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Canadian Agency for Drugs and Technologies in Health Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé aperçu technologique E TS numéro 24 février 2007 Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée À l’appui des décisions éclairées En avril 2006, l’Office canadien de coordination de l’évaluation des technologies de la santé (OCCETS) est devenu l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS). Adresser toute demande de publications à : ACMTS 600-865, avenue Carling Ottawa (Ontario) Canada K1S 5S8 Tél. : (613) 226-2553 Téléc. : (613) 226-5392 Courriel : [email protected] ou télécharger les publications du site Web de l’ACMTS à : http://www.acmts.ca Citer comme suit : Brown A, Wells P, Jaffey J, McGahan L, Poon M-C, Cimon K, Campbell K. Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée [Aperçu technologique no 24]. Ottawa : Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé; 2007. La production de ce rapport a été rendue possible par l’apport financier de Santé Canada et des gouvernements d’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Manitoba, du Nouveau Brunswick, de la TerreNeuve-et-Labrador, des Territoires du Nord-Ouest, de la Nouvelle-Écosse, du Nunavut, de l’Ontario, de la Saskatchewan et du Yukon. L’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé assume l’entière responsabilité de la forme finale et du contenu de ce rapport. Les opinions exprimées dans ce rapport ne représentent pas forcément celles du Santé Canada ou de gouvernements provinciaux ou territoriaux. La reproduction du document à des fins non commerciales est autorisée pourvu que l’ACMTS soit dûment mentionnée. L’ACMTS est financée par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux canadiens. Dépôt légal – 2007 Bibliothèque nationale du Canada ISSN : 1203-9365 (version imprimée) ISSN : 1481-451X (version électronique) H0446 – février 2007 NUMÉRO DE LA CONVENTION DE POSTE-PUBLICATIONS : 40026386 PORT DE RETOUR GARANTI À AGENCE CANADIENNE DES MÉDICAMENTS ET DES TECHNOLOGIES DE LA SANTÉ 600-865, AVENUE CARLING OTTAWA (ONTARIO) K1S 5S8 Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée février 2007 Nous remercions Janice Mann de son aide précieuse dans la production du présent aperçu tiré du rapport technologique d’Allan Brown et ses collaborateurs. Le présent aperçu reprend l’essentiel du rapport technologique commandé par l’ACMTS : Brown A, Wells P, Jaffey J, McGahan L, Poon M-C, Cimon K, Campbell K. Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée [Rapport technologique no 72]. Ottawa : Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé; 2007. L’ACMTS assume la pleine responsabilité quant à la forme et au contenu définitifs du présent rapport. LE RAPPORT EN BREF février 2007 Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée La technologie Les appareils de surveillance au point de service (PS) de l’anticoagulothérapie orale (ATO) qui mesurent le rapport international normalisé (RIN). La situation Les personnes à risque élevé d’incidents ou de complications thromboemboliques à la suite de la formation d’un caillot sanguin qui doivent subir une ATO de longue durée, durant au moins trois mois plus précisément. Ces études ont été soumises à une méta-analyse. Pour les besoins de l’analyse économique, sept comptes rendus décrivant six études distinctes ont été examinés, de même qu’une évaluation économique primaire a été exécutée. Incidence sur la prise de décision • surveillance de l’ATO amène une diminution du nombre de décès et d’incidents thromboemboliques et une meilleure maîtrise du RIN que l’épreuve de laboratoire courante, sans qu’il y ait de différences remarquables sur le plan des épisodes hémorragiques. Le sujet La disponibilité d’appareils portables au PS permet la surveillance de l’ATO de longue durée sans qu’il soit nécessaire de se rendre à l’hôpital ou d’effectuer une analyse de laboratoire. Ces appareils sont particulièrement utiles en régions rurales ou éloignées où les services de laboratoire sont difficilement accessibles, ou quand la personne désire voyager pendant une longue période. L’efficacité de ces appareils dans la surveillance de l’ATO est incertaine. Pour éclairer la prise de décision quant au financement de ces appareils, il est