Examen critique et analytique de diverses chartes des Xe, XIe, XIIe

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Examen critique et analytique de diverses chartes des Xe, XIe, XIIe
'T
EXTRAIT DE LX REVUE RÉTROSPECTÎPE,
q
! " EL JA(VIER
1837.
EXAME N
CRITIQUE ET ANALYTIQUE
DE DIVERSES (1I-IARTES
DES X, XIe, XII ET XIW SIÈCLES,
SEL/.TIVES A LA T01CBÂ1NI.
[
Coiiirnuniué par M. Prosper Tarbé.]
Ceci n'est point une histoire de Touraine : ce
pas iiiiiic celle d'une église ou (l'un couvent. Il ne s'agit que de quelques chartes (l'origine diverse , tristes
débris (le chartriers autrefois fameux que le hasard a
EéUfliS (le nouveau.
La Touraine, ce beau pays que l'oua nomma le Jardin
de la France, n'a jamais été le théâtre (le ces évènemens
qui retentissent au loin ; jamais elle ne fut le foyer
d'un mouvement revolutionnaire ; jamais elle ne vit
germer et éclore dans son sein une grande idée morale,
philosophique ou religieuse elle n'a point et n'a jamais eu de cachet original.
Soumise à toutes les impressions puissantes Venues
du dehors, triînée i la r( ' mOI 'que tic toutes les passions
bonnes on mauvaises qui ont a g ite le inonde, elle ne
I
—
B B LI O THE QU E ))
Document
0000005628315
..7
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
fut jamais Touraine, mais elle fut toujours France.
Aussi l'histoire de ses moeurs, de ses us et coutuuws,
est-elle duis intérêt plus général que celle tics faits
passés aux bords (le la Loire.
Tout ce qui se faisait en Touraine se faisait ailleurs:
parler des * chartes de cet i e province, c'est parler (les
chartes (l'une nation, c'est révéler aux siècles modernes
les siècles passés, c'cst soulever un coin du voile qui
convie le moyen-âge.
La fin un dixième siècle, les onzième, douzième et
treizième siècles (le la monarchie française occ u peront
(eUX qui prendront la peine de lire ce Mémoire les
petits - fils (le Charlemagne vont descendre du trône
Itugues_Capet va prendre la place qu'ils ne peuvent
plus défendre ; le roi de France n'est plus Seigneur que
(le deux ou trois villes, et ses vassaux possèdent des
provinces. Il n'y a plus de Chaiiip-de-Mai , les capitulaires de Charlemagne dorment dans la poussière;
l'autorité, c'est la force; le (Iroit, c'est la victoire; les
seigneurs donnent et reprennct les bénéfices, fixent les
impôts, font des lois de police, jugent toutes les causes
et font exécuter leurs jugemens. Le noin du Roi mmc
sert plus qu'à dater les chartes. A côté de ce pouvoir
brutal s'élève une autre puissance moins tumultueuse;
elle ne manie pas la lance, ne va pas aux tournois; cc
n'est pas au trône de France qu'elle prétend; si ou
l'en croit, son royaume n'est pas (le CC monde; c'est
elle qui arrête Attila aux portes dc' Rome; c'est elle
(l iii fait tomber à genoux (levant l'Éternel les rois
souillés (hi sang (le Jeurs peuples; clic a mis Charlemagne sur le trône, puis elle va jeter le nom (le Dieu
au milieu de tous les hommes d'armes qui s'cntrégorgent.
JE »ivEjisS CHARTES.
3
Pourquoi k clergé a-t-il cessé (le remplir sa divine
mission? Pourquoi les ministres de paix ont-ils pris part
à toutes nos dissensions civiles? Les moines avaient fait
voeu de paivreté, et leurs couvens devinrent plus
riches que les rois qui les avaient comblés (le préscus.
Au commencement de l'ère chrétienne, ils se contenlaient de prier pour eux-mêmes; gagner le ciel lenr
semhlait tchc assez difficile, pour que la vie d'un
homme pût à peine y suffire ; leurs successeurs Vendirent des places dans le paradis, ils en assurèrent
aux générations futures, ils en promirent aux générations passées, si les général ions présentes voulaient les
payer : elles curent la faiblesse de le faire. Dès lors la
puissance du clergé fut sans bornes; la terreur de
l'enfr, dont ils pouvaient se servit' dans l'intérêt de
l'humanité , ne servit qu'à la fortune (le l'église. On va
les voit' tantôt évoquer un vieux souvenir , Une douat ion verbale, par exemple, et arracher aux enfans une
charte (le COUCCSSIOR (lui (levait sauver leurs ancêtre
des flammes éternelles ; tantôt assis au chevet du mourant, ils épouvantent cet hiomnie si brave dans les
combats et si faible sur un lit (le souffrance; et le
in nitra n t leur donne ses biens. Celui-ci pleure lanière
(l it ' î chérissait , celle-là le fils qu'elle u porté dans sou
sein; ce noble seigneur n'a pas d'enfans et son nom va
s'éteindre: les moines sont là qui promettent tout pour
(le l'or ; ils savent tout exploitei' , la joie et la douleur,
le remords et l'espérance, la crainte et l'ambition : et
puis quand ils ont ruiné une famille, ils appellent fa
colère de Dieu sut' quiconque osera lent' reprendre ce
qu'ils ont indignement extorqué. Les moines Ont disparu, et la malédiction du ciel qu'ils Invoquaient à kiji'
secours est N'tOfll bée sur CLIX.
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
C'était l'an 945.....
Louis d'Outre-mer, ce fils du malheureux Charlesle-Simple, régnait en France, etThéotolon était archevaque de Tours. issu d'une noble famille, ce prélat
avait porté l'habit monastique dans l'abbaye de Cluni.
Le monastère de Saint-Julien, le seul que renfermât
la ville (le Tours, n'était plus (jU'Ufl monceau de ruines
en 856 les Normands l'avaient détruit. Théotolon le
fit reconstruire, le (Iota richement, et ne cessa d'encourager les donations faites à monseigneur suint Julien; dans la charte que l'on va lire, c'est un chanoine
qui se dépouille pour enrichit' des moines de l'ordre de
.saint Benoît
cc Eccicsiain sanctain Domini vous fidelium crescere
tandemque augmen tis cotidian is per Christi gratiam
tu! u la ri nenlo fidel i uni anib igit , q u arnobre rn ego
Tcouo!o (i) , divjnâ miseranue cicmentiâ Turonicae
sedis archiepiscopus notum ac manifestum esse voInnius cunctis sanctac ecclesic fidelibus et pracipuè
ejusdem nostr sedis archiepiscopalis quin accessit ad
riostii culîninis celsitudiizein quideni fidel is nostet' et
canonicus sancti () Mauricii nection et sancti Martini
nomine ilotgerius huiniliter deprecans Uti cellulam
saiicti Cristofori quoe est sita in villâ Bridrado quam
ci in beneficiuni datam habehamus necnon et mansuin (3) ex proprio ipsius beiieficio, quem ohm pi'ci' Teoio/o:Tli&tolois fut évêque de l'ours de 932 à 945.
2) Sancti Mauricti: aujourd'hui Saint.C.atien. Le chapitre de cette cailiidrale claie de 859. Cette église, une des plus anciennes de France, avait
été mise par saint Martin sous la protection de saint Matirice; elle y lesta
jusqu'à la fin du treizième siècle où elle prit le nom de Saint-Gatien, son
premier évéquc.
(3) I'Îansum : Mansrss de mancre:
ri
manoir, ferme, métairie, etc.
DE DIVERSES CHARTES.
5
decessor suus nomine iunbertus pro quodain mundatione IpSIUS loci COfltLIICflt (lOiflhilO et sancto Juliano (i)
ad supplementum monachorum ibidem servientium
per liane auctoritatein sub aliquantuli censuuln redibiLone sibi vel successorihus suis pro majoris rei firmilate annuatim i'eddendâ condonare et concidere (lignareniur cujus (leprecationem uiià cum assensu fidelium
nostrorum utrius que ordiais latam et tietutilein esse
eognoscefltcs benigue recepiinus. Concessinius igitur
1 )refatam cellulain sancti Cristofori cum suprà dicto
tuanso, cuin omnibus utilitatibus et adjaccntiis suis, ad
1sredietos monachos sancti Juliani , in spccialcs corum
usus, ut faciant exindè sicut et de alus rebus sancto
Jiiliano pertinentibus et justè et legaliter adqiusitis.
Solventes cxindè aunis singulis ad missain sancti 1vlau.
1icii que celcbratur X K!. octob. Rotgerio fideli
nostro sive succcssorbus suis censutu proedictum soudus V, et pro manso solidos II, et cis ampitus non re(1uiratur aut cxigatur. Si autein ex instituto censu re
gligentes rcpctiti fuerint id ipsitut eniendare studeant
et qiiod tenziei'iut itou ideo a ni ittant piccamiir in teICI SIICCCSSOI'IIlfl riostrortim (Lemdnhialu Ut SIeULI sua
LICLU quae par amoiCin OnIuipOtCIiLiS t )oniini gessetin t
staliili voluerint vi ly ore consistctP , ita liwe iioSti
pirvi tatis gesla Si tiant omni tetnporc pcin)aiwre iiitactht
et inviolata ; et ut !ic auctotitas firiiiiov liaheatut'
t) Sanao Julewio Sanctus Juliauus de Scalarid, Saijt-.T,il icn-deEclitIks : ce mujiasicre élitit aiuisi uoInnt4 L41rc4 qu'il se trouait au lieu où
y aient les bateaux il lut consacré par Grégoire LIC Tours , 4 1 11 1 j 5 )ILOrlil
les reliques dt.aiut Julien, eu iG skir,itt en 55G, il Lit rebâti par
14,1011, eu ot u. Saint Mon, abbi de C,i,ty, y vint la uiiue ouue pour y
faire iei'rv la ugl.
6EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
manu propriâ eam firmavirnus manibusquc Ifldcliuin.
utriusque orbnis adfirinari rogavimus.
Data mense marc'; in civitate Turoriici , anno X,
regnante llludovteo. »
Au bas de cette charte se trouvent vingt - deux signatures, c'est d'abord ce lle de l'archevêque, puis
viennent celles (les dignitaires de Saint-Julien; les fidèles
laïques de Tliéotolou n'ont pas apposé leur seing manue! sur cette pièce, ils tic savaient sans (1OLIFC pas
signer, cl l'usage (les sceaux était peu répandu car il
n'en est pas question dans la plupart dei pièces de ceUe
époque : une chose digue de remarque , c'est que la
signature de l'archevêque et celle du doyen de SaititJulien sont en caractères grecs: sic )H2cûA. JPI®BHPO I)ccaiu'.
The'otolon avait ete moine à Cluni ; quand la mitre
archiépiscopale lui fut offerte, il la refusa par humilité,
et ne l'accepta que pour obéir à son abbé. Quelques
années après, cc moine, autrefois si modeste , (lit vit
parlant de lui ad nostri cU/Injnjs celsiiudinc,n
c'est (1U ' iE était le successeur (le saint i\Iartiu et (le
Grégoire (le Tours ; c'est que les archevêques et les
évêques prétendaient ne relever que de Dieu et se
disaient ses vicaires chacun dans leur diocèse; c'esL là
ce qui faisait toute leur force. A cette époque on devait
tout matérialiser, tout jusqu'aux dogmes religieux pour
les faire comprendre; un archevêque assis sut' son siége
d'or, sa crosse en main , entouré de ses vassaux, Paraissait plus grand que l'humble serviteur (le Dieu
allant sans l)rult fluire une aumône, ou porter quelques
paroles (le paix et de consolation sous ic toit (le l'af-
DE DIVERSES CHARTES.
figé. Au dixième siècle l'orgueil était grandeur:
Théotolon était donc grand.
Aussi , est-cc bien humblement que Roger, soit
, 1w iletnande la permission (l'offrir à saint Julien
une chapelle que l'at'chcvèquc lui avait donnée en hénefice; l'archevêque y consent; niais après avoir daigué consulter ses fidèles des deux ordres; puis il prie
ses successeurs de con sidéter l'autorisation qu'il donne
('owifiesi clic était leur ouvrage; il les supplie (le maintenir en pleine vigueur les donations faites par Roger.
Malgré la toute puissance des évêques, on voit qu'ils
étaient soumis aux formes imposées à tous les suzerains
par le gouvernement féodal : au moment ob fut rédigée
la charte dont il s'agit, l'autorité royale était anéantie
chaque seigneur était roi dans sa tci'iC et jouissait des
prérogatives du trône. Pour se les faite pai'dorùicr,
pour ne pas effaroucher la susceptibilité de ses vasseaux , chacun cherchait i dissimuler le joug qu'il leur
faisait porter: Charlemagne ne publiait (le loi qu'après
avoir consulté les grands de l'Étai ; Tliéotolon , pour
autoriser une donation, demande l'assentiment (k ss
fidèles des deux ordres, de ses vassaux , clercs et laïques. Quant au tiers-état, il ne (levait plus eu êLre
question que quand Louis-'e-Gros l'aurait reconstitué.
Pour s'assurer l'appui de leurs fidèles, les é1ties
coniiiie les rois avaient été obligés de multiplier les béiiéfiies et les fiefs; Lotit se donnait eu bénélice : k droit
tic passage d'un pont, des serfs , u oc tente 'I'liéotolou
avait octro'é i Boget la chapelle de Saint-Cliristoplie,
aussi Rogw' a-t-il besoin (l'êLI'c autorisé par son siizetain pour faire donation dc soit à l'abbaye de
Saint-Julien ; cc COflSeiltL'n1Cl1 t ne lui était Pas mêtiic
nécessaire poli! disposer d'une partie (le ses
1)iCIIS 1)10.
8EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
pres : Proprii hen/icii; on nominait ainsi les l)jCfls
qui venaient des ancêtres et qu'on ne tenait à aucun
titre de la générosité suzeraine ; les principes de la
propriété étaient foulés aux pieds; on ne pouvait ni
vendre, ni donner, ni échanger, sans l'assentiment du
seigneur; donner surtout , même son propre bien,
c'était, pour employer une expression de Beaumanoir,
apetisser son fief, et par conséquent faire tort ait
ce qui nécessitait son expresse autorisation.
Ce qui peut donner une idée du pouvoir arbitraire
des suzerains, c'est la prière que Théotolon adresse à
ses successeurs; il les supplie de respecter cette doua..
tion; il ne parle plus dc sa grandeur, c'est sa petitesse
qu'il invoque; il est bien humble alors, car il demande
une faveur à la postérité. Théotolon savait bien que
que
cette donation ne serait valable qu'autant que le l)IUS
fort voudrait bien croire à sa validité la charte qui
suit semble de la même (lute que celle qui la précède;
elle fera connaitre sous un autre point (le vue l'arbitraire du régime féodal.
