus élevés en milieu rural,
quel que soit le nombre d’occupés dans les ménages.
Entre 1988 et 2000, la présence d’occupé(s) est associée àune
baisse de l’incidence au niveau national. Cette baisse se retrouve
dans le milieu rural alors que l’incidence en urbain a augmenté
quel que soit le nombre d’occupés.
5.7- Pauvretéet nombre de chômeurs dans le ménage.
Comme cela peut intuitivement être attendu, au seuil de
26
pauvreté générale, les ménages ayant le plus de personnes au
chômage (03 et plus) ont l’incidence la plus élevée. Au seuil
alimentaire, par contre, le nombre de chômeurs dans les
ménages n’influe pas particulièrement sur la pauvreté extrême,
probablement en raison des opportunités qu’offre l’activité
informelle qui permet un niveau de dépenses équivalent au seuil.
Au seuil de pauvreté générale, quel que soit le nombre de
chômeurs présents dans le ménage, le ratio de pauvreté est
systématiquement moins élevé en milieu urbain qu’en milieu
rural.
L’évolution entre 1988 et 2000 de la relation pauvreté-chômage,
se caractérise par une baisse du ratio de pauvreté au niveau
national, quel que soit le nombre de chômeurs. Elle est
cependant très différenciée selon la localisation : hausse en
milieu urbain (sauf pour les ménages ayant un (01) chômeur) et
réduction en milieu rural.
5.8 - Pauvretéet ratio âge dépendance.
Pour les deux seuils, le taux de pauvretécroît avec la hausse du
ratio de dépendance. Il est plus de deux fois plus élevépour les
ménages ayant un ratio de 3 personnes et + que pour les
ménages dont le ratio est compris entre 0 et 1. Cette observation
est valable, au seuil de pauvretégénérale, àla fois en urbain et
en rural. Ce dernier milieu enregistre, en outre, des ratios
systématiquement plus élevés que ceux de l’urbain.
Selon la localisation, entre 1988 et 2000, le taux de pauvreté
s’est détérioré pour l’urbain quel que soit le ratio de dépendance.
Dans le rural, la détérioration a concerné les ménages dont le
ratio de dépendance est élevé(supérieur à2).
5.9- Pauvreté et catégorie socio-professionnelle du chef de
ménage (CSP).
27
Pour les deux seuils, l’incidence de la pauvreté est plus grande
dans les ménages dont le chef est chômeur, saisonnier
(respectivement 26.3 et 30.4% au seuil de pauvreté générale).
Au seuil de pauvreté générale, s’ajoutent à ces catégories les
pauvres des ménages de «salarié permanent agricole» avec
27.0%.
A l’inverse, les taux de pauvreté les plus faibles se retrouvent
pour les chefs de ménage "employeur agricole", "salarié
permanent non agricole" et "employeur non agricole".
Au seuil de pauvreté générale, selon les strates, à l’exception des
ménages dont le chef est Indépendant agricole ou Employeur
non agricole, l’incidence est plus importante en milieu rural
pour toutes les autres CSP.
Au plan de la distribution de la pauvreté, les 2/3 de l’ensemble
des pauvres au seuil alimentaire et les 3/5 au seuil de pauvreté
générale sont dirigés par un chef inactif, saisonnier ou chômeur.
La pauvretésemble ainsi associée au caractère de précaritédes
CSP.
Comparativement à 1995, pour les deux seuils, la situation en
matière de taux de pauvreté s’est améliorée pour les ménages
dont le chef est employeur non agricole, indépendant non
agricole et salarié
5.10 - Pauvretéet sexe du chef de ménage
Pour les deux seuils, l’incidence de la pauvreté en 2 000 est
moindre pour les ménages dirigés par une femme: 2.0 contre
3.2% au seuil de pauvreté alimentaire, et 8.9 contre 12.4% au
seuil de pauvretégénérale.
