Paper 3 - Federgon
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Paper 3 - Federgon
Au pays des ‘tenders’ et ‘appels à projets’: les premières années du recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Belgique Auteurs: Ludo Struyven et Liesbeth Van Parys Analyse réalisée dans le cadre d’une étude comparative internationale commandée par Federgon et portant sur le recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes Date: septembre 2009 iii La présente contribution a été réalisée dans le cadre d’une étude comparative internationale portant sur le recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Les résultats de cette étude sont présentés dans une série de cinq articles. Le présent article est le troisième de la série. Il aborde les premières étapes du recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Belgique et explore les voies de l’avenir sur la base des expériences engrangées dans les deux pays européens ‘modèles’: la Grande-Bretagne et les Pays-Bas. La naissance et l’évolution du recours à des opérateurs externes en Grande-Bretagne et aux PaysBas sont plus largement abordées dans les deux premiers articles de cette série. Un quatrième article présente une synthèse des analyses de ces pays et de quelques autres, synthèse qui permet de tirer des enseignements pour le recours à des opérateurs externes en Belgique, ainsi que dans d’autres pays qui prennent des mesures pour développer un marché public. Une note de recommandations a également été rédigée dans le cadre de cette étude. Cette note a pour but, en s’inspirant de pratiques observées à l’étranger, de confronter les premières expériences menées dans notre pays à des choix de principe, plutôt que de décrire comment ces choix peuvent être mis en œuvre techniquement. Titre des articles: 1. Van Parys L. & Struyven L. (2009a), La réforme du marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Grande-Bretagne: un exercice d’équilibre. 2. Van Parys L. & Struyven L., (2009b), Le système hybride de recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes aux Pays-Bas: évolutions récentes sur le marché de la réinsertion. 3. Struyven L. & Van Parys L. (2009a), Au pays des ‘tenders’ et ‘appels à projets’: les premières années du recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Belgique. 4. Struyven L. & Van Parys L. (2009b), Expériences de recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Leçons pour la Belgique. Synthèse. 5. Struyven L. & Van Parys L. (2009c), Le recours à des opérateurs externes dans le cadre de l’accompagnement des demandeurs d’emploi: comment aller plus loin après la première phase de ‘tendering’ et d’’appels à projets’? Note de recommandations. v Table des matières Liste des abréviations v 1. Introduction 1 2. Modèles organisationnels dans le cadre de l’implication des acteurs privés dans les tâches publiques 2.1 Le défi de l’activation: trois modèles de gestion et d’organisation 2.2 Le modèle de l’appel d’offres comme instrument de recours à des opérateurs externes 2.3 La nouvelle logique du système de marché public: pas moins de service public, mais un service public autrement 3 3 4 6 3. Les régions belges à la loupe 3.1 Des ‘tenders’ aux ‘appels à projets’ 3.2 Le modèle de l’appel d’offres en Flandre 3.3 Appels à projets en Wallonie 3.4 Appels à projets à Bruxelles 11 11 14 27 35 4. Grand angle sur les évolutions à l’étranger 4.1 Un démarrage identique … 4.2 … mais des choix de conception radicalement différents 4.3 Conséquences sur le développement du marché public 40 40 42 46 5. Principaux problèmes et défis pour les régions belges 5.1 Des similitudes dans les différences 5.2 Principaux problèmes et défis 5.3 Conclusions 50 50 51 55 Bibliographie 57 vii Liste des abréviations CPAS Centre public d’action sociale CPP Centrale projectprogrammatie (programmation centrale de projets) DGO6 Direction Générale Opérationnelle 6 Économie, Emploi et Recherche du Service Public de Wallonie DIISP Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle DWP Department for Work and Pensions EFT Entreprises de formation par le travail FSE Fonds social européen IBO Individuele beroepsopleiding in de onderneming (formation professionnelle individuelle en entreprise) IPV Initiatieven voor Professionele Vorming van de Voedingsnijverheid (initiatives de formation professionnelle de l’industrie alimentaire) IRO Individuele re-integratieovereenkomst (contrat individuel de réinsertion) JCP Jobcentre Plus LPP Lokale projectprogrammatie (programmation locale de projets) MIRE Missions régionales pour l’emploi ONG Organisation non gouvernementale OISP Organismes d’insertion socioprofessionnelle PAC Plan d’accompagnement des chômeurs SLN Steunpunt Lokale Netwerken (Point d’appui réseaux locaux) SPE Service public de l’emploi SUWI Wet structuur uitvoeringsorganisatie werk en inkomen (loi visant à promouvoir la réinsertion des demandeurs d’emploi aux Pays-Bas) UWV Uitvoeringsinstituut Werknemersverzekeringen (Institut des assurances sociales – Pays-Bas) VDAB Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (Office flamand de l’emploi et de la formation professionnelle) 1 1. Introduction Le présent article expose les développements récemment intervenus en Belgique depuis l’introduction de nouveaux instruments destinés à impliquer les acteurs privés dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Cette évolution se déroule notamment au sein des trois services régionaux de l’emploi, à savoir le VDAB (Flandre), le Forem (Wallonie) et Actiris (Bruxelles). Au cours de ces dernières années, il y a eu des ouvertures au sein de chacun de ces services publics afin d’élargir et de renouveler le champ des opérateurs; des missions d’accompagnement des demandeurs d’emploi ont ainsi été ouvertes à des opérateurs externes. Un levier important dans ce cadre est le renforcement de l’objectif d’activation des demandeurs d’emploi, tel que visé dans l’accord de collaboration de 2004.1 Si l’objectif politique est semblable dans les trois régions, les voies empruntées pour le réaliser dans la pratique diffèrent. Il est difficile d’y voir clair dans les différentes options choisies en raison du manque de transparence dans la manière dont ces choix sont mis en œuvre et transposés concrètement. Cet article a pour objet d’identifier le fil conducteur dans l’approche de chacune des régions et de mettre ces approches en perspective en les comparant entre elles et en les comparant aussi avec celles adoptées par d’autres pays, plus particulièrement les Pays-Bas et la Grande-Bretagne. La question centrale de cette étude peut donc être résumée comme suit: où en sommes-nous aujourd’hui en ce qui concerne le recours à des opérateurs externes et où se situent les défis, à la lumière des évolutions observées dans d’autres pays? L’étude, dont le présent article fait partie, a pour objet de procéder à une analyse approfondie des nouvelles évolutions dans le domaine du recours à des opérateurs externes dans des pays disposant d’une importante expérience en la matière, tels que la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, et de formuler les prochaines étapes du recours au marché dans notre propre pays. Elle s’articule particulièrement autour de l’approche de cette politique sur le plan organisationnel: l’introduction du recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi dans un segment de marché public. Trois méthodes ont été utilisées dans le cadre de cette étude: recherche documentaire, consultation d’experts et interviews individuelles des donneurs d’ordre concernés et des (représentants des) acteurs du marché.2 1 2 Accord de collaboration relatif à l’accompagnement et au suivi actifs des chômeurs, conclu le 30 avril 2004 entre l’Etat fédéral, les régions et les communautés. Pour le présent article, nous remercions tout particulièrement les personnes suivantes du VDAB, du Forem et d’Actiris pour leur aimable collaboration: Luc Van De Putte, Robert Declercq et Gregory Verhaeghe du VDAB; Carine Nardellotto du Forem; Nathalie Descheemaeker et Marleen Ruysseveldt d’Actiris. Au VDAB, nous avons eu également un entretien complémentaire avec Luc Hostens et Linda Mariën du VDAB Anvers pour discuter plus spécifiquement de l’approche dans le cadre des appels d’offres régionaux. 2 Le présent article est structuré comme suit. Le premier chapitre est consacré à une approche théorique par le biais d’une analyse des modèles organisationnels et des principes qui les sous-tendent, avec une explication des notions importantes: sous-traitance, appel d’offres, régisseur, système de ‘marché public’. Cela nous aidera pour notre focus sur la situation belge dans la deuxième partie où, au terme d’un premier aperçu comparatif des lignes directrices, nous analyserons la manière dont le recours aux opérateurs externes s’est mis en place et les différentes évolutions en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles. Dans le troisième chapitre, nous élargirons à nouveau le champ de vision en regardant vers l’étranger, et plus particulièrement vers la Grande-Bretagne et les Pays-Bas. Armés de nos connaissances théoriques et internationales, nous reviendrons enfin, par un nouveau mouvement de zoom, sur la situation dans les trois régions belges. Dans le quatrième et dernier chapitre, nous formulerons quelques problèmes et défis communs à la Flandre, à la Wallonie et à Bruxelles dans la perspective de l’évolution future du recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes en Belgique. 3 2. Modèles organisationnels dans le cadre de l’implication des acteurs privés dans les tâches publiques 2.1 Le défi de l’activation: trois modèles de gestion et d’organisation Tout comme dans d’autres pays en Europe et bien au-delà, les pouvoirs publics régionaux belges compétents pour l’emploi et la formation, en collaboration avec les autorités fédérales - qui sont compétentes pour l’indemnisation des chômeurs -, déploient des efforts croissants afin d’augmenter le taux de participation au marché du travail des demandeurs d’emploi et des inactifs. Alors que les demandeurs d’emploi ont l’obligation d’adopter un comportement de recherche plus actif et de faire davantage d’efforts pour contribuer à leur réinsertion, les pouvoirs publics s’efforcent également de permettre à chaque demandeur d’emploi de trouver un travail au moyen d’un accompagnement et d’une formation sur mesure. Pour ce faire, des instruments de screening et de diagnostic toujours plus pointus sont mis en œuvre afin d’identifier les nombreuses barrières à l’emploi et de les éliminer par le biais d’instruments et de méthodes d’accompagnement adaptés en partenariat avec d’autres organisations sur le terrain. Dans le même temps, une plus grande attention est également accordée au travail sur mesure et à la concertation avec le demandeur d’emploi sur le parcours à suivre, et ce afin d’augmenter l’implication et la responsabilisation de celui-ci. Les pouvoirs publics sont donc face à l’important défi de l’activation. Pour l’aborder d’un point de vue organisationnel, ils disposent de différentes méthodes (cf. Struyven & Vanhoren, 2004; Struyven, 2006). Ils peuvent choisir de prendre eux-mêmes en charge l’exécution, et par conséquent d’augmenter leur capacité à court terme ou – si cela n’est pas (encore) réalisable immédiatement – de faire appel à la sous-traitance. Par le biais de la sous-traitance, ils achètent des connaissances, de l’expertise et de la capacité qui ont été développées ailleurs – par d’autres organismes publics ou par des opérateurs privés commerciaux ou non commerciaux. Il s’agit du modèle public classique où certains éléments de la prestation de services peuvent être sous-traités. Le deuxième modèle est celui de l’appel d’offres ou tendering en néerlandais.3 Dans ce cas, la collaboration avec les acteurs privés commerciaux et non commerciaux est primordiale. Contrairement à l’achat de services déterminés sur la base d’une considération de type ‘make-orbuy’, le modèle de l’appel d’offres repose sur un choix de principe qui consiste à confier l’accompagnement des demandeurs d’emploi à d’autres acteurs du 3 Le terme ‘tendering' correspond au terme anglais ‘contracting-out’, qu’il faut distinguer de l’’outsourcing’ ou recours à des prestataires externes sur base de considérations de type makeor-buy. En néerlandais, le mot ‘tendering’ est plus proche de ‘aanbesteding’ (adjudication) que de ‘uitbesteding’ (sous-traitance). Cependant, il ne faut pas oublier que le mot adjudication a un sens juridique spécifique dans le contexte des marchés publics, à distinguer de l’appel d’offres (voir Struyven L. & Vanhoren I., 2004). En Belgique, les termes ‘uitbesteding’ et ‘aanbesteding’/tendering sont souvent confondus dans la pratique, consciemment ou non. 4 marché, tant commerciaux que non commerciaux. Dans le tendering, il est clairement question de la création d’un marché public. La création du marché sur la base du modèle de l’appel d’offres suppose plusieurs conditions spécifiques, d’abord pour qu’un marché puisse se développer et ensuite pour qu’il puisse continuer à se développer. Ces conditions sont notamment les suivantes: conditions de concurrence égales, seuils d’accès bas, transparence dans les procédures de sélection et d’attribution des marchés, concurrence sur la base du prix et de la qualité, formation des prix orientée par le marché, intervention réduite des pouvoirs publics dans le processus, et gestion davantage axée sur les performances par le biais d’un financement totalement ou partiellement lié au résultat. Il existe donc une distinction de principe entre le modèle public classique avec recours à la sous-traitance et le modèle de l’appel d’offres. Outre ces deux modèles, on en distingue encore un troisième, à savoir le modèle des chèques. Dans ce cas, les moyens publics sont attribués aux prestataires de services privés par l’intermédiaire du demandeur d’emploi (client). Dans ce cadre, le demandeur d’emploi peut choisir lui-même le prestataire de services privé auprès duquel il achètera les services souhaités. On peut déduire de ce qui précède qu’il ne s’agit pas, dans le cadre du modèle de l’appel d’offres, de privatiser le service public, mais de transférer à des acteurs privés l’exécution de tâches financées par les pouvoirs publics, en l’occurrence l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Le modèle de l’appel d’offres réunit les avantages des deux univers: les pouvoirs publics peuvent continuer à assumer la protection de ce service de type social qu’est l’accompagnement des demandeurs d’emploi, tout en tirant le meilleur parti du potentiel des acteurs privés. Les moyens nécessaires à l’exécution de ces tâches sont alors attribués de manière concurrentielle aux acteurs privés, et ce par un organisme public désigné intervenant en qualité de donneur d’ordre. Les pouvoirs publics remplissent donc davantage un rôle de régisseur que d’acteur. En principe, les prestataires de services privés sélectionnés jouissent d’une liberté assez grande pour déterminer le contenu des services qu’ils fournissent. Il convient de souligner que le service public de l’emploi (SPE) peut également concourir en qualité de prestataire public. Cela exige bien entendu que cet acteur ait un statut autonome ou, au moins, qu’il y ait un cloisonnement ou une compartimentation transparente entre acteur et régisseur. 2.2 Le modèle de l’appel d’offres comme instrument de recours à des opérateurs externes La finalité du modèle de l’appel d’offres est le développement d’un marché public. Le Grand et Bartlett (1993) parlent à ce propos d’un quasi-marché. Ils souhaitent ainsi préciser qu’il convient de ne pas confondre un marché public avec un ‘marché libre’ pour la prestation de services de type social, en l’occurrence le 5 placement des demandeurs d’emploi. Le Grand et Bartlett distinguent trois différences importantes: – dans un marché public, la concurrence n’est pas nécessairement motivée par le profit: des organisations sans but lucratif et des organisations publiques peuvent aussi concourir; – il s’agit toujours de fonds publics mis à disposition par l’État (tout comme dans un système de subsidiation). Dès lors, la demande totale ne varie pas de la même façon que dans un marché libre, elle ne peut que se déplacer entre les prestataires; – le pouvoir d’achat n’est pas (nécessairement) détenu par les demandeurs d’emploi individuels (clients), mais par une instance qui intervient en tant que donneur d’ordre pour le compte du client4 final. Selon Le Grand et Bartlett (1993), les principaux motifs d’introduction d’un marché public sont doubles: – premièrement, on vise une augmentation de l’efficience et de l’efficacité des prestations de services. La concurrence qui apparaît devrait stimuler l’amélioration des prestations des opérateurs, tant privés que publics; – deuxièmement, la réactivité des prestataires par rapport aux souhaits et aux besoins des clients, d’une part, et la liberté de choix du client, d’autre part, doivent augmenter. Dans le domaine de l’accompagnement des demandeurs d’emploi, ceci implique concrètement de pouvoir fournir aux demandeurs d’emploi un accompagnement sur mesure. Afin d’illustrer la particularité d’un quasi-marché, nous ne parlerons pas dans la suite de cet article - de même que dans les autres articles qui font partie de l’étude Federgon - d’un marché libre mais d’un marché public. En ce qui concerne les exemples étrangers, le modèle de l’appel d’offres est présenté en détail dans les articles relatifs à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. Dans le présent article, nous utilisons ces exemples pour faire une comparaison avec les développements observés en Belgique. 4 Dans le présent texte, le terme ‘client’ est employé pour désigner le demandeur d’emploi à accompagner (note du traducteur). 