L`agriculture, fournisseur d`énergie

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L`agriculture, fournisseur d`énergie
MOUVEMENT
L’agriculture, fournisseur d’énergie
La journée du Brabant Wallon,
conjointement organisée par les sections
provinciales de la FWA et de l’UAW, était
consacrée aux débouchés énergétiques de
l’agriculture. L’occasion était belle de se
pencher sur un sujet qui occupe, avec de
plus en plus d’acuité, l’actualité, qu’elle
soit belge, européenne ou mondiale.
Cette journée a par ailleurs offert aux
nombreux agriculteurs présents l’occasion
de soumettre leurs interrogations aux
différents acteurs de ce dossier, présents à
la table des intervenants.
Esteban Jaime
«L
’agriculture, fournisseur d’énergie»,
c’est sous ce thème
que se déclinait la journée
provinciale du Brabant
Wallon organisée par l’UAW
et la FWA à Thines. Le président provincial Yvan Gregoire
en souhaitant la bienvenue à
tous a rappelé les enjeux importants d’une filière bioénergétique pour le secteur et
pour qui une question essentielle se pose: on nous fait miroiter que de nouveaux débouchés seront créés pour l’agriculture. Oui, cela va sans
aucun doute soulager le marché puisque ces usines pourront transformer d’importantes quantités de betteraves,
céréales et colza; mais la priorité sera-t-elle accordée à nos
productions à nous, agriculteurs wallons?
Quel sera l’impact de ces
nouveaux débouchés sur le
revenu des agriculteurs sachant que nous connaissons
depuis certaines années un
prix d’achat très faible des céréales et que les perspectives
du prix de la betterave ne
sont pas plus réjouissantes?
Les 3 axes
agro-énergétiques
Quelle bonne idée de faire
cette journée sous le signe de
l’énergie alors qu’il fait si froid
a attaqué le Ministre du
Logement, des Transports et
du développement territorial
avant de situer les agriculteurs
de notre région dans un
contexte global.
Par leurs pratiques et leur
lien privilégié avec le monde
rural, les agriculteurs peuvent
intervenir pour limiter les
émissions de gaz à effet de
serre. Avec à la clé, des économies d’énergie et la production d’énergie renouvelable,
mais aussi, de nouveaux dé8
bouchés pour leurs produits,
en précisant son action à leur
encontre. Je compte cependant les aider au mieux à réussir à prendre la place qui lui
revient dans le développement durable, en particulier
en matière d’énergie. J’ai
également pris des mesures
pour réduire la facture énergétique des exploitations
agricoles.
Le Ministre Antoine axera
son action sur 3 domaines.
D’abord, la filière biocarburant qui est capitale pour le
monde agricole. La Région
Wallonne est prête et le ministre a bon espoir que
BioWanze soit une réalité,
mais il convient de parler un
langage vérité et de préciser
que les revenus qui découleront de cette initiative ne seront pas comparables à ceux
qui étaient générés dans le
passé par la betterave sucrière. Néanmoins, même si l’influence de cette demande sur
les prix des produits agricoles
est difficile à prédire, les agriculteurs tireront profit de la
création de cette usine dans
tous les cas. Car, sur le plan
purement agricole, le développement de filières non alimentaires va offrir aux agriculteurs un débouché énorme
pour leurs produits agricoles.
Si l’on prend rien que le projet
de la Raffinerie Tirlemontoise
à Wanze, la production de
300.000 m3 d’éthanol demandera environ 1.000.000
T de matières premières comme cela a été évoqué. Et il y
aura peut être d’autres unités
de production en Belgique et
certainement chez nos voisins. A mettre en parallèle
avec les emblavements de
2004 en RW: 34.656 ha de
betteraves et 131.155 ha de
froment. Il y a donc largement
de la place pour tous les agriculteurs wallons, même belges.
M. Antoine n’oublie pas
non plus ni les filières courtes
ni la recherche et développement. Ainsi, conscient de
l’absolue nécessité de la qualité de l’huile et du tourteau
qui seront produits directement à la ferme, j’ai lancé,
2 février 2006
pour aider les agriculteurs
soucieux de s’investir dans
cette filière, un projet concernant la production d’huile de
colza carburant dans une unité de production décentralisée. Le type de biocarburant
pourra être utiliser dans les
flottes captives.
