LA PEINE Ça vaut la peine d`en parler!
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LA PEINE Ça vaut la peine d’en parler! 33e Congrès de la Société de criminologie du Québec 23, 24 et 25 mai 2007 LSJPA APPLICATION DES PEINES Annick Murphy Procureure chef adjointe aux poursuites criminelles et pénales Chambre de la jeunesse Montréal Le modèle québécois d’intervention en matière de délinquance juvénile survivra-t-il à l’application de la LSJPA? Rappel historique Fin des années 90 - Refonte par le parlement fédéral de la loi concernant les jeunes contrevenants (projet de loi C-7) Contestation par l’ensemble de la société québécoise Mobilisation générale des intervenants sociaux judiciaires afin de préserver les acquis du « modèle québécois d’intervention en matière de délinquance juvénile » Rappel historique 19 février 2002 - Le projet de loi C-7 reçoit la sanction royale Novembre 2002 - L’affaire du décret (10212001) du Gouvernement du Québec concernant le renvoi relatif au projet de loi C-7 sur le système de justice pénale pour les adolescents est plaidée devant la Cour d’appel Rappel historique 31 mars 2003 - Jugement de la Cour d’appel suite au renvoi par le Gouvernement du Québec Dispositions de la LSJPA validement adoptées et dispositions attaquées par le PGQ pas incompatibles avec les instruments internationaux ratifiés par le Canada Présomption d’assujettissement à la peine applicable aux adultes et présomption concernant l’exception à la règle de confidentialité de l’identité de l’adolescent portent atteinte à la liberté et à la sécurité psychologiques des adolescents en vertu de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés Principe de la proportionnalité dans la détermination de la peine ne porte pas atteinte au droit garanti à l’égalité Rappel historique 1er avril 2003 Mise en vigueur de la LSJPA Modèle d’intervention québécois L’adoption de la LSJPA force les directeurs provinciaux à redéfinir les grandes orientations de leur intervention auprès des adolescents et à préciser les objectifs et les valeurs du modèle d’intervention québécois Modèle d’intervention québécois Objectifs Responsabilisation Éducation Réadaptation Réinsertion sociale Modèle d’intervention québécois Valeurs Prise en compte des besoins spécifiques des adolescents Bon service au bon moment Intervention rapide Respect des besoins de la victime Promotion de la participation des parents Usage des ressources de la communauté La LSJPA nous condamne-t-elle à renoncer à ces objectifs et à perdre ces valeurs? La LSJPA et ses principes Toutes les peines doivent respecter les principes énoncés à l’article 38 Si le tribunal entend rendre une peine de mise sous garde, il doit de plus appliquer les principes énoncés à l’article 39 Que sont ces principes et quels en sont les effets? Principes généraux LSJPA Code criminel Article 38(1) - Objectifs Article 718 - Objectifs Sanctions justes Sanctions justes Réadaptation et Réinsertion sociale réinsertion sociale Maintien d’une Protection durable société juste, paisible de la société et sûre Principes généraux LSJPA Article 38(2)a) La peine ne doit pas être plus grave que pour un adulte en semblables circonstances Article 38(2)b) Harmonisation des peines entre les régions Code criminel Article 718.2b) Harmonisation des peines, peines semblables pour des infractions semblables dans des circonstances semblables Article 718.2b) Harmonisation des peines au Canada Principes généraux LSJPA Article 38(2)c) La peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité de l’adolescent à l’égard de l’infraction Code criminel Article 718.1 La peine est proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant Principes généraux LSJPA Article 38(2)d) Examen de sanctions alternatives à l’emprisonnement Code criminel Article 718.2e) Examen de toutes les sanctions substitutives Principes généraux LSJPA Code criminel Article 38(2)e) minimum de contrainte i. réadaptation et