6 2.3 La nouvelle logique du système de marché public: pas moins de service public, mais un service public autrement L’introduction du recours à des opérateurs externes pour une tâche publique implique plusieurs caractéristiques nouvelles qui supposent chaque fois des exigences ou règles du jeu spécifiques propres à un quasi-marché (cf. Struyven, 2006): 1. une multiplication du nombre d’opérateurs pour le marché public nouvellement créé: ceci suppose des seuils d’accès suffisamment bas pour les nouveaux entrants; 2. une gestion davantage axée sur le résultat (placement dans un emploi ou emploi durable, accès à une formation ou à un stage) que sur les processus: ceci suppose une définition et une mesure objectives du résultat; 3. une concurrence accrue entre les opérateurs: ceci exige des conditions de concurrence égales (level playing field), une transparence suffisante, une disponibilité des informations et des coûts de transaction minimes. Souvent, l’introduction du modèle de l’appel d’offres est envisagée en termes d’augmentation ou de diminution du rôle du service public. Pourtant, il ne s’agit pas en premier lieu de diminuer le volume des missions publiques, mais d’organiser ces missions autrement. Si la compétence relative à l’exécution du modèle de l’appel d’offres est confiée au service public de l’emploi (SPE), ce dernier a une tâche importante à assumer en tant que donneur d’ordre (régisseur). Cela signifie que les pouvoirs publics achètent, en l’occurrence via le SPE, des services sur le marché des prestataires (agréés et/ou certifiés).5 Dans le cadre du modèle de l’appel d’offres, l’exécution des missions d’accompagnement se déplace vers des organismes publics et privés (commerciaux et non commerciaux) qui sont en concurrence. Ceci est défini par contrat entre le service public en sa qualité de donneur d’ordre, et un ou plusieurs prestataires de services en leur qualité de preneurs d’ordre. Le service public qui est chargé de l’inscription des demandeurs d’emploi et de l’octroi - ou du maintien - des allocations, oriente le demandeur d’emploi vers les prestataires. Le demandeur d’emploi dispose en principe de la possibilité de choisir entre plusieurs prestataires. Les candidats adressés à un prestataire ne peuvent généralement pas être refusés ou renvoyés vers le service public qui les a adressés. Ceci est destiné à endiguer le phénomène d’écrémage, c’est-à-dire de sélection des demandeurs d’emploi plus faciles à placer. De plus, le 5 Les pouvoirs publics peuvent décider de désigner le SPE pour ce faire. D’autres possibilités consistent à attribuer cette tâche à un nouveau service à créer au sein du ministère ou à un organisme externe (par exemple, l’organisme chargé du paiement des allocations). Toutes ces formes existent dans d’autres pays. Un problème spécifique se pose quand le service public assume cette tâche alors qu’il est lui-même actif sur le marché en développement en tant qu’opérateur qui propose une offre de services. Nous reviendrons sur ce problème dans les chapitres suivants. 7 service public veille à l’exécution du contrat, assure le suivi des résultats et continue à assumer la gestion du dossier du demandeur d’emploi. Les intérêts publics sont ainsi protégés. Le modèle de l’appel d’offres peut être appliqué à des degrés divers. Si le SPE continue à assurer des prestations de base déterminées (inscription, premier entretien, orientation), il n’est pas nécessaire d’acheter des services auprès de prestataires privés pour l’ensemble des demandeurs d’emploi. Les pouvoirs publics peuvent décider de proposer eux-mêmes certaines formes de prestations de services – par exemple, des formes limitées de prestations de services pour les chômeurs de courte durée (‘preventieve doelgroep’), alors que les services intensifs pour les chômeurs de courte durée ou les chômeurs de longue durée (‘curatieve doelgroep’) sont laissés aux acteurs du marché. Un conflit d’intérêt peut survenir lorsque le SPE est à la fois donneur d’ordre et prestataire proposant des services que les acteurs du marché offrent également, et que ce même SPE continue à décider vers lequel des deux prestataires de services – le prestataire interne, public ou le prestataire externe, privé – le demandeur d’emploi sera orienté. Cela place le SPE dans une situation où il est à la fois juge et partie et cela suscite des questions sur la légitimité de l’intervention du service public, et ce même si, dans la pratique, des conflits ne naissent pas nécessairement lors de l’orientation des candidats vers le marché des opérateurs. Le jeu est ensuite joué par des acteurs autonomes. Ces acteurs occupent une position double. D’une part, ils sont porteurs de l’intérêt général et, d’autre part, ils supportent également des risques. Ils ne se comporteront donc pas uniquement comme des acteurs sociaux, mais également comme des acteurs économiques. Dans une certaine mesure, ceci vaut tant pour les acteurs privés commerciaux que non commerciaux, et même pour différents acteurs publics. Cela implique qu’ils collaboreront entre eux mais aussi qu’ils se feront concurrence et qu’ils rechercheront la voie la plus efficace pour atteindre un résultat déterminé. La réalité dans laquelle les acteurs doivent prouver leur valeur est très complexe. Différents types de relations naissent entre les acteurs: 1. entre le demandeur d’emploi en tant que client et le SPE, et entre le client et le prestataire: il s’agit en l’occurrence d’une relation professionnelle et de confiance; 2. entre le demandeur d’emploi en tant que demandeur sur le marché des prestataires: il s’agit en principe de la liberté de choix et de concurrence; 3. entre la régie par le SPE et le prestataire: il s’agit d’une relation concurrentielle se matérialisant dans une relation donneur d’ordre - preneur d’ordre; 4. entre les différents prestataires (relations mutuelles): il s’agit d’une relation de collaboration ou de concurrence; 5. entre le SPE (qui assure notamment les services de base et l’orientation des demandeurs d’emploi) et le prestataire: il s’agit en principe d’une relation professionnelle de coordination et d’échange d’informations. 8 Ces relations dans le modèle de l’appel d’offres se déclinent sur deux plans, un plan économique et un plan professionnel, qui se chevauchent pour chacun des trois acteurs: donneur d’ordre, prestataire et demandeur d’emploi. Cette situation est illustrée schématiquement ci-dessous. Bron: HIVA Figure 1 La nouvelle configuration des relations entre les acteurs concernés dans le modèle de l’appel d’offres La nouvelle configuration crée un nouveau niveau de complexité par rapport au système précédent des exécutants publics ou subsidiés. Il devient donc plus difficile de concevoir un système stable et cohérent. Ceci résulte des exigences élevées imposées en matière de conception, d’orientation et d’organisation du système (voir notamment Stiglitz, 1988; Le Grand & Bartlett, 1993; Struyven et al., 2002; Groot et al., 2002; Le Grand, 2003; Struyven & Steurs, 2005; Groenewegen, 2006; Struyven, 2006). Dans le même temps, chaque choix à poser pour la création du système de marché s’accompagne de considérations relatives au caractère approprié des objectifs stratégiques fixés pour la mise en place du marché et pour l’organisation de ce dernier d’une manière plus ou moins concurrentielle dans le cadre de la législation en vigueur sur les marchés publics. Cela génère les cinq champs de tension suivants (Struyven, 2005): 9 – concurrence axée sur les prix vs concurrence axée sur la qualité: la concurrence axée sur les prix engendre une pression à la baisse sur les prix, au détriment de la qualité;6 de plus, cela exige une différenciation suffisante des prix selon le degré de difficulté du client; – seuils d’accès bas versus qualité: si, pour l’attribution des marchés, on accorde une plus grande importance à l’expérience et à l’expertise déjà développée, les possibilités pour les nouveaux entrants diminuent; de plus, cela freine l’innovation; – coûts de transaction versus concurrence: des appels d’offres suffisamment fréquents sont une condition sine qua non pour une saine concurrence mais engendrent à chaque fois de nouveaux coûts de transaction et compromettent également la continuité de l’offre d’accompagnement si le contrat n’est pas prolongé; de plus, des appels d’offres trop réduits ou trop restrictifs impliquent le risque que des acteurs potentiels ne soumissionnent pas; – liberté de choix du client versus activation: les obligations d’activation prévalent sur la souveraineté du client en tant que demandeur ou consommateur sur un marché; de plus, la liberté de choix implique que l’on soit attentif aux possibilités qu’a le client de poser un choix individuel; – gestion axée sur le résultat versus gestion axée sur les processus: le fait de prescrire certaines normes spécifiques applicables à la prestation de services est en contradiction avec le principe d’autonomie dans le processus d’exécution. Chaque choix spécifique dans le cadre d’un appel d’offres a des conséquences sur les autres paramètres qui sont susceptibles de varier. Dès lors, ces choix peuvent avoir des répercussions les uns sur les autres. Les conséquences de ces choix fluctueront en fonction des caractéristiques et des stratégies des acteurs. On peut ainsi s’attendre à ce qu’il y ait des différences entre organisations commerciales et non commerciales, ou entre petites et grandes organisations. En Flandre, on constate par exemple actuellement que les organisations non commerciales sont dans une position moins favorable lorsqu’il s’agit d’appels d’offres de grande ampleur couvrant une vaste zone géographique ou prévoyant un financement davantage lié au résultat. Lorsque l’on analyse les évolutions sur ces marchés dans d’autres pays, on constate qu’il n’existe pas un seul et unique modèle d’organisation et que d’autres pays, jouissant d’une plus grande expérience en matière d’introduction d’un marché public dans le domaine de l’accompagnement des demandeurs d’emploi, adoptent des choix de conception différents d’un appel d’offres à l’autre. Ceci ne s’explique pas uniquement par les objectifs poursuivis et par l’expérience retirée d’appels d’offres précédents mais également par la dynamique autonome du 6 Par qualité, il convient notamment d’entendre la question de savoir si chaque demandeur d’emploi bénéficie de l’offre d’accompagnement appropriée, même si cela suppose un prix plus élevé. 10 processus et par la manière dont les acteurs (commerciaux et non commerciaux) l’anticipent (Struyven & Vanhoren, 2004; Struyven & Steurs, 2005; Struyven, 2006). Comme nous le verrons encore plus loin, les choix évoluent aussi dans notre pays d’un appel d’offres ou appel à projets à l’autre et influencent donc également le marché des opérateurs en développement et l’offre d’accompagnement produite. De plus, on peut se demander de quelle manière le service public de l’emploi en tant qu’organisation interagit dans la nouvelle configuration. Enfin, se pose également la question de savoir dans quelle mesure le cadre juridique est utilisé de manière adéquate. 11 3. Les régions belges à la loupe 3.1 Des ‘tenders’ aux ‘appels à projets’ Au cours de la législature précédente 2004-2009, la Flandre, la Wallonie et Bruxelles ont mené diverses expériences consistant à faire appel aux acteurs du marché pour l’exécution de parcours d’accompagnement des demandeurs d’emploi. Ces pratiques relativement nouvelles s’inscrivent dans le cadre d’une évolution des services publics de l’emploi (VDAB, Forem, Actiris). Comme on le voit aussi dans d’autres pays, le centre de gravité par rapport au service public se déplace: on passe ainsi d’une situation où un nombre limité d’opérateurs sont actifs dans l’exécution vers une situation avec un grand nombre d’opérateurs qui sont actifs sur le ‘marché’ des missions publiques. De ce fait, le rôle du service public évolue également et passe d’un rôle d’acteur à un rôle de régisseur et de donneur d’ordre. Les prestataires peuvent être à la fois des opérateurs publics ou privés. Parmi les exemples d’opérateurs publics, on peut citer les CPAS, les établissements d’enseignement, les centres de formation des classes moyennes, etc. Les opérateurs privés sont des organisations commerciales ou non commerciales, qui peuvent aussi collaborer entre elles. Quant aux opérateurs privés non commerciaux, ce sont des organismes non institutionnels de formation et de mise à l’emploi émanant du réseau local, du secteur socioéducatif, du réseau syndical, etc. (ce qu’on appelle les ‘tiers’ en Belgique). Les opérateurs commerciaux englobent aussi bien de grandes entreprises appartenant au secteur de l’intérim et au secteur du recrutement et de la sélection que des acteurs de niche de plus petite taille. Même si les pratiques dans les trois régions vont dans le même sens, le cadre juridique dans lequel elles s’inscrivent diffère. En Flandre, on procède par le biais d’appels d’offres généraux (‘tenders’), en Wallonie et à Bruxelles, par le biais d’appels à projets/appels à initiatives. – En Flandre, les pouvoirs publics ont commencé à mettre en place un ‘marché public’ pour des missions d’accompagnement par le biais du ‘tendering’. L’objectif consiste explicitement à élargir le champ des acteurs en faisant appel au marché des acteurs tant commerciaux que non commerciaux. Dans ce cadre, un certain nombre de principes de fonctionnement du marché sont garantis par l’application de la loi sur les marchés publics. – En Wallonie et à Bruxelles, le mécanisme de subsidiation reste en vigueur, mais il est explicitement fait appel au marché. Les instances compétentes continuent pourtant de privilégier délibérément l’instrument de la sous-traitance et non – comme nous l’expliquerons plus loin – l’instrument des appels d’offres. Le marché se compose d’acteurs tant commerciaux que non commerciaux. En ce qui concerne les acteurs non commerciaux, il s’agit la plupart du temps 12 d’organismes agréés (en vertu d’un décret ou arrêté7 en Wallonie ou d’une convention de partenariat à Bruxelles). Dans une moindre mesure, des initiatives non agréées sont également impliquées dans le secteur privé non commercial, ainsi que des initiatives publiques ou semi-publiques (CPAS, établissements d’enseignement, etc.). Tant les appels d’offres (en Flandre) que les appels à projets (en Wallonie et à Bruxelles) s’inscrivent dans la procédure consacrée d’un appel ouvert aux opérateurs intéressés. Une condition préalable est que ces opérateurs doivent satisfaire à la réglementation en vigueur en matière d’agrément au titre d’agence de placement privée dans chacune des régions. De manière générale, le recours à des prestataires privés (commerciaux et non commerciaux) de services d’accompagnement pour les demandeurs d’emploi suppose des conditions juridiques et organisationnelles spécifiques. Forme juridique D’un point de vue juridique, la nouvelle approche adoptée en Flandre relève de la loi sur les marchés publics (1993), tout en tenant compte des montants minimums et du degré de publicité prévus dans la réglementation européenne et en vertu des principes du Traité CE (non-discrimination, égalité de traitement et transparence). Au VDAB, cette forme juridique est appliquée de manière stricte, y compris pour les instruments de subsidiation tels que le FSE qui étaient autrefois organisés différemment (cf. infra). Le Forem et Actiris n’ont pas opté pour la forme juridique d’un marché public mais pour le mécanisme de subsidiation, l’objectif étant d’introduire une plus grande diversification et une plus grande complémentarité sur le marché. Cela donne au ‘régisseur-ensemblier’ une plus grande marge de manœuvre pour déterminer la procédure et les critères de sélection des opérateurs, en ce sens qu’il n’est pas tenu de respecter le cadre légal des marchés publics, qui fixe les procédures et critères de manière stricte. Dans le cadre du régime de subsidiation, le service public demeure toutefois tenu de respecter la réglementation applicable en la matière (lois coordonnées sur la comptabilité de l’État, 1991), les principes généraux du droit (tels que l’égalité de traitement et la transparence), les formes d’agréation en vigueur (généralement définies par la loi) et – last but not least – les critères qu’il définit lui-même. 7 En Wallonie, ces asbl sont généralement agréées en vertu d’un décret (Région wallonne) ou d’un arrêté (Communauté française), de sorte que la frontière entre le semi-public et le privé est plus difficile à déterminer. 