«In nomine swnmi SalvatorisDomiii i.Theotolo sanct
Turonensis seclis archiepiscopalis ininlo et percogn i t u w
esse volumus fidelihus satictT, I)oniini Ecclesi presen.
tihus ac futuris, prcipuèque successorihus nostris
quia deprecatus est nos quidam fidelis noster et (t) archidiaconus nostrae mati'is Ecclesiœ nomine Dodaldus,
titi ex rebus sancti Lupi, quas nostre largitionis in
donum lenere videtur, aliquid dare (2)—cuidam homini
nomine Berncrio et uxori suie Hugualde sui) condi(r) Arc/zidiac.onus: archidiacre, second dignitaire dè l'église (le Tours.
(2) Les traits tirés remplacent tes mots que le mauvais état de la charte a.
fait disparaitre.
DE DIVERSES CHARTES. 9
tione census annuatim reddendum per hujus nostr
auctoritatis testamentum conccderemus: cujus (leprecation is benignè recipien Les concessirnus —Berncrio et
uxori suai Hua1a (i ) ex prefatâ sancti Lupi abbatiâ terrâ
arabili arpennum () situm prope suhurhiuiii—Tiironicœ urbis, non longè ah ips ecc1esi% sancti Lupi,
terminatum de tribus partibus terris cjusdem potestatis, quartâ autem parte viâ publictt, et etiamrnoclo
concedimus eis ipsam terram ut habeant ikeritiain
de super edificandi, plantandi, construendi et quidqutd
etiam eligerint ameliorandi, so1veitcs exiiidè annis
singulis ad festivitatem sancti Lupi quze celebratur
III Ki. augusti partibus Dodaldi fide!is nostri sive sucsessoribus suis censuin denarioruin VI; et eis amplius
ne requiratur aut exigatur, sed sub tali ceusu Iiherèac
quictè possideant, flemme inquietante atque contradicente, et si de eodem censu tardi autnegligentcs repetiti fuerint id ipsura emendaic studeant et quod
tenuerint non Ideè ainittant: post eoruin quoque di€ressione si fraterBerneiii nomine Evrard atque nepta
ipsius flua scilicet pr1ibati Evrardi adhuc vixerint
ipsam terram cum omni emelioratione teneant et possideant sub pra'fixo censu : sin autem eis supervixerjiit
habeant licentiam dandi, vendendi nec non qUiCUfllqtie
voluerint ex parentibus vel amicis, uni so!um modo,
retinquendi, salvo tainen ecclesiastico censu; ut autein
hac auctoritas firmior sit, firmiorque inaneat manu
proprif eam subito firmavimus manibusquc fidelium
nostroruni firinari rogavimus (i).
(i) Hualœ, sans doute pour Huonaldœ.
(2) Arpennum: arpent on trouve, dans quelques chartes qui ne sont ios
citées dans ce mémoire, le mot agripennus qui indique parfaitement l'étymologie du mot arpent.
(3)Cette pièc est comme la précédente revêtue d'eu très grand nombre
ioEXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
Dodaki, archidiacre de Tours, demande la permission de détacher quelques pièces de terre de son bénéLice pour les donner à rente à un individu nominé Bernère, et à 1-lugualde, sa femme: il est stipulé qu'après
eux, la terre passera au frère de l3eriière cL à sa nièe,
et que si ces derniers, au contraire, meurent avant.
Bernère et sa femme, ceux-ci pourront alors donner
ou vendre la terre qu'on leur abandonne à celui de
leurs parens OU de leurs amis qu'ils voudront choisir
pourvu toutefois qu'ils n'aient qu'un seul successeur.
N'est-ce pas là l'origine d'une redevance seigneuriale?
Ce sont des terres labourables que l'on donne à rente;
cette rente doit être payée à Ddald et à ses successeurs
dans sa dignité, il est vrai; mais ou accepic pour débiteur, dans le cas où Bernère et sa femme viendraient
à décéder, le frère (le Bcrnère, Evrard,ct la fille de ce
dernier, c'est-à-dire des hommes ou (les femmes , ce
qui ne serait pas s'il se fût agi de conférer un bénéfice.
On a dû remarquer que l'on concède le droit de bâtir,
de planter et daineliorem.
Si Bernère n'eût pas obtenir droit d'améliorer sa
nouvelle propriété sans se faire garantir par le vendeur
qu'il ne serait pas inquiété, il ne l'aurait Pas fait impunément : ou on lui aurait pris ce qu'il aurait ajouté
au sol, ou on aurait exigé une augmentation de l'ente
et de nouvelles redevances: les vexations auraient recommencé à chaque changement que le malheureux
fermier aurait tenté; aussi ic régime féodal étouffait-il
l'industrie, le commerce , l'agriculture; avec lui il n'y
de sigieli Lires: quelques-unes sont en caracIres gree. Il y aune Li j nr muet e
de t'areLttdiamr Iiodald ; vitnt ensuite la date atii
de ].a
J)a(a p,tt'as,julii in eieilatc Turma', aune X it'gnaafr Iiluderico ,,e.
DE DIVERSES CHARTES.
ii
avait pas de progrès possible; il n'y avait même pas
d'expérience à tenter.
C'est de cette tyrannie absurde que datent les habitudes routinières (les paysans de nos jours; il faut souvent des siècles pour réparer les fautes d'une époque.
Spectateur tranquille de la misère du peuple, le
clergé s'occupait de sa propre fortune: Jose Il 11(i)
venait de succéder à Théotolon. Le nouvel archevêque
s'empressa de se concilier les moines de Saint-Julien,
et l'année même de son élection, il leur octroya cri pur
don le village de Sounay et les églises (le Sainte-Marie
et de Saint-Gervak. Voici la charte de cette donation.
« Ecdesiam sauctain Domini votis fidelium crescere
tandemque augrnentis coti(lLanis per Cliristi gratiain
pullulari nemo fidelium ambigit; quamobrem ego
Joseph, divinâ miseratione Turonicae eccicsioe ai'chiepi.
scopus, cogitans de Domini tiinore ac mtcrne rctrihutione dignurn duximus, cum consilio nostrorum ridehum , ut pius dorninus veniam nostroruni peccaminutn
indulgere dignetur, quatenus ex rebus nostrœ mattis
eccicsia nobis speciali ditione sul)jectis allqui(l ad inonasterinin sancti Juliani in suhuirbio Turonice urbc
situai ad supplenentuni InOUaCIIOFUnI [bidein donii no
Martino fainulantium conce(lelemus sicuti et tcimnus
videlicet Suinacum vi Ilam, cu ni ecclesiis dual)us, unain
ni honore sarictue Marie dkatam , alteram in honore
sancti Gervasii constructam, et cum ornuibus appencittus et utilitatibus suis, curn terris cultiset incultis silvis
ad abundè, pratis, pascuis, aqu is, aquaium decursitius
(t) Joseph U lut srcheqiie de
tIC cette année.
'l'ours de 45 à 95; il mounit k iS juin.
T •__
12EXAMEN CR!TIÇCE ET ANALYTIQUE
mobilibus et immobilibus ripis et exitibus, et quidquid
est que situm aut ail inquerendum totum et ail integ'um. Fuit namque ohm ipse locus vicus canonicus et
maximo honore et veneratione habitus. Sed propter
incursionem atque infestationem (ï) paganorum sicuti
à plurinià locâ in solitudidem et in sattus Bessiarutn et
ahsque habitatore est reduetus prtercà concessiinus
ex rcbus Thesauri nostre maIns eccIesia, per conseilsuin et deprecationem fidelis vcri Bernardi (hiaconiJ
que ipsum Thesaurum per nostra largitionis donum
tenere videtur, omnem terram et sylvam quae ibi pi-ope
adherere videtur cum omnibus adjacentiis et utilitatibus suis. Sunt autem Iiec sita in pago turonico supra
nivulum Grenussiœ (2): ha'c VCVG omnia supradicta cun
terris cultis et incultis silvis et cuin omnibus adjacentiis
et utilitatibus carum partibus monasterit sancli Juliani,
cujus rector et abbas dominas Geoigius iccognoscitur
tra(linlus, cediinus , cedirnus ac dclegamtcs ut sint in
victualibus stipendiis mnonacharuni, coeterisque mmliiitatibus omui tempore et pro ipsis rebus studeant (3
Ipsi nionacimi auuuatitn ail muissain sancti Maumieii que
ceichratur X Xl. octob. Ail partem nostram sie successorum nostrorumn solidos Il et ail partem rcctoiurn
nostrc matris Ecclesie tiiesauri et sic predictas ces cumn
omnni integritate sine ullins contiarictate trimant et
possideant. Precamur interea succcssoiumn nostrorum
demeutiain ut sicuti sua statuta quai per amnorem ouipotentis Domuini fecerint , stabili volticniut vigoic PCI'sistere , ita Ikrc nostrac parvitatis gesta sinant mancre
(i) Faganoruin Pagaai, le-i Normand
(2) (;re,luisue peut-irc )OUF (orr?cie(/;icata:
de Touraine..
() T.r mot sohcir est pas.é dans la chai
-
Ab .:.
t
DE DIVERSES CHARTES.
15
intacta et inviolata: ut autem Ilfec nostra denacio fit'-.
mior habeatur manu nostri poiutiflcii corroboravirnus,
manibusque fidelium nostrorum utriusque ordinis eurn
adnotari et corroborari erecrevimas (i).
Cette Charte rappelle les descentes des Normands
sur les bords de la Loire. L'église de Saint-Julien avait
été détruire et pillée par ces hordes barbares en 83o:
les riches COU VCflS (le lit Touraine excitaient sans cesse
leurs convoitises; en 903, l'église de Saint-Martin et
vingt autres paroisses, monastères ou couvens, avaient
été la proie de l'incendie qu'ils avaient allumé; les
trésors que la piété ales superstitions y avaient amoncelés depuis cinq siècles étaient tombés aux mains de
ces païens, dont les fils devaient bientôt enrichir les
églises dc la Neustrie et de l'Angleterre; les Normands
spéculaient sur l'effroi que leur nom inspirait ils tonchait'nt d's pensions sur la cassette des rois et levaient
les tributs sur les peuples; la crainte faisait tout payer,
aussi ne négligeaient-ils rien pour entretenir au loin
cette terreur sur laquelle s'appuyaient leurs espérances;
quand ils venaient au bord de la Loire, s'il y avait à
piller, ils pillaient, puis quand ils ne trouvaient plus
rien à prendre, ils brûlaient ce qu'ils ne pouvaient
emporter; partout où ils avaient passé, il ne restait
plus que des ruines; les lieux naguère habités n'étaient
plus que solitude, ils avaient trouvé la civilisation et
laissaient après eux le désert.
(r) Cette charte est resétue d'un très grand nombre do signal ures autographes. On y voit une ligne entièrement écrite de la main de I'arcbevèque;
la partie tic la pièce où se trouvait la date est illisible; mais il résulte d'une
note icrite au dus, qiw cette donation a été faite eu 46, eu qu'elle servit â
tenu iF titi priLun é.
a*
si •
-
s
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r
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
Si les hommes du Nord ruinaient le clergé (le France,
au moins ils ne lui enlevaient (lue ses trésors; ses terres
lui restaient; Charles Martel n'avait pas brûlé les églises
et les couvens ; mais il leur avait pris les domaines dont
ils jouissaient déjà pour les partager avec ses soldats.
Le clergé ne renonce à rien , il n'y a pas de prescription reconrn,ie par lui; chaque jour son influence
et la crédulité (les fidèles lui rendaient une partie de ce
qu'il avait perdu ; cependant à la (in de la seconde
race, il y avait encore en Touraine des comtes qui disposaient (le biens ecclésiastiques; c'est ainsi que, dans
la charte l'on va lire, le comte Geoffroy (i) prend le
titre de reiwu swlct(e GenoJ/œ rector: il avait donné
ses biens en bénéfice à son fidèle Gislard, qui était
aussi uti laïc; celui-ci demande et obtient la permission
d'en donner une partie aux moines (le Saint-Julien pour
une rente modique : ou remarquera (jUC les moines qui
ont écrit celte charte ont eu grand soin de stipuler que
s'ils négligent dc payer la rente à laquelle le donateur
les impose, ils ne perdront pas pour cela ce qu 'on leur
donne; seulement ils veulent bien consentir à ce que
dans ce cas on invoque la loi contre eux. Quelle sera
cette loi? Ce ne sera pas celle du royaume, ni même
.-elle (le la province; c'est la coutume (lU bourg de
Mailly , mos paei; c'est le dernier degré de subdivision où la jurisprudence française soit jamais tombée.
Quand chaque village a sa loi, cest qu'il n'y a Ph (le
loi ; quand la justice et la raison changent (le principes à chaque pas, c'est qu'il ny a plus ni justice ni
raison; une circonstance faisait la loi, un caprice la
( i )Ce comte Geoffroy, qui neSI pas qualifié dan3 la charte, doit treGeoffroy Grise Gonselle, premier duc d'Anjou de ce nom; il succéda i sen père
O 958 et mourut en 987.
DE DIVERSES CHARTES.
détruisait; les transactions ne pouvaient plus avoir de
base que la bonne foi des parties:
Voici cette charte.
In nomine sumini Salvatoris Christi ego siquidem
Gauffredus rerum sanctœ Genofefœ rector notum fieri
CUplo omnibus, successorihus meis ceterisque fidelibus, quum accessit ad me quidam ridelis meus nomine
Gislardus cui quidem ces prœdicte virginis in henefic0
datas habebamus, deposcens uti ex cisdem rehus jam
(lictze celle pertinentibus monacliis beati Juliani XII
videlicet arpeunos ex alueto (i) ad prata redigendas
me't autoritate et huijus mantis firme testamento concederemus sub institulione scilicet anflualjs Ceosûs;
cujus petitionem ulpote fidelis mci libenti animo suscipiens Concessi jam (liCtiS famulis Christi pra!dictuln
alnetum ortatu et suasionc ipsius fidelis nostri iimno
ut et ipsis parculibus meis duin exorarcnt situm in
pago Turonico in villa Malliaco (2) juxta alterum
ainetum quod Bergia nuncupatur et si quideni rationis
ordini ut studeant exiiidè redderc annis singulis cidein
Gislardo vel ejus successoril)us ad festivitatem sancti
IIartiui ceusuin sol 1111 et sic omni tempore prfaii
rnonaclu ipsani lerram quiete teneant ac perenniter
possidcant teruninatur namcjue ex omnibus partibus
ej usdem pûtestatis tonfiniis. Si autem ex prdicto
censu negligeuites aut tardi extiterint id ipsum eis
emendarc juxta pagi niorem liceat et quud tcnuerint
deo nequaquam perdant ut autem bec auctoritas a
(t) Aineto ainetum aulnaye, de clous, aulne.
(2) Malliaco: Malliacum: Maillé aujourd'hui Ltcs tics. Le bourg de Maillé
exi stait en 4'5,i1 en est question dans le testament de saint Perpète et dans
Grégoire de Tours
16EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
nobis fada esse credatur et a successoribus noIris in
convulsa teneatur manibus propriis eam firinavimus et
quant pinriinos firmare fecimus.
Sig. Gauzfredi, Cornues.
Data in mense martio anno VI (i) regnante I-flotherio
I'cgc fuculsis in livites.
