Discours de Mme Anne Guérin, Conseiller d`Etat, Président
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Discours de Mme Anne Guérin, Conseiller d`Etat, Président
Discours de Mme Anne Guérin, Conseiller d’Etat, Président de la Cour administrative d’appel de Bordeaux Monsieur le Préfet de la région Aquitaine, préfet de la Gironde, Madame et Monsieur le Député, Monsieur le président de la communauté urbaine de Bordeaux, Messieurs les généraux et hauts officiers, commandant les régions terre, air, maritime et gendarmerie, Madame le premier président de la cour d’appel et Monsieur le procureur général, Monsieur le président de la chambre régionale des comptes d’Aquitaine, Madame et Messieurs les présidents des tribunaux administratifs du ressort, Mesdames et messieurs les présidents de juridiction, Monsieur le recteur d’Académie, Monsieur le préfet délégué, Mesdames et Messieurs les chefs des services, Monsieur le directeur du CHU, Monsieur le Bâtonnier de l’ordre des avocats, Mesdames et messieurs les présidents des conseils régionaux des ordres professionnels, des compagnies d’experts, Mesdames et Messieurs, mes chers collègues, Monsieur le Préfet, le fait que vous ayez répondu à notre invitation, malgré l'ampleur de vos charges, est une marque de considération à laquelle les membres de cette juridiction et moi-même sommes particulièrement sensibles et vous en remercions très sincèrement. Bordeaux partage avec cinq autres villes de province (Douai, Nantes, Nancy, Lyon, Marseille) le privilège d’être le siège d’une cour administrative d'appel. La cour administrative d'appel de Bordeaux comporte six chambres et réunit un effectif de 30 magistrats, assistés d’une quarantaine d’agents de greffe. Par le volume des affaires traitées (3.200 en 2010), elle est la quatrième cour administrative d'appel de France (après Paris, Marseille et Versailles), légèrement au-dessus de Lyon. Le président de la cour administrative d’appel de Bordeaux est, comme ses homologues, à la tête d’une juridiction chargée de statuer en appel des jugements rendus par les juridictions de première instance de son ressort. La particularité de la cour de Bordeaux est qu’elle a le plus grand ressort géographique de toutes les cours puisque non seulement, son ressort métropolitain coïncide avec les limites territoriales de quatre régions administratives (Aquitaine, Midi-Pyrénées, PoitouCharentes et Limousin), mais ce ressort comporte une partie ultra-marine sur laquelle le soleil ne se couche jamais puisqu’il s’étend des rivages atlantiques des Antilles-Guyane et de Saint-Pierre & Miquelon jusqu’aux confins de l’Océan Indien avec les îles de La Réunion et de Mayotte. Ce sont au total pas moins de 13 tribunaux administratifs sur lesquels la cour de Bordeaux exerce son office de juge d’appel. 1 Bien sûr, la conscience des enjeux considérables qu’un ressort aussi étendu fait peser sur le rôle régulateur de la cour, peut lui faire perdre de vue son ancrage dans la cité. Je mets donc naturellement sur le compte de mon tropisme personnel tout autant qu’un parcours professionnel, qui m’a amenée à présider (ou à exercer des fonctions de vice-président), à peu près dans toutes les juridictions du ressort de la cour, à l’exception notable du tribunal administratif de Limoges et de celui de SaintDenis de la Réunion, d’avoir eu ce souci de replacer Bordeaux, ville-siège, au centre et au cœur du ressort de la Cour. C’est le sens de la première audience solennelle de rentrée de son histoire que la cour administrative d'appel de Bordeaux organise aujourd’hui. A la différence de nos collègues de l’ordre judiciaire, aucun code ne nous fait obligation de prévoir de telles manifestations et, encore moins, n’en conçoit le déroulement. Ayant, ainsi, toute liberté d’organiser un tel évènement, la cour a mesuré que l’absence la réduisait au silence ! Elle a donc souhaité marquer cet évènement fondateur par des prises de parole, symboliquement partagées, et qu’elle a sciemment confié à deux bordelais en charge de responsabilités nationales, tant il est apparu que ces responsabilités les conduisaient nécessairement à