Cette situation confirme une tendance observée entre 1988 et
28
1995 qui a montré une amélioration de l’incidence des ménages
dont le chef est une femme.
5.11 - Pauvreté et niveau d’instruction du chef de ménage.
En 2000, l’incidence de la pauvreté est directement liée au
niveau d’instruction. Pour les deux seuils, elle est nettement plus
accentuée pour les ménages dont le chef est sans instruction,
simplement alphabétiséou ayant un niveau primaire.
En termes de distribution, au seuil alimentaire, la proportion de
personnes pauvres appartenant à des ménages dont le chef est
"sans instruction" ou "alphabétisé" a suivi une tendance à la
baisse entre 1988 et 2000, avec 84.8% en 88, 74% en 95 et 70%
en 2000, traduisant ainsi une forme d’amélioration pour ces
catégories vulnérables.
Au seuil de pauvretégénérale, ces deux catégories comprennent
également près de 71% des pauvres en 2000, contre 84.4% en
1988 et 73.6% en 1995.
5.12 - Pauvretéet accès aux infrastructures sociales de base.
L’accès aux réseaux électrique, d’assainissement et
d’alimentation en eau potable, constitue un déterminant
important du bien être des populations.
Pour l’ensemble des réseaux, quel que soit le seuil de pauvreté,
l’incidence est plus grande quand les populations ne sont pas
raccordées.
Ainsi, au seuil de pauvretégénérale, le taux de pauvretéest de
12.1% pour les ménages disposant de l’électricité et de 16.8%
pour ceux qui n’en disposent pas. Cet écart entre les deux taux
est encore plus important au seuil alimentaire où il est quatre
fois plus élevé pour les ménages n’ayant pas accès au réseau
électrique.
29
Pour le raccordement au réseau de gaz, l’incidence est de 6.5%
quand le raccordement est réaliséet de 14.4% quand il ne l’est
pas.
Pour l’eau potable, ces taux sont de 10.14% (raccordement) et
21.02%( pas de raccordement).
5-13-Décomposition du changement de la pauvreté14 :
La décomposition est opérée à l’aide du logiciel SIMSIP.
Le degréde pauvretédépend de deux facteurs — outre le choix
du seuil de pauvreté: d’une part, le niveau moyen de la dépense,
et, d’autre part, l’étendue de l’inégalité de la distribution de la
dépense. En principe, un accroissement de la dépense moyenne
réduit la pauvreté, tandis qu’une élévation de l’inégalité l’accroît.
En utilisant la méthode de Datt et Ravallion15, les changements
dans le temps des mesures de pauvretéseront décomposés selon
les deux composantes, croissance et
redistribution, afin
d’évaluer le rôle relatif de chacune d’elles dans l’évolution de la
pauvreté. Cette approche peut fournir aux décideurs politiques
d’importantes informations tant en ce qui concerne l’évaluation
des politiques passées, que pour ce qui est des politiques
nouvelles àmener dans la lutte contre la pauvreté.
L’application de cette démarche aux données algériennes a
donné les résultats affichés dan le tableau 3 ci-contre. On y
observe que l’augmentation de l’incidence sur la période
1988/1995 est due principalement à l’effet croissance évalué à
9.6 %, l’effet inégalité jouant au contraire vers une baisse de
Cette partie a été totalement reprise du mémoire de fin d’études de
S.Boulahbel et L.Mekdji. op cité.
15
Datt G. et Ravallion M., «Growth and Redistribution Components of
Changes in Poverty Measures: A Decomposition with Applications to Brazil
and India in the 1980s », Journal of Development Economics, vol. 38, n°2,
1992, p. 275-295.
14
30
l’incidence (-0.18 %).
Par contre, sur la période 1995/2000, la réduction observée de la
pauvreté est expliquée à la fois par l'effet inégalité estimé à 4.43% et par l’effet croissance (-2.2%). Les deux effets ont joué
simultanément dans le même sens.