nécessaire de connaître l’efficacité et la rentabilité relatives des appareils au PS, utilisés par les patients ou dans les cliniques d’anticoagulation, comparativement à l’épreuve de laboratoire courante. La méthode et les résultats L’analyse prend la forme d’une étude méthodique de la documentation clinique et économique. Pour les besoins de l’analyse clinique, de nombreuses bases de données ont été consultées. Après l’extraction des données des 16 comptes rendus sélectionnés, deux examinateurs ont Les appareils au PS peuvent améliorer la santé. Le recours à un appareil au PS dans la • Les appareils au PS peuvent réduire les coûts. Comparativement à l’épreuve de laboratoire, l’appareil au PS en clinique d’anticoagulation est économique pour le payeur en santé. L’appareil au PS est également rentable si la société est prête à débourser 50 000 $ par année de vie pondérée par la qualité (QALY). Par rapport à l’épreuve de laboratoire, l’autosurveillance n’est pas rentable, selon toute apparence, du point de vue du système de santé public. • Des ressources supplémentaires sont nécessaires. Près de 24 % des personnes soumises à l’ATO au Canada seraient en mesure de passer à l’autosurveillance par un appareil au PS. Dans cette situation, la mise de fonds s’élèverait à 50 millions de dollars et le coût annuel des articles consommables serait de 18 millions de dollars. Le présent aperçu reprend l’essentiel d’un rapport exhaustif d’évaluation d’une technologie de la santé disponible dans le site Web de l’ACMTS (www.acmts.ca) : Brown A, Wells P, Jaffey J, McGahan L, Poon M-C, Cimon K, Campbell K. Efficacité pratique et rentabilité des appareils de surveillance au point de service de l’anticoagulothérapie orale de longue durée. Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS) 600-865, avenue Carling, Ottawa (Ontario) Canada K1S 5S8 Tél. : 613-226-2553 Téléc. : 613-226-5392 www.acmts.ca L’ACMTS est un organisme sans but lucratif indépendant qui appuie la prise de décisions éclairées en matière de soins de santé en fournissant de l’information fiable et objective sur les technologies de la santé. 1 Introduction L’anticoagulothérapie orale (ATO) est d’usage répandu dans la prévention et le traitement de la thromboembolie, communément appelée caillot sanguin. L’anticoagulothérapie peut être brève ou longue (plus de trois mois), nécessaire dans ce dernier cas en présence d’un risque élevé de complications thromboemboliques, habituellement en raison d’une maladie chronique, dont la maladie cardiaque traitée par une valve cardiaque mécanique, la fibrillation auriculaire chronique, la thromboembolie veineuse, l’infarctus du myocarde aigu, l’accident vasculaire cérébral ou l’occlusion artérielle périphérique1,2 Dans de nombreux cas, l’ATO se poursuit pendant toute la vie. Bien que l’ATO de longue durée soit déjà courante au Canada, son usage se répandra davantage selon toute vraisemblance au fil du vieillissement de la population, car la fibrillation auriculaire et la thromboembolie veineuse, deux des affections les plus courantes nécessitant une ATO – sont plus fréquentes chez les personnes âgées. En Amérique du Nord, la warfarine est l’anticoagulant de prédilection en ATO de longue durée. La warfarine, qui empêche l’organisme d’utiliser la vitamine K dans le processus de coagulation, est en fait un antagoniste de la vitamine K. Celle-ci est essentielle à la formation de caillots. La warfarine est disponible au Canada sous les marques Apo®-Warfarin, Coumadin®, Gen-Warfarin, Novo-Warfarin et Taro-Warfarin. Les données probantes disponibles confirment l’utilité du traitement de longue durée par un antagoniste de la vitamine K comme la warfarine pour réduire le risque de décès (mortalité) ou de maladie ou d’incapacité (morbidité) chez les personnes à risque élevé de formation de caillots sanguins. Étant donné que chaque personne réagit à sa façon à la warfarine, et que cette réaction peut changer au fil du temps, la dose doit être adaptée à chaque cas particulier. Si la dose est trop basse, le patient ne sera pas suffisamment protégé contre la formation d’un caillot sanguin. Si la dose est trop élevée, le patient courra un risque de saignement ou d’hémorragie. D’où l’importance de surveiller le degré d’anticoagulation dans l’ATO de longue durée. Jusqu’à maintenant, la