participer à la réflexion engagée au plus haut niveau sur le devenir de leurs professions respectives au service de la justice. Je remercie Monsieur le Bâtonnier Thierry WICKERS, président du Conseil national des barreaux et Monsieur Dominique LENCOU, président du Conseil national des compagnies d’experts de justice d’avoir bien voulu accepter d’engager une libre réflexion avec moi autour du thème : « le juge, l’avocat, l’expert : quels enjeux pour le justiciable de demain ? » 1. Les leçons du passé : quand le mieux est l’ennemi du bien Quel juge ne s’est pas posé un jour la question de savoir ce que serait une justice idéale pour le justiciable ? Une justice exigeante ? une justice impartiale ? une justice efficace ? Il y a encore quinze ans, si j’avais dû ouvrir cette audience de rentrée solennelle, il est probable que je n’aurais évoqué que les deux premiers qualificatifs, mais n’aurais pas même songé au troisième. Il y a de cela vingt ans, je n’aurais évoqué que le premier qualificatif et d’ailleurs, je ne l’aurais fait qu’avec la conviction profonde que la justice administrative était bien de celles-là, une justice exigeante, ce qui la dispensait de se poser la question de savoir si elle était impartiale, et si elle était efficace. Exigence et qualité 2 La justice administrative a – de son point de vue - toujours eu un haut niveau d’exigence qualitative et a longtemps considéré comme supérieures les garanties qu’offrait sa procédure : - - - une instruction rigoureuse, à la fois écrite, contradictoire et inquisitoriale (conduite par le juge), un processus d’élaboration particulièrement soigné de la décision juridictionnelle caractérisé par le double examen du dossier, voire même le triple examen de celui-ci par le rapporteur, le président-réviseur, le rapporteur public, la collégialité qui domine encore très largement les formations de jugement notamment dans les juridictions d’appel (75 % des affaires à la cour administrative d'appel de Bordeaux sont ainsi jugées par des formations collégiales), l’intervention à l’audience publique d’un magistrat, chargé de dire le droit, même si sa dénomination de commissaire du gouvernement lui a valu de rendre fort mal compte de la réalité de ses fonctions. Exigence et efficacité Longtemps, cette exigence qualitative de la justice administrative s’est accompagnée de délais de règlement très longs des litiges, comme si la lenteur à juger était la contrepartie du perfectionnisme affiché, une sorte de « mal nécessaire ». La juridiction administrative portait ce péché originel, comme con-substantiel à son mode de fonctionnement (nécessités de l’instruction écrite, règlement collégial des litiges), jusqu’au jour où des moyens humains lui ayant été mieux alloués, et certains des éléments de sa procédure allégés, il s’est avéré que la question pouvait trouver des solutions. Et si aujourd’hui, beaucoup encore reste à faire, - je pense notamment à certains tribunaux administratifs du ressort de la cour qui connaissent toujours des situations difficiles à raison du volume des procédures d’urgence et de stocks très lourds – la juridiction administrative affiche désormais dans son ensemble des délais moyens de règlement des litiges inférieurs à un an, la cour de Bordeaux jugeant ellemême dans un délai moyen de 9 mois. Naguère encore, la seule mission du juge administratif, inculquée à plusieurs générations de jeunes magistrats, était de rendre des jugements juridiquement irréprochables. Préoccupé à l’excès de donner une réponse juridique au litige, le juge s’interdisait d’intervenir dans le règlement des situations qui l’avaient fait naître. Eût-il d’ailleurs été moins indifférent aux conséquences de ses décisions, qu’il eût été dans l’incapacité de le faire, ne disposant d’aucun outil juridique pour y pourvoir. Vos décisions sont parfaites, entendait-on au début des années 1990, et alors qu’est-ce que cela change pour les justiciables que nous sommes, si elles interviennent trop tard ou si elles ne peuvent trouver à s’appliquer, ce que d’aucun avait résumé d’une formule demeurée célèbre : « justice administrative : zéro faute ; efficacité : zéro » ! Exigence et impartialité 3 Longtemps enfin, cette exigence qualitative que nous croyions porter comme notre marqueur s’est, de la même façon, accompagnée d’un certain autisme à l’égard d’un autre soupçon, lié à l’existence même d’un ordre juridictionnel administratif, celui d’être le juge de l’administration, tant nous étions convaincus que nous ferions la démonstration de notre légitimité par l’exemplarité de nos décisions, si soucieuses de sauvegarder les droits et libertés individuelles et par ce subtil équilibre qu’elles savent ménager entre intérêt général et intérêts particuliers. Or, cette exigence de qualité n’a pas mieux tenu lieu de substitut au soupçon porté sur notre impartialité que son puissant porte parole à l’audience, - le commissaire du gouvernement devenu au prix d’incessantes concessions à la théorie des apparences « rapporteur public » - n’a su durablement résister à l’usure de son statut, méconnu et injustement décrié. Vous êtes juges, entend-on souvent dire encore, et alors qu’est-ce que cela change pour les justiciables que nous sommes, si vous donnez toujours raison à l’administration ! Aujourd’hui, l’exigence qualitative demeure au centre des préoccupations de notre ordre juridictionnel, mais cette question se présente de façon entièrement renouvelée. La justice administrative a en effet pris conscience que la qualité était une condition nécessaire mais non suffisante. 2. les mutations de la décennie écoulée La décennie qui vient de s’achever a vu des mutations essentielles s’opérer, qui mettent à nouveau en perspective ce que doivent être les nécessités d’une justice exigeante, impartiale, et efficace. Qualité et efficacité L’unique mission du juge administratif n’est plus aujourd’hui seulement de rendre des décisions juridiquement irréprochables. Ce même juge assume la responsabilité non seulement de la qualité de ses décisions, mais également de leur effectivité. pour avoir prise sur la situation litigieuse, le juge doit d’abord intervenir à très bref délai, pour ordonner les mesures conservatoires dans l’attente du règlement définitif du litige. A cet égard, l’on ne dira jamais assez combien la loi du 30 juin 2000, qui a profondément revisité les procédures de référé devant les juridictions administratives, aura permis au juge administratif de s’affranchir de certaines des pesanteurs qui le privaient d’assumer pleinement son office dans la résolution des litiges. le juge administratif vise désormais, dans la conception et la formulation de sa décision, à un règlement durable de la situation litigieuse. Plus que jamais dans le contentieux de l’annulation des actes administratifs – qui reste son domaine d’élection –, le juge administratif a conscience de la responsabilité 4 qu’il encourt en choisissant un terrain d’annulation et contrairement à une idée reçue, il ne privilégie les vices de forme ou de procédure qu’à défaut de trouver dans le dossier les moyens d’asseoir sa décision sur une illégalité de fond. De même n’hésite-t-il plus – même lorsqu’il n’y est pas tenu par un texte - à « surmotiver » sa décision en retenant plusieurs moyens d’annulation, afin d’éclairer les parties, ou à introduire dans sa décision un considérant « mode d’emploi » ayant pour seul objet de faire apparaître les voies d’un rétablissement de la légalité. enfin, il appartient au juge d‘assumer une responsabilité directe dans l’exécution de ses décisions et là encore, on sait que la demande d’injonction qui lui est soumise, soit à l’occasion de l’exécution du jugement, soit en cas de refus d’exécution de celui-ci, a été un puissant facteur de changement dans la perception que le juge administratif a de la situation litigieuse dont il peut contrôler tous les aboutissants. Sans forcer le trait, je dirais que l’on est passé d’un juge relativement indifférent aux conséquences de ses décisions, à un juge qui assume désormais pleinement la responsabilité de celles-ci. Qualité et impartialité En ce qui concerne le cœur de la fonction juridictionnelle, à savoir la détermination de l’issue du litige, le juge administratif a pris conscience qu’il pouvait