Ic Clergé, dans sa marche habile, se servait tic ses
richesses pour augmenter son influence, et de son influence pour augmenter ses richesses: ses tribunaux
d'abord n'avaient jugé que les affaires qui concernaient
l'Église; b i entôt ils sur lajusticedes barons,
et leur juridiction finit par tout envahir. Voici un
procès instruit devant Hardouin (a), archevêque de
Tours. C'est sur la table même de l'archevêque que
l'accord se signe, c'est en son nom que la charte est
écrite: Gandalbert, son vassal, plaide contre le couvent
(le Saint-Julien. Pour sauver son aine et celles de ses
parenS, il reconnaît bus ses torts et renonce à ses pré-
tentions: il est vrai qu'on lui fait dire qu'il est propric
voluntate ductus, nemine cogente, etc. Cet excès de
précaution ne dépose-t-il pas contre les auteurs de la
charte? A ce style on reconnaît les moines, les bons
pères ne peuvent jamais avoir tort, toutes leurs prétentions sont justes: c'est par charité, c'est par pitié
pour les ames des trépassés qu'ils vculentbien transiger.
Mais comme au fond ils savent que c'est par la crainte
de l'enfer qu'ils font agir leur partie adverse, que la'
terreur est une contrainte, et que la contrainte est un
trc de 96o; Lothaire monta sur le trône en 95?.
(i) Cette charte d o i t
(i) Bard'uIfl , archevêque (le Tours de 960 85. Ce fut lui qui couujarua l'église de Notre-Dame de Loches.
DE l)I'VERSES CHARTES.
I
moyen de nullité, ils ont bien soin de faire dire à Gandalbert qu'il agit librement. lis lui ferment ainsi tout
recours légal contre cette transaction, s'il vient jamais
à découvrir qu'il est dupe de sa faiblesse.
Ce titre constate la date (l'un fait historique d'ailleurs connu. Ii fut écrit l'année oi le roi Lothaire fit
sacrer son fils Louis, ic dernier roi (le la race CarloVI ugicune.
Voici cetLe charte:
Notitiœ rei gestae qualiter ego Guandalbertus domini
Arduini arcluepiscopi nepos anno incarnationjs doiniuicœ M CCCC LXX VIII indictione VII requisivi aut
repetivi a monacliis sancti Juliani medictatein quarumdain (leciinarum videlicet de dUaI)tlS quartis antiquis conjacentibus in villâ (i ' Ciconiaco. Et de ternie
quarte qua est sita lit Grasciaco SiTfliliter antiquâ: pertinentibus ad abbatiani 2) sancti Hiiarii, quam
in beneficiutis de suproedicto avonculo ut senioi'e rneo
et archiepiscopo Arduino tenere videbar: undè ipsas
decimas me repentenle et eisdem inonachis nolentibus
reddere, maxima inter me et iii05 corltentio fuit orta:
sed ubi cognovi ab ipsis inonachis ut ah alus fidelibus
christian is quod domi nus Theotolo fundator ej usdeiii
lori beatè Juliani jam dictas decimas per seriem3) carcharuin cain oinni ititegritate monachis eumdcm locum
incokntibus coutraderat, et in regale preceptuin quod
de ipso mouasterio est compositum scrihi preceperat,
(t) Vills C'iconiaco: cigoigne. Telle est la traduction de ces mots écrits
au dos de la charte i.lans une noie de deux lgues.
(i) Sancti lIiIa,ii r Saint-itilaire. Cette égtic fut construite vers l'ait
c'était une des plus ânciennei de Touraine.
(3) Carcltarum, sans doute pour Cartarum.
4.
usEXAMEN CRITIQUE ET A\ALYTIQI E
propriâ ductus voluntate, nemine cogente, pro remedio
anima meat, et genitoris mci qui id ipsum diehus vt
suœ assenserat, et aliorum parentum meorum, ut
omnium fidelium eliristianormim supra scriptas derimas
sicut et eoruin conlinet auctoritas ahsque u1It repeti
tone aut contradietione Iiberè et quietè cos lenere et
possidere concessi et ne aliquis heres aut successor meus
allam querilani aut ullam calupniani de eis in ferre
presumat. flanc notitiam fierl precepi ac manibus pro—
pniis firmavi : inanibusque scuiorun ut alioruni fidehum meorum affirnmari rogavi.
Arduiiius gratii di Turonoi'um archiepiscopti s
signumn se crucis Guandalberti vassali (t qui
banc noliLiamu propriâ ductus voluntate lien
jussit; signum ) Gorbonis vassalli ; signum
Arduini fratnis ejus; signum ftuthenii vassali;
signum Senardi vassali; Mamerius cicnicus;
Adalcim finmnavit; signum Ervei ; signum
Addonis vassali.
Data simulque corrohorata mense julio in civitate
turoniis su p. m. sÉ. Domni Arduini archiepi. Anno
ab incarnatione domini M GCCC LVIII in quo anno
Hiotharius rex Cludovicum (ilium .sicuinregein ondinare
fecit.
Une charte, d'Eudes (3), comte de Touraine, (lue l'on
va lire, ne présente aucune particularité qui n'ait déjà
(s) Tassali vassalul vassal. On nommait ainsi alors 1m officiers diin
suzerain.
(a) C'or/oni.s: ce Corbon était seigneur des Roches: son petit-fils fit bâtir
sur les bords de fa Loire un château fort dont les ruines subsistent encore.
On remarque une tourelle que l'on nomme la lanterne de Roche-(;oibon.
) Eudes I, comte de Touraine, fils du comte Thibaut dit le Tricheur,
DE 1)IVFIISES CII
été relevée dans celles qui précèdent. On remarquera
seulement la formule finale: ce n'est pas une signature
que l'on demande au comte Eudes: il et peut-être été
embarrassé pour la doBner, c'est le signe de la sainte
croix qu'il pose au bas de la charte. Les parties con.
t ractantes preuaicn tDieu à témoin de leurs engagernens;
elles juraient (le les tenir sur les saints Evangiles ou
Sur les reliques des saints qu'on avait soin d'apporter;
puis elles faisaient au bas de la charte le signe de la
sainte croix: de cette manière le clergé ménageait
l'amour-propre des puissances du siècle et trouvait
moyen de les attacher à leur parole par la crainte des
peines éternelles dont il menaçait les parjures.
lit
sumrni Salvatoris Domini nostri qUi(lctfl
0(10 gratiâ Dei coines flotuin hymnio (i) et percogni
tum esse volumus cuuictis sanctœ Ecclesir Gdelibus pre
sentibus scilicet at fiituris precipuèque successoribus
nostris quia (leprecatus est nos quidain vassalus ne fidelis noster nomine Gosfredus uti ex rebus bcneficii sui
quod per nostrœ largitionis donum lenere videur hiec
est sup. fluviwn.......um aqua decurrenti sancte
Mariae Ravinnensi scilicet . . . . . . . qui eumdem
locuni tenuerint sub instituttone censu annuatim.
• . • . nostrac auctorila Lis testameimtnm concederemus;
cujus tieprecationeni recipientes concessimus jam (lictm
sanctie Maria' prelibatos arpenfloS cum aquâ (1uldem
adjacenti sitos in pago Turonico. Terminantum autem
ex unit parta vià public ex duabus terra ex codem bc-
tpotisa en premières noces MliaiuI de oriiande, et en deuxièmes Berthe
de Bourgogne qui épousa de1uia !e roi Pohert. Eudes mourut CD 995.
(t) !fymmo pour imo.
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
neficio, quarta E') Jugenne fluivio. Eo namque lenore
prel ihatain terram Velaquam san c ta Maria conced 1m U S
ut habeant fratres eumdem locum tenentes licenciam
de super quisquid melius eligerint opetandi solventes
annis singulis in festivitate saucti Maxi mi quœ celebratur X1IIKI. septembris censum solidos II et deiier. 1111
et eis non amplius non requiratur, et si de eoilem
censu negligentes quisquain, aut tardi extiterint III
ipsiim ei emendare studeant et quod tenuciint non
idc amittant: habebuntque licenliam si eis necessitas
extiterit dandi vendendi cuicumque voluerint est au1cm hac auctoritas pleniorein in Deinornineobtineat
firmitatein manu propriâ eam per signulu sanctœ crucis
adfirniaviinus -atque corroboravimus et tidelibus nostris
utrin sque ordiais corroborari decrevimus.
S. Odonis comitis; S. Gtianiolis; S. Gilcluini ()
Sainiurensis, clerici; S. Gilduini Hrctuliensis
S. Guarini 1)repasiti ; S. Rajinundi Blesensis
S. Girberti Brenensis; S. Gauscelini Blesensis.
Enirna, soeur du comte Eudes, avait épousé Guillaume, deuxième du nom, duc d'Aquitaine, un de
plus puissans seigneurs de son temps; il est le premier
qui ait pris le titre de duc de cette province: la Guyeurie
avait été confisquée par Lothaire et donnée à Hugues
de Fiance: Guillaume résista au Roi et au duc, délit
icu, général Geoffroy, comte d'Anjou, cl força Lothaire
à lui donner l'investiture (le ce fief. Quand Hugues
Capet usurpa le trône, Guillaume refusa de k recon(i) Jugeune pour Vgénaœ, Viagenna., la Vienne.
(2) Gdduj,,i Sal,nnriasis: Gjldujnj de Saumur loua un grand rôle daas la
guerre des comtes deTouraine et d'Anjou.
CHARTES.
DE DI\ IRSI1S
natre. Les deux Chartes qui suivent, expédiées en son
nom et rev&ues de son seing, sont dignes d'intérêt.
More antiquo patruni, cUflCtOrUfllqUC civium lège
I? o,nanoru n, decretum est in orbe terrarum ut sacra
eatholica fidei i nstituta principali sanctione veraciter
conscripta ecclesiastico jure legaliter corroborarelliLir
et scripturarum seric decente oi'narentur, ne cujus pik
fraudis nequiciâ inhoLlcstè violorantur quarnobrein perinittente (1ivinâac subsquente cictnentili, licet non mets
mentis tamen kudignatate cotnitu (t) posituo ego Guilelinus (luxtotws () rnonachyœ Aquitani quorum
notum (jeri cupio toto mentis desidenio eu nclis fidelibus
sanctie Dom in î Ecc1csie 1n'esenti bus scilicet atque futuris quod accedens ad tue qtiidaiu fidtlis meus nomine
I-eniiifredus precatus est ut unam capellam in villâ quai
vulgo nuncupatur Laluiacus, sua in honore santi Diotmisii dieatatn cuni decimis viueis pratis domibus curtif'is , virdeganiis SCU maiicipiis utriusquc SCXÛS ad
catti capellam pertinentibus et cwn tct'râ arahile et insuper quantuni ad ipsam eapellam quesitLlmfl et ad
inqturendurn cernitur esse, sibi et uroris swi' velpost
il/oru,n decessum duo bus successorihus sub censum
quinque solidortim pura aucloritatis sCrij)ttlfll (lignaremus concedere quod onini modo nobis placuit fecisse
et peroratione ut singulis annis, piestitum cenSuin
solvant et se negligentes ipsius censis fuerimit, duplicatum reddant et posteà sicut censuali ut prrfatuirm est in
scnipturaruni scnie ad festivitatem omniuni sanctorum
annuatirn debitumn solvant et postea juste et racionabilitur ahsque ulbt disruptionc teneant et possidcant
(r) Cornifli pour comitala: comte. Avant lui t'Aquitainen'était qu'un comte.
() Monacl,iv pour monarc/rire; monarchie, royaume.
EAME_\ Ctt1I'IÙIJ 1[ AALï1'JUt L
precainur demquc omnes nostros successores ut ea quc
justa et rationabilia statuimus ita iconservant sicuti sua
et suis successoi'ibus optaverint perinanete gesta ut
autem hc manu flrma pleniore muneaut vigore manibus propriis firmavi et postea fidelibus meis diversi
ord mis divcrs'quc potestatis corroborand u w (
1)at4i Inenejunii anno XL, reguante rege Lothario.
Cette pièce est datée de la quarantième année du
règne du roi Lothaire : celte date est inexacte. LoLit a i r e est né en q4 r, il fui associé au trône en fut
sacré en 954 après la mort de son père, et mourut en
986. En commençant à compter les années de son règne,
zitème (lu jour où il fut associé au tr&hie, on ne pourra
jamais lui former un règne de 4o ans.
Peut-être est-ce une erreur de l'écrivain; peut-étre
est.c en haine de Hugues Capet que Guillaume ordonnait à ses scribes (le prolonger k règne de Lothaire
après sa mort.
Ce qui pourrait le faire supposer, c'est lu qualité (j11c
prend Guillaume, il se nomme d'ix lolius ,noizachiw
Aquitaniquoivw.
Dans ce peu de mots perce toute l'indépendance
féodale. Guillaume se souvient alors que l'Aquitaine
fut autrefois un royaume: il a daigné faire hommage
aux descendans de Charlemagne; tuais quand Hugues
Capet, qui long-temps fut son égal , prend le titre de
roi, Guillaume alors s'appelle duc de la monarchie des
Aquitains. Leurs droits étaient de même valeur: leurs
(o) ici se trouve: I o une croix entourée d'un dessin représentant un trèfle
de la main du due; a° un autre dessin fait par Gilbert, éque de Voiliers;
3 0 IronIe-deux S ig liallires. Ou y remarque UU 5iand nombre de digruiiaires
e cclésuasti(1ucs et trois cicomies, doui Aimneri , vjcote de Thour.
DE DIVERSES CHARTES.
prétentions étaient donc aussi justes. C'est la force seule
qui a décidé du succès.
En luttant coutre le nouveau roi, Guillaume savait
très-bien qu'il serait soutenu par ses peuples: des races
différentes habitaient le Nord et le Midi au nord
étaient les Francs, au Midi les Gaulois : au Nord régnait
la loi salique , au Midi le code romain. Aussi, au début de cette charte est-il mention de cette loi qui depuis
(les siècles régit les Aquitaines : il y a (le plus dans cctt
pièce et dans celle qui suit, quelque chose de plus pur
et de plus élégant dans le style : on peut même remarquer dans les premières lignes des mots qui rappellent
les préambules ambitieux de Justinien.
Au surplus, le droit romain n'avait pu défendre le
Midi de la France du régime féodal et (le ses abus: dans
la charte dont il s'agit, Guillaume donne une chapelle
en bénéfice à un homme marié et à sa femme, puis
après eux à deux de leurs héritiers. C'est une de ces
concessions qui forment la transition entre les bénéfices
conférés à vie et les fiefs héréditaires.
Voici la seconde charte annoncée ci-dessus
in nomine surnrme et individu Trin itatis Willelnius
Aquitanorum omnium princeps anno ab incarnatione
Dowini nostri Jesu Christi VCCCC L XXXV liii indichoue secunde.