surveillance se faisait en milieu hospitalier ou aux consultations externes par une épreuve de laboratoire. Le prélèvement sanguin (veinopuncture) est analysé au laboratoire pour déterminer le rapport international normalisé ou RIN. La valeur du RIN indique l’intensité de l’ATO. La surveillance continue selon cette procédure n’est pas chose aisée pour le patient, particulièrement s’il réside dans une région éloignée car alors il doit franchir une longue distance pour se rendre au lieu de l’analyse, ou pour celui qui désire voyager pendant une longue période car il lui est alors impossible de se présenter à l’hôpital pour l’analyse. Comme c’est le cas habituellement, il y a un délai du prélèvement sanguin à la transmission du résultat de l’épreuve au médecin qui exerce la surveillance et qui prescrit l’anticoagulothérapie orale. Dans les dix dernières années, la technologie au point de service (PS) dans la surveillance de l’ATO est devenue disponible. L’appareil portable produit le même résultat, soit le RIN, que l’épreuve de laboratoire, sans qu’il soit nécessaire d’avoir accès au laboratoire ou de procéder à la veinopuncture. Seule une goutte de sang prélevée du bout du doigt est nécessaire à l’analyse, à l’instar de la technique du glucomètre. Le résultat est connu en une minute seulement et le médecin peut modifier la dose dès lors. L’appareil au PS peut être utilisé dans divers milieux, dans une clinique, au domicile du patient ou dans un autre milieu de soins. Le patient en autosurveillance peut communiquer le résultat au 1 médecin qui, lui, adapte la dose, le cas échéant. Dans certains cas, le patient modifiera lui-même la dose de son anticoagulant. Les appareils de surveillance au PS ont fait leur apparition sur le marché en avril 1999, alors que CoaguChek® a été homologué le premier par Santé Canada. Depuis lors, des professionnels de la santé, des établissements de soins et des personnes les utilisent, quoique leur usage soit encore limité. Dans certains pays comme l’Allemagne, l’autosurveillance et l’autocontrôle à l’aide d’appareils au PS sont désormais courants. Au Canada, CoaguChek est indiqué dans la surveillance par le professionnel de la santé ou le patient. Le prix de détail de l’appareil de Roche Diagnostics est de 995 $. À cela s’ajoutent le coût des bandes réactives, soit 325 $ pour 48, le coût des lancettes, à savoir 7,49 $ pour 50, et le coût de la solution de contrôle de la qualité, soit 29 $ l’ensemble de 4 x 2mL. Au moment de la présente analyse, ProTime® était réservé aux professionnels de la santé au Canada. Le prix de détail de l’appareil ProTime Machine (International Technidyne Corporation) est de 1 895 $ (sous réserve de modifications) (entretien personnel du 18 août 2006 avec Katrin Jung, Sorin Group, Toronto). L’utilisateur doit également se procurer les cuvettes ProTime et les collecteurs Tenderlett au prix de 512,50 $ la boîte de 25 (sous réserve de modifications) (entretien personnel du 18 août 2006 avec Katrin Jung, Sorin Group, Toronto). Compte tenu de la disponibilité d’appareils au PS dans l’ATO et de leurs avantages potentiels, les administrateurs et les bailleurs de fonds des programmes d’anticoagulation au Canada doivent connaître l’efficacité pratique et la rentabilité relatives de ces appareils comparativement à l’épreuve de laboratoire courante. 2 Objectif L’analyse a pour objectif d’évaluer l’efficacité pratique et les aspects économiques des appareils de surveillance au PS de l’ATO de longue durée. L’objectif sera atteint en répondant aux questions de recherche suivantes : • Que disent les données probantes cliniques sur l’efficacité pratique des appareils de surveillance au PS comparativement à l’épreuve de laboratoire courante dans l’ATO de longue durée? • Quelle est la rentabilité de l’autosurveillance de l’ATO à l’aide d’un appareil au PS et de la surveillance au PS en clinique d’anticoagulation comparativement à l’épreuve de laboratoire courante? 