Tableau 3 : Décomposition du changement de pauvretéen
effet croissance et inégalitéau seuil de pauvretégénérale.
Urbain
rural
1988/1995
12,35%
national
-0,30%
1995/2000
0,04%
-0,18%
-4,43%
-3,56%
effet de croissance
6,82%
effet d'inégalité
0,09%
effet de croissance
-1,96%
effet d'inégalité
-3,26%
effet de croissance
4,71%
-5,97%
1988/2000
12,64%
effet d'inégalité
-2,82%
-5,66%
9,65%
-2,25%
7,12%
Entre 1988 et 2000, l'effet de croissance explique l'augmentation
de la pauvreté: il est évaluéà7.12%. Par contre l'effet inégalité
estiméde -3.56% a affaibli cet accroissement.
Selon les milieux, l’effet croissance du milieu rural est
nettement supérieur àcelui du milieu urbain sur les 3 périodes.
Cela indique que l’éradication de la pauvreté en zone rurale
sollicite plus d’effort de croissance qu’en zone urbaine. La
politique de développement devrait ainsi être plus orientée vers
le milieu rural.
Un autre résultat qui conforte cette conclusion est celui
correspondant àla dépense moyenne de consommation par tête
31
en zone rurale qui est systématiquement inférieure àcelle de la
zone urbaine (respectivement 7966 et 9884.62 DA en 1988 ;
31442 et 39139 DA en 1995 ; 41846 et 55718 DA en 2000).
6 - La pauvretéen 2006
L’estimation de l’incidence de la pauvreté16, réalisée à l’aide du
logiciel SimSIP, s’est faite selon les hypothèses suivantes:
 la variation de la dépense par tête entre 2000 et 2006
correspond àla variation en volume de la consommation
par tête estimée par les comptes économiques nationaux,
soit +9,4% sur la période (source: CGPP);
 la distribution de 2000 (structure des dépenses selon les
déciles) est reconduite pour 2006 (l’effet changement
d’inégalité est neutre et seul l’effet variation de la
dépense est pris en compte);
 les seuils de pauvreté (alimentaire et de pauvreté
générale) ainsi que les limites des dépenses moyennes
des déciles de 2000 sont reconduits.
Les calculs faits indiquent un taux de pauvretéen 2006 de 5.6%
au seuil de pauvretégénérale. Cela marque un recul de la
pauvretéde près de 54% par rapport à l’année 2000.
La baisse concerne àla fois le milieu rural et le milieu urbain.
Elle a cependant éténettement plus forte pour la strate urbaine (60.7%, contre -34.7% pour le rural) ; ce qui a pour effet de
maintenir une incidence de la pauvretéplus élevée en milieu
rural.
Le nombre de personnes pauvres s’élève en 2006 à 1 876 000,
équivalent àcelui évaluéen 1988. Il a baisséde 50% par rapport
àcelui de 2000 et de près de 53% par rapport au nombre de
1995.
Il s’agit de l’incidence au seuil de pauvretégénérale. Au seuil alimentaire,
l’incidence est trop faible pour avoir une signification statistique.
16
32
En 2006, les personnes pauvres sont localisées àprès de 65% en
milieu rural. Cette proportion était de 50% en 2000. La pauvreté
se ruralise davantage.
Le PSRE, le PNDA et le PCSC, auxquels est associée une
politique sociale soutenue, sont à la base de la réduction de la
pauvreté.
Evolution de la pauvretéentre 2000 et 2006
variation
Totale
20002006
-53,7
-34,7
-67,0
Incidence en %
2000 2006
National
12,1
5,6
Rural
14,7
9,6
Urbain
10,3
3,4
Nombre de
pauvres en
milliers
National
3719 1876
-49,6
Rural
1876 1215
-35,2
Urbain
1842 661
-64,1
Sources : 2000 : Etude CGPP sur la base de l’enquête
consommation des ménages de l’ONS 2000/2001.
2006 : Estimations par le CGPP.