Volo igitur atque cupio et omnibus mous cupio ut
sciant tain omnium pontificium clericoruin clignitas,
sen principium sublimitas ac cunctorum omnium tain
virorum quam mulieruin uu1usque sexûs generahtas
ita bonam volumptatemn me habuisse, et 01) meamn
conjugein nomme Emma et oh ainorem ejus et ailemm multorum homi num mihi benevolentium hoc
jEXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
facio bono animo et protnptâ voluntate ......... Iloc
scripturarum ailfirmare titulis ut firmum et roboratum perpetualitet' maneat ne in posterum ab nullo
honiine possit umquam violatum esse : (le igitur tihi
in pago Pitavo(ii curtani Jkcassaiiias media ni et medtam ecclesiaru eteinin ipso page cedo curtam () Vosatiam mediam et totam ecdesiarn, item in alio Ioco qu
vocatur lazias totam ecclesiain et cuic1quid pertiiiet ail
ipsarn, item in alio que vocatur Cigon qui sita est super
ftnvium Ausanci, item terrain nomine Varias que sita
est super fluvitim Clinni, item alla nomine Valenciacus,
que est super fluviam Ur1iozmn, et sicut fuko tenuit
ipsas les iLa tihi SCripcionenl tradi ail tenendum sive ail
possicleniluni item in alio loco in villà quai dicitur Magniaco tota ecclesia et quidquid pertinet ail ipsani
item in alio loco ecclesiain que (licitur Maruaco et
quidquid pertinet ail ipsam item in alio loro in viflâ
que dicitur Namtolio et Auriaco, et quicqurd pertinet
ail ipsas, item villâ que dicitur Brcnon et quicquid ail
ipsam pertinet , item super fluvium Allezia, villœ qu
vocantur Tortron et Trajacus et quidquid ail ipsas
pertinet, item villam que vocatur Ulmas et quiilquid
ail ipsam pertinet , item villam qua' dicitur Cassanon
et Mantes, et terram Saiicti Stephani qu .........
dictzc ville Cassation item iii alio Ioco ecclesiam (JUC
(liCitUr Morteriolo et quicquid ad ipsamn pertinet. item
cedo tibi ecclesiam et curtam que vocatur 'fourciacus,
et quidquid ail ipsam pertinet.
Has m'es superius nomnintas tphi frado pempetualiter
ail hahendum corijux mea (Iilectssima vel ail possiden.
(IUW, et ut ex eis facias abhodierni die quicquid vo(i Pictaa
()
Poitou.
F'oça/ia Vouzajl!cs.
DE DIVERSES CHARTES. 25
mens vel voluntas tua fuerit. Quibuscumque sanctis
(lare pro remeclio aniine vcl cuicumquc homini tribuere boc mihi placuit inserere ut si ego aut cellas
heredttin nicoruin seu aliquis persona caubae cupiditatis
aut falsitatis hauc scriptionein iiiquietare tempta vent
ii pniinis iram Domiiii oninipoteutis mancat , su [Ili
contraria sancta Dei genitrix Maria, cum omnibus
sanctis in die inagnijudicii partent quoque habeat cuin
I)athan et Abiron qtios terra vivos dcglutivit : cum
stipulatione adnixâ manibus propriis firmavi et post
inc "iris optiinis ad corroborandum tradidi X signum
Willelmi comitis que liane scripcioneni fieii rogavit.
Hanc tibi trado cccicsiam conjux mea, quie vocatur
Saziaco in tali tenore quo cuin vixero leneam, et Pt
disces.sum vicunisineullà intermissione ad te revertatur.
Celte charte est de 939. Guillaume a fait hommage
Hugues Capet; il n'est plus le duc de la monarchie
des Aquitains : cependant il semble protesler encore
contre sa soumission, il s'i nti tLLle princeps 4uiia,zorum Omnium, et console son amour-propre en ne
pernant pas un titre féodal.
Guillaume avait vieilli : cc n'était plus l'intrépide
guerrier d'autrefois; tontes ses luttes contre ses
nains étaient finies: il n'allait plus, époux infidèle,
porter aux pieds de la daine (le Thouars et ses lauriers
cl son amour. Emma maintenant est son épouse cliric 7 il ne parle que de son affection pour elle; et cependant Emina, pour se venger de sa rivale, l'avait
livrée à la brutalité de ses palefreniers. Emma avait
soutenu, dans le chteatt (le Chinon, un assaut que
lui livraient et le vicomte de Thouars et le citic Guillaume, soit
Guillaume la combla de dons : ceux
aGEXAMENCRIT1QIJE ET ANALYTIQUE
qui chercheront à attaquer cette donation sont dévoués à la colère du Tout-Puissant; on appelle sur
eux l'inimitié de la Sainte Vierge et (le tous les saints,
ils iront rejoindre aux enfers et Dathan et Abiron
d'où vient ce changement? c'est que les moines s'en
sont mêlés. Emina avait concédé au couvent de Bourgueil toutes les terres que son mari lui donne: les
moines trouvèrent plus prudent de demander à Guillaume la ratification d'un acte auquel il n'avait pas
participé : le duc s'y pr&a. L'acte est nécessairement
écrit ou au moins dicté pat' les moines; tout y est
soigneusement détaillé; un domaine est omis, on répare cette erreur à la fin de la charte. Le duc accorde
à sa femme la permission de donner tous ses biens à
(l ui elle voudra; ils sont déjà donnés. Le comble de
l'adresse monacale est d'avoir mis clans la bouche de
Guillaume les imprécations qui doivent atteindre ceux
qui oseront attaquer cette donation : l'odieux n'en
retombe pas sur les bons pères (le Bourgueil, qui ne
se font aucun scrupule d'en profiter.
L'exemple de la duchesse Ernina ne pouvait manquer
(l'être suivi, et l'abbaye (Le Bourgueil vit ses richesses
s'accroître rapidement.
La septième année (lu règne dc lingues, Gerla, ahliesse (le Sainte-Croix, fait une donation à SaintPierre (le Bourgueil: il est bien entendu que la donatrice ira tout droit en paradis jouir du bonheur des
cieux et que ceux qui voudront s'opposer à ses intentions, iront tout droit en enfer, et en attendant seront
excommuniés dans celui-ci. La mention d'excommunication, qui n'est ici que comminatoire, est ascez curieuse en ce qu'elle fait conuaitre la position (le l'excommunié; il est repoussé du Seuil (le toutes les églises.
DE DIVERSES CHMTES.
Cette charte est terminée par un grand nombre
dc signatures, ce sont celles des dignitaires du couveut de Bourgueil. L'un d'eux, nommé 1)urant, s'intitule subdecanus sive succantor, ce qui indique
(lue la dignité (le sous-chautre était réunie à celle de
SOUS-doyen.
Enfin pour écrire cette donation on a pris un inorceau do parchemin déjà couvert d'écriture il a été
lavé; cependant l'on distingue encore quelques débris
(le lettres.
Au surplus voici cette charte.
intellectus sensusque gdneri huinano potest mente
sagaci ponsare actque solerter indagatione perpeu dccc niliil anuplius vaicre uniemiiquc quam quod de
anuatissimis suis rebus in lods venerabilihus lit
motiachorum curetur imptndere ut in huranicâ
beacione inveniet aternam ccii umuieraciotuein OpittilatIte
atque puotegeuite in perpctuo foutu10 lesu Gluristo,
lioc redemptore nostro, ego Gerla abbatissa Alun(i)
Crucis monachorurn seu ai'ga () Radigundis canoniorum (4) , cunctaque congregatio mmiii comumissa.
Gupimus etiam per aniordiit l)omii,i nostri lesu Christi
laigire de nostr'is cebus propriis et pro reinissione faciutorumn nostrorum sicut consuetudo futuro teinpoie
proclamata Kosmy (4) , et priutcriti nucoi'iLas que
cliristianoruin decrevit ad circo liane seripcionem de(x) AIrnoe (irucis : ce couvent de la Sainte-Ci'oix était situé ii l'oitico.
) Aie p ou g agiv, de a)Io- , saint. Saute Radegondr .st vénérée en
Touraine; elle a une chapelle à Chinon.
(3) wzonicorum: on remarquera que cc mot est au masculinj ce tic cougrgatioii de chanoines avait donc une femme pour chef. L'abbesse Gtîla
s bien soin de le faire remarquer.
fl) Kosmv: ce mol %iclst probablement de esrv.s, le monde.
7"'
SEXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
nacioiiis donamus donatum que in perpetilum volurnus
ut Superni gaiidia adquiramus, transfundimus atque
coucecliinus in ceriobio Burgeolo inonasterium consservetum in honore beau Petri apostoli, apostoloruni
prineipis, vi!Iau-i Triolo terris (lotnibus viricis pratis
et omnia qmie a(l camdem villain pertinent arbitrium
voluntatem banc scripcionem firtnavirnus ad eodern
moiiastcrj j in alinion ils ii) vel snbstancja nionachoruin
ididem habitancium ut inerearnur adsisci participare
bonorum eoruin in regno apostoloruni absque ulla
contradictione abas scu inonaciji teneant sitigulisque
annis at solcmnitatern Scac Radegundis quze cvenit
ictus agusti solidos X per solvant.
Denique et si per aliquain necessitatem taidi aut
negligentes ail illarn festivitatem censuin non retilant
ies non iw1att set in dupliceui cornponant.
Precamur itaque omnes successores nostros ( l ui post
nos futiri erunt ut auctoritateni islam a nobis iuiolat)ili ter factam conservent similter adscqueii tibus
C011ilil optaverint conservari et tijusce modi firma stabuis ipsi scripcio et iticonviilsa cum stipulatione omni
te mpore permaneat tam cum SOroriI)us et fratribtis
pariter ErnlaTnus et roborari decreviinus et si aliquis
i uviolare istam edicionem presulnpscrit irain I)oinin i
adquirat omuipotentis et ail liminibus omnibus sanctai
Dom mi cccicsie se cognoscat ecom ni u nicatus et cutin
l)attiaii et Ahyron quos terra vivos absorbuit, et cumo
Juda proditore qui ])oinirium lesum inagistruin suuin
tradidht... etc.
Data ) inensi mail, annos VII regnante Ugonii rege.
(i 41i,nonv.s pour alimenlj.
(ta) Cille i-liane est reviliue d'un très grand nombre de signatures autogra phes; clic est écrite par un prêtre floLuhllé Rauutfc. A cé de ta (laI 5e
ri
DE DIVERSES CHARTES.
Feulque Nerra, duc d'Anjou, avait donné le gouvernement de Montbazon à Guillaume de Mirebeau,
son vassal. Celui-ci et ses gens administraient le pays
qui lui était confié 'a la manière du temps, c'est-à-dire
en pillant tous les environs de sa résidence, en inventant chaque jour de nouvelles vexations : le monastère
de Bourgueil n'était pas plus épargné que les terres
laïques; de là des contestations qui nécessitèrent le
traité suivant
Notum sil omnibus sacrie fidei cultoribus preseuti bus
scilicet et futuris, quod Willuius ( i) quidam castri Mirebelli princeps requirebat in vosaliâ villa pravas consuédines et hommes quos commendatas vocant pro quibus sepissime lites commovehantur inter prefatum
principem et monaclios Burguliensus () qui in procijominatâ villa inorabantur unde placit um construxeru nt
abbas Baudricus et monachi Burgulienses contra pradictum militem et ministros ejus perpendeiis igitur in
animo suo ipse miles injustuin esse hoec quod querchat
spoute deseruitetcum Baudricoabbate qui tune ecclesiam Burguliensem regebat placituw fecit et a proedicto
abbate monachisque Buguliensibus accepit octo libras
denerarorium ut omnes viri ac mulieres in terra Saucti
Petri commanentes absque ulla inquietudine securi
manerent et viverent ipsi scilicet qui antiquam pagamus honorem Mirebelli accipiat in predictâ possessione hospicium acceperunt.
trouve cette mention: Ranu/Ju$ sacerdos scripei. Les lettres qui composent
ces trois mots sont écrites les unes au-dessus des attires sur deux lignes parallèles perpendiculaires à la date.
(s) Villmu.s pour IVilelmas , Guillaume.
(s) Burgulienses moines de Saint-Pierre-de-Bourgueil,
-
5eEXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
On remarquera d'abord les mots pravas consuelu.
dines; ils sont importans, car ceci se passe à l'époque
où se formaient toutes les coutumes; la pièce ne dit
pas quelles sont celles que voulait introduire le chitelaiu de Mirebeau : mais voici comment les choses se
passaient en pareil cas, on arrachait un tribut par la
violence, l'année d'après ou le demandait comme redevance, et si on payait, la troisième année, les officiers
(lu châtelain levaient 1'imnpt au nom (le la Coutuimie.
Cette pièce est assez curieuse comme négociation diplomatique: les moines qui l'ont écrite font (lire à Gu i llaume qu'il avoue ses torts, puis cependant , malgié
leur bon droit que tout ic inonde reconnaît, ils lui
paient une somme assez considérable pour le temps;
ils achètent le repos de leurs vassaux; mais ils connaissent la violence de Guillaume, ils savent que tous les
ans ses vexations peuvent recommencer, il faut donc
avec lui traiter aussi de l'avenir.
Guillaume, a un fils païen u , qui fut depuis la tige
(les premiers seigneurs de Monthazon; il est convenu
que tous ceux qui s'établiront sur le domaine (le SaintPierre, avant que ce jeune homme ait reçu l'hommage
(le Mirabeau, seront compris dans le traité de paix.
Dans cette charte, les moifues jouent le MIe qui leur
convient; ils s'interposent entre le fort et le faible, ils
arrachent le cultivateur à la tyrannie du châtelain ils
font mieux, car ils se conduisent en gens habiles, ils
obtiennent un traité de sauve-garde pour leurs domarnes : c'est uii moyen de les peupler. Chacun doit
chercher un asile sur une terre oh l'on est sur de trouver un peu de repos et de sécurité, choses rares dans
un temps de trouble et (l'anarchie.
(t) Païen: Pa,'anus.
DE DIVERSES CHARTES.
Cependant les moines, ens'occupant des intérêts (le
leurs vassaux n'oubliaient pas les leurs.
La charte qui suit constate une donation faite au
couvent de Bourgueil : elle est revêtue d'un trs grand
nombre (le. signatures , parmi lesquelles
distingue
celle d'Archernbauld de Sully, archevêque (le Tours,
excommunié par le pape pour avoir marié le roi Robert
et la reine Berthe; et celle d'Hervé , alors chanoine et
trésorier du chapitre de Tours, qui rebâtit à ses frais
l'église (le Saint-Martin, et releva l'abbaye de Beaumont.