3 Méthode de l’analyse clinique et de l’analyse économique Méthode L’analyse se conforme au protocole établi au préalable. Par après, les critères de sélection des études ont été modifiés pour prendre en compte les études où des personnes sont soumises à l’ATO de moins de trois mois au début de l’étude. Cet élargissement des critères est imputable à la difficulté de déterminer la durée du traitement au moment de référence dans bien des études. La documentation publiée a été recensée en consultant PubMed, The Cochrane Library, DIALOG®, MEDLINE®, 2 EMBASE®, BIOSIS Previews® et PASCAL. D’autres recherches documentaires ont été effectuées dans PubMed et The Cochrane Library. La stratégie de recherche repose sur les descripteurs et les mots clés appropriés pour restreindre les résultats aux essais cliniques comparatifs, aux métaanalyses et aux études méthodiques. Aucune restriction de langue ou d’année n’a été imposée. La littérature grise a été relevée en consultant le site Web d’organismes de réglementation, d’organismes d’évaluation de technologies de la santé et d’organisations connexes. Des bases de données spécialisées, comme celle du NHS Centre for Reviews and Dissemination de l’Université de York et celle du Latin American and Caribbean Center on Health Sciences Information (LILACS), ont été consultées. Enfin, nous avons parcouru le site Web d’associations professionnelles pertinentes. Critères de sélection Pour les besoins de l’analyse clinique des appareils de surveillance au PS de l’ATO, l’essai clinique comparatif et randomisé (ECR), dans un milieu de recherche ou un milieu clinique, était admissible s’il avait recruté des personnes soumises à une ATO de longue durée, soit d’au moins trois mois, et s’il comparait la surveillance de l’anticoagulation à l’aide d’un appareil au PS et la surveillance habituelle par l’épreuve de laboratoire. L’étude retenue examine le taux d’hémorragie majeure, le taux d’incidents thromboemboliques majeurs ou la période durant laquelle le RIN du patient se situe dans l’écart thérapeutique normal. Deux examinateurs ont procédé de façon indépendante à la sélection en examinant chacune des mentions et son résumé avant d’en discuter entre eux pour établir un consensus. Ils ont ensuite examiné, chacun de leur côté, la version intégrale des comptes rendus choisis et en ont discuté ensemble de nouveau avant de s’entendre sur le choix final. Évaluation de la qualité La qualité des études retenues a été évaluée selon les critères de l’échelle Jadad, et la dissimulation de l’affectation des ressources a également été évaluée et qualifiée d’appropriée ou d’inappropriée selon les critères proposés par Schulz et Grimes3,4. Les aspects pour lesquels l’information était insuffisante ont été qualifiés d’imprécis ou d’absents. Nous avons pu obtenir les renseignements manquants en communiquant avec les auteurs. Technique analytique Pour évaluer les paramètres de l’hémorragie majeure, de l’incident thromboembolique majeur et de tous les incidents thromboemboliques, nous avons effectué une méta-analyse en calculant le ratio d’incidence approché (RIA) et son intervalle de confiance (IC) de 95 % du taux d’incidents, pour comparer les résultats de l’appareil au PS et les résultats de l’épreuve de laboratoire. Nous avons également comparé les taux de mortalité, et calculé les RIA connexes. Le RIA s’apparentera au risque relatif quand l’incident est « rare », ce qui pour certains correspond à < 10 %5. Dans toutes les comparaisons, nous avons appliqué un modèle à effets aléatoires selon la méthode de DerSimonian et Laird6. Les différences entre les effets ont été mises à l’épreuve par le test z, et les valeurs p < 0,05 dénotent la signification statistique. Les données des études sur le nombre de jours où le RIN est dans l’écart thérapeutique, ou au-dessus ou en deçà de cet écart, ont été regroupées pour illustrer la période où le RIN est dans l’écart et la période où ce RIN est hors de l’écart. Nous avons procédé au test t apparié des périodes moyennes dans l’écart dans le groupe témoin et le groupe de l’intervention. 