ii. réinsertion sociale iii. conscientisation face aux responsabilités, reconnaissance des torts causés à la victime et à la collectivité Article 718 2.d) sanctions moins contraignantes d. favoriser la réinsertion sociale f) conscientisation face aux responsabilités, reconnaissance des torts causés à la victime et à la collectivité Principes généraux Article 38 (3) - Facteurs à prendre en considération L’objectif des peines spécifiques est de rendre l’adolescent responsable de l’infraction qu’il a commise par l’imposition de sanctions justes ayant des conséquences significatives qui favorisent sa réadaptation et sa réinsertion sociale en vue de favoriser la protection durable du public Principes généraux LSJPA Article 38(3)a) Degré de participation Code criminel Article 718.1 Degré de responsabilité Article 38(3)b) et c) Dommages causés à la victime et à la collectivité et réparations Article 718.e) Réparations des torts causés à la victime et à la collectivité Principes généraux LSJPA Article 38(3)d) Calcul de la détention préventive Article 38(3)e) Antécédents judiciaires Code criminel Article 719.(3) Tribunal peut prendre en compte toute période de détention préventive Article 725.(1)a) Antécédents judiciaires Principes généraux LSJPA Article 38(3)f) Circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation de l’adolescent Code criminel Article 718.2a) Circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant Principes applicables au placement et à la surveillance Article 39 (1) a) b) c) d) - Le tribunal ne peut imposer une mise sous garde que si, selon le cas, l’adolescent: a commis une infraction avec violence (cause, tente ou menace de causer des lésions corporelles) n’a pas respecté les peines ne comportant pas de placement sous garde qui lui ont déjà été imposées a commis un acte criminel passible de plus de 2 ans (plusieurs déclarations de culpabilité antérieures) cas exceptionnel Principes applicables au placement et à la surveillance LSJPA Article 39(2) La mise sous garde ne sera imposée qu’en dernier recours après avoir examiné toutes les mesures de rechange possibles Code criminel Article 718.2d) La privation de liberté ne sera envisagée qu’après avoir examiné la possibilité de sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient Principes applicables au placement et à la surveillance Article 39(5) - La mise sous garde ne doit pas se substituer à des services de protection de la jeunesse ou à d’autres mesures sociales plus appropriées Principes applicables au placement et à la surveillance Protection de la jeunesse au Québec Art. 38f) LPJ f) troubles de comportement sérieux : lorsque l'enfant, de façon grave ou continue : 1° se comporte de manière à porter atteinte à son intégrité physique ou psychologique et que ses parents ne prennent pas les moyens nécessaires pour mettre fin à la situation ou que l'enfant de 14 ans et plus s'y oppose ;… Principes applicables au placement et à la surveillance Conséquences de l’article 39 L’utilisation de la mise sous garde est retardée, ce qui empêche d’offrir l’encadrement nécessaire pour amorcer la réhabilitation Un certain nombre d’adolescents ne se retrouvent jamais dans une situation prévue à l’article 39 et ne peuvent donc bénéficier de cet encadrement, ou alors sont écartés de l’application de l’article 39 par l’effet de l’article 39(2) Quelques chiffres Statistiques Avertissements et renvois Avertissement Renvoi 1er avril au 31 déc. 2003 5596 930 2004 6775 1553 2005 5781 1534 2006 5452 1508 1er janv. au 30 avril 2007 1562 419 Statistiques Peines spécifiques Travaux Probation communautaires Placement et surveillance 1er avril au 31 déc. 2003 2976 4699 1400 2004 4797 7464 2279 Statistiques Peines spécifiques Travaux communautaires 2005 Total 4397 4397 Placement et Probation surveillance 6 mois et moins 7 à 12 mois Plus d’un an 1424 1497 4620 209 524 227 6794 1944 Statistiques Peines spécifiques Travaux communautaires 2006 Total 4488 