Oit
In noini ne Summt3i Salvatoris Domini A rcharnbaldits
y nisericorl iiI d ict i i)onin i Tu ronica sedis ardu e 1;
sancl;r I)otnini
etinctis ri ciel
pus notutil
Eeclesiapresentibtis ac futurs, pracipue SLtCCe5Ot'ibus
nostris quutn deprecatus est nos quidam
vasut
ex
nomine
Corbo
(
rebîms
,fidel,s
noster
ac
salis
benelicii quod (le zwbis tenere videtur quartas 1111;
iii prato arpennos monachis saneti Petri Burguliensis
monasterj i sub institutione censûs annuatim rodden.
dum per hujus tiostra auctoritatis testamentum coure(leretnus cujus tiep recat ionem beni gne unà ctirn asxensu
fideliwn nostrorum reeipientes concessimus j arn d ictis
monachis pradictas quartas cum supra (licto prato scilicet partiin cuitas terras et partimn incullas sicut in
pago Turonico in vicariâ Caiuoncnsi (3' in carte Suliacensi terminanta retro et totis partibus terrù cjusdem
j SCO-
CSS( V4)(IIIflUS
F2obiliS
(i) Ârchembai1d fut évêque de 98 t à ioo5. II est tantôt nominé &rce-
naldiis, tantôt Arcliirnba%dus.
(2) Corbo: ce Corbon est le môme dont il a été question dans une
flotta
précédentes.
(3) Coinoscnsi: Chinon.
*
:..
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
potestatis infra istas terminationes totum et ad integrum
eis perpetuflifl coneedtmus ad posscdndum ut habeaut
licentiain (le super aedificandi planleudi construendi ('t
qnidqutd me! ius eligerent emelioratidi, sol ventes exinde
annis singulis ad festivitatem sancti Mauricii qme celebratur X K! octob. Corbonifideli nostrosive suis successoribus censum sol. VIII et cis amplius non requira tur aut exgatur sed sub tali censu libere ac quiete teneant atque possideant nemine inquietante ac contra-
dicente et si de eclem censu tardi aut negligdn es
repetitifuerint id zpsun emendare studeant et quod
tenuerint non perdant. Ut auteni 1ic actoritas tirmior sit, firmiorque in perpctuuln sit observata manu
propriâ firmavimus manibusque fidelium nostrortiin
utruLsque ordinis adfirinari rogavimus etc.
Data Turonis civitate mense fcbr. XLIII K!. mortis
anno dominica incarnationis ])CCCC XC VIIlI regnante Rotberto rege, anno XI.
Cependant Guillaume II, duc d'Aquitaine, était
mort, il avait eu pour successeur Guillaume dit le
Grand, son cils : celui-ci voulut aussi contribuer à la
fortune du couvent de Bourgeuil fondé par sa
mère;
il lui fit une riche donation (lotit la charte suit
Iminensa omriipotentis Dornini misericordia (livitias
clementiae sua humano gencri n1ultiplici doue intulit
dum de terrenis coelestia drperituris sine fine manentia
felici cominercio iiiercari coticessit quid meute (levotâ considerans ego Wilielinus (i ), Aquitanoruin du
(j) tVillelrncis Guillaume lit, mon eu to3o, avait succédé à son père
en 993.
Li
DE DIVERSES CHARTES.
Pictavorum verè cornes, ad locum principis apostok.
um Petri quod vocatur Burgulium aliquid (le rcbus
proprietatis meïe condonari disposui : hortanto et deprccaute venerabili genitrice Emniâ quoe hoc ipsum
iiobilitej (undavit et multipliciter adornavit igitur,
desertum quoddam triuin silvarum in pago situm Pictavensi antiquilus nuncupatum Brittanniola , nidtirn
vulturis ubi a venerabile abbate Gauzbcrto capella in
honore Do!nini genitricis ac virginis Mariœ constructa
liahetur, dono ac tradocœnobii fratribus Burguliensis,
ut habeant licentiam in ibi excolendi aedificandi planiandi construendi et jure perpetuo possedendi cum
tiecimis oinntbusque utilitatibus ad id ipsum pertinentibus, scilicet terris cultis et incultis, vinejs, silvis,
pratis, pascuis, aquis, aquarumque decursihus, farinarus inobilibus et immobilibus, cunctis quoque adjacentiis suis. Simili et jan modo concedo sancti Petri
Burguliensis cœnobii monachis super fluvium Vendcia
CLIW decimis farinariis omnibusque uulitatil)us suis
quamdarn terrain Iongè viam, dictain farne Morelu, lueC vero omnia pre1ibata eà ratione trado atque
transfundo in speciales usus fratrum in cœnobio Burguliensi degentiurn ut habeant et possideant ca in seinpiterrillin absque ullius personae diminutione aut inquietudjne, et rniscricordis Domini clementiam pro inei
et genitricis incr quoquc ac uxoris propriac et fil iorum
uworiiin, si Dominus eos niihi dederit, saline perpetuà studeant iniplorare. Insuper non soluiti in istis
j)renolnitatis apostoli Petri terris et jam in omnibus
prcfati cœuobii Burguliensis potestatihus aut terris
ultra l)OSCUIII positis nullus ininistenalis publicus , nec
pra'posi(us, nec venator, nec vicarius, neque equoruin
custodes, neque pro sanguine, pro homicidio , pro
3
s-
54EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
furto, pro rapto, pro incendio, pro teloneo (i), pro
pascuario arietum pccorwn et vaccarum, aut aliqufi
repetundarum leguin cotisuetudine introeundi habeat
potestatem. Insuper et coloni qui eas terras incolunt
ita sint ah omnibus publicis negotiis absoluti ut nec ad
casiilla facienda aut biduanurn aliquid reddere aut ipsi,
aut hoves eorum, cogantur: si vero aliquis exheredibus,
aut pro heredibus nostris, sive alienius potestatis persona, hujus nostre bonœ voluntatis donum qualihet
occasione aut violentiâ infringere temptaverit, maledicto Domini super eum veniat et gloriani ejus non
vi ; et claviger oetherius apostolus Petrus regni
cttis januam illi claudat ; et cum diabolo et ministris ejus perpetue gehennœ supplicia sine fine suslineat,
nisi quanto ociùs ad emeudationemn venerit, irivasa
restituent, atqe neglecta dignâ satisfactione correxerit(2).
Cette pièce est d'un haut intérêt le duc d'Aquitaine n'a plus la prétention de repousser la suzeraineté du roi de Framice: il se nomme simplement 4quitanorum dux et Fictarorurn cornes : la lutte est
terminée; dans les chartes de son père ci-dessus relatées il n'est pas question d'Hugues Capet et (le SCS
successeurs: dans celle-ci, après une longue suite de
signatures apposées après celle (lu duc, on trouve la
date de la charte, elle est ainsi conçue : 4cturn Malia-
ceni3) inonasterio anno (Iiç'inœ incarnationis millesiino 1111 renanie Robe rio rege, anno XIII. La révolu(i) Triodroit ci payer pour le passage d'un polit.
(2) Cet:i . ce est revêtue d'un tr grand nombre de Sign,?urea de
comtes, vicomtes, évêques. etc.
(3) Maliacensi: Maillé.
DE DIVERSES CHARTES.
tien est consommée non-seulement en fait, mais encore
en tout ce qui Lient à la forme, à la routine: il n'y a
plus d'arrière-pensée d'indépendance: peut-être cette
résignation tenait-elle aucaractère pacifique et religieux
tic Guillaume le Grand: il aimait ses peuples et avait
L'ame ouverte à toutes ces douces affections; il chérissait sa mère Son épouse, il demandait au ciel la grâce
d'avoir des enfans: un pareil caractère était une bonne
fortune pour un clergé qui savait manier à son profit
toutes les faiblesses de l'humanité. La charte, dont il
s'agit, non-seulement confère aux moines de Bourgueil
un vaste domaine, mais elle leur assure les privi!égcs
les plus extraordinaires: toutes leurs propriétés deviennent inviolables. Aucun offkier public ne pourra
plus y entrer: elles sont fermées aLIX chasseurs, aux
prévôts, aux vicaires des suzerains: sous aucun pré.
texte on ne pourra y pénétrer l'assassin, le voleur,
l'incendiaire, celui qui a fraudé le droit de passage
celui qui a fait paître les troupeaux sur un terrain
proliibéy trouvent un asile assuré: la main dela loi doit
s'arrêter aux limites du couvent: bien plus, il est stipulé dans cette charte un droit qui indique bien l'esprit d'égoïsme des moines: leurs vassaux sont exemptés
de toutes charges publiques; en indiquant quelles sont
les corvées auxquelles échapperont ceux qui demeurent,
sur le territoire deSaint-Pierre, cette piècefait connaître
une partie des obligations auxquelles étaient assujettis
ceux qui n'avaient pas le même bonheur: ils devaient
travailler à construire ces chfteaux qui servaient à les
défendre ou àles tyranniser suivanties circonstances: de
plus, de dieux Jours l'un ils étaient, avec leurs bestiaux,
tenus de cultiver les terres de leurs maîtres. Si, avant que
cette charte fêt octroyée, les moines exigeaienL de ces
36EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
malheureux serfs les mêmes travaux que le duc d'Aquitaine, il est facile (le concevoir qu'il ne restait plus à
ceux qui n'étaient ni moines ni chevaliers un seul jour
à donner à leurs intérêts personnels. Après toutes ces
concessions viennent les malédictions et les anathèmes
d'usage: mais comme de tout temps il fut avec le ciel
des accomunodemens, après avoir menacé le coupable des
supplices éternels, on lui permet cependant de s'y
soustraire s'il veut expier ses fautes par une satisfaction
convenable, c'est-à-dire en se mettant à la merci des
moines.
Tous ces moyens ne suffisaient pas encore pour les
rassurer contre la toute-puissance des seigneurs. Les
chevaliers, sûrs de se faire ouvrir les portes du ciel, en
faisant une donation au jour de leur mort, se riaient
souvent pendant leur vie des engagemens qu'ils avaient
souscrits. Ceux de leurs prédécesseurs les liaient encore
bien moins; en vain les moines appelaient comme témoins (le l'acte les dignitaires du couvent, les nobles du
voisinage: les uns mouraient, les autres, influencés par
la crainte, gardaient le silence: on inventa alors des témoins muets: au moment de l'acte, les parties se remet.
talent l'une à l'autre, ou bien donnaient à une tierce
personne un objet matériel en témoignage du fait dont
i l s'agissait: il y avait pour ainsi (lire deux actes: l'un
ne servait qu'à constater la date de l'autre dans le souvenir des assistans. Tantôt on fouettait de jeunes enfans, et la douleur qu'ils avaient soufferte leur rappelait
le jour où tel acte avait été signé: tantôt on jurait sur
les évangiles de respecter un traité que l'on venait de
signer, puis en témoignage de ce serment on mettait à
la page sur laquelle on avait juré un brin de paille on
un autre objet (lu même genre.
DE DIVERSES CHARTES.
C'est ainsi que, vers l'an ro3o environ, Hardouin de
Maillé appelle à son lit de mort les moines de Marmoutiers, il leur fait une donation ,faciens donum per cultellumplicatun, dit la charte: il paraît que le couteau
était à cette époque l'objet (fui se donnait en pareilles
circonstances. On en voit un exemple bien plus positif
dans la charte dont le texte suit:
Scedulse hujus descriptio presentihus ac futuris nota
sit cunctis fidelibus quia Giraldus fihius Unsberti maildavit abbati Burguliensi nomine Bernoni ut darct ci
anirne beneficium in societatis adminiculum et venit
ad eurn abbas Turtiniacensis(i) quia Giraldus non polerat ire usque ad inonasterium. Sed ibi hoc Turtiniaco
dedit societatem corporis et anime scilicet Giraldo et
uxori ejus Errnsende: Geraldus vero pro beneflcio sito
contulit sancto Petro abbatique ac moiiachis VIII
vie tos de pratos ad glantus super œquain argentum ad
censum duos solidos et VIII denarios, et ipsos octo
-victos misit donum super altare sancti Petri Turtiniacensis. Ermsendis vero femina ejus dedit de alodos
suos III victos in Turtiniaco ad altare Burguliense et
ipsi alodi fuerunt Frealdo patre supradict Er:nsdis;
et hoc in ratione supradicti benelicii donum fuit cul-.
telluin unum, teslis in capsâ 5ancti Fortunati cum allis
reliquiis; hoc donum Geraldi et uxoris ejus frater Avmericus, fihius corum et uxor ejus Mazerina, infantes
eorurn sine u1lâ requisitione et sine ullum relevanientuLn concedant sancto Petro ac monachis ibi dcgentilus
prsentibus et futuris ità ut perpetuo haheutes possideant, nomine heredis nostri inquietè ferenti: hoc pla(t) Turtiniaccnsis: Tourenav.
8EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
citum et liane cartulani donacionis inquisierunt Alberiens nomine qui fuit des Lengeias et Basilius, nec non
Anbertus prepositus, Odilardasquoque qui sunt fratres
Burguliensis factum jussu et iniperio vicecomitis Turicusis Aimerici, et matris ejus Ainordis, etc.
On voit, en effet, que le couteau, témoin de cette
donation, est placé dans la châsse de saint Fortuné
sans doute on avait prêté serment sur ses reliques;
chaque fidèle, chaque héritier du donateur, quand il
verra la chasse et le couteau qui y est reufermé, se
rappellera lit donation de Giraud.
Les moines, qui ouvraient et fermaient les portes du
Paradis pour les autres, y entraient tout droit quand ils
s' y présentaient aussi leur vient-il alors la singulirc
idée de considérer un couvent comme une société de
commerce qui émet ses actions. En effet, on voit ici Je
prieur deTourtenay donner, au nom de l'abbé de SaintPierre de Bourgueil, société de corps et d'arne avec les
moines du couvent à Giraud et à son épouse; ce marché
est conclu moyennant quelques pièces de terre il est
difficile que des acquéreurs poussent jamais in confiance
plus loin.
Cette charte bizarre est datée du règne (le Henri,
roi des Français (//inrico rege Francorum), elle est
signée du vicomte de Thouars dans la chambre duquel
elle est écrite.
On va voir dans une autre charte jusqu'où pouvait
aller la cupidité des moines, et combien peu ils avaient
(le scrupules sur les moyens de s'enrichir.
Geoffroy-le-Barbu (ï ), comte d'Anjou et de Touraine,
(L) GolTioy-1e-Bathii snc .;éda, en ro6o, à Geffrov .5Jarle], son oncle nia-
tend. I l commit la faute de lutter Coolie l'autorité spiiituelle, saus avoir
DE DIVERSES CHARTES. 39
ne vécut jamais en paix avec Foulque Rechin, son frère.
Ce dernier fut le plus fort, et son frère fut renfermé
dans une sombre prison. Trahi par ses sujets, excommunié par le clergé, maltraité dans ce château de Chi.
non où il expiait la faute d'avoir un frère ambitieux
et dénaturé, Geoffroy-le-Barbu devint imbécille: quelle
belle occasion pour abuser de sa faiblesse! aussi les
moines ne s'en firent-ils faute, comme on w. k voir.