3 4 Résultats La recherche documentaire initiale a produit 439 mentions, et les mises à jour habituelles 13 autres mentions, pour un total de 452. Nous en avons retenues 43, puisque 409 n’étaient pas conformes aux critères de sélection. Après l’élargissement des critères de sélection, nous avons sélectionné deux autres études, et avons donc examiné la version intégrale de 45 mentions potentiellement pertinentes. À la suite de cet examen approfondi, 29 comptes rendus ont été rejetés, et 16 portant sur 15 ECR distincts ont été retenus7-22. Les ECR sont disparates des points de vue de la période d’observation, de l’âge moyen des participants et de l’indication de l’anticoagulation. Du lot, 11 comparent l’autosurveillance ou l’autocontrôle de l’anticoagulation à la surveillance habituelle. Huit études n’ont recruté que des personnes soumises à l’ATO depuis au moins trois mois, et dans sept études, les participants ont été admis à compter de l’instauration de l’ATO. Le score de qualité des 15 ECR selon l’échelle Jadad va de 1 à 3, neuf d’entre eux obtenant 3 sur 5, et deux obtenant 1. Tous les ECR confondus, on compte 2 144,6 années-personnes d’observation dans le groupe de l’intervention et 2 316,1 années personnes d’observation dans le groupe témoin. L’analyse globale porte sur cinq grands paramètres pour lesquels toutes les études sont considérées ensemble, puis les seules études comparant l’autosurveillance ou l’autocontrôle aux soins usuels. Dans ces études, le nombre d’incidents thromboemboliques majeurs est beaucoup moindre, et le nombre d’incidents thromboemboliques en général et le nombre de décès sont également moindres dans le groupe de la surveillance au PS que dans le groupe des soins usuels. S’agissant de tous les ECR et des ECR sur l’autosurveillance ou l’autocontrôle, la période moyenne où le RIN est dans l’écart thérapeutique est plus longue dans le groupe de la surveillance au PS que dans le groupe des soins usuels (respectivement p = 0,004 et p = 0,016). Il n’y a pas de différences statistiquement significatives sous l’angle du risque d’hémorragie majeure entre les deux groupes. Les résultats ne bronchent pas quand seules les études de qualité élevée sont prises en considération. Tableau 1 : Ratios d’incidence approchés de tous les ECR* et des ECR sur l’autosurveillance ou l’autocontrôle** Tous les ECR ECR dont le score de qualité est de 3 ou plus Autosur-veillance, autocontrôle † Hémorragie majeure Incidents thromboemboliques majeurs Tous les incidents thromboemboliques Tous les décès Période dans l’écart en % 0,75 (IC 95 % 0,51 à 1,10) 0,78 (0,48 à 1,28) 0,48 (IC 95 % 0,33 à 0,72) 0,53 (0,31 à 0,91) 0,45 (IC 95 % 0,29 à 0,70) 0,65 (0,29 à 1,48) 0,54 (IC 95 % 0,35 à 0,83) 0,36 (0,14 à 0,93) 69 % contre 61 %† 0,76 (IC 95 % 0,47 à 1,24) 0,43 (IC 95 % 0,25 à 0,74) 0,35 (IC 95 % 0,16 à 0,73) 0,38 (IC 95 % 0,19 à 0,74) 71 % contre 63 %‡ ‡ p = 0,004; p = 0,016. 4 71 % contre 64 % Dans les 11 ECR où les patients ont recours à un appareil au PS pour l’autocontrôle, trois ne mentionnent pas les critères de sélection des patients, le consentement ou les abandons. La plupart des autres études indiquent que près de 40 % (16 % à 40 %) des patients ne sont pas en mesure d’utiliser un appareil au PS. Par ailleurs, six des onze ECR précisent la proportion des participants qui ont abandonné après l’entraînement à la surveillance au point de service, plus précisément un taux d’abandons allant de 18 % à 28 %. Six études mentionnent que de 12 % à 19 % des patients ont cessé d’utiliser l’appareil au PS comparativement à 0 % à 6 % dans le groupe des soins usuels. 5 Analyse économique Étude de la documentation économique Méthode La documentation publiée a été relevée par une recherche documentaire dans MEDLINE® (de 1966 à aujourd’hui), BIOSIS Previews® (de 1969 à aujourd’hui), PASCAL et EMBASE® (de 1974 à aujourd’hui), sans imposer de restrictions d’année ou de langue. La stratégie de recherche a été définie en fonction de descripteurs et de mots clés appropriés et d’un filtre pour restreindre la recension aux mentions de nature économique. Nous avons également effectué une recherche documentaire parallèle dans Health Economic Evaluations Database (HEED). Critères de sélection L’étude économique était retenue si elle satisfaisait les critères suivants : • la structure d’une évaluation économique complète, soit l’étude coût-efficacité indiquant la mesure comparative générale des coûts et des conséquences, ou d’une évaluation économique partielle, comme une comparaison des coûts; • la population étudiée : des adultes soumis à une ATO de longue durée; • l’intervention : la surveillance de l’anticoagulothérapie à l’aide d’un appareil au PS; • le comparateur : l’épreuve de laboratoire courante de détermination du RIN; • le principal paramètre d’intérêt : exprimé par l’incidence supplémentaire du passage du comparateur à