infléchir sur la qualité du procès administratif en ayant une approche renouvelée avec les acteurs de ce procès : l’avocat principalement. Ce faisant, et sans même en avoir pleinement conscience, il a fait des choix qui confortent le sentiment qu’ont les justiciables de son impartialité. Le juge administratif est avec l’avocat dans une relation assez paradoxale. Le juge administratif peut juridiquement se passer de l’intervention de l’avocat : l’existence d’un grand nombre de recours qui sont dispensés de son ministère – en première instance notamment – en atteste. Et lorsqu’il ne se passe pas de l’avocat, le juge peut toujours dispenser l’affaire d’instruction (R. 611-8 CJA), ou pire, la dispenser d’audience publique (R.222-1 code de justice administrative) dans le cas des ordonnances1 ou de certaines procédures de référé. Si le juge peut en théorie se passer de l’avocat, le paradoxe est qu’il ne peut exercer pleinement son office qu’avec le concours de l’avocat. Au fond, le juge n’influe que marginalement sur la qualité du débat contentieux porté devant lui. y compris celles de l’article R.222-1 7° qui ne sont pas seulement des ordonnances dites de « tri », mais statuent sur le fond du litige, sans pour autant méconnaître l’article 6 § 1 de la CEDH (Conseil d'Etat 20 juin 2007 USMA et autres 302040) 1 5 Il ne peut exercer son office que dans les limites strictes du litige qui lui est soumis : ce sont en effet les parties qui fixent elles-mêmes le cadre du procès. Son pouvoir d’interférer dans le débat par des moyens qui n’auraient pas été soulevés par les parties – les moyens que nous appelons d’ordre public – ou selon des techniques procédurales précises (substitution de base légale ou de moyens) est strictement encadré. Tout au plus, peut-il exercer un pouvoir, qui n’est pas sans intérêt pour le justiciable, de requalification des prétentions des parties (conclusions et même moyens). Avouons-le : Le juge administratif a, longtemps, été assez passif dans son rôle de juge de l’instruction, se bornant à constater la qualité ou la médiocrité des écritures, et n’attachant qu’une importance résiduelle à l’audience publique, dont le rituel, marqué par l’interdiction faite aux parties d’apporter des éléments nouveaux, ne pouvait – ne devait – réserver aucune surprise. Les avocats d’ailleurs le lui rendaient bien, qui sanctionnaient la passivité du juge, par leur propre impavidité à l’audience, le commode « je me réfère à la procédure écriture » faisant office de substitut à des observations orales jugées inutiles. La relation juge administratif–avocat s’inscrit désormais dans un procès administratif entièrement revisité. Sans doute, le modèle de l’audience de référé, où l’oralité vient directement concurrencer l’écrit, a-t-il fortement imprégné le procès administratif traditionnel, au point de le contaminer. Mais il s’est surtout produit un double déplacement du centre de gravité des débats : Le rapporteur public, magistrat indépendant chargé à l’audience de dire le droit, mais qui pouvait apparaître comme ayant pris position publiquement en faveur d’une partie, a été mis à l’écart du délibéré. L’audience publique qui n’était que le point d’orgue de la procédure écrite est puissamment réhabilitée : non seulement, les parties sont désormais mises en mesure de connaître, avant l’audience, les conclusions du rapporteur public mais elles sont invitées – dans tous les cas – à prendre la parole en dernier. Ces évolutions ne sont pas que de simples concessions à plusieurs des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, et ne sont pas les inévitables correctifs d’une procédure écrite jugée parfois inadaptée, sinon par trop rigide. Elles traduisent une profonde mutation de la juridiction administrative, qui accepte de reconnaître que l’échange mécanique des mémoires peut n’être pas suffisant pour rendre compte de la complexité du litige, qu’il peut y avoir intérêt – et un intérêt certain – à permettre à l’audience publique de rendre plus complètement compte de cette complexité, et surtout qu’un contradictoire oral – certes encore encadré, mais enrichi par la connaissance qu’ont les parties du sens des conclusions du rapporteur public – est mieux à même d’éclairer le juge dans son œuvre de dépassement dialectique des échanges pour faire naître la solution juridique la plus appropriée, et sans doute aussi la mieux comprise. 