13 Forme organisationnelle En termes d’organisation, le fonctionnement du marché implique une scission entre donneur d’ordre et preneur d’ordre. Dans les trois régions, ce sont les services publics de l’emploi (VDAB, Forem et Actiris) qui assurent la préparation, la rédaction et le suivi des appels d’offres/appels à projets. – Au niveau interne, cela a impliqué, au VDAB, une restructuration ayant pour objet d’introduire une séparation nette au niveau du management entre le service public en tant qu’acteur et le service public en tant que régisseurensemblier. – Au VDAB, le rôle de régisseur a été confié à la ‘tenderteam’ (à distinguer de l’entité ‘operaties’). Au Forem, en vertu du décret de 2003 sur le Forem, le rôle de régisseur-donneur d’ordre (‘régisseur-ensemblier’) a été confié à Forem Conseil, et plus particulièrement au ‘Service des relations partenariales’ (à distinguer du ‘Service aux particuliers’). – Chez Actiris, les appels à projets sont lancés par le département interne Partenariat et Réseau d’Actiris. En ce qui concerne l’ampleur des appels au marché, on a commencé dans les trois régions de manière modeste, avec des volumes et des budgets très limités: 4 millions d’euros pour le premier appel à projets (on est passé à 8,5 millions pour le quatrième appel à projets) en Wallonie et quelque 11 millions d’euros pour le premier appel d’offres en Flandre.8 – En Wallonie, l’initiative a été prise par le Forem en 2004. La Wallonie travaille avec des appels d’offres annuels depuis 2004 dans le cadre du plan d’accompagnement des chômeurs (PAC - 2004); à la fin de l’année 2008, le cinquième appel à projets a été lancé pour une période de programmation sur trois années. Des ‘appels à initiatives’ ont également été lancés dans le cadre d’autres programmes-cadres (Plan Marshall, Plan stratégique transversal n° 3). Ces appels à initiatives sont plus nettement délimités que les appels à projets en termes de portée et d’objectifs. – En Flandre, le premier appel d’offres a finalement été le fruit d’une initiative politique lors de l’entrée en fonction du nouveau gouvernement en 2005. Dans cette région, les appels d’offres ne sont pas lancés de manière régulière. Le premier appel d’offres lancé en 2005, désigné sous le nom de ‘proeftuin 8 Les actions abordées ici en matière d’implication des acteurs privés portent spécifiquement sur l’accompagnement des demandeurs d’emploi (‘accompagnement’ au sens large du terme). Pour la formation des demandeurs d’emploi, les services publics ont mis en place leurs propres systèmes de sous-traitance ou de collaboration lorsqu’ils font appel à des partenaires externes. Ces systèmes ne sont pas abordés dans le présent article. Les formes de sous-traitance ou de collaboration pour la formation des demandeurs d’emploi (et des personnes à l’emploi) existent depuis plus longtemps que l’accompagnement. Leur organisation relève, tant au VDAB qu’au Forem, de la compétence de l’opérateur de formation (VDAB Competentiecentra et Forem Formation). 14 tendering’ (appel d’offres expérimental), ciblait le groupe cible des chômeurs de longue durée (‘curatieve doelgroep’) dans le cadre de l’activation des demandeurs d’emploi. L’objet et le groupe cible des appels d’offres qui ont suivi varient. En 2009, les principaux appels d’offres lancés en Flandre sont l’appel d’offres FSE (Fonds social européen, 2007), l’appel d’offres relatif au Plan d’emploi pour les jeunes (2008) et l’appel d’offres pour les centres urbains (2009). Quelques appels d’offres de moindre ampleur se terminent (IBO, accompagnement à l’activation, coaching d’insertion). – A Bruxelles, l’organisation d’appels à projets a démarré en 2008, dans le but de renouveler des conventions de collaboration précédemment conclues. Quatre appels à projets ont été lancés en 2008, et trois en 2009. De plus, Actiris a lancé en 2008 un appel à projets en collaboration avec Bruxelles Formation. Pour les services régionaux, les nouveaux appels au marché sont additionnels (ou quasiment additionnels) par rapport à la palette de services proposée par le service public. Il ne s’agit donc pas d’un déplacement d’activités existantes vers le marché mais de l’attribution d’activités supplémentaires, la plupart du temps financées par des fonds publics additionnels. Il convient de nuancer ce propos en soulignant qu’au VDAB, le récent appel d’offres relatif aux centres urbains est financé avec des fonds de l’ancien ‘curatieve tender’, fonds qui sont entre-temps devenus une dotation. Nous allons maintenant examiner de manière plus approfondie le modèle dans chacune des trois régions. Nous examinerons successivement pour la Flandre, la Wallonie et Bruxelles le contenu du rôle de donneur d’ordre, la fixation des prix et le financement lié au résultat, les évolutions sur le marché des opérateurs et les résultats en termes de placement des demandeurs d’emploi. 3.2 Le modèle de l’appel d’offres en Flandre En Flandre, le modèle de l’appel d’offres (tendering) est l’instrument dominant dans le cadre du recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement et le placement des demandeurs d’emploi. La mise en place d’un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi est un fait nouveau en Flandre. Les moyens consacrés à l’accompagnement augmentent dans le cadre de la politique d’activation des demandeurs d’emploi et de l’objectif visant à relever le taux d’emploi de la population active. Mais, dans le même temps, le VDAB organise leur allocation aux prestataires de services de manière plus stricte, et il est fait appel à de nouveaux segments du marché. En principe, le VDAB dispose, grâce au modèle de l’appel d’offres, d’un certain choix entre des candidats-prestataires qui se font concurrence sur le plan des prix, des méthodes et/ou de la qualité. Dans le cadre de ce modèle, un rôle important en matière d’achat est réservé au service ‘arbeidsmarktregie’ (régie du marché de l’emploi) du VDAB. Celui-ci a pour principal objectif d’augmenter la capacité de l’offre tout en conservant une offre 15 d’accompagnement de qualité et accessible au demandeur d’emploi. La régie du marché de l’emploi flamand par le VDAB est à distinguer de la régie du parcours individuel des demandeurs d’emploi. Parallèlement aux appels d’offres récents, le VDAB jouit d’une assez grande expérience dans le domaine de l’organisation de la sous-traitance des formations. Les appels d’offres lancés par le service ‘arbeidsmarktregie’ pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi ne doivent donc pas être confondus avec cette tradition de sous-traitance. Pour être tout à fait complet, il convient également de faire mention des ‘appels d’offres régionaux’ dans le cadre de la ‘lokale projectprogrammatie’ (LPP). Ceci n’est en soi pas nouveau; ce qui est nouveau, en revanche, c’est le fait que la loi sur les marchés publics est appliquée dans ce cadre, d’où l’utilisation du terme d’appel d’offres. L’objectif poursuivi est d’axer davantage les projets sur la demande et d’attirer de nouveaux acteurs. Cette évolution vers des appels d’offres pour des packages de formation spécifiques à une région constitue indubitablement un pas en avant. Toutefois, il s’agit toujours de packages de formation relativement restreints destinés à quelques opérateurs de niche d’assez petite taille (qui ne sont pas nécessairement issus de la région en question). En soi, ceci reste encore éloigné de la constitution d’un marché public de l’accompagnement et de la formation. 3.2.1 Contenu du rôle de donneur d’ordre En 2005, la Flandre a lancé son premier appel d’offres, faisant ainsi appel pour la première fois au vaste marché des organisations du secteur marchand et du secteur non marchand pour l’organisation et la mise en œuvre de parcours complets pour les demandeurs d’emploi de longue durée. Ceci représentait une étape importante dans la création d’un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi par des partenaires commerciaux. Pour ce faire, le VDAB a d’abord procédé à une compartimentation en son sein afin d’établir une séparation entre le VDAB en tant que régisseur du marché de l’emploi – le donneur d’ordre des appels d’offres – et le VDAB en tant qu’acteur ou prestataire de services. Le premier appel d’offres lancé était le ‘proeftuin trajecttendering’ qui avait pour objet d’adjuger l’accompagnement de 6 000 demandeurs d’emploi de longue durée. Le régisseur comptait, après évaluation de cette expérience, tracer les lignes futures du système de recours à des opérateurs externes. Trois ans après le lancement de l’appel d’offres, le marché a été intégralement exécuté. Cependant, au terme de la législature 2004-2009, on ne voit toujours pas clairement dans quelle direction la politique de recours à des opérateurs externes va évoluer. Entre-temps, le VDAB n’est pas resté les bras croisés et a lancé toute une série d’appels d’offres. Le budget total pour les appels d’offres sur base annuelle s’élève à 32 millions d’euros (2009; pour une exécution en vitesse de croisière). Ce montant correspond à 16 040 parcours nouvellement entamés sur base annuelle et 16 à 4 215 unités de renforcement des compétences. Les montants et chiffres sont répartis comme suit. Tableau 1 Montants et chiffres pour les appels d’offres du VDAB au niveau central en 2009 (en vitesse de croisière) Appel d’offres Montant sur base annuelle FSE 17 millions Jeugdwerkplan (Plan d’emploi pour les jeunes) Centrumsteden (Centres urbains) 5,6 millions Activeringsbegeleiding (Accompagnement d’activation) 2,2 millions Accompagnement IBO* (jusqu’au 1/11/09) 0,38 millions Total * Montant total 7,5 millions 32,68 millions Volume sur base annuelle 1 780 parcours pour les personnes en situation d’incapacité 4 010 parcours pour les 3 groupes à risque (allochtones, personnes infra-qualifiées, plus de 50 ans) 973 places de formation pour les personnes en situation d’incapacité 1 867 places de formation pour les 3 groupes à risque 77 formations économie sociale (1 375 places de formation, budget de 2,3 millions) 4 050 parcours (parcours intensifs de placement) 5 100 parcours (accompagnement et placement intensifs pour les groupes à risque) 1 100 parcours d’accompagnement de chômeurs de longue durée présentant un problème médical, mental, psychique et/ou psychiatrique grave 1 050 accompagnements IBO 16 040 parcours + 1 050 accompagnements IBO 4 215 unités de renforcement des compétences L’appel d’offres IBO court jusqu’au 1/11/2009 Bron: VDAB & HIVA Les principaux appels d’offres entre 2005 et 2009 sont l’appel d’offres curatif (juillet 2005), l’appel d’offres FSE (mai 2007), l’appel d’offres relatif au Plan d’emploi pour les jeunes (mars 2008) et l’appel d’offres concernant les centres urbains (janvier 2009). Les appels d’offres sont gérés par une ‘tenderteam’ qui fait partie du service de la régie au niveau central. De plus, le VDAB a, depuis longtemps, accumulé de l’expérience dans le domaine de la sous-traitance de 17 formations, tant au niveau central que régional. A cet effet, un budget ‘programmation centrale de projets’ (CPP) et un budget ‘programmation locale de projets’ (LPP) sont prévus. Le budget CPP est un budget géré au niveau central auquel les régions peuvent faire appel. Le fait que ce budget soit géré au niveau central est lié à la source de financement (par exemple IPV, secteur non marchand, …). En principe, le budget de la LPP peut être librement alloué par les ‘régions VDAB’ sur la base de priorités énoncées dans le plan d’action régional annuel. Dans la plupart des régions, ce budget sert à subsidier un certain nombre d’initiatives d’organisations non commerciales. A cet égard, la région d’Anvers joue un rôle de pionnier car, depuis 2005, elle alloue tous les fonds de la LPP par le biais du système de l’appel d’offres, en s’inscrivant donc dans le cadre de la loi sur les marchés publics. L’appel d’offres FSE fait figure d’exception. La situation est en effet différente, et ce pour plusieurs raisons: premièrement, en raison de la nature propre du FSE (Fonds social européen) en tant que source de financement de projets pour des tiers (exclusivement) non commerciaux et deuxièmement, en raison du fait que le VDAB reprend partiellement le rôle de régie de l’agence FSE. Par conséquent, le montant annuel de 15 millions d’euros pour les appels d’offres est plus proche de la réalité que le montant de 32 millions d’euros cité par le VDAB. Le service public de l’emploi conçoit l’appel d’offres comme un instrument permettant de répondre de manière flexible à des besoins ponctuels, régionaux et sectoriels du marché du travail (VDAB Plan d’action annuel 2009). Comme le VDAB organise les appels d’offres et les recours à la sous-traitance à partir des services sur lesquels ils portent, sa politique est fragmentée. Il n’y a pas de cadre d’achat commun. Le Plan d’action annuel 2009 fixe comme objectif la rationalisation des procédures de sous-traitance et d’appel d’offres tant au niveau local que central (la programmation locale et centrale des projets). Une évaluation des différents projets de tendering est également prévue. Il n’y a pas actuellement de politique systématique au sein du VDAB pour décider de l’opportunité de travailler ou non avec des appels d’offres. Jusqu’ici, les motifs des différents appels d’offres étaient à chaque fois de nature spécifique. Le seul principe qui guide la politique est que les effectifs du VDAB ne peuvent plus augmenter. En raison de cette décision, le VDAB propose - à politique constante une capacité constante au marché. Pour le reste, il recourt à des appels d’offres sur la base de décisions ad hoc prises par la direction, le ministre de tutelle et le Conseil d’administration. Le moment du lancement de l’appel d’offres et les objectifs poursuivis dans ce cadre diffèrent d’un appel d’offres à l’autre: – dans le cadre de l’appel d’offres curatif, un choix politique clair et la problématique du groupe cible, pour lequel le VDAB ne dispose d’aucune offre en interne, ont été prépondérants; 18 – l’appel d’offres relatif au Plan d’emploi pour les jeunes a été lancé sur la base d’une concertation tripartite au sein du Vesoc (comité flamand de concertation économique et sociale); – l’appel d’offres concernant les centres urbains est en partie une suite de l’appel d’offres curatif et résulte d’un choix du VDAB; – l’appel d’offres relatif à l’accompagnement d’activation a été lancé à la demande des régions en raison de l’absence d’expertise pour le groupe cible concerné (clients présentant une problématique médicale, mentale, psychique et/ou psychiatrique); – en ce qui concerne les Competentiecentra, le recours à des appels d’offres s’inscrit dans le prolongement d’accords conclus avec les secteurs financeurs (IPV; secteur du gardiennage; transfert de fonds provenant du Département Welzijn pour des formations dans le secteur non marchand, notamment au métier d’auxiliaire de soins polyvalent, etc.); – enfin, les villes qui financent des projets (Anvers, Gand, Hasselt, Genk) optent aussi pour la formule de l’appel d’offres dans le cadre la LPP. Le choix de la formule de l’appel d’offres dépend d’une série de facteurs: choix politiques et stratégiques; nature du groupe cible; demande des régions, des secteurs, des acteurs locaux, des villes. Il n’est pas entièrement vrai de dire que des appels d’offres sont lancés uniquement quand des moyens financiers supplémentaires sont disponibles. Le principe général est que, pour chaque nouveau programme d’action, on vérifie si le VDAB peut l’exécuter ou non avec la capacité dont il dispose à ce moment-là. Si tel n’est pas le cas, un appel d’offres est lancé. S’il apparaît tout de même opportun que le VDAB exécute le programme lui-même, une analyse est menée afin de déterminer quelle autre partie des services existants peut faire l’objet d’un appel d’offres.9 Évolutions dans le cadre des appels d’offres successifs Le champ des appels d’offres a été élargi en termes de groupe cible. Lors du premier appel d’offres, seul le groupe cible curatif (chômeurs de longue durée) était visé. Les appels d’offres récents (Plan d’emploi pour les jeunes, FSE) visent également le groupe cible préventif (chômeurs de courte durée). 9 Les moyens financiers nécessaires à la ‘sluitende aanpak’ (accompagnement intensif des chômeurs), avec lesquels le premier appel d’offres a été financé, sont, depuis, devenus une dotation qui a servi à financer le nouvel appel d’offres relatif aux centres urbains. Il n’a pas été libéré de moyens supplémentaires pour le programme d’action concernant les plus de 50 ans; il est demandé au VDAB de réaliser ce programme avec la capacité existante, et les partenaires sociaux ont demandé que le VDAB l’exécute lui-même plutôt que de recourir à des opérateurs externes. Pour pouvoir réaliser cet objectif, le VDAB examine quelle autre partie des services peut être externalisée (dans ce cas, l’appel d’offres relatif aux centres urbains). 