Nosse debebitis si qui eritis posteri nostri majoris
scilicet hujus habitatores monasterii sancti Martini,
Gausfredum Papaboue cognornine et Marca (i) uxorem
ejusAnardi quandam propositi fihiam donationern hujus
inodi sanclo Martino et nobis pro aniinabus suis fuisse:
est in Andecavo (2) castellum quodilain Ruiliacus nomine, quod cum id ipsum circurncirc pertinentihus
casamentis ex paterno jure ejusdem 1%larcœ conjugis
suœ in Gauffredi devenerat possessionein. De quibus
casanientis, cum qwr vellet agendi GaifJreda iiberam haberetfacuitatem, placuit ci et aliquid ide,
pro futurie spe salutis, Domino inaluit offerre : donavit
itaque nobis, sub eâ qua tenuerat li'bertate perpctuo
possidendam, quamdam terre partein, ante mernoratum
ah aquilone situm castellum, ad adificanduin in eâ ecclesiam et burgum; cui etiam ex latere unam terr
mansuram , quia in propriâ dominicaturâ habebat, cum
assez de fermeté pour être le plus fort. fl lutta contre les moines
moutiers, les chanoines de Tours, et fut excommunié; ses états f,::
nés à sou frère. II fut délivré, en 1096, par le pape Urbain II. La d: da
sa mort est incertaine.
(s) Marca: quelques auteurs ont cru que Geoffroy était murt sans avoir
été marié; d'autres lui donnent pour femme Jua,dont on ignore la famille
Peut-étre fut-il marié deux fois.
(a) Andccuro Angers.
toEXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
partis ad ipsam pertinentibus subjunxit. Doiiavitcuuj
eft pariter boves et parcum cum ovibus, nec non et
bladuni terre ipsius, prornitteus insuper ut cum aitare ecclesiac de Cadenaco, per obituin uxoris Odoiijs
Rufi, ail ipSUm redierit, deciiiio quœ ex etdem niansura
iii debetur ecclesue, nobis ah ipso condonetur. Donavit pra3terea oblationem et sepulturam de hominibus
qui in eâ ainpiiflcatione casteili qui a parte Cadena ci
a stagno usque ad predictani rnansurarn porrigitur inhabitant, ut videlicet omnes in Mc quant vulgo Porprisum vocitant amphficatione cornanentes, non alii quant
ecclesiae nostra illic consistenti, ecclesiasticos reditus
debeant persolvere. Donavit et (tuas terrie mansuras
soudas et quietas in Alocho (le Puteolis sitas. Eâ seulcet ratione ut si qua unquam in his colunia surrexerit
à qtt( nobis ilias acquietare non possit, excamhiuin
eorum reildat nobis in terrâ de Gugucinado. Quod se
spopondit facturum esse si vixerit aut uxorcrn suant ,
annenti ail hoc ipsâ, si co defuncto et ipsâ superstite
ejusmodi calumnia surrexerit: hic etiam adhuc addendo scptem pariter terrœ mausuras soudas et quictas
sitas versus peregrina in cortc prefati castelli sui; eâdeiii
similiter devotione licentiam tribus in ebdomadâ diehus
nionacho nostro attribuens qui illic ail ea qua- dedit
excoleuda fucrit imruoratus al quotiene noster abbas ibi
adent, non triduana sed continua fiet piscatio, quotquot in eodern loco denioratus fecerit dicbus : verim
piscationes bujus modi in proprio stagno permisit fieni.
De terris quoque ccnsivis et casamentis totius swe
ditionis si quis nobis ahquid (lare aut vendere vouucrit
favorali liberalitate concessit hc autem oninia ut de
quorum sunt casamento distinctè possit aguosci, mansiira et pars terrœ ail cdificanduin data vins existtujt
DE DIVERSES CHARTES.
coniitis Gaisfredi inasistirie vero septem ad casamentum Gaisfredi'de Pruiliaco (i) pertinent. Sed Guarinus
de Fontanis a heneficio cas tenebat ipsius, hic igitur
oinnes tàin cornes quàm et Gauffredis alque Guarinus
propriâ quisque auctorisationc clonaciones hac Gauffredi uxoris que ejus gratis confirmavere, nam cornes
postulatus, eum placitaret quâdain vice eutn suo fratre
Fulcone (2) apud vicuin Condatensem, relectâ coi-am
ipso cartâ istâ ah Eusibio Anclecavensi pontifice, pro
suâ erga nos seduhl benignitate mox eam auctoritatis
propria3 , ut est infrà cernere, sacrœ cruels corroboravit caractere. Coeteri duo idem fccerc Gaisfredi ipsius
precario.. - Porro autem idem ipse Gauffrcdus p'
bis omnibus quœ nohis donavit mille tamen a nobis
solidos partim in denariis, partim in alus rehus accepit:
fecit autem donationem omnium supra memoratorum
cum supra nomiiiatâ suâ conjuge presens in capitulo
nostro anno viddicet ah incarnatione Domini millesiino LX11I presidente nobis domino abbati Alberto
testibus istis.
Au premier coup d'oeil on a dû saisir toutes les préeau lions employées parla fourberie pour valider un acte
nul devant toutes les législations clii monde.
Cette charte, revêtue de la croix (lit
est datée
de ioG3.
(in a bien soin de dire que Cette donation a été faite
lorsque Ceoffrov était libre, quurn quce vellet agendi
GauJfredus liheram haberetfacaltate,n. Or, la cap(s) Gausfredi de Pruiléaco: Geoffroy de Preiiilly. Il fut un de CCLIX qui
livrèrent la ville d'Angers à Foulque Rtcliin il n'est pas £'Lonnant qu'il
'ontinuàt à trahir les intérêts de Geoffroy-le.Barbu•
(s) Fuko,ze Foulque le Réchin.
42EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
tiviié de Geoffroy n'a commencé qu'en 1067; il était
donc libre en io63. Comme on craint d'être interrogé
sui' la manière dont cette charte a été signée, on se
hâte, pour satisfaire l'indiscrétion des curieux, de
raconter dans de minutieux détails comment la chose
s'est passée : si l'acte est signé en io63 par Geoffroy
libre et jouissant (le ses facultés, toutes ces phrases
sont inutiles, eues ne sont là que pour masquer une
fraude. Cette charte est surprise à la folie d'un inalheu.
reux vieillard qui a signé sans savoir ce qu'il faisait
on veut avoir l'air (l'avoir acheté COS Concessions exorbitantes qu'on lui arrache, et on fait reconnaître à
Geoffroy qu'il a reçu mille sols, partie en deniers, partie
en autres choses, ù alus Teints; l'avare dc Molière ne
ferait pas mieux.
Dans l'histoire Geoffroy est connu sous le nom do
Geoffroy-le-Barbu on remarquera que dans cette
charte il est surnommé Papaboue.
Parmi les droits et priviléges que les moines de SaintMartin obtiennent à si bon marché, on remarquera qu'on
leur donne le monopole des cérémonies funèbres pour
tous ceux qui meurent dans une certaine étendue de
terraiu; ils ont aussi le droit (le recevoir ce qu'on Vent
bien leur donner, ce (l ui les dispense (le solliciter,
chaque fois qu'ils extorqueront une donation, l'autorisation des comtes d'Anjou dès lors ou ne pourra plus
&ic inhumé en terre sainte que quand le défunt leur
aura fait une donation quelconque ou quand ses héritiers auront réparé ce que le clergé veut bien appeler
un OUl)li de la part du trépassé.
La charte dont la teneur suit est plus valable que la
l)I'Céclente; elle n'est pas moins curieuse. Un chevalier,
nommé Armery, donne aux moines de Bourgueil une
DB DIVERSES CHARTES.
église que ses uêres avaient fondée et enrichie sous
prétexte que la conduite (les clercs qui la desservaient
M éritaient d'être réformes.
Autiqua traditio et necessaria assuitudo obtinuit
ut si quid agerotur quo(l dignuni memoriâ posteris temporibus eenseretur, ne vetustato ingruento rei gestie
veritas fuscaretur, res gesta solcmniter litteris mandaretur. Quod id ipsum ego Armericus Madulli Scouensis
fihius, fietî inandavi no olemosina sciUcet quam legaliter egeram aliquando, traderetur oblivioni. Sciant
igitur catanci et successores nostri quum super fluviam Ligerim (s) prope castelum quod dicitur Legais
est vicus quidam in quo est in honore sancti Miehaelis
ecclesia à quo ipsa villa sibi nomen vindicavit, ita ut
hodiè Sancti Michaelis locus ille vulgariter appelletur,
pro vencratione beau archangeli taliter nuncupati
oeclesiam itaquc prefatam antecessores moi terris pratis vineis decimis alus redibitus aliquantukim ditaverant. Ditalam quatuor clericis coinmiserunt quos canonicos appellabant: Ingelgerius auein avus meus videns
quam quantum ad Domini servicium ecclesia (lebebat
cinendari, ut monaclios ibi iinmiserit voluntateut qui.
tiem habuit, sed volontateui simm minimè implevit,
lioc tamon constituit ut si aliquando ihi monachi
mitterentur do nullo alio flS j de IOCO assuinerentur
Burgulicnsi. Id ipsum pater meus Machelltjs qui Buegulii monachis effectuis et filiam Ingelgerii matrem
ineam Richeldiin habebat obtestatus est ego ver ArInericus avi et patris moi satisfaciens voluntatibus et
matris mea obsecundans postulationibus, loco saucti
(r) Lgerim: la Loire.
44EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
Petri Burguliensis in jus et dominationem monachoruni
in ihi Domino servientjum dedi et transfudj œcclesiara
illain sicuti canonici eam tenuerant et possiderant,
ipsis canonicis concederitibus; ut (le cetero cam quictain teneant et possideant et ah omiii inquietudine seculari immunein habeant, consuetidines etiam quas
ah decessorihus (i) ineis canonici habuerant moiiachj
itendidein habeant. Scilicet in basco meo P0rC0S suos
sine pascuarlo mittant : quicquid hommes mci liberi
vel non liberi de suo loco illi dare voluerint habeant
et si in datis iebus aliquid consuetidinis ego vel successores mei habuerint absque consuetidinis illius redibitione inonachi quietè possideant (nam et iliud cano-.
nici sirniliter fuerunt) proeter vineas prata terras cuitas
et incultas quœ ejusdem ecclesioe extiterent. Hommes
monachoruin vel in dorno vel in terri coinmanentes liberi existant ab omni vicarij precor itaque et
obtestor omnes successores meos ut liane elemosinam
meam quaixi pro preclecessoribus et successoribus feci,
ipsi quoquc conservent augmentent et muniant. Ne
si aliter agerint, beneficii hujus priventur beucficii et
trudentur in infernum pro tain nefando sacrilegio. Feci
autern banc donacionern fidelium meorum sano usus
consiijo Richeldis matris meœ Ingelgerii flua indesinenti
suecensus precario, omnium fratrurn meorum asseusu
suffultus benevolo : feci autein hanc donacionem legaliter in capitulo Burguliensi videntibus monachis et
laids ubi reciprocâ vicessitudine in eodem capitulo
heneficiuiii orationum recepi et pactum est ut in eodcin
capitulo ego et Carbonnellus frater meus mortui pansaremus, aut si veliemus monachi viventes essemus,
(L) Pour predeces:oribus.
DE DIVERSES CHARTES.
dono in capitulo facto accessi ad Radulphuni secundum Turonenscm arcliiepiscopuni d eprecan s uti doua
Isuic assentiret quod et ipsc fecit. Et in capitulo sancti
Mauricii Turonensis confirmavi t su pplicavi eti am super hoc Fulconi comiti Andegavensium, comitis Goffredi Martelli nepoti qui meac petitioni libenter assen sum prebuit ut pote pro anirnd Goffredi (ï) Martelli
avunculi sui et ipse confirmavit et optimatibus suis
banc cartain ad conflrmandum tradere jussit. Hoc autetn factum est anno incarnationis divinae millesjino
iionagesimo III, indictione I, epacta XX, concurrentibus V, hoc donum supradicti Armerici machelli viderunt isti testes, nomina quorum subsequuntur (2).
Sans doute, lors de la création de l'église Saint-Michel, on avait aussi dévoué à Satan et à ses ministres
ceux qui porteraient atteinte à cette pieuse fondation;
sans doute ic prêtre qui se trouvait être l'archevêque
(le Tours à cette époque, après avoir donné son consentement, avait prié ses successeurs et les générations
présentes et futures de respecter l'indépendance de mon.
seigneur saint Michel ; et, cependaut, voici que cette
église, ses dépendances, ses clercs sont livrés aux moines
de Saint-Pierre. Saint Pierre a tant de crédit dans l'autre
monde! c'est le portier des ciew! enrichir son couvent
n peut être un péché, rit-on tort à quelqu'un, même
à un saint.
On doit remarquer aussi que les donateurs stipulent
(i)Goffredi Martelli Geoffroy Martel, mort eu xo6o ,oncle de Foulque.
(s) Cette charte est revètue d'un très grand nombre de signatures et de
treize croix grossièrement faites, parmi lesquelles on distingue celle de Foui.
que Réchin. Il savait cependant écrire: ou s de lui un fragment d'histoire
concernant tes princés de la maison d'Anjou. II mourut en 5109-.
46EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
en leur faveur le droit d'être ensevelis dans le chapitre
de Saint-Pierre, ou celui de s'y faire recevoir moines,
si ccla leur convient. C'est bien ic moins qu'on puisse
faire pour eux on se figurait alors fléchir la colère
de Dieu en mourant dans une robe de capucin.
La religioo comme on le voit, se prêtait aux moeurs
du temps; ses ministres avaient oublié depuis long.'
temps que le Christ était venu sur la terre pour délivrer le faible de l'oppression du fort; les moines avaient
des serfs comme les laïques non-seulement ils maintenaient en servitude ceux qui se trouvaient sur leurs
terres, mais encore ils recevaient en présent des
hommes et des femmes comme si on leur eut donnd
des meubles ou des bestiaux la terre (le Dieu était une
terre (l'esclavage. On sait coinriicut les moines de SaintDenis traitaient leurs serfs; on n'a pas oublié que les
derniers serfs en France furent la propriété des moines.
Dans la charte qui suit on voit une abbesse donner
au bienheureux saint Martin de Tours une femme et
toute sa postérité présente et future.
In nomine sanctae et Individuae Trinitatis. Amen.
Quum (lies mali est, et malitia crescit de die in
(hein , ego Aatidis Dei gratià Jotrensis ecclesi abbatissa tain quam futuris notiflcamus, et assensu nostri capituli nostris pariter literis et sigillo
ceriificamus. Elisabeth de Turci uxorem Rainadi panificis quae beatae Maria virginis femina fuit cuni omni
su( posteritale tain presenti qUàmn futui'â , ecelesie
heati Martini 'furonensis episcopi pro Emelinii fihii
Jietirici de Gandeluz in perpetuum coiicedimus. Iloc
•iutern factum tempore Petri decani, Giraudi tesauraru, in presentia Joliannis de Linerus ejusdem eceiesie
- )E DIVERSES CHARTES.
canonici et iterum corcilio et assensu Fukonis deTurci
et Odoiiis de Nogiane ejusdem eccIesie servientum.
Ces moines si habiles à s'enrichir avaient souvent
bien de la peine à défendre leurs propriétés, nime
contre leurs vassaux; la pièce suivante peut en donnêr
Une idée.