Conclusion :
L’analyse de l’évolution de la pauvreté monétaire qui vient
d’être présentée a montré une tendance générale à la régression
du phénomène. Elle a également fait ressortir les principales
caractéristiques des populations pauvres (en 2000) : ménages de
grande taille, avec un taux de dépense élevé et un accès aux
infrastructures sociales de base (réseaux électrique,
d’assainissement et d’alimentation en eau potable) limité, un
chef de ménage peu instruit, chômeur ou saisonnier et de sexe
33
masculin. Si la population pauvre est répartie de façon quasiégale entre l’urbain et le rural, la pauvreté reste plus prononcée
en milieu rural (en termes d’incidence, de profondeur et de
sévérité), bien qu’une tendance à l’urbanisation de la pauvreté
soit décelée. En termes d’évolution, une amélioration de la
situation en matière d’incidence de la pauvreté s’est effectuée
pour les ménages ayant une taille inférieure àquatre personnes,
dont le chef est employeur non agricole, indépendant non
agricole, salarié, de sexe féminin, sans instruction ou de niveau
d’instruction au plus secondaire. L’incidence des pauvres non
raccordés aux différents réseaux de base s’est également réduite.
Par contre, le ratio de pauvretés’est détérioré pour les ménages
de grande taille, dont le ratio âge dépendance est élevéet dont le
chef est chômeur.
Il est important cependant de prendre conscience des limites de
la démarche, qui sont des points de débat récurrents dans les
études de pauvreté basées sur les dépenses des ménages. Elles
peuvent être résumées dans les principaux éléments suivants:
♦ difficultés inhérentes aux enquêtes auprès des ménages
comme: couverture de l’enquête, plan de sondage (cas
particulier des personnes sans domicile fixe qui peuvent être
sous représentées alors qu’elles peuvent potentiellement faire
partie des pauvres), taille de l’échantillon (souvent fonction
essentiellement des ressources allouées à l’enquête, ce qui ne
permet pas d’obtenir des résultats pour des catégories de
variables fines), erreurs de mesure, traitement des non-réponses
ou des données aberrantes et extrêmes (notamment celles
relatives aux réponses nulles sur les dépenses);
♦ validitéde la valeur calorique des biens alimentaires (pour le
calcul du besoin minimum);
♦ valorisation des biens et services produits par le ménage pour
sa propre consommation ou ceux offerts par d’autres ménages :
par les ménages? prix du marchélocal? autre?;
♦ non prise en compte des biens durables achetés antérieurement
à l’enquête (sous-estimation des dépenses et donc de la
pauvreté);
34
♦ formalisation de la méthode de calcul du loyer fictif pour les
ménages propriétaires d’un logement;
♦ variabilité des prix dans l’espace (régionalisation): l’indice des
prix à la consommation n’est pas désagrégé de façon
suffisamment fine pour tenir compte des différences régionales
et locales (en dehors des strates urbain-rural);
♦ hétérogénéité des ménages en termes de taille et de
composition (en groupes d’âge et sexe): approfondissement du
recours aux techniques d’échelles d’équivalence et économie
d’échelle.
Les indicateurs fondés sur la pauvreté monétaire en général
restent toutefois de loin ceux pour lesquels les données sont le
plus facilement obtenues et le suivi de leur évolution
relativement simple. Ceci n’exclut pas de recourir parallèlement
à d’autres approches qui prennent en compte les autres éléments
constitutifs du bien-être des ménages (conditions de vie,
potentialités, droits sociaux, droits politiques). La multiplication
des études et leur confrontation seront source d’une meilleure
connaissance du phénomène. Les politiques et les programmes
de lutte contre la pauvreté n’en seront que plus réalistes et
efficaces. Une condition essentielle à remplir: développer les
capacités de mesures et d’analyse de la pauvreté, notamment au
niveau local qui doit se réapproprier la prise en charge du
phénomène.
35
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