l’intervention (notamment par une mesure synthétique comme le ratio coûtefficacité supplémentaire, l’écart de coût ou la différence sur le plan des coûts et des conséquences). Un examinateur a passé en revue les mentions en appliquant les critères de sélection au titre et au résumé, avant d’évaluer la version intégrale des comptes rendus sélectionnés. Un examinateur a extrait les données des études retenues à l’aide d’une fiche d’extraction des données, et un autre examinateur a vérifié les données extraites. Évaluation de la qualité Deux examinateurs ont évalué la qualité des études économiques choisies en fonction de la liste de vérification conçue par le British Medical Journal; ils ont également évalué la qualité des études de comparaison des coûts23,24. 5 Résultats La recherche documentaire a permis de recenser 139 mentions, dont sept conformes aux critères de sélection et qui portent sur six études distinctes. Deux de ces six études sont des évaluations économiques complètes25-27, et quatre sont des études de comparaison des coûts28-31; cinq étudient l’appareil CoaguChek25-28,30,31, et une l’appareil ProTime29. Les deux évaluations économiques complètes25-27 sont de qualité relativement élevée. En général, les résultats penchent en faveur des appareils au PS. Évaluation économique primaire Méthode L’évaluation économique prend la forme d’une analyse coût-utilité en vertu d’une modélisation analytique décisionnelle. L’arbre décisionnel a été conçu comme un modèle Markov dans Microsoft® Excel. La population est formée de personnes soumises à une ATO de longue durée, soit au moins trois mois. Les options de l’arbre décisionnel sont les soins usuels, la surveillance à l’aide d’un appareil au PS en clinique d’anticoagulation et l’autosurveillance à l’aide d’un appareil au PS. Le modèle adopte les perspectives sociétale et du système de santé. L’horizon temporel du modèle est de cinq ans. Dans le modèle analytique décisionnel, les cohortes hypothétiques sont observées pendant cinq ans après le début de l’ATO par la warfarine. Dans chaque option de surveillance, la période où le RIN est dans l’écart thérapeutique ou hors de cet écart est estimée selon les résultats de la méta-analyse avec le risque connexe du premier caillot ou saignement et du caillot ou du saignement récurent, et du risque subséquent d’incapacité temporaire ou permanente. Dans chaque année-cycle du modèle, les personnes passent de l’un des cinq états de santé à un autre, allant de l’absence de caillot ou de saignement au décès. Figure 1 : Aperçu du modèle *RIN = rapport international normalisé 6 Le passage d’un état à un autre est régi par les taux de probabilité des incidents issus de la métaanalyse et de la documentation publiée. Les principaux éléments du modèle sont la période où le RIN est dans l’écart thérapeutique et la période où le RIN est hors de cet écart dans chaque option de surveillance, le risque d’effets indésirables durant ces périodes et le risque d’incapacité à la suite d’un effet indésirable. Les années de vie pondérées par la qualité (QALY) correspondant à chaque décision ont été estimées en fonction des données de plusieurs études25,26,32-36. Résultats Concernant CoaguChek, notre analyse indique que, dans la perspective du système de santé, le passage des soins usuels à un appareil au PS en clinique d’anticoagulation est économique (voir le tableau 2). S’agissant de l’autosurveillance, les résultats ne penchent pas en faveur de la rentabilité du point de vue du système de santé disposé à débourser la somme seuil de 50 000 $; ils confirment cependant la rentabilité dans la perspective sociétale. Concernant ProTime, passer des soins usuels à un appareil au PS en clinique d’anticoagulation est favorable, semble-t-il, du point de vue du système de santé. Nous n’avons pas établi de comparaison entre les soins usuels et l’autosurveillance, parce que ProTime ne pouvait pas être utilisé en autosurveillance au Canada au moment de notre analyse. Tableau 2 : Coûts annuels de la surveillance de l’anticoagulation par patient et ratios coût-efficacité sur cinq ans de CoaguChek et de ProTime Stratégie de surveillance Soins usuels CoaguChek en clinique d’anticoagulation Autosurveillance par CoaguChek ProTime en clinique d’anticoagulation Coûts annuels Comparaison avec soins usuels (coût par QALY) Prestataires Prestataires de Sociétale* de soins (pas soins (y CHSLD) compris CHSLD) Système de santé Patients et prestataires Total 322 $ 361 $ 686 $ 862 $ 1 008 $ 1 223 $ S.O. rentable S.O. rentable S.O. 10 808 $ 807 $ 274 $ 1 081 $ 72 955 $ 57 595 $ rentable 392 $ 862 $ 1 254 $ 2 437 $ rentable 15 966 $ *Comprend les coûts assumés par les patients et les prestataires de soins; CHSLD = centre d’hébergement et de soins de longue durée; QALY = année de vie pondérée par la qualité; s.o. = sans objet. 