6 Qualité et exigence Le juge administratif est avec l’expert dans une relation d’indépendance et de respect. Le juge administratif n’est jamais tenu de faire droit à une demande d’expertise présentée par les parties et peut, inversement, ordonner une expertise à laquelle les parties n’avaient pas jugé indispensable de soumettre tout ou partie du litige. De même, n’est-il aucunement tenu par les conclusions de l’expert qu’il a commis. Pour libre et indépendant qu’il soit dans sa relation avec l’expert, le juge administratif n’a pas pour autant entendu réduire cette relation à une simple prestation de services du second vers le premier. Tout au contraire, en faisant de lui un collaborateur occasionnel du service public par sa jurisprudence Aragon, le Conseil d’Etat lui a reconnu un rôle essentiel. Lorsque le procès administratif se déplace sur le terrain des opérations d’expertise, l’expert est en quelque sorte le délégataire du juge, investi qu’il est de ses pouvoirs d’investigation, son « bras séculier ». Chargé de mener à bien une mission définie par le juge et qui, lorsqu’elle est prescrite par la décision de fond, fait partie intégrante de la « chose jugée », l’expert devient le « juge des faits ». De même que le juge administratif dirige seul l’instruction, l’expert doit conduire seul les opérations d’expertise, dont il doit à tout moment conserver la maîtrise, à commencer par leur durée. Comme le juge, l’expert doit veiller, jusqu’à la clôture de ses opérations et la remise de son rapport, à respecter un contradictoire scrupuleux et équilibré. La dernière réforme d’envergure de l’expertise admistrative opérée par le décret du 22 février 2010 ne s’y est d’ailleurs pas trompée, qui a encore renforcé le rôle inquisitorial de l’expert, notamment lorsqu’il est désigné en référé et lui a ouvert un nouveau champ d’intervention avec l’avis technique. 3. Quels enjeux pour le justiciable de demain ? Le développement des nouvelles technologies, dont chacun ici est conscient qu’il sera l’enjeu de la prochaine décennie, l’accélération du temps qui impose de plus en plus de prévoir, d’anticiper, l’extraordinaire foisonnement des savoirs qui s’étale sur la toile, suscitant d’ailleurs autant les certitudes que les désarrois, font que le justiciable de demain sera tout à la fois mieux assuré de ses droits et plus fortement avide de les voir reconnaître. De ce point de vue-là, il est fort à parier que loin de se tarir, la soif de justice ne s’avère de plus en plus prégnante à étancher. De son côté, le juge administratif, auquel aucun des grands projets publics n’est étranger, a également vu son rôle de régulateur des grandes politiques publiques renforcé et son champ d’intervention s’élargir (contrôle de l’immigration clandestine, 7 droit au logement opposable, revenu de solidarité active). Aujourd’hui, la justice administrative ne supprime pas de juridictions, elle en crée ! Pour sa part, la cour administrative d’appel de Bordeaux est engagée dans une politique d’ouverture et de modernisation et l’étendue de son ressort territorial, qui est aussi une source de son rayonnement, lui impose de mettre en place des stratégies fortes, en termes de communication et d’innovation. revue de jurisprudence en ligne : C’est ainsi que depuis quelques jours, la cour de Bordeaux a organisé sur son site, http://jurissite-caa.bordeaux.fr sa première revue de jurisprudence en ligne. Ce blog, qui permettra à tous ceux d’entre vous qui sont soucieux de se tenir à jour de l’actualité de la Cour, de consulter, - et même retrouver grâce à un moteur de recherche – une sélection des décisions les plus importantes rendues par la juridiction, à laquelle seront associées les conclusions des rapporteurs publics, ou de prendre connaissance des communiqués de presse qui viendront ultérieurement enrichir le site. J’ajoute que, pour ceux d’entre vous qui