J`ai pris la foudre

Transcription

J`ai pris la foudre
Quelques pistes pour aller plus loin
par Bartlomiej Woznica
© D.R.
Il n’est pas insignifiant que Laurent Larivière vienne du monde de la danse. Tout son
film tourne en effet autour de la question du corps, de son appréhension, de sa domestication pourrait-on même dire comme s’il s’agissait d’un espace étranger à investir.
Le personnage principal semble se retrouver comme étranger à lui-même, moins sur
un plan psychologique d’ailleurs qu’à un niveau très concret puisque c’est son propre
corps qu’il va chercher à éprouver.
J’ai pris la foudre
Fiction - France - 2006 - 20’
Réalisation
Laurent Larivière
Production
Kazak Productions
Scénario Laurent Larivière
Image Claudine Natkin
Montage Lise Beaulieu
Son Jean-Baptiste Hael
Créations sonores
Cécile Le Prado
Interprétation
Philippe Duclos,
Isabelle Malin,
Fabien Colliot
Adolescent solitaire en pleine mutation, Quentin met son corps en danger
pour éprouver son existence. Il cherche à correspondre, au risque de sa vie,
au héros intérieur qu’il s’est érigé en modèle.
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Laissant peu de prises à l’interprétation et ne livrant rien de ses motivations (proche
en cela du rapport de la danse au sens), le personnage déconcerte. Mais le lien fort que
J’ai pris la foudre entretient avec la notion de rite initiatique peut nous éclairer. Comme
on le sait, ce rite vise à acter la métamorphose du jeune garçon en homme. Il consiste
souvent à traverser des épreuves d’endurance afin notamment de chasser le côté féminin de l’homme et de signifier la séparation définitive avec le corps de la mère. C’est
l’occasion pour le jeune homme de faire preuve de sa bravoure face à la souffrance, à
même sa chair. C’est aussi un moment de solitude, une parenthèse dans son existence
sociale (dans le film, le personnage est précisément en vacances) puisque ces rites ont
souvent lieu en dehors de l’espace commun livrant les futurs initiés à eux-mêmes face
à une nature dangereuse. Relever les éléments qui structurent J’ai pris la foudre comme
un rite de passage.
Mais ce rapprochement n’épuise pas la complexité du film. En ne proposant plus explicitement de tels moments charnières, nos sociétés créent un vide quant à la reconnaissance d’une réelle place dans le tissu social à une part grandissante de la jeunesse et
poussent ainsi celle-ci à des conduites à risques, souvent interprétées par les anthropologues comme une tentative de susciter une expérience limite à laquelle fait précisément défaut un cadre rituel. En quoi peut-on avancer que le personnage, plutôt que
de faire l’expérience d’un rite d’initiation, doit faire face à l’absence d’un tel cadre ?
On pourrait dire que le personnage est tout au long du film à la recherche d’un contrechamp auquel s’opposer (le terme anglais de reaction shot conviendrait mieux à cet
égard). Remarquez à ce propos l’ouverture du film où le personnage, surplombant
l’espace urbain, jette des cailloux. Le cadre choisi infère l’idée que les cailloux sont en
réalité jetés contre l’espace urbain. Celui-ci ne répondant évidemment pas au défi qui
lui est lancé, le personnage va alors devoir chercher d’autres adversaires auxquels
s’affronter. Comment interprétez-vous à cet égard le monologue qui clôt le film et qui
semble renvoyer à la sublimation qui peut être trouvé à travers le jeu de rôle ?
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