7 6 Limites Dans l’analyse de l’efficacité pratique, il nous a été impossible de déterminer si les incidents thromboemboliques avaient été évalués à l’aveugle et de façon objective. La fréquence de l’épreuve de détermination du RIN est plus élevée dans la surveillance au PS. Aucune des études n’est à double insu. En raison des critères de sélection des participants des essais cliniques et du taux élevé d’abandons, il est difficile de préciser le caractère applicable des constatations. En outre, il est impossible de tirer une conclusion probante quant aux effets bénéfiques de l’autosurveillance ou de l’autocontrôle à l’aide d’un appareil au PS sans que des essais cliniques comparatifs et randomisés rigoureux se penchent sur la question. Au chapitre de l’analyse économique, les limites sont les suivantes : • la méta-analyse n’a pas permis d’établir la distinction entre CoaguChek et ProTime sur le plan des résultats cliniques; nous avons supposé que leur efficacité pratique respective est équivalente; • à l’exception du coût de l’appareil et de celui des articles connexes, CoaguChek et ProTime sont traités sur un pied d’égalité dans la modélisation; • l’information sur les ressources nécessaires à l’usage du coagulomètre portable ou à l’exécution de l’épreuve de laboratoire courante au Canada est rare; • nous avons pu analyser l’appareil au PS dans deux milieux : la clinique d’anticoagulation et le domicile du patient en autosurveillance; l’appareil peut être utilisé dans d’autres milieux, le cabinet du médecin de famille, la pharmacie ou la résidence de personnes âgées qui bénéficient des soins d’une infirmière à domicile; • notre analyse se limite à l’autosurveillance; l’appareil peut également être utilisé dans le cadre d’une stratégie de prise en charge où le patient modifie lui-même la dose de l’anticoagulant à la lumière des résultats37. 7 Incidence sur le système de santé Selon les estimations, les programmes d’assurance médicaments publics au Canada comptent 209 000 personnes soumises à une ATO de longue durée, qui bénéficieraient d’une disponibilité accrue d’appareils au PS. En outre, 50 160 de ces personnes seraient en mesure d’utiliser un tel appareil pour les besoins de l’autosurveillance à la maison. La mise de fonds nécessaire pour doter ces personnes d’un appareil CoaguChek serait d’environ 50 millions de dollars, tandis que le coût annuel des articles consommables s’élèverait à 18 millions de dollars. Si les cliniques d’anticoagulation canadiennes se munissaient de la technologie CoaguChek, le coût d’acquisition des appareils serait d’environ 84 000 $, tandis que le coût annuel des articles consommables serait d’environ 8 millions de dollars. Si elles optaient pour la technologie ProTime, la mise de fonds serait d’environ 160 000 $, alors que le coût annuel des articles consommable s’élèverait à environ 9,5 millions de dollars. L’examen des aspects éthiques et psychosociaux dans des articles cliniques7,8,12,13,15-18,20-22,38-41 révèle que la plupart des interventions dans les études en question sont l’autosurveillance ou l’autocontrôle à la maison à l’aide d’un appareil de surveillance. Des données probantes font ressortir cependant que les patients préfèrent la surveillance au PS en clinique d’anticoagulation à l’épreuve de laboratoire courante à l’hôpital. 