19 Une évolution importante réside dans le fait que le VDAB a renoncé à lancer des appels d’offres pour des parcours complets. Selon le VDAB, cette décision est motivée par des considérations financières. Le VDAB estime que le prix payé dans le cadre de l’appel d’offres curatif était trop élevé pour le peu de résultats engrangés et pour des parcours trop limités. Il convient de souligner à ce propos que le VDAB prend à chaque fois comme référence une norme de résultats qui est basée sur ses propres prestations. Nous reviendrons là-dessus au paragraphe 3. Le VDAB dénonce plus spécifiquement le fait que les prestataires n’ont pas investi suffisamment dans le renforcement des compétences. Le VDAB avait en effet établi que 70% des candidats adressés avaient besoin d’un parcours étendu incluant un volet renforcement des compétences (modules 3-4-5-6). Une analyse des pratiques des prestataires a démontré que les parcours proposés incluaient souvent un training à la recherche d’emploi (module 3 - de la sorte, le parcours était considéré comme ‘parcours étendu’), alors que les véritables formations ne constituaient qu’une petite partie et que les formations sur le lieu de travail (module 6) étaient presque inexistantes. Le VDAB constate que la mesure IBO a été peu utilisée alors qu’elle implique un faible coût pour les partenaires. Le fait est que la participation à une formation professionnelle individuelle (IBO) n’est pas considérée comme résultat et que seule la mise à l’emploi ultérieure compte. Sur la base de cette évaluation, le VDAB a décidé, dans le cadre du Plan d’emploi pour les jeunes, d’offrir d’abord lui-même des services en matière de renforcement des compétences avant de lancer l’appel d’offres. Cette évolution soulève la question de savoir dans quelle mesure un volet formation est bien nécessaire pour l’insertion de ces groupes cibles et si le VDAB ne met pas, dans le cadre du screening, trop ou trop unilatéralement l’accent sur les déficits de connaissances techniques. Ceci est peut-être dû au fil conducteur adopté pour le bilan préliminaire, qui part du métier de préférence de la personne afin de détecter les éléments qui font obstacle à son accès à l’emploi. Conflits de rôle pour le VDAB Comme nous l’avons déjà expliqué dans le premier chapitre, des conflits de rôles peuvent survenir lorsque le VDAB assume simultanément l’évaluation de l’offre, propose les mêmes services que le marché et décide de l’orientation des candidats. Selon le VDAB, la neutralité dans l’évaluation de l’offre est suffisamment garantie car les offres sont évaluées les unes par rapport aux autres, et non par rapport à la norme de qualité propre au VDAB. L’orientation des candidats est, in fine, laissée à l’appréciation du consultant qui procède à sa propre évaluation à cet effet. A ce jour, il n’existe encore aucun instrument de mesure pour l’orientation. Le VDAB n’a pas l’impression que ses consultants orientent les candidats les plus difficiles à placer vers les partenaires mais il n’a en fait pas beaucoup de moyens pour contrôler cet aspect. Les consultants du VDAB ont un sentiment contraire: ils ont l’impression d’orienter les meilleurs candidats vers les opérateurs externes et de 20 rester, eux, avec les candidats les plus difficiles. Les consultants se montrent motivés pour réaliser l’orientation aussi bien que possible. Un arbre de décision est actuellement en cours d’élaboration; le consultant pourra utiliser cet outil afin de faire un choix entre une orientation interne ou externe dans le cadre du Plan d’emploi pour les jeunes, du projet FSE ou du projet Centres urbains. Ce choix devra toujours être opéré par région, car les marchés du travail diffèrent et les contingents prévus doivent être remplis. Le VDAB peut la plupart du temps assurer une orientation régulière de candidats vers les prestataires contractants. Une standardisation intégrale de l’orientation est impossible. Les groupes cibles sont délibérément définis de manière très large dans les cahiers des charges. Si le prestataire n’est pas satisfait du candidat qui lui est adressé, celui-ci peut être retiré, bien qu’un renvoi ne soit formellement pas possible. Dans la pratique, les cas de renvoi sont peu fréquents. Différentes mesures ont été prises au sein du VDAB afin de limiter autant que possible les situations où il serait juge et partie: intégration de la régie dans une division distincte au sein de l’organisation, objectivation de l’orientation des candidats, transparence dans la sélection des prestataires et dans l’attribution des marchés. Il convient toutefois de se demander si ces mesures suffisent pour donner une base de légitimité solide pour les décisions à prendre. Même s’il n’y a pas dans les faits de raison de soupçonner le VDAB de prendre des décisions partiales ou servant son propre intérêt, le fait que cela puisse être potentiellement le cas porte préjudice à la légitimité de sa position en tant que donneur d’ordre. La seule manière de résoudre ce problème d’une manière efficace vis-à-vis des publics externes est d’accroître l’autonomisation des services qui ont un lien direct avec les services achetés sur le marché. 3.2.2 Fixation des prix et financement lié au résultat Le VDAB mentionne un prix indicatif dans les appels d’offres. Selon le VDAB, les acteurs du marché sont demandeurs en ce sens. Nous remarquons là encore que le VDAB fixe la norme de prix à partir de sa propre pratique. Le prix indicatif est basé sur un calcul du coût que la mission représenterait, en termes de temps, pour le VDAB s’il exécutait lui-même celle-ci. Un coût unitaire donné est appliqué par unité de temps. Les coûts de développement ne sont pas inclus. La part du financement lié au résultat évolue vers 40% alors qu’elle était de 30% initialement (dans le cadre de l’appel d’offres curatif). Les prix sont soumis à une pression à la baisse. Le prix indicatif dans le cadre de l’appel d’offres curatif s’élevait à 2 757,50 euros (hors TVA). Dans le cadre des appels d’offres récents, ce prix indicatif est tombé à 900 euros (appel d’offres FSE), 1 150 euros (appel d’offres relatif au Plan d’emploi pour les jeunes) et 1 220 euros (appel d’offres relatif aux centres urbains) (prix hors TVA). Ces appels d’offres ont beau concerner des groupes cibles et actions différents, ce qui frappe, c’est le faible niveau des prix. 21 Les offres des opérateurs sont parfois nettement inférieures au prix indicatif, ce qui peut représenter un danger en termes de qualité des prestations. Le problème qui se pose pour l’évaluation réside dans le fait que, légalement, les critères méthode, qualité et prix doivent être envisagés séparément. Il est impossible d’estimer si la méthode proposée peut être mise en œuvre pour le prix indiqué. La comparaison avec l’étranger demande à être nuancée, car les prix ne peuvent pas être envisagés indépendamment du mode et du degré de financement du résultat. Au VDAB, le financement lié au résultat repose sur un système de bonus/malus. Un bonus est payé si l’opérateur a pu réaliser un nombre de placements supérieur à la norme prévue; un malus est imputé dans le cas contraire. Cela signifie que, si le prestataire respecte la norme pour l’ensemble des candidats qui lui sont adressés, il est rémunéré à 100%. Aux Pays-Bas, le financement lié au résultat repose sur l’obtention ou non d’un résultat de placement par parcours individuel confié à un opérateur externe. Plus la part de financement lié au résultat est importante, plus les prestataires auront tendance à indiquer un prix supérieur afin de compenser le risque de non-rétribution. Surtout durant les premières années du recours à des opérateurs externes aux Pays-Bas, quand les résultats étaient inférieurs aux prévisions, le budget effectivement payé pour un nombre donné de parcours était généralement inférieur au budget estimé. En Flandre, le résultat obtenu dans le cadre du premier appel d’offres (dit ‘curatif’) est inférieur à la norme, mais les prestataires en ressentent moins les effets sur un plan financier. Par exemple, si un résultat moyen de 44% est obtenu au lieu des 50% prévus dans un système de financement lié pour 30% au résultat, le prestataire ne perd que 6% sur la part de 30% et il perçoit 100% du prix convenu sur la part de 70%. La comparaison des prix entre les pays est donc indissociablement liée au mode de financement du résultat et aux éventuels bonus. Tout cela n’empêche pas que le niveau de prix dans le cadre des appels d’offres du VDAB soit largement inférieur à celui des prix néerlandais (cf. infra). Le faible niveau de prix pratiqué en Flandre fait que les prestataires doivent injecter des revenus obtenus ailleurs afin de s’en sortir financièrement – et ceci vaut pour tous les types d’acteurs, tant commerciaux que non commerciaux. On peut sérieusement se demander si cette forme de ‘financement double’ faisait bien partie des objectifs visés. 3.2.3 Évolutions sur le marché des opérateurs Le marché des opérateurs qui s’est constitué à ce jour en Flandre peut, sur la base des attributions de marché réalisées pour un ou plusieurs appels d’offres centraux, être estimé à 52 organisations au maximum (il est préférable de parler d’attributions de marché étant donné qu’un certain nombre d’organisations ont été choisies plusieurs fois). Il ne s’agit que d’une fraction du nombre total de prestataires potentiels sur ce marché public. Le marché total des opérateurs peut être estimé à 583 organisations (sans tenir compte des acteurs qui opèrent dans 22 différents segments ou des acteurs agréés non actifs). Ces organisations se répartissent comme suit dans les différents segments du marché: travail intérimaire 133; outplacement 130; bureau de placement gratuit 320. Il est frappant de constater que les partenaires commerciaux sont fortement sous-représentés parmi les prestataires qui se sont vu attribuer un marché. Les partenaires commerciaux ne sont bien représentés que dans l’appel d’offres pour les parcours curatifs (9 des 14 lots attribués), l’appel d’offres concernant le Plan d’emploi pour les jeunes (3 des 3 lots attribués) et l’appel d’offres pour les centres urbains (5 des 5 lots attribués). Ceci est notamment lié aux conditions et à la délimitation géographique des lots visés dans l’appel d’offres. A titre d’illustration, nous passons ci-dessous en revue les principaux appels d’offres: – appel d’offres curatif: bon nombre d’organisations commerciales avaient soumissionné pour le premier appel d’offres, à savoir l’appel d’offres expérimental pour le groupe curatif. Le marché a finalement été attribué en partie à des associations entre organisations commerciales et non commerciales, plus précisément T-Groep et Levanto (Anvers; MalinesTurnhout) et T-Groep et Vokans (Brabant flamand). Les six autres lots ont été attribués aux entreprises suivantes: Vedior (désormais Tempo Team), SBS Management et deux nouveaux venus sur le marché belge, Agens et Alexander Calder (ces organisations d’origine néerlandaise ne sont plus présentes actuellement sur le marché belge); – appel d’offres FSE: dans le cadre de cet appel d’offres, aucun lot n’a été attribué aux opérateurs commerciaux, qui ont pourtant été nombreux à soumissionner; – appel d’offres relatif au Plan d’emploi pour les jeunes: cet appel d’offres était structuré sur la base d’un seul lot pour toute la Flandre. Les trois organisations sélectionnées sont issues du secteur commercial: Plus Uitzendkrachten (avec Levanto comme sous-traitant), Randstad Diversity et SBS; – appel d’offres relatif aux centres urbains: dans le cadre de cet appel d’offres, les lots ont été exclusivement attribués à des soumissionnaires commerciaux, plus précisément Tempo Team, Manpower, Randstad, T-Groep et SBS. Le nombre d’acteurs commerciaux impliqués dans le marché en construction demeure donc somme toute très limité. Ceci est en partie lié au caractère prescriptif de la description des services dans l’appel d’offres, mais en partie aussi aux critères d’évaluation utilisés pour la sélection des prestataires. Cela constitue spécifiquement un problème dans le cadre de la mise en place d’un nouveau marché public. Le VDAB estime que les spécialistes que l’on comptait toucher au départ n’ont pas encore répondu à l’appel pour l’instant. Certains appels d’offres s’avèrent être trop généraux (Plan d’emploi pour les jeunes), de sorte que les possibilités d’évaluation de l’expertise présente sont insuffisantes et que le champ des opérateurs devient très vaste. Dans le cadre des appels d’offres portant sur des services d’accompagnement (FSE - placement pour les groupes cibles; Plan d’emploi pour les jeunes; Centres urbains), l’évaluation est basée sur l’expertise 23 relative à la demande sur le marché de l’emploi et non sur l’expertise dans l’accompagnement ou l’intermédiation pour des postes vacants figurant dans la base de données des offres d’emploi. Le VDAB prévoit donc de pouvoir évaluer les soumissionnaires sur la base de critères spécifiques relatifs à la qualité, l’expertise et l’expérience. Cette approche peut se justifier, mais dans la perspective de la constitution d’un nouveau marché, elle représente une barrière à l’entrée supplémentaire pour les nouveaux prestataires. Sur un marché plus mature, les donneurs d’ordre accorderont plus d’importance à l’expérience et à la qualité (résultats). Mais, là encore, il est important de prévoir des packages qui laissent suffisamment d’espace aux nouveaux entrants pour pouvoir acquérir l’expérience requise. L’incertitude quant aux appels d’offres à paraître (moment de la publication, objectifs poursuivis) ne facilite pas les choses pour les acteurs du marché intéressés. Le mode de fonctionnement actuel n’offre au marché en développement qu’un soutien insuffisant et trop peu d’opportunités d’investissement, de spécialisation et d’échange de bonnes pratiques. Si des opérateurs collaborent, c’est pour atteindre la taille critique exigée (pour les partenaires non commerciaux) et pas pour permettre des innovations dans les méthodes. Les organisations non commerciales en particulier ont tendance à répondre à tous les appels d’offres qui sont publiés (‘aujourd’hui le nettoyage, demain l’horeca’). Les partenaires non commerciaux, notamment les ONG, sont très critiques à l’égard du caractère expérimental de la politique relative aux appels d’offres.10 En substance, ils soulignent que l’appel d’offres n’est pas l’instrument approprié pour activer les groupes à risque. A l’occasion de la définition des groupes cibles dans le cadre de l’appel d’offres relatif aux centres urbains, les ONG ont essayé d’obtenir que le groupe cible curatif ne soit pas inclus dans cet appel d’offres, mais sans résultat. De plus, les ONG locales soulignent que les appels d’offres mettent en péril le financement propre de leur organisation.11 Les changements de personnel et la courte durée des missions compliquent le planning à long terme de l’organisation et compromettent la qualité des prestations. Les partenaires non commerciaux concluent de plus en plus souvent des alliances afin d’accroître leur spécialisation et de pouvoir opérer sur un plan transrégional. Les organisations du secteur non marchand se demandent si elles doivent maintenant se spécialiser davantage sur certains groupes cibles ou proposer des activités commerciales afin d’assurer leur continuité. Le VDAB, en tant que donneur d’ordre, est lui-même demandeur d’un marché financièrement sain et stable mais il ne discerne pas pour l’instant dans ce cadre de rôle à jouer pour le régisseur. En fonction du système souhaité de recours au 10 SLN (2008), ‘Geen muziek meer in ‘Love me tender’! Manifest niet-commmerciële derden, december 2008.’, Slinger, jrg. 13, n° 5, pp. 1-5. 11 SLN (21/05/2008), Verslag tenderoverleg VDAB-SLN, Gent: SLN. 24 marché, une vision et une approche visant à soutenir un marché stable des opérateurs s’avèrent pourtant nécessaires. Pour que le marché puisse réellement se développer, il faut des moyens. Cela nécessite une décision politique. De plus, le rôle du VDAB doit être clarifié: quel rôle le VDAB peut-il remplir dans le cadre du développement du marché? Le prestataire public doit-il s’immiscer dans ce développement? Est-ce encore le rôle d’un donneur d’ordre? Peut-être s’agit-il là d’un rôle à confier à un régulateur, fonction qui n’est encore actuellement assumée par aucune instance. Les différences en matière d’assujettissement à la TVA constituent un obstacle spécifique pour parvenir à la concurrence loyale. Le principe est que c’est la nature de la mission, et non le statut de l’organisation, qui détermine si les services sont soumis à la TVA. – Pour l’accompagnement de parcours, les organisations ne peuvent en principe obtenir aucune exonération de la TVA. Toutes les organisations, y compris les organisations non commerciales, doivent indiquer des prix TVA incluse lorsqu’elles répondent à un appel d’offres. Le VDAB compare les soumissions sur la base du prix TVA incluse. Le fait que les organisations doivent ou non finalement payer la TVA dépend de la décision prise par l’administration de la TVA auprès de laquelle une demande d’exonération a été introduite. Certaines organisations non commerciales sont intégralement exonérées de TVA, d’autres sont des assujetties mixtes. Ceci est déterminé sur la base de l’activité principale exercée et non sur la base du statut de l’organisation. – L’enseignement et la formation bénéficient d’une exonération en vertu de l’article 44 du Code de la TVA. Toutefois, l’incertitude règne toujours pour ce qui concerne les organisations privées qui sont totalement soumises à la TVA, et notamment les acteurs commerciaux. Actuellement, il existe une sorte de vide juridique en la matière. C’est là un problème qui doit être résolu au niveau fédéral. Un autre aspect du dossier TVA concerne la récupération de la TVA, chose qui est actuellement plus compliquée pour les organisations non commerciales. Là aussi, une assimilation entre les organisations commerciales et non commerciales est souhaitable. 