Deuxième axe de réflexion:
la filière bois-énergie,pour laquelle un nombre important
d’emplois pourraient être
créés grâce à la production
d’électricité.
La troisième voie est celle
de la biométhanisation. Il y a
déjà 3 unités fonctionnant
déjà avec des effluents agricoles Et dans les autres secteurs, il y a de nombreuses
autres réalisations:Si bien que
la valorisation du biogaz, hors
sites agricoles, permet aujourd’hui de produire de l’ordre de 103 000 MWh verts
soit l’équivalent de la
consommation d’environ 29
500 ménages.
Malgré cela il ne faut pas
se voiler la face, les projets de
biométhanisation impliquant
des exploitations agricoles
souffrent d’un manque de
rentabilité.
André Antoine a de nombreuses idées pour rendre la
bioénergie agricole efficace
en Wallonie, son exposé aura
été très complet en la matière
et concernait de nombreux
points que nous aurons l’occasion de traiter à l’avenir.
Rôle de la Région
Wallonne
ment (que pour le sucre),
puisque la culture d’oléagineux est insuffisante pour
couvrir tous les besoins en
huile à transformer. L’usine
de Feluy pourra fournir le tiers
des 400.000 tonnes prévues
pour incorporation dans le
diesel classique. Elle pourra
être opérationnelle rapidement, par transformation d’une unité existante sur le site
de Basf. Si les plus de 10.000
hectares de colza vont trouver
un débouché supplémentaire, cette production agricole
peut être poussée beaucoup
plus loin.
Il y a beaucoup de niveaux
de compétences et de pouvoirs, beaucoup d’acteurs de
terrains concernés par la problématique biocarburant.
Le rôle du gouvernement
dans ces dossiers a été de déblayer tout le terrain politique
international (OMC), européen (les directives en rapport
avec les biocarburants), fédéral belge (la défiscalisation) et
régional (la filière, l’aménagement du territoire, l’économie). Il a établi une coopération fructueuse avec des industriels soucieux de réussir
ce tournant vers l’avenir qui,
assurément, doit compter sur
ces nouveaux produits.
BioWanze en détails
saires à l’alimentation de l’usine seront de l’ordre de 100
000 Ha de blé et 6000 Ha de
betteraves.
Bio Wanze travaillera 350
jours/an, 24H/24 H et emploiera 100 personnes sur le
site. Les implications en
amont et en aval seront significatives.
Quant à la logistique, la
voie fluviale sera favorisée
pour la quasi-totalité du bio
éthanol et pour une part
considérable des apports de
blé. Le sirop sera acheminé
par pipe line. La voie ferroviaire participera à l’approvisionnement en blé et l’utilisation du camion concernera
l’acheminement du blé local
et le transport du gluten.
L’approvisionnement en
blé se fera pour une partie de
Belgique, le reste proviendra
du Nord et de l’Est de la
France ainsi que l’Allemagne.
En effet, la Belgique est importatrice de blé, tandis que
la France et l’Allemagne sont
les plus gros exportateurs de
blé en Europe. Nous comptons quand même sur une légère augmentation, en
Belgique,des surfaces emblavées en blé grâce à la culture
de blé énergétique sur jachère et aux ACE 45, aides octroyées aux cultures énergétiques hors jachère.
En principe, la décision finale pour implanter l’unité
bioéthanol sera prise fin avril,
elle dépendra des agréments
valables en Belgique et déterminera la quantité de bioéthanol que la RT pourra vendre, de l’octroi du permis
d’environnement, du budget
investissement nécessaire et
de la part des quotas dévolus
à ce traitement.
Conditions de succès
des biocarburants
Suite à la fermeture de la
sucrerie de Genappes,un syndicat d’étude de biocarburants destiné à trouver de
nouveaux débouchés pour le
sucre a été créé en Région
Wallonne. Son président
Gérard Lambert a exposé son
point de vue en la matière.