4488 Placement et Probation surveillance 6 mois et moins 7 à 12 mois Plus d’un an 1519 1180 4568 337 723 211 6954 1701 Statistiques Peines adultes 1er avril au 31 déc. 2003 Nombre d’adolescents 7 2004 16 2005 2006 1er janv. au 30 avril 2007 9 12 4 Quelques exemples Exemple 1 15 ans - Un antécédent Deux vols qualifiés, deux voies de fait armées, deux menaces, bris d’engagement Impulsif, agressif, trouble limite, immature, pas d’empathie, risque élevé de récidives Peine: 18 mois de probation avec suivi, conditions et résidence au lieu désigné par le DP Exemple 2 16 ans - Aucun antécédent Possession pour fins de trafic de 247 roches de crack Membre d’un réseau organisé, ne reconnaît pas sa culpabilité, risque élevé de récidive Engagement en vertu de l’article 31 LSJPA (au soin de sa mère, durée 9 mois) Peine: tenant compte de la « détention » chez sa mère, 3 mois de placement différé Exemple 3 14 ans - Deux sanctions extrajudiciaires Août 2003 - Introduction par effraction, outils de cambriolage, consommation, risque élevé de récidive Mars 2004 - Peine de 6 mois de probation et 10h de travaux communautaires Récidive - Vol d’auto (réseau) Décembre 2004 - Peine de 12 mois de probation avec suivi et 20h de travaux communautaires Exemple 3 Récidive - Vol d’auto (réseau) Septembre 2005 - Peine de 12 mois de probation avec suivi et 18h de travaux communautaires Récidives importantes - Vol d’auto (réseau), introduction par effraction, conduite dangereuse et méfait 1er juin 2006 – Peine de 36 jours dont 24 jours de MSG discontinue et 12 jours de surveillance Exemple 3 Récidives de même nature 10 octobre 2006 - Peine de 150 jours de placement et surveillance Cette peine avait été suggérée par le délégué jeunesse en août 2003! Constats La cristallisation des principes de la LSJPA en matière d’application des peines présentera une menace au maintien des objectifs et des valeurs prônés par la société québécoise en matière d’intervention jeunesse Constats La durée des peines en probation et en mise sous garde a considérablement diminuée La moyenne d’âge actuelle est d’environ: 16 ans et demi en probation 17 ans et demi en mise sous garde Constats La mise sous garde est devenue une mesure privative de liberté à réserver aux adolescents à risque élevé de récidive et semble avoir perdu sa vocation d’instrument de rééducation et de réhabilitation La règle du 2/3-1/3 détermine le moment de la réinsertion sociale et ne permet pas de tenir compte des particularités de l’adolescent Constats Le temps passe… de nouveaux intervenants sociaux judiciaires sont formés aux principes de la LSJPA… et nous nous éloignons inexorablement des acquis actuels Constats Les amendements à la LPJ qui seront vraisemblablement en vigueur au mois de juin prochain limiteront l’utilisation des troubles de comportement comme motifs de compromission Un nombre important d’adolescents ne bénéficieront ni des ressources de la LSJPA ni de celles de la LPJ Constats La peine adulte n’est pas actuellement la principale menace au maintien des objectifs et des valeurs du modèle d’intervention québécois Audition prévue (automne 2007) par la Cour Suprême du Canada dans l’affaire Sa Majesté la Reine c. D.B. (Ontario) - Les articles 62, 63, 70 et 75 et les paragraphes 64(1), 72(1) et 110(2) b) de la LSJPA portent-ils atteinte de façon injustifiée à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés? Constats Les visées du Gouvernement fédéral en matière de crimes graves pourraient bouleverser dramatiquement le système jeunesse actuel et lui donner son coup de grâce Solutions Développement de nouveaux programmes de suivi dans la communauté en vertu de la LSJPA Utilisation de toutes les alternatives possibles découlant de la LSJPA Interpellation des gouvernements États généraux sur la place des adolescents dans la société québécoise Cette présentation n’engage que l’auteure et n’implique d’aucune manière le Directeur des poursuites criminelles et pénales