25 3.2.4 Résultats en matière de placement des demandeurs d’emploi Une question importante dans le débat relatif au fonctionnement du marché est de savoir si les parcours confiés à des partenaires externes répondent aux attentes en matière de sortie vers l’emploi. Les résultats bruts sont disponibles pour l’appel d’offres curatif. Ils affichent la tendance suivante: Tableau 2 Taux de sortie de l’appel d’offres curatif sur la base de trois mesures des parcours clôturés (chaque fois calculés pour les parcours pour lesquels un taux de sortie était déjà disponible au 31/03/2009) Taux de sortie vers l’emploi (%) Taux de sortie du chômage (%) Norme (taux de sortie du chômage) (%) Taux de sortie après 6 mois (1ère mesure) Taux de sortie 6 mois après la 1ère mesure Taux de sortie 12 mois après la 1ère mesure Taux de sortie 18 mois après la 1ère mesure 38,8 50,6 - 40,7 53,4 - 43,3 59,1 - 44,9 62,2 - Taux de sortie sur la base des 3 mesures* 31,5 43,1 50,0 * Taux de sortie calculés pour 5 845 et 5 686 parcours respectivement. Les résultats sont mesurés à trois moments de mesure différents (6, 7 et 8 mois après la fin du parcours) et ensuite, 6, 12 et 18 mois après la première mesure. La norme est déterminée par le VDAB sur la base des taux de sortie enregistrés pour un groupe comparable dans le passé. Source: VDAB / IDEA Consult (31/03/2009) Comme le montre le tableau ci-dessus, la norme globale de 50% qui a été fixée en matière de taux de sortie du chômage pour les 6 000 parcours adjugés ne sera pas atteinte. D’importantes différences régionales ont été initialement constatées. Des taux de sortie supérieurs sont probablement en partie dus à un ‘parquage’ plus important, phénomène qui consiste à cantonner les candidats plus difficiles à placer dans des prestations de services plus limitées. Ainsi, SBS Management Consultants, un prestataire présentant un taux de sortie élevé, affiche aussi un pourcentage élevé de parcours non clôturés ou en cours. Ceci indique que derrière les différences de résultat se cachent aussi des différences méthodologiques. Rappelons à ce propos que l’écrémage est évité puisqu’il n’est pas prévu de possibilité de renvoi dans le contrat. En d’autres termes, le prestataire doit intégrer tous les clients dans un parcours. De plus, le financement lié au résultat est seulement limité (no cure, less pay) et non pas complet (no cure, no pay). Ces deux mesures permettent de lutter contre l’écrémage, bien que les efforts effectivement 26 consentis pour les demandeurs d’emploi puissent toujours être différents (cf. le phénomène du ‘parquage’). On est frappé par les différences importantes constatées entre le taux de sortie vers l’emploi et le taux de sortie du chômage. Ceci souligne le caractère problématique d’une analyse des résultats reposant uniquement sur les taux de sortie. Une analyse des résultats doit être suffisamment différenciée. La distinction entre sortie du chômage et sortie vers l’emploi n’est pas la seule distinction importante. Il faut également tenir compte des compétences acquises, par exemple. On peut citer à ce propos les appels d’offres pour le module formation professionnelle. Dans la région d’Anvers, par exemple, le financement pour ces appels d’offres n’est pas lié au résultat. Les prestataires rapportent les progrès du client sur la base des compétences clés acquises pour un métier spécifique, telles que définies par le SERV (Conseil économique et social flamand). Pour le VDAB, les résultats de l’appel d’offres curatif sont un peu décevants par rapport aux attentes. C’est pourquoi, le financement lié au résultat a été porté de 30 à 40% dans les appels d’offres plus récents. Le VDAB entend ainsi obtenir un meilleur résultat que celui de l’appel d’offres curatif. Il convient toutefois de formuler des remarques au sujet de la mesure (trois moments de mesure successifs, alors qu’au VDAB, on opte pour un seul moment de mesure) et du calcul de la norme (basé sur de grandes cohortes qui présentent des caractéristiques comparables et qui ont été placées dans le passé par le VDAB; différences régionales).12 En fait, on omet ici le fait que l’appel d’offres curatif ciblait un ‘groupe résiduel’ qui n’avait pas été accompagné par le VDAB. Dès lors, comment le VDAB peut-il déterminer une norme sur la base des résultats qu’il a obtenus par le passé? Dans les appels d’offres ultérieurs, la mesure en trois moments successifs (après 6, 7 et 8 mois) a été abandonnée. Le principe maintenant veut que les partenaires soient évalués de la même manière que le VDAB lui-même. Dans les appels d’offres plus récents, les normes sont déterminées sur la base d’une moyenne pour l’ensemble de la Flandre. La norme a été fixée à 63% dans le cadre de l’appel d’offres Plan d’emploi pour les jeunes, et à 55% dans l’appel d’offres Centres urbains; il s’agit à chaque fois d’une norme de sortie vers l’emploi conformément au Contrat de gestion du VDAB. Dans le cadre des appels d’offres pour des modules, les normes qui sont d’application restent en vigueur, même si l’utilisation du ‘placement dans un emploi’ comme critère de succès peut susciter des interrogations lorsqu’il s’agit de renforcement général des compétences. 12 Pour l'appel d’offres curatif, la norme était déterminée sur la base de la norme de sortie comparable fixée dans le Contrat de gestion du VDAB (54%), majorée de 5% (car les résultats du VDAB devaient augmenter de 5%). Dans le cadre des trois mesures successives, on a redescendu la barre à 50%. 27 3.3 Appels à projets en Wallonie Depuis 2004, le Forem fait appel au marché par le biais d’appels à projets. L’initiative en la matière est venue du Forem. Depuis, on travaille avec des appels à projets annuels. A la fin de l’année 2008, le cinquième appel à projets a été lancé pour une programmation sur 3 ans. Les missions visées dans les appels à projets s’inscrivent dans le cadre du Plan d’accompagnement des chômeurs (PAC)13 (Accord de collaboration de 2004 entre l’Etat fédéral et les Régions et Communautés en matière d’activation des chômeurs). Les actions portent sur l’accompagnement à l’emploi et la formation des demandeurs d’emploi au sens large du terme, à l’exclusion des formations qualifiantes (cf. infra). Afin de mieux harmoniser l’offre avec les besoins du groupe cible étendu et diversifié du PAC, un recours à des partenaires externes pour l’exécution des actions d’accompagnement s’est avéré nécessaire. Pour impliquer les acteurs privés, Forem Conseil utilise deux types d’instruments: – les ‘appels à projets’ dans le cadre du PAC ou les ‘appels à initiatives’ qui sont comparables (spécifiquement dans le cadre du Plan stratégique n° 3 – PST3); – le cofinancement d’actions de formation ou d’accompagnement: en vertu de contrats-cadres conclus entre le Forem, la Région wallonne et un groupe d’opérateurs non commerciaux, ou également dans le cadre d’autres initiatives contribuant à la mise en œuvre du DIISP (Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle): Organismes d’insertion socioprofessionnelle (OISP), entreprises de formation par le travail (EFT), missions régionales pour l’emploi (MIRE), … Les appels à projets s’inscrivent dans une logique de subsidiation en vertu des lois coordonnées sur la comptabilité de l’État (1991). Les appels à projets ne sont pas conçus sur la base d’un système de marché public. La loi sur les marchés publics ne s’y applique pas. Il s’agit là d’une différence importante avec l’approche privilégiée en Flandre. Il convient toutefois de souligner que la formule de l’appel d’offres soumis à la loi sur les marchés publics est déjà utilisée par Forem Formation en tant qu’opérateur de formation. Les appels à projets sont organisés par Forem Conseil. Au niveau interne, il existe au Forem depuis 2003 une scission entre Forem Conseil et Forem Formation. L’entité Opérateur-Emploi et l’entité Régisseur-Ensemblier relèvent de Forem Conseil. Le nouveau rôle de régisseur est ancré dans le décret de 2003 modifiant le décret de 1999 et est défini comme un rôle de ‘régisseur du marché et (d’)ensemblier d’actions menées par les opérateurs publics et privés’. Cette évolution a engendré la création de deux nouvelles fonctions pour le Forem: la 13 Accord de collaboration relatif à l’accompagnement et au suivi actifs des chômeurs, conclu le 30 avril 2004 entre l’Etat fédéral, les régions et les communautés. 28 fonction d’analyse du marché de l’emploi (Service d’analyse du marché de l’emploi et de la formation - AMEF) et la fonction de coordination et de stimulation des prestataires publics et privés (Service des relations partenariales – SRP). Les rôles de donneur d’ordre et de prestataire de services sont donc dans une certaine mesure scindés, dans la lignée de la distinction entre régisseur et acteur qui existe au VDAB. Au VDAB, le service ‘ régie du marché de l’emploi’ inclut à la fois le département ‘placement’ et le département ‘appels d’offres’ (‘tenderteam’); c’est également le cas au Forem. 3.3.1 Contenu du rôle de donneur d’ordre La motivation du Forem pour ne pas travailler sur la base de la forme juridique d’un marché public réside dans la volonté d’introduire, dans le cadre de son rôle de régisseur-ensemblier, une diversification et une complémentarité plus grandes dans l’offre de services. Avec les appels à projets, le Forem a pour objectif de développer de nouvelles approches en offrant des possibilités aux organisations commerciales, non commerciales agréées et non commerciales non agréées. Ces initiatives génèrent une plus grande diversification de l’offre, ce qui permet de mieux répondre aux besoins du plan d’activation des chômeurs. Cette nouvelle offre est complémentaire à l’offre interne déjà existante. Outre la diversification et la complémentarité, le partenariat constitue également un principe directeur pour le Forem. La notion de partenariat est définie comme suit dans le décret relatif au Forem: ‘Toute forme d’association ou de collaboration avec des intervenants publics et/ou privés, par laquelle des moyens financiers, humains ou matériels peuvent être mis en commun pour poursuivre un objectif ressortissant aux missions de l’Office qui dépasse ou qui rend plus adéquate la réponse qu’un intervenant aurait pu apporter seul aux besoins des publics cibles ou lorsque l’Office ne peut réaliser une partie de ses missions seul, en raison de la spécificité du besoin à couvrir’ (décret du 6 mai 1999 relatif au Forem, article 7). Un objectif essentiel pour le Forem est de mieux harmoniser la demande et l’offre pour certains groupes cibles par le biais d’une diversité d’actions effectuées par une diversité d’acteurs (‘faire autre chose’; ‘faire autrement’). Le partenariat est également mis en exergue dans les accords de coopération conclus avec les initiatives non commerciales agréées et dans d’autres initiatives prises dans le cadre du Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle (DIISP, décret de 2004). Celles-ci bénéficient d’un financement structurel émanant de la DGO6 (Direction Générale Opérationnelle) du Service Public de Wallonie. Le Forem soutient ces initiatives sur la base d’une formule de cofinancement. Les appels à projets, ainsi que les accords de coopération et autres initiatives dans le cadre du DIISP, émanent du régisseur-ensemblier. Actuellement, ces dispositifs ne visent pas des actions d’accompagnement (contrairement à ce que l’on observe en Flandre). Les appels à projets portent sur des actions telles que 29 l’insertion et des formations générales non qualifiantes. Les formations qualifiantes relèvent de Forem Formation. Groupe cible des appels à projets Les appels à projets s’inscrivent intégralement dans le cadre du plan d’activation des chômeurs, qui est en vigueur depuis 2004. Le groupe cible de l’appel à projets se compose de chômeurs complets indemnisés (et de chômeurs en stage d’attente) âgés de 18 à 50 ans. Les appels à projets sont ouverts à tous les opérateurs intéressés, tant du secteur public que du secteur privé (commercial et non commercial). Des partenariats peuvent également présenter des projets. Le cinquième appel à projets Forem Conseil a l’expérience des appels à projets annuels. Le cinquième appel à projets a été lancé entre novembre 2008 et janvier 2009. Les projets ont pu démarrer au mois de mai 2009. Le budget total du cinquième appel s’élève à 27 434 000 euros sur 3 ans.14 L’objectif poursuivi est de toucher quelque 20 500 demandeurs d’emploi.15 Sur base du budget disponible et du nombre prévu de demandeurs d’emploi, on peut évaluer le coût moyen à 1 338 euros maximum par demandeur d’emploi. Le coût réel dépend des résultats obtenus, étant donné que le financement est lié en partie au résultat. De plus, le coût moyen fluctue en fonction de la mesure (cf. infra). Pour le cinquième appel, 749 propositions de projet ont été introduites et 730 ont été jugées recevables. Parmi ces 730 propositions, 353 projets ont été sélectionnés. Les conditions pour pouvoir rentrer un projet sont en nombre très limité. Seuls un agrément en tant qu’agence de placement privée (uniquement s’il s’agit d’actions d’accompagnement à l’emploi dans le cadre de la mesure 1; cf. infra) et un enregistrement dans la base de données Formabanque sont nécessaires. D’autres garanties (notamment en matière d’obligations fiscales, sociales, etc.) sont demandées par la suite, c’est-à-dire uniquement pour les projets sélectionnés. Dans un premier temps, les projets sont évalués sur leur cohérence. Cette évaluation est réalisée au niveau central par une taskforce (composée de membres des directions régionales du Forem et présidée par un expert externe). Dans un second temps, les directions régionales du Forem, d’une part, et les comités subrégionaux de l’emploi (organes réunissant les partenaires sociaux), d’autre part, évaluent la pertinence des projets. La sélection finale est ensuite 14 Il s’agit de montants maximums qui seront recalculés sur la base des résultats obtenus (cf. financement lié au résultat). 15 Les budgets annuels disponibles sont de l’ordre de 11 millions d’euros (pour l’année 2 + l’année 3). Le montant total de 27 434 000 euros ne peut être dépassé. 30 réalisée par un groupe rassemblant des représentants du Service public de Wallonie (DGO6) et du Forem ainsi que des experts externes, et placé sous la présidence d’un représentant du Comité de gestion du Forem. Le cinquième appel à projets est une reconfiguration basée sur l’expérience des éditions précédentes. La reconfiguration opérée par Forem Conseil porte sur les éléments suivants: – la prolongation de la période de programmation qui passe de 1 à 3 ans (cf. supra); – un regroupement des types de projets en 4 mesures; – le principe de ‘l’adressage’ ou orientation des candidats; – une plus grande importance accordée au résultat dans le cadre du financement. Comme dans les appels à projets précédents, l’objectif est de coller au maximum à la demande en donnant aux sous-régions l’opportunité de participer à la sélection des projets introduits (cf. supra) et à la détermination des priorités locales sur la base d’une analyse des besoins locaux. Le cinquième appel à projets se caractérise par un regroupement en différentes mesures selon le type d’actions, le groupe cible et les résultats. Plusieurs actions peuvent être combinées au sein d’une même mesure. Le cinquième appel à projets se compose de quatre types de mesures: – mesure 1: transition vers l’emploi salarié (cible: personnes moins difficiles à placer); – mesure 2: sensibilisation à la création d’activité; – mesure 3: orientation et mobilisation socioprofessionnelle (cible: personnes difficiles à placer); – mesure 4: formation générale de base. Dans les appels à projets précédents, les organisateurs du projet devaient euxmêmes prendre en charge le recrutement des demandeurs d’emploi. Dans le cinquième appel à projets, ceux-ci peuvent également être adressés par le Forem (‘adressage’). Pour le consultant du Forem, il est en effet important de pouvoir faire au demandeur d’emploi une offre concrète d’insertion. L’organisateur du projet indique ensuite si la personne peut participer à l’action. Un recrutement par les opérateurs demeure toutefois possible. Conflits de rôles La mission du Service des relations partenariales consiste à mobiliser l’ensemble des acteurs du marché de la formation et de l’accompagnement afin de mieux harmoniser l’offre et la demande sur le marché de l’emploi. A cet effet, le Forem alloue des subsides permettant de créer une offre supplémentaire qui se distingue de l’offre déjà existante. 31 Même si le Forem (ou le ministre de tutelle du Forem) n’opte pas pour la procédure des marchés publics mais pour une technique de subsidiation, cela ne le dispense pas de respecter les principes européens en matière de nondiscrimination, d’égalité de traitement et de transparence. Ces principes impliquent en fait une confirmation du principe constitutionnel d’égalité de traitement des citoyens (cf. articles 10 et 11 de la Constitution) et des principes de droit administratif relatifs à la bonne administration (principe selon lequel les décisions doivent être préparées avec soin, principe de l’appréciation raisonnable des intérêts en présence, principe de sécurité juridique, etc.) (Gouvernement flamand, 2008). En ce qui concerne plus spécifiquement la collaboration avec des partenaires, le Contrat de gestion du Forem pose les principes suivants: objectivité, transparence et évaluation. Pour la sélection des projets dans le cadre du cinquième appel à projets, différents niveaux au sein de l’organisation du Forem ont été impliqués, ainsi que différents intervenants comme les comités subrégionaux de l’emploi, la Région wallonne et des experts externes. L’implication de différents acteurs internes et externes dans l’évaluation des projets augmente l’objectivité de l’évaluation. Le point faible de cette procédure, contrairement à la procédure des marchés publics, réside dans le fait que les marges d’interprétation demeurent plus grandes. Lors de l’évaluation, d’autres éléments peuvent toujours entrer en ligne de compte, ce qui augmente le risque de traitement inéquitable des organisations candidates. L’implication de partenaires sociaux sous-régionaux dans l’évaluation sert favorablement la pertinence des projets à sélectionner mais augmente le risque de favoritisme car, au niveau local, les intervenants entretiennent des liens plus étroits avec les organisations actives sur le terrain. Le fait que le Forem, dans son rôle de pouvoir subsidiant, assume lui-même l’organisation d’une offre de services propre (similaire et en dehors du contexte des appels à projets) constitue moins en soi une source potentielle de conflit de rôles. Les activités externalisées doivent en effet être complémentaires à l’offre structurelle du Forem. Cela diminue la tentation de prendre des décisions inspirées par le souci d’éviter de porter préjudice à l’offre interne. Toutefois, il apparaît dans les faits que les actions prévues dans le cadre des appels à projets figurent bel et bien aussi au menu de l’offre propre du Forem (par exemple, transition vers l’emploi salarié pour les personnes moins difficiles à placer). Au niveau individuel, dans le cadre de l’’adressage’ des candidats, le Forem dispose en principe d’un levier supplémentaire pour faire en sorte que les candidats soient adressés de la manière la plus objective possible. Dans le cinquième appel à projets, les candidats sont en effet adressés par le Forem lui-même vers les partenaires, qui ne peuvent les renvoyer que moyennant motivation de leur décision. La pratique devra démontrer dans quelle mesure la neutralité de l’adressage est garantie. 