Notumsit prcsenti bus et futurisquod Daniel, major
de Parciaco(i), furatui est atiquando annonam mofla chorum majoris monasterii quorum major ipse erat et
occultevendidit eam Adelardo dc Parciaco et Petrnjflœ
uxori ejus. Igitur de hoc forisfacto impiacitaverlint
euin inonachi et ad hoc tes ducta est (JUOd Johannes
paup, et Guaiterius facit inaluni judicaverunt Danielem
ilium forisfecisse majorian-i suam et quidquid tenebat
de monachis et ita perdidit majoriam. Iloc viderunt
et audierunt Wiilelmus prior, Sancelinus ceilerarius,
Hubertus celierarius, Paganus camerarius, Odo des
Fontanis, Landricus hospitularius, Adelardus de Parciaco et Petronilia uxorci, Gualterius filins ipsius Danielii. Porro non muito post teinpore ceint idem Daniel denegare totum piacitum supra scriptum : undè
iterum monachi ad tenninaverunt ci diem piaciti. Venit
dies : ventuiii est ad piacitum. Itabuit Daniel ex parte
suâ Archengerius de Rupibus et cum juin deberet fierti
judicium recoguovit Daniel sic placitavisse monachos
contra euiii sicut superiùs relatum est : undè iterum
judicatuin est cum jure mjoriam perdidisse. Ubi affuit
Gualterius fecit rnaliiin qui jain in ni tero piacito abjudicaverat ci majoriain requisiverat autern Gualterius
(i) arçay.
48EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
fdius ipsius Danielis a monachis majoriain illam et
(lixerat quod pro forisfitcto patris sui non deberat eam
amittere et venerat terminus in quo traclandam erat
indè inter Monachos et eum. Et tunc requisicrunt monachi ab eo ut priUS redderet eis centum solidos denariorum quos ante inuitos annos pepigerat autein abbati eornm pro eidem majoriâ, nec unquam redjiderat
eos, et ut priùs ernendaret eis et hominibus corum
quœdam alia forisfacta quœ reclamarent contra eum
respondit ille de iliis centum sohdis factaru fuisse coucordiam cum monachis per man uni dtmini Raduifi tunc
prions; ad hoec monachi responderunt dominum, Radulfum non esse tune presentein, sed venturum ad
festivitateni }iyemalcm heati Martini quœ futura est
post diinidium ferè annuin et si ille Gualterius diratiocinaret hoc in prcscuti 1 ejus ]psi concedei'ent respondit die quod infra festivitateui esLivalim beau Martini
acciperet mdc consilium utniùin hoc facturum esset
au non et habuit Convenentiam ipsis inonachis quod infra terminum ilium nihil forisfaccret cis neque frater
ejus neque pater corum : sed paulo post violata fuit
fiducia illa; nàin pater ejus et katerinfregerunt furtim
quamilam dom uin monachoruin infra teniiiinu in constitutum. Propter quod monachi ceperunt ilium Guaitenium et tenuerwit id captione per aliquot dies donec
ipse recognovit si injustè agere adversuni monachos et
juravit eis super sanctorwii reiiquias in presenhia illomm monachoruin WilicIrni prions, Odonis de Foniaco,
et Johannis de Coburnio qui rcliquias aituierat quod ah
illo termino(tunc autein erat annus dominicœ incarnationis M. C. X.) usque ad decem annos non requireret
a monachis majoriam iliain. Fuit quoque talis convenieutia inter cos quod si ita se habcrei ergo mona-
DE DIVERSES CHARTES.
chos ut post illos decein annos placeret eis reddere ei
majoriam reciperet cam. Si autem monachi non red.
(lerent ci, ipse vellet adhuc indè placiture contra eos
inonachi requirerent priùs ab eo centum solidos supra(lictos et alia forisfacia sua. Ibidem quoque juravit
eisdem inonachis quod in totâ viti suâ servaret eis
legiam fidelitatem adversuis omnes hommes, juravit
etiam quod propter occasionem captionis quarn mona..
clii fecerant ci nec ipse nec aliquis alius propter eum
faceret quidquam mati vel dampni ipsis monachis aut
rebus eorum : hoc factum est presentibus jam dictis
monachis id est Willelmo priore, Odone de Fouziaco,
Johane de Coburnio, Huberto cellerario qui recepit
jusjurandum, Samelino cellerario, Arnulfo cellerario,
Pagano camerario, Roberto cortocapello , Radulfo caballario, Ebrardo scutellario et multis alus.
Cette pièce est le récit (l'Un procès féodal : le maire
de Parçay, accusé de vol, convaincu de forfaiture, perd
son fiel: appel de sa part et nouvelle condamnation;
puis alors surgit un nouvel incident : son fils prétend
lui succéder : on nommait mairie, non pas une seigneurie, mais le droit de jouir de quelques revenus
seigneuriaux : c'est ce qu'on appelait aussi feudu,n
bursce, fief boursier: il paraîtrait qu'à cette époque la
mairie était héréditaire, aussi le fils de l'homme que
l'on vient de destituer l'obtient-il malgré la défiance
qu'il inspire. Ce document est une espèce de mémoire
sur les faits qui ont fait rentrer entre les mains des
moines la mairie de Parçay: il peut donner idée de
la violence du temps, du peu d'importance qu'on attachait aux sermens les plus sacrés, et (le l'impossibilité où chacun se trouvait (l'obtenir justice.
(I
r
-
50EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
Après avoir vu les moines lutter contre le maire de
Parçay et ses enfans qui les dépouillent et qu'ils n 'osent punir, on sera peut-être eurieux (le lire une sorte
de Code d'instruction criminelle rédigé sous les auspices de Juheil, archevêque (le Tours; c'est un traité
destiné à mettre fin aux contestations que faisaient
naître sans cesse entre le seigneur de Lugny et les
moines de Saint-Quentin la prise et la garde des voleurs.
-Juliellus (i) Dei gratiâ Turonensis archiepiscopus
universis presentes littcras inspecturis salutem in Domino : noverint universi quod cum inter priorem et
conventum de Gressio (2) ex unâ parte, et Garinum
Gonele militem ex alterâ super vigeriam terra dictomm prions et conventûs de Bochellii quain vigeniam
idem miles ad se dicebat pertinere et dicti prior et couventus ex ahuso dicebant quod dicta vigeria ad ipsos
pertinebat: contentio vcrteretur; tandem diclae partes
in nostrâ presenCiâ institutae super permissis in hune
modiim pacis concorditer con venerunt : quod si aliquis
latro in dictâ terrâ caperetur, ut de extrà terrain Sit
sequUtUS, extrafleuS et non mansionarius in dictâ terra,
serviens dictorum prions et conventus hoc notificaret
dicto militi aut ejus mandata in domo suit de Luigneio,
et latronem capere poterit sine conditione eorum idem
miles cum omnibus rebus quas idem latro habehit. Si vero
latro mansionarius in dictâ terrà captus fuit similiter
serviens dictorum prions et conventus eidem militi notificabit: eteumdem latronem poterit caperesimiliteridem
miles cum omnibus rebus quas super se liabebit quum
caperetur tantum modo, nec in aliisrebus dicti latronis
(x) fuàdllus: Jubel de Mayenile fut arche'éque de Tours de t229 à 1244
(2) Gresio: Gray, Grez, Grnz: Prieuré de Saint.Jean-du-Grez.
1
DE DIVERSES CHARTES.
poterit idem miles aliquid reclamare post, (lien1 vero
denunejacionis factie dicto niiliti atit ejus mandato : in
dicto loco serviens prions et convcntus latronem non
tenebitur custodire. Si autem dictus miles dubitayerjt
quod ille qui latroiiis cepit aliquid de rebus pradictis
quœ habere debebit., celaverit aut habuerit, juramentu-m ihius habebit quid aliquot de rebus predictis non
habeat, et supradicti capientis tenebitur credere juramento. Nec aliud poterit idem miles in dicta terrâ de
utero reclarnare: immo omnimodo alia vigeria eisdem
priori et conventui in perpetuuni remanebit tain in
dictâ terrâ quam in omnibus hominibus extraneis seu
mansionariis in eâdem per hoc tamen non prjudicatur
(licto militi in uno modio frumenti quod haberedicitur
in terrâ supradictâ, actum ad petitionem parti um mense
unio anno Domini niillesirno duccntesiir.o quod regesimo sexto.
Qu'on n'aille pas croire que les questions de compétence traitées dans ce traité soient discutées, dafls l'intérêt des justiciables; ce serait une erreur il ne s'agit
ici que de l'intér& pécuniaire et seigneurial des juges:
les biens des condamnés étaient confisqués au profit de
celui au nom de qui se rendait la justice: ici les juges
se disputent non-seulement la dépouille du voleur,
mais encore les obj ets volés il ne vient à l'idée d'aucune des parties contractantes que l'objet volé n'appartient pas au voleur : ils ne se figurent pas que fa
justice doit s'efforcer de réparer le tort causé par le
coupable; le fruit du vol leur semble une sorte de part
que le hasard jette entre leurs mains, et dont ils s'emparent parce qu'ils ont le pouvoir de s'en emparel'
qu'on n'oublie pas qu'à cette époque les seigneurs cou-
EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
raient les grandes routes pour dévaliser les passans:
ils devaient trouver tout simple de garder pour eux les
objets volés par d'autres.
Des hommes qui avaient fait voeu de pauvreté recevaient et achetaient perpétuellement des propriétés
foncières, des rentes et redevances, des droits seigneuriaux: sans doute ils avaient pour excuse la charité que
l'on pratiquait scrupuleusement dans quelques coucependant on a pu remarquer que dans toutes
les pièces qui précèdent, il West pas question d'auinône: tout ce qu'on donne aux moines, leur est donné
pour leur subsistance : tout cc qu'on leur demande, cc
sont (les messes. Il est vrai que quelquefois on exige
d'eux une rente payable en argent; mais ils stipulaient
que, s'ils ne payaient pas ces rentes, ils ne perdraient
pas les domaines concédés; tantôt ils finissaient par
obtenir des donateurs ou de leurs descendans la remise
de ces re(lCVaflCeS : tantôt ils cessaient de les payer,
puis opposaient la prescription: au milieu du treizième
siècle, les moines possédaient plus de terres que les
hauts barons du royaume; ils avaient plus d'or, de
pierreries, que n'en contenait le trésor des rois de
France. Les papes les avaient comblés de priviléges
qui leur servaient d'armes offensives et défensives
rappelez-vous tous les rois de France à genoux devant
le tombeau de saint Martin de Tours, les peuples marchant à la Terre-Sainte à la voix des moines, ces
mêmes hommes bravant partout et la suprématie des
prélats, et l'autorité royale, et les ordres de la reine
Blanche; et vous aurez l'idée de ce que l'intrigue et le
mensonge peuvent accumuler de puissance. Cependant
l'excès de leur prospérité inquiétait les ordres religieux:
aussi les moines, qui se sentaient trop faibles pour pou-
_________________________ - - -
.------'--
DE DIVERSES CHARTES.
voir se passer entièrement d'un appui, s'étaient-ils efforcés de se maintenir dans les bonnes grâces de la cour
dc Rome; il n'y avait qu'un moyen de s'assurer la protection des papes, c'était de se prêter à leurs vues ambitieuses : ce rôle devint celui des moines; ils combattirent pour les papes, et soutinrent de leur crédit et de
leur parole les prétentions les plus exagérées qu'il
plut aux successeurs de saint Pierre de faire prêcher à
la chrétienté : pour tant de services les religieux leur
demandaient sans cesse et de nouveaux priviléges et k
maintien des anciens, et surtout la permission d'être
riches et de s'enrichir encore, comme s'ils n'eussent
pas renoncé au monde et à ses vanités.
Les papes n'étaient pas ingrats, les bulles suivantes
en sont la preuve.
Alexanderepiscopus servus servorutn Dei cunctis in
Christo. Filiabus abbatissae et conventui monasterii dé
virginitate Cisteriensis (i) ordinis Cenornanensis diocesis salutem et apostolicani benedictionein solet annuetè sedes apostolica pus votis et honestis pctentium
desideriis favorem benevolum impartire, quapropter
dilecte in Domino filie, vestris justis petitionibus grato
concurrentes assensu ut privilegiis et indulgentiis Cisteriensis ordinis ab apostolicâ sede concessis vel in
posteruni concedcndis qua nohis eoinpetunt, gaudere
possitis auctoritate vobis presentium indulgcmus. Nulli
ergo horninum liceat banc paginam nostraconcessionis
infiegere vel ci ausu temerario contrarie si quis autem
hoc attemptare presum pserit indigna tioncin oninipotenus Dei et beatortim Petri et Pauli apostoloruni ejus
(r)
Cisteriensjs or.hns: ordre de Cteaux.
54EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
se novent marisurum. Dat. Viterbii XI Ki. jutii ponti-.
ticatus notni anno quarte.
Alexander episcopus servus servoruin Dei dilectis
huis abbati et conventui rnonastenii de Burguclio ordinis sancti Benedicti A ndegavcnsis diocesis salutetu et
apostolicam benedictionem. Vestrœ religonis bonesta
cui favor debitur gratte specialis laudabiliter pLoiflittetur ut quw justè deposcitis ad exauditionis gratiam
adinittainus volentes igitur paci et tranquillitati VeSIrae ac monasterii vestri indemnitatibus quantum crnn
.Deo possumus precavere, vobis auctoritate presentium
iiidulgemus ut Iibertatibusj urisdictionibushononibus ac
dignitatibus liberè ac sine diininutione aliquâ gaudere
possitis tùm in capite quam in membnis quibus a qulaquaginta annis monasterium vestruni hactenus 1)tscriptione legitinlâ est gavisum , nichorninus prohiI)eutes aichiepiscopi et episcopi lit dioccsibus
dictum rnonasteniuin et membra ipsius Consistunt et
ahi ordinaril aliquid a vobis, nisi id tant 'wn quod u
nionastenio vestro et membnis ejusdem liactenus percepisse noscuntur , contra prescriptionem legiliniam
exigere vet extorquere presuivant. Nulli engo oinniii
Loin I nuin liceat hane paginant nostroe concessionis infningeLe aut ci ausu tcuieraiio contrarie; 5i quis autein
1iac a Itemptare presumpserit indiguationem ornai potentis Dei et beatorum Petri et Pauli apostoloruiii ejus
se iiovenit inansuruni, De. Neapoli XV Ki. junii pontificatus nostni an no primo.