La Région wallonne s’est
montrée active dans la préparation des dossiers industriels
qui, par la force des choses,
présentent un grand niveau
de complexité. En moins d’une année, les dossiers de
Wanze et de Feluy sont arrivés à maturité et vont trouver
leur réponse aux appels d’offres à émettre au niveau fédéral.
M. Lambert s’est penché
sur le cas du biodiesel en
Wallonie dont , l’approvisionnement se pose différem-
Guy Paternoster, Directeur
des Matières Premières à la
Raffinerie Tirlemontoise, nous
a livré le point de vue d’un des
segments les plus concernés,
avec les agriculteurs,celui des
raffineries du sucre. Il faut savoir que SüdZucker détient
déjà une usine à Leipzig semblable à ce que ce sera
BioWanze, qui produira du
bioéthanol.
Le projet (Bio Wanze) en
lui-même sera situé sur le site
de la sucrerie de Wanze.
Cette usine produira 300 000
M3 de bio éthanol incorporable tel quel ou sous forme
d’ETBE dans l’essence, 55
000 To de gluten et cogénèrera de la vapeur et de l’électricité. 800 000 To de blé et
400 000 To de betteraves
sous forme de sirop seront
utilisés pour alimenter l’usine.
Les surfaces agricoles néces-
La présentation de Jean-Marc
Jossart de Valbiom asbl dévolue
à l’étude des biocarburants se
voulait prospective et analysait
les voies de réussite pour ces produits. La défiscalisation est l’une
des clés pour le succès de ces
matières.
- En Ethanol, il existe un taux
différentiel d’accises entre l’essence pure et l’essence contenant minimum 7% vol.d’éthanol
(y compris sous forme d’ETBE).
- Pour le biodiesel, il existe un
taux différentiel d’accises entre le
diesel pur et le diesel contenant
3,37% de biodiesel en 2006 (et
augmentation à 4,29% en
2007, et 5% les années suivantes).
- L’huile est un produit exonéré d’accises lors de la production
par un agriculteur ou une coopérative agricole, sur base de sa
propre production de colza, et
lorsque l’huile est vendue à l’utilisateur final sans intermédiaire.
L’huile est également exonérée
pour une utilisation dans les sociétés régionales de transport en
commun.
Pour que cette mesure de défiscalisation soit totalement efficace, il faudrait transposer les
textes européens en législation
belge et que le lancement des
appels d’offres ait lieu. Il faudrait
aussi que la neutralité budgétaire aujourd’hui en vigueur soit
plus flexible et que la défiscalisation se fasse pour des biocarburants à haute incorporation aussi.
Du point de vue des matières
premières, des améliorations
pourraient être trouvées dans la
recherche d’une simplification
administrative pour la filière. Il
existe actuellement 3 filières séparées - l’alimentaire,les cultures
énergétiques primées à 45 ¤/ha,
la jachère - avec garantie et
conditions des contrats différentes. Il faudrait en outre que ce
prix soit suffisamment rémunérateur pour les agriculteurs, ce qui
n’est actuellement pas le cas
pour le colza, la betterave ou le
froment.
Favoriser la culture du colza,
matière première sera très déficitaire,permettrait un approvisionnement indigène plus régulier.
- Intégration des cultures non
alimentaires et filières courtes
dans le programme de
Développement Rural serait un
atout supplémentaire.
En ce qui concerne la transformation à proprement parlé,l’usine de biodiesel pour alimenter le
marché à court terme, l’unité de
production d’ETBE et les cinq
producteurs d’huile pourraient
être complétés par des usines de
production d’éthanol et de biodiesel et un nombre significatif
de producteurs d’huile pour atteindre une taille critique.
En termes de commercialisation, on avance des pistes intéressantes pour impulser ces nouveaux débouchés. A savoir, Augmenter le marché potentiel
de l’éthanol,si nécessaire via une
obligation.
Favoriser les 3 types de biocarburants
- éthanol : à court terme sous
forme d’ETBE,à moyen terme directement en mélange à l’essence (10%, voire 20% à la pompe,
85% voire 100% en flottes captives ou auprès de pompes spécifiques).
- biodiesel: à court terme
jusque 5% à la pompe et 3040% en flotte captive des
transports en commun, à moyen