32 3.3.2 Fixation des prix et financement lié au résultat Le Forem applique un tarif indicatif, mais celui-ci n’est pas publié. Dans le cadre des appels à projets précédents, seuls des tarifs horaires étaient indiqués. Par conséquent, les promoteurs avaient tendance à prévoir un nombre d’heures supérieur dans leurs offres, alors que le faible nombre d’heures (420 heures au maximum) est justement une caractéristique des appels à projets. Les appels à projets font mention d’un prix horaire et d’un prix par personne. Le tarif moyen par demandeur d’emploi s’élevait dans le troisième appel à projets à 1 095 euros. Le montant relativement faible s’explique par la durée réduite des projets et par le caractère additionnel de la subsidiation - pour le prestataire subsidié. De plus, l’approche dominante est une approche axée sur des groupes de huit à douze demandeurs d’emploi et non sur un accompagnement individuel intensif. Le premier appel à projets prévoyait uniquement une obligation de moyens. L’objectif du Forem était de ne pas placer la barre trop haut afin de susciter un intérêt suffisant parmi les nouveaux acteurs, sans les effrayer à l’avance avec des normes de résultat préalablement définies. A partir du deuxième appel d’offres, l’accent a davantage été mis sur le résultat, initialement encore en termes de nombre de demandeurs d’emploi atteints et de non-abandons durant l’action, et dans l’appel à projets actuel aussi en termes d’effets. Les résultats sont définis sur la base des groupes cibles spécifiquement visés et des actions prévues dans chacune des mesures. La mesure 1 s’adresse aux personnes moins difficiles à placer. Le résultat est défini comme suit: dans les six mois qui suivent le début de l’action, être au travail ou avoir intégré une formation de type qualifiant. La mesure 3 cible au contraire les personnes plus difficiles à placer. Le résultat est ici défini de la manière suivante: au terme de l’action, avoir exécuté la première étape du plan d’action ou avoir intégré une formation ou être à l’emploi. La définition large du résultat s’explique par le degré de difficulté du groupe cible. Pour la mesure 4, la définition est également large: dans un délai de six mois à compter du début de l’action, avoir accédé à l’emploi, ou bien avoir intégré une formation dans le cadre d’un projet professionnel, ou bien avoir acquis les compétences de base ou les compétences transversales visées en vue d’un emploi potentiel dans un métier déterminé. Le financement est structuré comme suit: 60% lors du recrutement, 10% en cas de non-abandon (action menée à son terme de manière fructueuse) et 30% si le résultat préalablement défini est atteint. 3.3.3 Constitution du marché en développement En Wallonie, le motif de la diversification et de la complémentarité est actuellement mis en avant pour faire appel aux acteurs du marché par le biais d’un appel à projets et pour ne pas recourir à la formule de l’appel d’offres, instrument qui se prête mieux à la mise en place d’un marché public. D’un autre côté, il est 33 explicitement fait appel à tous les opérateurs du marché, tant commerciaux que non commerciaux. Il est intéressant de voir quelle est la part des acteurs commerciaux par rapport à l’ensemble des acteurs concernés. Le tableau ci-après fournit un aperçu, pour l’ensemble des quatre premiers appels à projets, de la répartition selon le type d’opérateur: opérateurs publics, opérateurs non commerciaux agréés, opérateurs non commerciaux non agréés et opérateurs commerciaux. Tableau 3 Ampleur et répartition (en pourcentage) du marché des opérateurs, selon le type d’opérateur et par appel à projets Appel à projets 1 Public Privé non commercial - agréé Privé non commercial - non agréé Privé commercial Total Appel à projets 2 Appel à projets 3 Appel à projets 5 18% 34% 15% 36% 11% 37% 7% 34% 22% 30% 30% 32% 25% 19% 22% 27% 116 139 129 152 Source: Forem Les acteurs non commerciaux représentent chaque fois un tiers environ du nombre de projets attribués. La part des acteurs commerciaux s’élève à plus d’un quart. Il convient de souligner la forte progression des opérateurs non commerciaux non agréés. La part des opérateurs commerciaux a légèrement augmenté, passant de 25 à 27%. La hausse est à chaque fois au détriment des opérateurs publics. Le segment commercial se compose au total de 29 organisations commerciales différentes qui sont impliquées dans au moins un des quatre premiers appels à projets. Parmi ces 29 organisations, six sont membres de Federgon (Manpower, Randstad, Tempo-Team (anciennement Vedior), Trace, Sodie, Tènce). En termes financiers, la part du secteur commercial privé dans l’ensemble des opérateurs contractants a plus fortement augmenté (elle est passée de 11 à 31% du budget). Les organisations commerciales sont essentiellement impliquées dans des actions menées dans le domaine de l’orientation et de la transition vers l’emploi salarié. La majorité des opérateurs contractants appartient au secteur privé non commercial. En l’occurrence, il s’agit à la fois d’opérateurs agréés tels que les EFT, les OISP, les MIRE, l’AWIPH, etc., et non agréés tels que des initiatives syndicales, des initiatives socioculturelles, Vie féminine, etc. Vu la part relativement importante des prestataires privés agréés dans le secteur non commercial, il est important de souligner que les nouvelles activités demeurent additionnelles pour les organisations participantes: en ce qui les concerne, en effet, ces activités 34 viennent s’ajouter aux activités qui bénéficient d’un financement structurel (de la Région wallonne ou de la Communauté française) ou aux activités normales de l’organisation. 3.3.4 Résultats en matière de placement des demandeurs d’emploi Le Forem a réalisé une évaluation interne portant sur les résultats quantitatifs des trois premiers appels à projets.16 Tout d’abord, les données globales relatives au taux de sortie vers l’emploi et au taux d’intégration dans une formation ont été calculées en comparaison avec celles du PAC en général. Ensuite, l’image a été affinée en tenant compte de la nature de l’action et des caractéristiques du public cible. Troisièmement, les résultats ont été comparés pour les différents types d’acteurs. Les données sont basées sur un échantillon de 14 828 contrats conclus avec des demandeurs d’emploi. Cette évaluation a permis de faire les constats suivants: – le taux de sortie vers l’emploi (mesuré six mois après la fin du parcours) s’élève à 39,9%; le taux d’intégration dans une formation s’élève à 8,5%. Ces résultats sont légèrement meilleurs que ceux obtenus avec l’ensemble des demandeurs d’emploi dans le cadre du PAC. En moyenne, le taux de sortie s’élève à 36,3% pour le PAC, et le taux d’intégration dans une formation à 8,2% (chiffres de 2006). Il est important de noter que la portée des appels à projets est plus ciblée que celle du PAC en général. En effet, les personnes hautement qualifiées, par exemple, sont à peine représentées. Autre exemple: les organisations non commerciales agréées soumises au décret doivent recruter des personnes qui n’ont pas obtenu leur diplôme de l’enseignement secondaire et/ou qui totalisent une période de chômage plus longue; – si nous comparons les différents types d’opérateurs, il apparaît que les organisations commerciales obtiennent de meilleurs résultats; elles sont suivies par les opérateurs non commerciaux non agréés et les opérateurs publics. Les organisations non commerciales agréées obtiennent les moins bons résultats alors qu’elles sont pourtant les plus performantes pour le recrutement du public cible. Le schéma reste le même si l’on tient compte du degré de difficulté (durée du chômage et niveau de formation) du groupe cible. Le secteur commercial obtient les meilleurs résultats pour toutes les catégories de demandeurs d’emploi. Il convient de souligner le résultat très favorable enregistré pour les personnes plus faciles à placer (64% de sortie vers l’emploi ou d’intégration dans une formation), résultat qui n’est toutefois pas au détriment des groupes cibles plus difficiles. 16 Appels à projets mis en œuvre dans le cadre du Plan d’accompagnement des chômeurs. Évaluation à la demande du Comité de gestion. Note au Bureau exécutif de Forem Conseil, 8 juli 2008 (Document N° 08.0913 FC). 35 3.4 Appels à projets à Bruxelles Les bases pour l’introduction d’un dispositif intégré de partenariat ont été jetées en 2007, sous l’impulsion de l’Office bruxellois de l’emploi Actiris. Ce dispositif intégré constitue un complément aux services offerts par Actiris. L’objectif général est de ‘veiller à assurer l’accompagnement de tous les chercheurs d’emploi sur l’ensemble du territoire de la Région bruxelloise, particulièrement les plus éloignés du marché du travail, et à les orienter vers un emploi de qualité, de manière individuelle, structurée et adaptée à leurs besoins’ (Rapport annuel 2007). Pour ce faire, il faut développer une ‘offre de services la plus large, transparente et complémentaire possible’. Contrairement à ce que nous avons observé en Wallonie, il n’y a pas de lien direct avec l’accord de collaboration de 2004 en matière d’activation des chômeurs. La nouvelle approche des partenariats a permis de conclure, en 2008 et en 2009, sept appels à projets différents ayant pour objet de renouveler les accords de collaboration qui existaient depuis 1993. En principe, des appels d’offres peuvent aussi être organisés, mais en vertu de la réglementation, ceci est exclu pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. La formule de l’appel d’offres pourrait être utilisée pour d’autres activités, mais ce n’est pas (encore) le cas dans la pratique. 3.4.1 Contenu du rôle de donneur d’ordre Le dispositif intégré de partenariat est présenté comme une grande réforme qui s’inscrit dans le contexte de la gestion mixte du marché de l’emploi dans la Région de Bruxelles-Capitale (Ordonnance du 26 juin 2003). A cet effet, Actiris est renforcé dans son rôle de régisseur-ensemblier des opérateurs d’emploi. L’ordonnance établit une distinction entre quatre types d’opérateurs: – Actiris, en sa qualité de service public bruxellois de l’emploi, est chargé de garantir une prestation de services gratuite, continue et universelle, de favoriser le plein emploi et d’assurer un développement équilibré du marché du travail; – les agences d’emploi privées telles que les entreprises d’intérim, les bureaux de sélection, etc.; – les bureaux de placement des écoles; – d’autres opérateurs d’emploi tels que les organismes de formation, les Missions locales, les CPAS, etc. Dans le cadre du renouvellement des accords de collaboration, il a été décidé de travailler avec l’instrument que sont les appels à projets, par analogie avec l’approche privilégiée en Wallonie. Cette approche repose sur un plan d’action 36 stratégique qui est renouvelé tous les 2 ans.17 Les appels à projets reposent sur l’arrêté du Gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale du 28 février 2008.18 Ils sont ouverts à tous les opérateurs, tant publics que privés, tant commerciaux que non commerciaux. La réglementation prévoit qu’Actiris peut conclure des accords avec tous les types d’opérateurs d’emploi pour la fourniture de services en matière d’emploi. A cet effet, Actiris dispose de trois instruments: – l’instrument de la subsidiation sur la base d’un appel à projets; – une procédure d’appel d’offres public; – une procédure spécifique visant soit le dépôt de projets à caractère innovateur laissés à l’initiative des opérateurs d’emploi, soit un partenariat d’adhésion. Tous les instruments ne peuvent pas être utilisés pour tous les types d’actions. L’arrêté du 28 février 2008, qui traite de la manière dont les partenariats doivent être conclus, stipule qu’Actiris ne procède pas par voie de marché de services ‘pour les conventions relatives aux activités d’emploi (visant l’accompagnement des demandeurs d’emploi), qui ont pour objet l’exécution d’un ensemble d’opérations réalisées dans une démarche intégrée et coordonnée, le cas échéant, avec des opérations de formation professionnelle et formation permanente’. Cette disposition constitue le fondement juridique en vertu duquel la mise en place d’un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi n’est actuellement pas possible en Région bruxelloise. La situation est différente en Flandre et en Wallonie, où un tel obstacle juridique est inexistant. Comme nous l’avons vu plus haut, la Flandre utilise souvent, dans la pratique, la formule des appels d’offres publics, alors que la Wallonie recourt exclusivement à des appels à projets pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi, tout comme Bruxelles donc. Deux motifs sont mis en avant pour justifier l’exclusion de la technique des marchés publics dans le cadre des actions d’accompagnement intégral. Premièrement, l’instrument de la subsidiation est préféré à l’instrument du marché public en raison de la caractéristique des parcours d’accompagnement intégral qui exigent une méthodologie et une expérience spécifiques. De tels critères ne se prêtent pas à un appel d’offres public. Deuxièmement, l’objectif est d’éviter une concurrence directe ou trop forte entre les acteurs commerciaux et non commerciaux sur le plan des prix. Un appel à projet sert davantage cet objectif, car le montant du subside est déterminé préalablement, indépendamment de la valeur économique du service, et les acteurs commerciaux seront donc moins tentés d’y participer. 17 Plan d’action stratégique pour le partenariat d’Actiris 2009-2010. Actiris: Département Partenariat et Réseau, 111 p. 18 Arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 28 février 2008 portant exécution de l’article 7 de l’ordonnance du 18 janvier 2001 portant organisation et fonctionnement de l’Office régional bruxellois de l’emploi. 37 Les appels à projets publiés en 2008 et 2009 relèvent de la catégorie de la subsidiation. En 2008, un appel à projets spécifique a aussi été lancé pour un partenariat d’adhésion avec les CPAS, avec cofinancement du FSE. Les appels à projets 2008 courent jusqu’en 2010. Les appels à projets 2009 concernant des contrats conclus à compter du 1 juillet 2009 courent sur une période de 2 ans et demi (jusqu’à la fin de l’année 2011). Ces appels à projets concernent: – des actions d’accompagnement de publics spécifiques (parcours complets); – des actions d’accompagnement à l’élaboration d’un projet professionnel; – des actions de recherche active d’emploi; – des actions d’accompagnement à la création de son propre emploi et; – des actions relatives à l’accueil des enfants de 0 à 3 ans de demandeurs d’emploi. De nouveaux appels à projets sont encore prévus pour la période à venir, notamment dans le domaine de la formation en alternance pour les jeunes. Conflits de rôle En matière de positionnement par rapport aux partenariats et de choix en faveur du mécanisme de subsidiation, Actiris se trouve dans une situation similaire à celle du Forem. Une des priorités stratégiques-organisationnelles fixées dans le Contrat de gestion conclu entre le Gouvernement bruxellois et Actiris, est la révision des programmes antérieurs, le but étant surtout de mettre en place un dispositif intégré pour les demandeurs d’emploi dans le cadre de l’accompagnement de parcours, avec des objectifs concrets pour chaque partenaire. A cet effet, il a été décidé de revoir les accords de collaboration existants, qui étaient déjà en place depuis longtemps, et de les ouvrir à de nouveaux opérateurs. Toutefois, le Gouvernement bruxellois impose des limites à l’ouverture en optant pour un mécanisme qui est moins susceptible d’intéresser les opérateurs commerciaux. La motivation avancée pour ne pas recourir à la formule de l’appel d’offres public pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi en témoigne (cf. supra). La justification du choix exclusif en faveur du mécanisme de subsidiation ne cadre pas avec le principe général de nondiscrimination et de concurrence égale. La préférence est donnée à la continuité, avec des partenaires connus ayant déjà l’expérience d’une méthodologie déterminée, plutôt qu’au renouvellement. Cela ne signifie pas que les accords sont ‘automatiquement’ renouvelés (comme c’était le cas auparavant). L’évaluation des dossiers introduits est confiée à un comité de sélection composé de représentants des différents services d’Actiris (Service Méthodes et Qualité, Service Partenariat, Observatoire de l’emploi, …); la décision est prise par le Comité de gestion. Le choix de l’instrument qu’est la subsidiation implique que les critères de sélection, et surtout l’octroi de points par critère, laissent davantage de possibilités 38 d’interprétation. Le fait de pouvoir apporter la preuve de l’expérience acquise dans le domaine faisant l’objet de l’appel à projets constitue, par exemple, toujours un des critères. Lors de l’attribution des projets, une marge de manœuvre est laissée pour la négociation sur les montants, les actions proposées et le nombre de participants. 3.4.2 Fixation des prix et financement lié au résultat Lors de chaque appel à projets, un prix moyen maximum est fixé dans le cahier des charges. Ce prix est calculé par Actiris sur la base des connaissances et de l’expérience du passé. Considérons, par exemple, l’appel à projets relatif à l’accompagnement de publics spécifiques. Pour ces actions, un coût moyen de 700 euros maximum par bénéficiaire est fixé à titre de subside annuel. Ce montant ne peut pas être purement et simplement comparé aux montants qui ont cours dans les autres régions. Pourquoi? Premièrement parce qu’il n’est pas prévu de financement pour la formation dans ce type d’actions (la formation ne relève d’ailleurs pas de la compétence d’Actiris). Ensuite parce que les promoteurs de projets peuvent compléter ce montant avec des moyens provenant d’autres sources de subsidiation. Les partenaires peuvent ainsi avoir recours à des agents contractuels subventionnés, de sorte qu’une partie du coût salarial à prendre en compte ne doit pas être répercutée dans le coût. Il faut donc faire preuve de prudence si l’on veut faire une comparaison avec les prix pratiqués en Flandre et en Wallonie. Le financement est, pour une partie des actions, lié à un cofinancement du FSE. C’est le cas pour les appels à projets ‘recherche active d’emploi’, ‘accompagnement à la création de son propre emploi’ et ‘accueil des enfants de 0 à 3 ans de demandeurs d’emploi’, et pour l’appel à projets spécifique relatif aux CPAS. Ceci impose des exigences spécifiques pour l’introduction et le suivi des dossiers. Pour les actions ‘accompagnement à l’élaboration d’un projet professionnel précis et réaliste’ et ‘accompagnement de publics spécifiques’, il n’est pas prévu de cofinancement du FSE. Les appels à projets actuels ne prévoient pas de financement lié au résultat. Ils précisent cependant le résultat à atteindre, qui est défini de manière spécifique selon les actions. Par exemple, pour l’accompagnement de publics spécifiques, sont considérés comme un résultat positif, soit une mise à l’emploi (dans le circuit normal ou dans une formule d’activation), soit l’intégration dans une formation (de 20 heures par semaine au moins), soit l’intégration dans un atelier de recherche active d’emploi. Ces résultats sont mesurés au cours de l’exécution du projet et sont pris en compte pour l’adaptation du contrat en cours et pour l’évaluation réalisée dans la perspective des appels à projets suivants. 