Urbanus episcopus set-vus servoruiii Dei dilectis fil lis
abl)atl et conventui inonasteiii dc Vendocino (i ' ordinis
( i) JL4dUCtfl, Vçp.idôiue.
r' ''T
DE DIVERSES CHARTES.
sancti Benedicti Garnotensis diocesis, ad Rornanam ecclesiam nullo media pertinentis , salutem et apostolicam benedictioucm: quùm à nohis petitur quod justllm
et honestum, tain vigor equitatis quain ordo exigit
raionis ut id per sollicitudinern oflicii nostri ad debitutu perducat effectum; quapropter, dilecti in Domino
fuis vestris j ustis postulatiozi il)us grata concurrentes
assensu, omnes libertates et immunitates a Romanis
pontificibus predecessoribus nostris sive per privilegia
sive alias indulgentias vobis et monasterio vestro concessas, nec non libertates et exemptiones secularium
a regibus et principibus aliisquc fidelibus rationabiliter vobis et monastcrio prdicto indultas; terras quoque possessionis et alia bona vestra, sicut ea oinnia
justa ac paciflcè obtinetis, vobis et per vos eidern manastero auctoritateapostolicâ confirmam us, et presentis
scripti patrocinlo communimus. Nulli ergo omiiino
borninu m liceat banc paginam nostrac confirmationis
infringere vel ci ausu temerario contrarie; si quis autem
hoc attemptare prcsurnpseiit indignalionern onmipotentis Dei beatorum Petri et Pauli apostolorum ejus se
novent incursurum, Datum Viterbil V K!. apnilis poutificats nostri auna primo.
Urbanus episcopus servus servorum Dei dilectis fuis
abbati et conventui inonasterii Veodocinensis ordinis
sancti Benedicti, ail Romanam ecclesiain nullo media
pertinentis Carnotensis diocesis salutem et apostoliram
benediciionein devotionis vestre precihus mcli nati
presentium VOl)iS auctoritate concedinius ut possessiones et alia bona mobilia et immobilia quie liberas
personas fratrum nost rorum ail mon asteri um vestruin
mundi relictâ vanitatc, convolantium et professioneni
T
56EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
facientium, in codem jure successionis vel alio justo
titulo si remansissent in seculo, contigissent et que
ipsi potuissent alus libere erogare, rehus fuedatibus
duntaxat exceptis, valeatis petere recipere ac etiam
retinere. Nulli ergo omnino horninum liceat hune pa—
ginam nostra concessionis infringere aut ci ausu ternerario contraire. Si quis autem hoc atteznptare presurnp.
sent milignationem omnipotentis Del et beatorum
Petri et Pauli apostoloruin ejus, se novent mansurum.
Datuni apud Urbeni veterem V K!. novembnis, Pontificatus nostni auno secundo.
Ces bulles sont émanées d'Alexandre 1V et d'Urbain 1V; on voit que les pontifes romains y témoignent
grande bienveillance pour leurs enfans chéris. Pendant
les ordres religieux jouaient un si grand rôle dans
les affaires politiques du nionde, d'autres moines, plus
fidèles à leurs voeux, restaient ensevelis dans le silence
du cloître : là ils donnaient à la prière et à l'étude des
jours qu'ils avaient arrachés aux agitations de la vie;
ils cultivaient les arts, les sciences et les belles-lettres.
Tout ce qui nous reste de l'ancien monde, tout cc que
le moyen-âge a su garder ou créer, ou le doit aux
moines: eux seuls ont entretenu le feu sacré de la civilisation : c'était chez eux que l'on trouvait les précieux
manuscrits que les Vandales et les Goths avaient oublié
de détruire. Le calme (le la vie monastique favorisait
les hautes études : c'est aux pieds des autels qu'ont
écrit nos p lus anciens chroniqueurs. Marrnouiiers
était l'un des plus antiques couvens de France, et Grégoire de Tours est le père (le nos historiens. On a prétendu long-temps et l'on prétend encore que ic français
le plus pur se parle au bords de la Loire. Voici dt't&x
-:
DE DIVERSES CHARTES.
5
échantillons du langage (le Touraine qui peuvent servir
de pièces de comparaison, si l'on veut examiner ce
problème à toutes époques de notre histoire l'un est
de 1267, l'autre est de 1277.
Gie Johan de Chasteillon......de Blois et d'Avesnes
faz àsavoir à touz ceuls qui verront cestes présentes lettres
qui giepour l'amour deDieu et pour le rewede demame de
l'aine Aaliz ma fame, et de mes antécesseurs de l'asseiiteinent et de la volonté de ladite Aaliz ai doué et octroié
en pure et pardurable aumosne à l'abbé et au couvent
de l'Éstoile de l'ordre de Prétnonté, quarente souiz de
rente de la monnoie courant i Chateau Renaut pour
pitance à tous jours mes prandre chacun eu sus mon
toulin de Cheteau Renaut des devant diz abbé et couvent ou de leur certein coumandement le jour de là
feste Saint Remy par la mein à l'argentier de Cheteau
Renaut ou de celui ou de ceuls qui pour le tens recevront
ledit toulin; et seront rendus iceuls quarente souiz de
rente en la manière de susdite au diz abbé et couvent
ou a leur certein coumandement tous les jours de ma
vie. Et veul et commans que après mon décès iceuiz
quarente souiz de rente soient pris sus mon festage de
Blois chacun an dedens les dix jours enseyant après la
feste Saint Hillayre tant comme ladite Aaliz ma femme
vivra tant seulement par la main de celui ou de ceulz
qui pour le tens recevront le dit festage et veul et comflans que après le décès de ladite Auliz les devant ditz
quaretite soulz de rente soient pris sus le devant dit
tou lin de Chateau Renaut à tous jours et chacun an le
jour de ladite feste Saint Remy. Eu tele manière que
le dit abbé et couvent sien et seront tenus à chanter
une messe dou Scint Espérit ou (le Nosti'c-Dame chacune
r
8EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
semeinni tant comme gie vivre pour moi et pour ma
femme et-pour mes amis, et après mon décès seront
tenus li diz abbé et couvent à faire sollernpnement
mon anniversaire et la à Aliz ma fame et le nies aticesseurs chacun an tous jours mes et à un certein jour, et
si il a'veuait que le diz abbé et couvent ou leur certein
cowuandeinent ne fussoient pitiés du devant dcx qual'ente souiz de renie au termes dessus només gie vuel
et octroy que chaque semeine après les diz termes ils
aient diz souiz de paine oultre ladite rente tant comme
ils seront à paier de ladite ren!e; pourquoi le diz abbé
ou couvent ou leur coumandement en aient requis au
dix termes ceuls par qui mien il devront recevoir les
dites renies et pour toutes les choses de sus (lites ensamble et chacun par soi tenir faire et acomplir : gie
lie et oblige pardurablement mes hoirs et mes successeurs et en confermement dès devant dites choses gie
done au devant (hz abbé et couvent cestes 'ésentes
lettres scelées de mon scel et (hou scel Aliz ma fame et
le devant diz abbé et couvent medonièrent leur lettres
scelées de leurs scaus de faire loiaument ce (Jul est desus
devisé pour l'aine de moi de ma faine et de mes amis à
vie et à mort. Ce fut fet en l'an (le l'incarnation notre
Seigneur mil deus cent et cet.
A tous ceux qui ces presentes lettres verront et oirefit : Joufroy soies de Mont Bason chevalier saluz en
nostre Signor : sachent tout présent et avenir (111e nos
avons doié quité et octroyé et encores (louons (jLIitOflS
et octroyons à homes religions et lionesies, au pi'iOr et
au couvent (le saint Jolian don Gres l'usaige le ségréage,
le pasnage l'erbage et le forestage que nos avons en leur
boysc'est à savoir de Marrigni et de Forges, et quelque
DE DIVERSES CHARTES.
droit que nous avions en diz boys jusques à l'amende
de sept soue et tletni et retenons à nos et à nos liers
en levant diz boys toute venoyson et tete justice exceptée ladite amende de sept sous et demi et veenons
a nos la tierce partie du boys de Forges par les devant
dites choses, et nos donasmes et octroyasmes et encore
donnons et octroyons al diz religions i'usaige leségréage
le forestage l'erbage et le pasnage en plesse dou (res,
et l'amende jusques à sept sous et demi et la ohace au
lievre et au colin: en plesses et eu chans de denzlesdies
plesses si comme les dites plesses sient devisées par
murs et par fossez et par bones des autres boys, et à
ce garir et deffendre quant à ce que iios savons no
ohliiames nos et nos bers. En tesmoing de laquel chose
nous donasmes al diz religions cestes -présentes lettres
scelées (le notre seau de nostre volente : ce fut fait et
donné en l'an de grace mil et doux ccnz et sexante et
diz et sept au inoys d'aiust le juesdi après la saint père.
Dès que le clergé était parvenu à se faire donner
quelques sommes d'argent, des fruits de la terre-ou
toute autre chose, il eu faisait bientôt une redevance,
puis une dinie,et dès lors un impôt. C'est ainsi que les
moines de Marmoutiers avaient fini par avoir des droits
exorl)itans sur le marché (le Sembiançay et sur la pêche
des étangs qui se trouvent dans cette commune, (le là
contestation entre le couvent et Guillaume, l'archevêque
de Parthenay, seigneur de Semblançay. Voici le traité
qui fut conclu entre eux:
Sit notuin cunctis presentibus atque futuris à quibus
(IUC hoc scrJptuin nostrum quandoque legetur quod
cum inter nos Guillelmum l'arclicvesque dorninum de
60EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
Partenav et Johannain de Montfort uxorem nostram
ex unâ parte et religiosos viros fratrem Robertum ahbatem majoris monasterii et conventurn ejusclem loci,
nec non priorem de Siinpliciaco (i) ex aliâ, contentio
verteretur super plu ribus articul is pro en videlicet quod
religiosi predicti consueverant decimam super mercatum de Simpliciaco nec non super decimam fui-ni dicta
viike et super piscacionem quam hahehant religiosi
predicti in stangno de Simpliciaco. Nos Guillelinus et
Johanna prenoininati in recompensacione pi'dictorurn
tradimus prefaLis religiosis quindecim arpennos terr
vel circa sitos ad locum qui (ljctur Bella Villa jùxta forestum de Simpliciaco et unum arpennum prati quod
tenere solebat Robertus de Droes. Insuper voluinus
quod jus voairia sive justicia remaneat dictis religiosis
e: quidquid indè dependet excepta tamen alta justicia
quain nobis et heredibus nostris retinemus. Quum si
contingat prfatis religiosis sinistrum judicitun facere
nos sui successores flostri poterirnus proprio motu sive
ad petitioncm partis illud exnendari facere: si vero contingat predctis religiosis sive ecrum huellivutn queIn
quem ad mortem aut mutilatinuem condempnare, judido facto condeinpnatus nohis aut succe3soribus nostris
reddetur rursùs : conventum est inter nos quod quuin
faciemus bannum nostruin in villa de Simpliciaco videlicet per quadraginia viri religiosi predicti poterunt
vendere vinum suurn infra domos suas absque enigenda
circuhim. Quod etiam vinum non facient preconizare
et adequabiint mensuras suas mensurie castelli nostri
de Sirupliciaco nec tradent mensuras hominibus sibi
subditis suis, quin imo ipsi subditi accipient eas ab en
ti
Sirnp(zciac
Sen anis.
DE DIVERSES CHARTES.
qui tcnebit bannum nostruzn. Decima etiam nioleiidini
(le Siznpliciaco perttnebit religiosis predictis exceptâ
decimà tertie partis molendini: die vero nundjnaium
de Simpliciaco videhcet in festo sancti Martini estjvaljs
jus et emo1umciitum nundinarum spectabit dictis religiosis, ecepto pedagio super quod nichul accipient.
Salvà etiam et nobis reservata in omnibus altajustici.:
quidqtud autem stangnum nostrum quod facimus vel
faciemus fieri ad neam de pola terra sive dominjo
eorum sive subdictis eorum subripiet, nobis remanebit pro scatnbio prcdicto. Domûs vero quae a nobis
tenebatur ad censum annuurn quuw prafati religiosi
jncluseruut infra nutras suas eis remanebit: ipsi vero
facientcircumdari etclauditerram suam sic quod pisces
stangni mei non poterunt intrare dominium eoruni
nos vero Guillelmus et Johanna supradicta promiuimus eisdern religiosis garentizare et deffendere omnia
et singula predicta contra adverss omnes. Ren unciante
U0 ad hoc omni decepcioni fraudes et Jesiones omni
privilegio crucis impetrato vel impetrando, omni juri
scripto et non scripto, usibusque sive consuetudinibus
patlia3, atque recursionibus quibus presentes vm
sive robur amittere possent. Actum hoc est die lun
post festum sancti Michaelis archangeli: anno Domini
millesimo ducentesimo nonagesimo : hac sunt testes
dominus abbas Robertus Paganus camerarius, Guillelmus cellerarius, Petrus elewosinarius: Ingelgerius de
cantate monachorum, Roduiphus miles, Girardus
Aucherii.
Cette pièce fait connaître la jurisprudence du temps
sous un point de vue qui n'a pas encore été indiqué dans
e M ém oire; nous avons parlé des empiètemens mecs-
..
-
62EXAMEN CRITIQUE ET ANALYTIQUE
sans du clergé sur le pouvoir seigneurial. Ici on voit
Guillaume de Parthenay leur abandonner de droit de
voirie, c'est-à-dire celui de rendre la justice sous les
réserves qui sont détaillées; c'est là une (les diviios
de la justice en haute et basse justice: il n'y avait à cet
égard rien de fixe. Chaque coutume avait varié suivant
le caprice de son auteur. Les officiers de basse justice
avaient plus ou moins usurpé : les seigneurs qui n'entendaient rien aux lois faisaient facilement des concessions sur ce point. Guillaume de Parthenay pourra
modifier lesjugemens mal rendus (sinistrumjudiciurn)
soit en appelant de lui-même les affaires à SOU tribunal,
soit quand la partie condamnée l'aura saisi par une
requête. Si les moines condamnent un accusé à la peine
de mort, le condamné sera remis au seigneur et le
procès sera révisé. Après cette convention vient une
kn de police au profit de Guillaume: il s'agit de la
vente des vins que les deux parties ont à débiter
Guillaume ne veut pas de concurrence; les moines
ne pourront faire crier qu'ils ont du vin à vendre,
leurs mesures seront égales à celles de Guillaume; enfin
ils ne pourront li*er leurs marchandises; que par les
mains des officiers du seigneur de Semblançay.
Cette charte et la dernière qui sera citée dans ce
Mémoire: le treizième siècle va finir, une autre ère va
commencer; encore quelques années et la France va
sé trouver déchirée par la guerre étrangère: les révolutions 'vont se succéder: les secousses politiques ébranlent les croyances des peuples et changent les moeurs
des nations : les abus disparaissent, d'autres les remplacent. Le quatorzième siècle fut plus malheureux que
le treizième : l'anarchie féodale y est portée à son dermer degré: pendant cent cinquante ans les rois lutteront
DE DIVERSES CHARTES. 63
contre elle jusqu'à ce qu'elle prenne fin entre les mains
de Louis XI : alors viendra le tour des papes et des
moines, ils expieront leurs fautes durant les guerres
du protestantisme. Au milieu de toutes ces révolutions
la Touraine est restée ce qu'elle était et cc qu'elle sera
toujours, le plus beau et le plus paisible des pays.
PROSPER TARBÈ,
Société de l'Histoire de ['rance,
substitut du procureur du roi à Étampes.
Membre (le la
'MPKIMERIE DE H. FOUMItER ET COMP. RUE. DE SUE,
14.
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