8 La plupart des études qui examinent la question de la qualité de vie indiquent que les personnes qui ont adopté l’autosurveillance ou l’autocontrôle au PS ne reviendraient plus à l’épreuve de laboratoire courante. Il faut savoir que ce ne sont pas tous les patients qui sont en mesure d’opter pour l’autosurveillance ou l’autocontrôle, et que ceux qui peuvent le faire doivent y être entraîné. Il importe de s’assurer que le patient possède les capacités physiques et cognitives nécessaires pour faire usage de façon appropriée de l’appareil et de l’équipement connexe. De nombreuses personnes sous anticoagulation de longue durée ne sont pas en mesure d’adopter l’autosurveillance ou l’autocontrôle au PS, parce qu’elles n’en ont pas le désir ou par manque de capacités physiques ou cognitives. Selon les articles cliniques examinés, près de la moitié des personnes dans un programme d’autosurveillance nécessitent l’aide d’un prestataire de soins. L’examen souligne également la nécessité d’offrir aux professionnels de la santé une formation sur l’usage des appareils de surveillance au PS. 8 Conclusion L’étude des données probantes cliniques et la méta-analyse quantitative font ressortir que l’emploi des appareils de surveillance au PS de l’ATO amène une réduction significative des décès et des incidents thromboemboliques, et améliore la maîtrise du RIN, par rapport à l’épreuve de laboratoire classique. L’influence de l’appareil au PS sur les épisodes hémorragiques est semblable à celle de l’épreuve courante. Les résultats fondamentaux ne bronchent pour ainsi dire pas dans les analyses de sous-groupes. La prudence s’impose tout de même dans l’interprétation de cette conclusion en raison de certaines limites. Nous n’avons pu déterminer avec certitude si les incidents thromboemboliques ont été évalués à l’aveugle et de façon objective. En outre, la fréquence du test est plus élevée dans les stratégies de surveillance au PS que dans la stratégie de surveillance usuelle. Au Canada, près de 24 % des personnes soumises à une ATO seraient en mesure d’adopter l’autosurveillance ou l’autocontrôle à l’aide d’un appareil au PS. L’acuité visuelle, l’habileté cognitive et la dextérité sont essentielles à l’autosurveillance. En règle générale, la moitié des personnes participant à un programme d’autosurveillance pourraient nécessiter l’aide d’un dispensateur de soins. Des points de vue éthique et psychosocial, soulignons l’importance de l’éducation du patient et du professionnel de la santé quant à l’utilisation d’un appareil au PS. Notre analyse économique primaire conclut que les appareils CoaguChek et ProTime en clinique d’anticoagulation sont rentables comparativement à la surveillance usuelle, dans la perspective du système de santé public et en tenant compte des coûts en CHSLD. Dans la perspective sociétale, les appareils au PS sont rentables en clinique, selon le critère de la volonté de payer 50 000 $ par QALY. Un programme clinique devrait débourser environ 84 000 $ pour se doter d’appareils CoaguChek, et assumer le coût annuel des articles consommables, des cartouches et des lancettes par exemple, d’environ 8 millions de dollars. S’il opte pour les appareils ProTime, il devra débourser 160 000 $ pour acquérir les appareils et 9,5 millions de dollars par an pour couvrir les articles consommables. Dans la perspective d’un système de santé public, CoaguChek n’est pas rentable en autosurveillance à domicile d’après le critère de la volonté de payer 50 000 $ par QALY. Du point de vue sociétal, quand le temps et le déplacement des patients et des dispensateurs de soins sont pris en considération, CoaguChek est rentable. Au moment de notre analyse, ProTime n’était pas disponible en autosurveillance au Canada. La mise de fonds d’un programme d’autosurveillance à l’aide de l’appareil CoaguChek serait d’environ 50 millions de dollars, tandis que le coût annuel des articles consommables s’élèverait à environ 18 millions de dollars. 9 9 Références 1. Chai SJ, Macik BG. Improving the safety profile of warfarin. Semin Hematol 2002;39(3):179-86. 2. Ansell JE, Weitz JI, Comerota AJ. Advances in therapy and the management of antithrombotic drugs for venous thromboembolism. Hematology (Am Soc Hematol Educ Program) 2000;266-84. Accessible au : http://www.asheducationbook.org/cgi/reprint/2000/1/266 (consulté le 7 février 2006). 3. Schulz KF, Chalmers I, Hayes RJ, Altman DG. Empirical evidence of bias. Dimensions of methodological quality associated with estimates of treatment effects in controlled trials. JAMA 1995;273(5):408-12. 4. Jadad AR, Moore RA, Carroll D, Jenkinson C, Reynolds DJ, Gavaghan DJ, et al. Assessing the quality of reports of randomized clinical trials: is blinding necessary? 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