39 3.4.3 Constitution du marché en développement Grâce aux appels à projets récents, Actiris dispose de quelque 140 partenariats. Il s’agit de partenaires actifs dans le domaine de la formation, de l’insertion socioprofessionnelle, de la recherche active d’emploi ou de l’accueil des enfants. Ces partenaires sont disséminés dans les dix-neuf communes de la Région bruxelloise. Il s’agit pour la grande majorité d’initiatives non commerciales émanant d’asbl. Les autres partenaires sont les dix-neuf CPAS. Les informations disponibles ne permettent pas de dire dans quelle mesure de nouveaux partenaires parviennent aussi à décrocher un contrat de partenariat. Peut-être s’agit-il plutôt de nouvelles initiatives émanant du réseau d’organisations existant. La part des organisations commerciales parmi les opérateurs sélectionnés est un bon indicateur. A ce jour, cette part est très limitée. Concrètement, il s’agit des entreprises de travail intérimaire Manpower et Daoust Intérim (Daoust est également impliquée, avec Actiris, dans le bureau d’intérim social Exaris) qui ont respectivement un contrat pour ‘la recherche active d’emploi’ (2008-2010) et pour ‘l’élaboration d’un projet professionnel’ (2009-2011). Le fait que l’accompagnement des demandeurs d’emploi ne puisse pas être organisé selon la technique des marchés publics est une raison importante qui explique l’absence presque totale des partenaires de type commercial. Les éléments qui sont habituellement présents dans un appel d’offres, font défaut dans les appels à projets: la concurrence sur base du prix (en plus de la qualité), la transparence de la procédure par le biais d’une publication préalable des critères de sélection et d’attribution du marché, le financement partiellement lié au résultat. Peut-être existe-t-il encore d’autres raisons qui font que les organisations commerciales ne participent pas aux appels à projets. On sait par exemple que les entreprises d’intérim sont moins intéressées lorsqu’il s’agit de groupes plus vulnérables, de budgets trop restreints ou d’appels à projets sur une trop petite échelle. 3.4.4 Résultats en matière de placement des demandeurs d’emploi Actiris et ses partenaires sont reliés par le biais d’un réseau informatique. Dès lors, les partenaires peuvent directement consulter les informations contenues dans la banque de données d’Actiris. Actiris assume le rôle de gestionnaire du parcours d’insertion et dispose d’informations continues sur les actions que les demandeurs d’emploi entreprennent auprès des partenaires. L’objectif est que ces informations soient aussi utilisées dans le cadre des rapports intermédiaires établis par les promoteurs de projets et à des fins d’évaluation. Les premières données relatives aux indicateurs - lesquels restent encore à préciser - ne sont pas encore disponibles pour l’instant. 40 4. Grand angle sur les évolutions à l’étranger Afin de pouvoir répondre à la question de savoir vers où la Belgique peut s’orienter dans le cadre du recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi, il est intéressant d’aller voir au-delà de nos frontières. En effet, d’autres pays européens ont acquis une expérience plus ou moins longue dans ce domaine. Parmi eux, deux pays ont traversé un processus d’apprentissage et évoluent progressivement vers un marché public plus ou moins mature: la Grande-Bretagne et les Pays-Bas. Le lecteur trouvera un commentaire détaillé de ces deux cas dans le premier et le deuxième article de cette série portant sur le recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi (Van Parys & Struyven, 2009a; 2009b). Dans le cadre du présent article, nous nous limiterons aux éléments qui sont essentiels pour alimenter le débat sur le recours par les pouvoirs publics au marché des opérateurs externes en Belgique. 4.1 Un démarrage identique … En 1998, l’année de l’accession au pouvoir du nouveau Gouvernement en GrandeBretagne, le parti travailliste a annoncé le lancement du programme New Deal (DWP, 2008a). Dans le cadre de cette nouvelle politique du marché de l’emploi, il a été décidé, pour certaines zones dans lesquelles l’opérateur public avait mauvaise réputation et/ou dans lesquelles le chômage atteignait des sommets, de faire appel à des acteurs privés dans l’espoir d’améliorer l’efficacité des services fournis aux demandeurs d’emploi, de manière à leur permettre d’accéder plus rapidement à l’emploi. Depuis, de nombreux programmes d’appels d’offres ont été lancés, en revoyant à chaque fois les choix au niveau de la conception. En 2008, exactement 10 années plus tard, le gouvernement travailliste a de nouveau annoncé une ‘major transformation’ de la politique du marché de l’emploi avec l’introduction du Flexible New Deal (DWP, 2007). Désormais, tous les demandeurs d’emploi qui ont été accompagnés pendant douze mois par le prestataire public Jobcentre Plus sans parvenir à un résultat positif, sont orientés vers les acteurs privés. Les demandeurs d’emploi pour lesquels il est constaté, à un stade précoce, qu’ils ont besoin un accompagnement supplémentaire intensif, sont aussi transférés vers ces partenaires. Le choix en faveur de la mise en place d’un marché public repose sur des considérations diverses: augmenter l’efficacité et l’efficience (‘value for money’) des prestataires tant publics que privés, accroître la liberté de choix des demandeurs d’emploi, augmenter la capacité à court terme et tirer profit des connaissances et de l’expertise des acteurs privés. L’expérience néerlandaise en matière de mise en place d’un marché public remonte à peu près aussi loin que l’expérience britannique. Là aussi, l’insatisfaction quant aux prestations de l’opérateur public et l’évolution vers une politique d’activation du marché de l’emploi ont été à l’origine des réformes. Au 41 début des années ‘90, le monopole sur le placement de travailleurs a été officiellement aboli, et le prestataire public de l’époque a commencé à faire appel à des opérateurs privés commerciaux et non commerciaux. Les principales réformes sont toutefois arrivées avec l’introduction de la loi SUWI, qui vise à promouvoir la réinsertion des demandeurs d’emploi. Ainsi a vu le jour un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi (appelé marché de la réinsertion aux Pays-Bas), marché qui se compose de deux segments. Le premier est le segment public avec, d’une part, les communes qui se chargent de l’activation des clients de l’aide sociale et des personnes non indemnisées et, d’autre part, l’UWV (au niveau national) qui assure l’activation des demandeurs d’emploi indemnisés. Le second est le segment privé où les employeurs sont responsables de la réinsertion de leurs travailleurs. Dans chacun de ces segments, des activités sont adjugées à des partenaires privés. Pour la comparaison avec la Belgique et la GrandeBretagne, nous nous limitons ici à une analyse du segment public au niveau national. Tout comme en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, la pression accrue dans le sens de l’activation des chômeurs est une des raisons importantes qui a motivé la décision de recourir à des opérateurs privés pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Belgique. Toutefois, contrairement à ce que l’on observe chez nos deux voisins, ce recours à des prestataires privés suscite chez nous, à ce jour, un débat animé. En effet, l’existence de services publics fortement développés et efficaces suscite la question de savoir si le prestataire privé est bien à même de proposer un accompagnement d’une qualité et d’une efficacité équivalentes. Bien que cette question soit légitime, il n’est en fait pas possible d’y apporter une réponse pour l’instant. Actuellement, l’évaluation comparée (benchmarking) des prestataires publics de différents pays ou des prestataires publics et privés d’un même pays, demeure une mission très complexe. De plus, une comparaison des performances des prestataires publics et privés ne peut générer des résultats fiables que si elle est réalisée à l’aide d’une expérience scientifiquement contrôlée. Des tentatives menées en la matière en Allemagne et en France (Behaghel et al., 2008) montrent qu’il est très compliqué de mettre ce contrôle en place dans un cadre réel.19 19 En l’occurrence, le problème crucial réside dans le fait que les demandeurs d’emploi doivent, idéalement, être orientés de manière aléatoire vers les prestataires publics et privés. En raison de considérations éthiques, les demandeurs d’emploi ne peuvent toutefois pas être contraints à se faire accompagner par un organisme qui leur est imposé. Un autre problème qui s’est posé dans le cadre de l’expérience française est que le groupe cible pour lequel les prestataires privés avaient développé des méthodes d’accompagnement ne correspondait pas au groupe cible finalement atteint. Le cadre expérimental lui- même peut aussi avoir des influences indésirables sur le comportement des acteurs concernés et compromettre ainsi la validité de l’expérience (Behaghel et al., 2008; Gurgand & Mériaux, 2009). 42 4.2 … mais des choix de conception radicalement différents Tant la Grande-Bretagne que les Pays-Bas ont acquis une longue expérience en matière de création d’un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Bien que ces deux pays aient opté pour un système de recours au marché à une période plus ou moins identique et avec des préoccupations similaires, les succès et les échecs enregistrés de part et d’autre ont conduit à un système de marché public qui repose sur des choix de conception radicalement différents. Ceci s’explique à la fois par des différences institutionnelles, politicoidéologiques et d’échelle, ainsi que par la dynamique entre les acteurs publics et privés dans les deux pays. Nous passons ci-après en revue les différences les plus importantes en matière de conception du système. 4.2.1 Scission donneur d’ordre - preneur d’ordre et répartition des tâches entre les prestataires publics et privés Une première différence importante réside dans la scission entre le rôle de preneur d’ordre et celui de donneur d’ordre. En Grande-Bretagne, ces rôles sont clairement scindés. Le ministère (Departement for Work and Pensions) assume l’organisation des appels d’offres, tandis que l’agence Jobcentre Plus est responsable de la prestation de services aux demandeurs d’emploi. Aux Pays-Bas, on parlait aussi, jusqu’il y a peu, de deux instances séparées: l’UWV se chargeait de l’organisation des appels d’offres pour les demandeurs d’emploi après six mois de chômage, tandis que les Centra voor Werk en Inkomen assuraient la prestation de services de base pour les demandeurs d’emploi au chômage depuis moins de six mois. Depuis la fusion de ces deux instances, qui forment désormais l’UWV Werkbedrijf, cette division singulière du groupe cible a été abandonnée. Le fait que les deux fonctions soient réunies offre désormais à l’UWV Werkbedrijf l’opportunité d’acheter aussi, le cas échéant, un parcours ou une prestation supplémentaire pour les demandeurs d’emploi récents. En Belgique, la scission entre donneur d’ordre et preneur d’ordre est réalisée au sein même du prestataire public, en ce sens qu’il est prévu un cloisonnement entre l’organisme public en tant qu’acteur, d’une part, et l’organisme public en tant que régisseur des appels d’offres, d’autre part. La question se pose toutefois de savoir si cela garantit une même indépendance que dans les modèles britannique et néerlandais. Dans tous les cas, dans le système néerlandais, lorsque le diagnostic indique qu’un parcours ou des services supplémentaires sont nécessaires, ces prestations sont, par définition, achetés à des contractants externes. En Belgique, la situation est différente. Chez nous, les services publics régionaux de l’emploi ont à chaque fois le choix, lors de l’orientation d’un demandeur d’emploi, d’opter pour des prestataires internes ou externes. En ce qui concerne la répartition des tâches, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas suivent plus ou moins la même voie. Ainsi, dans ces deux pays, les opérateurs 43 privés prennent en charge les demandeurs d’emploi nécessitant un accompagnement plus intensif. En Grande-Bretagne, il s’agit des demandeurs d’emploi qui ont été accompagnés pendant douze mois par le prestataire public Jobcentre Plus sans parvenir à un résultat positif ou qui ont été orientés à un stade précoce, via le système ‘fast track’, vers un accompagnement plus intensif (cf. infra). Aux Pays-Bas, le consultant dispose de différents instruments qui l’aident à décider si un demandeur d’emploi a ou non besoin de services supplémentaires ou d’un parcours d’accompagnement. L’UWV ne fournit pas lui-même ces services/parcours mais les achète auprès d’opérateurs privés. En Belgique, nous pouvons constater que les régions n’ont pas encore dégagé une vision claire de la répartition des tâches entre les opérateurs publics et privés. En la matière, on se base sur l’offre existante du service public et/ou des partenariats agréés, plutôt que de partir des groupes cibles comme dans les exemples étrangers. Les tâches et groupes cibles changent d’un appel d’offres/appel à projets à l’autre, et il n’y a que peu ou pas de débat public à ce sujet. 4.2.2 Fréquence et échelle des appels d’offres Nous constatons une deuxième différence importante en ce qui concerne un autre choix de conception crucial: la fréquence et l’échelle des appels d’offres. Avec la nouvelle ‘Commissioning Strategy’ dans le cadre du Flexible New Deal, le Gouvernement britannique entend désormais conclure des relations stratégiques de longue durée avec une poignée d’opérateurs importants. Ceci se traduit par le choix de contrats de longue durée (5 ans, avec extension possible à 7 ans) pour de grandes régions et pour un grand nombre de demandeurs d’emploi (entre 4 000 et 7 000 environ par an et par prestataire) (DWP, 2008b). Aux Pays-Bas, on travaille aujourd’hui avec un cadre d’achat unique. Sur cette base, l’UWV peut conclure trois fois par an des ‘contrats d’accès’ (‘toegangsovereenkomsten’) sur 3 ans qui visent la mise en œuvre de ‘clusters’ de prestations bien définis par région ou district (lesquels sont inévitablement plus petits que les régions britanniques) (UWV, 2009). Tous les prestataires privés qui satisfont aux exigences préalablement définies peuvent poser leur candidature en permanence. Alors que les contractants privés en Grande-Bretagne sont certains de disposer d’un nombre minimum de demandeurs d’emploi à accompagner, il n’y a aux Pays-Bas aucune garantie quant au nombre de demandeurs d’emploi qui seront adressés aux opérateurs. En Grande-Bretagne, tout demandeur d’emploi au chômage depuis douze mois minimum est orienté vers un opérateur privé. Aux Pays-Bas, cette orientation se fait au cas par cas selon l’avis du coach UWV et sur la base de directives prescrites mais flexibles. Les services ou parcours de réinsertion sont achetés en principe pour des demandeurs d’emploi assez éloignés du marché du travail, qui ont une chance réelle d’accéder à un emploi salarié dans un délai d’un an. 44 En ce qui concerne la fréquence et l’échelle des recours au marché, la Belgique est encore loin des cas britannique et néerlandais où l’appel d’offres est pour ainsi dire devenu la procédure consacrée pour une partie des prestations classiques. En Flandre, la technique de l’appel d’offres est toujours utilisée sur une base ad hoc et additionnelle, pour de petits volumes et sans vision claire de la voie à suivre après les premières expériences. En Wallonie, on peut parler d’une certaine régularité (programmation sur 3 ans) mais là aussi, les budgets restent limités. A Bruxelles, enfin, on peut dire que le recours au marché des opérateurs n’en est encore qu’à ses balbutiements. 