auraient égaré le petit marque-page qui vous a été distribué, ils pourront toujours consulter le site du barreau de Bordeaux, qui grâce à l’obligeance de M. le Bâtonnier Dufranc, offre désormais une liaison directe avec celui de la cour administrative d'appel de Bordeaux. contrat de procédure : l’année 2011 verra également se mettre en place entre la cour et ses justiciables un véritable contrat de procédure. Destiné à mieux éclairer les parties sur la période envisagée pour l’audiencement du dossier, tout en cherchant à obtenir d’elles le respect d’un calendrier préalable d’échange des mémoires, ce contrat ne se veut pas seulement un outil de transparence et de prévisibilité de la procédure. Il postule aussi que les parties, associées dès l’enregistrement de l’appel, à la bonne marche de l’instruction, auront à cœur d’en respecter les échéances de façon à éviter les productions de dernière heure, qui perturbent le contradictoire, et transforment l’audience publique en audience de mise en état, alors que sa vocation première est d’être l’audience de formalisation des points en débat. Je remercie, là encore, le Barreau de Bordeaux d’avoir mesuré tous les enjeux d’un tel partenariat en désignant, en son sein, les interlocuteurs qualifiés qui aideront la cour à mettre au point les éléments de ce contrat dont le champ d’expérimentation, d’abord limité à certains contentieux, pourrait être rapidement étendu à la généralité des appels. Travail dématérialisé : Enfin, la cour administrative d'appel de Bordeaux a été retenue comme seule cour pilote pour l’expérimentation du travail dématérialisé. D’ores et déjà, plusieurs des chambres de la cour sont engagées dans un processus de travail collaboratif, - que nous appelons « eprocess », - aux termes duquel le circuit d’élaboration et de révision du projet d’arrêt, qui implique plusieurs acteurs, se réalisera sur support exclusivement numérique. Elle se prépare ainsi à accueillir la dématérialisation des procédures, au travers du déploiement d’Aramis, prévu au second semestre 2011, application dont l’appellation toute Gasconne nous indique que comme les mousquetaires et leur célèbre « tous pour un », une seule application est appelée à substituer toutes les autres. La dématérialisation des procédures, qui 8 devrait, dans un premier temps, s’imposer aux seules administrations et aux avocats, au moyen d’une application web gratuite et sécurisée, doit être préparée avec soin par une réflexion en amont avec des partenaires actifs et réactifs. Ainsi que j’ai eu l’occasion de l’exprimer devant le Conseil de l’Ordre, je forme des projets ambitieux pour le Barreau de Bordeaux, avec qui j’entends tisser des liens de collaboration exemplaires, parce qu’il est le Barreau de la ville siège de la Cour, ce qui lui confère des responsabilités particulières, mais surtout parce que son importance – 5ème barreau de France – le désigne tout naturellement pour exercer un rôle moteur susceptible d’entraîner les autres barreaux, fort nombreux au demeurant du ressort de la Cour, dans une dynamique vertueuse. Du côté des experts, la stratégie d’ouverture et de partenariat de la Cour n’en est pas moins ambitieuse, qui vise à terme à structurer l’ensemble des compagnies d’experts du ressort de la cour administrative d'appel de Bordeaux, et de les associer à toutes les démarches prospectives qui seront engagées par elle. La finalité est d’enrichir le corps expertal d’experts hautement qualifiés et déterminés à donner à l’expertise toute sa portée utile. Aux termes d’un propos dont j’ai conscience qu’il est trop long, je dirais que pour être plus encore demain la justice exigeante, impartiale, et efficace que le justiciable est en droit d’attendre, le juge administratif ne doit pas seulement s’attacher à poursuivre la mutation qu’il a engagée. Il doit désormais la faire partager par tous les acteurs au procès, devenus partenaires à la procédure. Et il a besoin de partenaires exigeants et efficaces. C’est à ce prix que le juge adminitratif, sans renoncer à son office de dire le droit, sans renoncer à la qualité de ses décisions, confortera sa légitimité. 9