4.2.3 Orientation et liberté de choix du demandeur d’emploi Un autre paramètre important est l’orientation des demandeurs d’emploi et la liberté de choix desdits demandeurs d’emploi chez nos deux voisins. En GrandeBretagne, le rôle du consultant public dans l’orientation est limité étant donné que chaque demandeur d’emploi qui a été accompagné pendant douze mois par JCP sans parvenir à un résultat positif est immédiatement orienté vers un prestataire privé. Les consultants publics disposent d’un pouvoir de décision plus grand dans la désignation des demandeurs d’emploi pouvant bénéficier du système ‘fast track’. Il s’agit de demandeurs d’emploi pour lesquels il est constaté, dès la phase initiale, qu’ils ont besoin d’un accompagnement plus intensif. Ils sont d’emblée intégrés dans la dernière phase assurée par JCP (phase 3) et sont donc plus rapidement orientés vers les prestataires privés (phase 4). La possibilité de choisir un prestataire de services est quasi20 inexistante en Grande-Bretagne. En effet, le consultant doit orienter le demandeur d’emploi vers le prestataire de services avec lequel un contrat a été conclu pour la région concernée. En ce qui concerne le contenu du parcours à suivre, le prestataire privé le définit idéalement en concertation avec le demandeur d’emploi. C’est effectivement, dans la plupart des cas, l’approche qui est adoptée par les prestataires de services. La réglementation dispose toutefois que chaque demandeur d’emploi britannique doit participer à ‘une activité à temps plein obligatoire et liée à l’emploi’ (activité d’une durée d’un mois). Aux Pays-Bas, les consultants publics (appelés ‘werkcoaches’) décident, sur la base d’un bilan préliminaire, si les demandeurs d’emploi ont besoin de services 20 Dans les zones dans lesquels le DWP a conclu un contrat avec non pas un mais deux prestataires privés, les demandeurs d'emploi seront orientés de manière à ce que le marché soit réparti à 50-50. A compter du mois d’octobre 2010, à savoir un an après l’entrée en vigueur de la 'Commissioning Strategy', les demandeurs d’emploi ne seront plus orientés selon une répartition 50-50, et l’orientation sera réalisée sur la base du système ‘Star Rating’ qui permet de faire une évaluation des prestataires de services. Plus les résultats du prestataire seront bons, plus élevé sera le nombre de demandeurs d’emploi qui lui seront adressés jusqu’à ce qu’on parvienne à une répartition maximale du marché à raison de 70-30 à long terme (60-40 au cours des trois premières années). Un des critères pour le système ‘Star Rating’ est la satisfaction des clients. En ce sens, les demandeurs d’emploi ont un impact indirect sur le choix en faveur de tel ou tel prestataire de services. 45 supplémentaires ou d’un parcours. Si c’est le cas, ils achètent ceux-ci auprès des acteurs privés. Idéalement, le consultant consulte le demandeur d’emploi sur les services à mettre en œuvre et sur l’acteur privé auprès duquel ces services seront achetés. Lors du recours à un opérateur privé, les consultants semblent se baser surtout sur leur propre expérience ou celle de leurs collègues directs. Ils peuvent également consulter certaines banques de données à cet effet (IWI, 2007). En principe, les prestataires de services peuvent refuser des demandeurs d’emploi, mais les renvois de ce type font l’objet d’un suivi de manière à éviter que ceci n’engendre des excès. La liberté de choix du demandeur d’emploi aux Pays-Bas peut toutefois être beaucoup plus grande. Le gouvernement néerlandais a en effet décidé de compléter le modèle de l’appel d’offres, tel que nous l’avons décrit jusqu’ici, par un ‘modèle des chèques’ (Van Parys & Struyven, 2009b). Dans ce système, les demandeurs d’emploi qui sont considérés comme suffisamment autonomes et dont on prévoit qu’ils pourront être réinsérés rapidement, ont l’opportunité de conclure un contrat individuel de réinsertion (IRO) auprès d’un prestataire privé de leur choix. A cet effet, le demandeur d’emploi dispose d’un budget (s’élevant à 4 000 euro, et à 5 000 euro pour les demandeurs d’emploi présentant une maladie ou un handicap) qui peut être utilisé pour un parcours de son choix. Les prestataires de services peuvent en principe refuser des demandeurs d’emploi. En Belgique, enfin, différentes pratiques ont cours. La pratique flamande s’apparente à l’approche britannique et néerlandaise: l’orientation des demandeurs d’emploi est réalisée par le prestataire public. Notons cependant que les directives relatives à l’orientation sont beaucoup moins claires. En Wallonie et à Bruxelles, par contre, il incombait initialement aux prestataires privés eux-mêmes d’attirer les demandeurs d’emploi. Plus récemment, nous avons constaté que cette pratique est maintenant complétée par une orientation assurée par le Forem. En ce qui concerne l’augmentation de la liberté de choix du demandeur d’emploi, nous pouvons constater que cet aspect n’est pas un motif nettement invoqué en Belgique pour justifier l’implication d’opérateurs privés. Une certaine marge de choix est toutefois implicitement prévue dans les appels au marché. Ainsi, le fait que les prestataires privés en Wallonie et à Bruxelles recrutent eux-mêmes les demandeurs d’emploi implique que ceux-ci peuvent personnellement choisir leur interlocuteur. 4.2.4 Financement D’autre part, nous constatons en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas des différences importantes en matière de financement des prestataires contractants. Le chiffre d’affaires des opérateurs privés en Grande-Bretagne est connu à l’avance puisque le volume de demandeurs d’emploi à accompagner est garanti. Ceci doit toutefois être nuancé en raison du fait que le financement est fortement lié au résultat. Vingt pour cent du financement est payé au titre d’acompte pour les services à fournir. Les 80% restants ne sont versés que si le demandeur d’emploi accède 46 effectivement à l’emploi (50% pour un emploi de courte durée et 30% si le demandeur d’emploi a travaillé durant au moins 26 semaines sur une période de 30 semaines à raison d’au moins 16 heures/semaine). Aux Pays-Bas, un système de ‘no cure less pay’ est également utilisé mais pas pour chaque prestation de services. Le rapport est en principe de 60-40% (moyens – résultat) mais est porté à 80-20% pour les demandeurs d’emploi très difficiles à placer. Dans le cas des IRO, il s’agit d’un rapport de 50-50%, avec également un assouplissement à 80-20% pour les personnes très difficiles à placer. Afin d’encourager les prestataires privés à placer les demandeurs d’emploi dans un laps de temps aussi court que possible et sous contrat de longue durée, la rémunération de ces prestations est majorée par le biais d’une augmentation de 10% à la facturation. De plus, les prestataires de services peuvent bénéficier de deux types de bonus. Le ‘schadelastbonus’ est accordé lorsque la personne ne perçoit plus d’allocation après son placement, et un ‘plaatsingbonus+’ est octroyé lors du placement d’un demandeur d’emploi de plus de 45 ans. Il convient de souligner que la formation n’est rémunérée, ni en Grande-Bretagne ni aux PaysBas, dans le cadre de ce financement. Ces deux pays disposent pour la formation de budgets spécifiques pour lesquels il faut faire une demande séparée. Notons aussi que la Grande-Bretagne, qui dispose tout de même d’une grande expérience en matière d’appels d’offres, ne pratique pas non plus de différenciation des prix. Ceci est regrettable car une telle différenciation constitue un incitant pour encourager les opérateurs à investir une énergie suffisante dans les demandeurs d’emploi plus difficiles à placer (Interview WorkDirections, 14 avril 2009, Londres). Il n’est pas exclu qu’une différenciation des prix puisse encore être envisagée à l’avenir. Différentes techniques sont suggérées à cet effet (Van Parys & Struyven, 2009a). En Belgique aussi, le financement basé sur les résultats obtenus (‘outcomes’) est de plus en plus utilisé. Les trois régions du pays ne sont toutefois pas aussi avancées en la matière. Tant la Flandre que la Wallonie utilisent le financement lié au résultat, tandis que ce n’est pas encore le cas à Bruxelles. Cependant, aucune des deux régions ne pratique une différenciation systématique du prix en fonction du groupe cible ou de l’instrument utilisé. La Wallonie applique certes une différenciation pour les normes de résultat. Celles-ci sont adaptées en fonction du degré de difficulté du groupe cible et en fonction des actions mises en œuvre. 4.3 Conséquences sur le développement du marché public Nous pouvons dire que le marché qui s’est développé en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas est désormais plus ou moins mature. Les modifications récemment intervenues dans ces deux pays peuvent encore sans aucun doute engendrer des évolutions sur ces marchés à l’avenir. Aujourd’hui, nous constatons en tout cas ce qui suit. 47 Le marché qui se met en place en Grande-Bretagne à la suite de la nouvelle Commissioning Strategy est un marché détenu par un nombre limité de gros opérateurs privés commerciaux. Il s’agit des opérateurs qui ont remporté l’appel d’offres pour l’accompagnement de 4 000 à 7 000 demandeurs d’emploi par an et par zone contractuelle. Cela est moins évident pour les acteurs non commerciaux étant donné que souvent, ils ne peuvent pas s’appuyer sur des ressources financières provenant d’autres activités ou de prêts. Par conséquent, ils ne peuvent pas assumer les risques afférents à ces contrats volumineux. Les opérateurs de plus petite taille et non commerciaux ne disparaissent toutefois pas du marché. Pour les contractants principaux, il est quasi impossible d’assurer l’accompagnement de tous les demandeurs d’emploi. Dès lors, ils sous-traitent à leur tour à un nombre important de petits opérateurs privés commerciaux, mais surtout non commerciaux. Il incombe aux contractants principaux de veiller à ce que l’ensemble de la chaîne des prestations atteigne les résultats préalablement définis, que les relations avec les ‘sous-contractants’ puissent reposer sur la confiance mutuelle et que les risques financiers soient répartis de manière réaliste entre les contractants principaux et les sous- contractants. Les petits opérateurs restent sceptiques et se demandent dans quelle mesure une telle relation pourra se mettre en place (Interview Association of Chief Executives of Voluntary Organisations, 15 avril 2009, Londres). Les gros opérateurs, quant à eux, ne sont pas satisfaits des prix pratiqués, qu’ils estiment trop bas au regard des prestations à fournir (Interview WorkDirections, 14 avril 2009, Londres; House of Commons, 2009). Il n’est donc pas exclu que de nouvelles modifications soient apportées au modèle de l’appel d’offres à l’avenir, surtout dans le contexte de la crise actuelle. Etant donné que les choix de conception qui sont privilégiés aux Pays-Bas sont pour ainsi dire à l’opposé de ceux de la Grande-Bretagne, on peut s’attendre à voir se développer dans ces deux pays un marché totalement différent. Et c’est effectivement le cas. Le marché néerlandais offre encore de l’espace pour de très nombreux prestataires privés commerciaux, tant de grande que de petite taille (Veerman et al, 2008). Les acteurs non commerciaux sont quasiment absents. Ces opérateurs se chargent de quelque 140 demandeurs d’emploi par an en moyenne. Sur le marché IRO, la taille des acteurs est encore plus réduite: ils assurent en moyenne l’accompagnement de 44 demandeurs d’emploi seulement. De plus, le marché IRO se compose surtout d’opérateurs récents: plus de 70% d’entre eux sont actifs depuis moins de 4 ans. Alors qu’en Grande-Bretagne, les pouvoirs publics ont explicitement décidé de confier une part déterminée du marché aux acteurs privés, nous constatons aux Pays-Bas une tendance à la contraction du marché à la suite d’une mise en œuvre plus sélective des parcours et d’un renforcement du rôle des coaches UWV dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi. La crise pourrait mettre un terme à cette contraction. Les prix sur le marché néerlandais se trouvaient dans une spirale descendante. L’introduction de l’IRO a toutefois pu casser cette tendance, avec comme conséquence le retour de prix acceptables. La concurrence sur les prix augmente en raison de la combinaison entre 48 accroissement du nombre d’opérateurs et contraction du marché. Dans le même temps, la pression dans le sens d’une amélioration de la qualité s’intensifie. En Belgique, enfin, nous ne pouvons pas encore vraiment parler d’un nouveau segment de marché pour les prestataires commerciaux et non commerciaux. La formation du marché reste pour ainsi dire confinée dans le cadre d’un système de subsidiation. L’expérience de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas montre que si les régions belges veulent pouvoir s’appuyer sur un marché concurrentiel et varié, où les connaissances et l’expertise des prestataires privés sont pleinement exploitées, il conviendra de concilier les exigences suivantes (cf. supra): – les barrières à l’entrée (exigences en matière de capacité financière, d’expérience et de qualité) doivent être suffisamment basses sans pour autant que cela compromette la qualité des prestations; – les appels d’offres doivent être organisés à une fréquence suffisante, de telle sorte que le marché puisse s’ouvrir à de nouveaux acteurs, et ce d’une manière telle que la continuité des prestations ne soit pas compromise; – le financement des prestations doit être proportionnel au coût réel et doit prévoir des incitants pour encourager les opérateurs à fournir des prestations de qualité pour tous les demandeurs d’emploi (au moyen d’obligations de résultat et d’une différenciation selon le degré de difficulté que présente le demandeur d’emploi); – les demandeurs d’emploi jouissent de préférence d’une certaine liberté de choix de telle sorte qu’une offre sur mesure puisse leur être proposée, sans toutefois les priver de l’accompagnement nécessaire dans un tel choix. Dans le prochain chapitre, nous expliquerons plus concrètement les défis que les régions belges doivent relever. Dans le tableau ci-dessous, nous résumons les principales différences et analogies en matière d’appels d’offres en Belgique, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. Tableau 4 Comparaison interrégionale et internationale des choix de conception dans le cadre de l’implication d’opérateurs privés pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi Flandre (VDAB) Scission donneur d’ordre – preneur d’ordre Répartition des tâches entre le privé et le public Organe d’orientation Wallonie (Forem) Bruxelles (Actiris) Grande-Bretagne (Department for Work and Pensions et Jobcentre Plus) Pays-Bas (UWV WERKbedrijf) Donneur d’ordre au sein du VDAB Donneur d’ordre au sein du Forem Pas de scission Donneur d’ordre en dehors de JCP Donneur d’ordre au sein de l’UWV Sur la base de l’offre existante, variations d’un appel d’offres à l’autre Service public Sur la base de l’offre existante + partenaires agréés Sur la base de l’offre existante + partenaires agréés Sur la base du groupe cible (après douze mois + ‘fast track’) Recrutement par les prestataires, et aussi depuis peu par le service public dans le cadre d’un partenariat Choix limité Service public Sur la base du groupe cible (tous les demandeurs d’emploi pour lesquels un parcours/module est jugé nécessaire) Service public ou demandeur d’emploi dans le cas de l’IRO Choix limité Vaste choix Financement sur base des services fournis (output) plutôt que sur base du résultat (outcome) (remboursement de tout ou partie du subside) Activités additionnelles Forme extrême (80%-20%) - 60%-40% (20%-80% pour les demandeurs d’emploi très difficiles à placer) - 50%-50% pour l’IRO (20%-80% pour les demandeurs d’emploi très difficiles à placer) Tous les demandeurs d’emploi pour lesquels un parcours/ module est jugé nécessaire Choix pour le demandeur d’emploi Financement basé sur le résultat Choix limité Recrutement par les prestataires, et aussi depuis peu par le service public Choix limité En augmentation (40%) En augmentation (30%) Échelle Appels d’offres ad hoc, activités additionnelles Activités spécifiques, additionnelles Tous les demandeurs d’emploi comptant plus de douze mois de chômage Source: HIVA 49 50 5. Principaux problèmes et défis pour les régions belges Que nous enseignent les évolutions à l’étranger sur la situation dans notre propre pays? Chaque pays connaît un contexte et des antécédents qui lui sont propres. Il serait par trop naïf de croire qu’il existe des recettes prêtes à l’emploi pour la mise en place d’un marché public et qu’il suffirait de faire un copier-coller. Pourtant, il est important de ne pas fermer les yeux sur ce qui se fait dans les autres régions de Belgique et dans d’autres pays. Ce qui s’y passe peut en effet être considéré comme un laboratoire dont nous pouvons tirer des enseignements pour notre propre usage. Plutôt que de cultiver notre propre ‘jardin expérimental’, nous avons privilégié dans le cadre de cet article la perspective du grand angle pour analyser les bonnes pratiques de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas. Maintenant, nous allons à nouveau faire un zoom sur les trois régions de Belgique et nous demander où se situent les principaux problèmes et défis à l’issue des premières expériences visant à impliquer les opérateurs privés. 5.1 Des similitudes dans les différences Au pays des ‘tenders’ et des ‘appels à projets’, ce qui frappe d’abord, c’est que la Flandre, la Wallonie et Bruxelles utilisent des instruments différents pour impliquer les acteurs privés. Ces instruments différents reflètent des choix différents en ce qui concerne toute une série d’aspects: importance de la concurrence sur les prix, degré de transparence dans la sélection des prestataires, poids de l’expérience et de l’expertise déjà acquises, degré d’autonomie dans l’exécution, importance des résultats à atteindre et proportion du financement lié aux résultats obtenus. En dépit de l’utilisation d’instruments différents, on peut par ailleurs détecter des tendances communes dans les choix de conception: les achats portent non seulement sur des modules mais également sur des parcours complets, il y a une plus grande transparence dans les nouveaux contrats, les contrats ne sont pas automatiquement renouvelés, une plus grande importance est accordée à la mesure des résultats, une partie du financement dépend du résultat atteint. – Notons aussi que l’application du modèle de l’appel d’offres en Flandre est encore assez proche de la pratique de l’appel à projets en Wallonie et à Bruxelles. – En Flandre, la distinction de principe entre l’appel d’offres et la sous-traitance est ramenée à la différence juridique entre suivre ou non une procédure de marchés publics. Ainsi, la description des missions est toujours très détaillée, les missions visées dans les appels d’offres restent purement additionnelles, les appels d’offres restent fragmentés et d’une ampleur limitée, les coûts sont déterminés sur la base de calculs budgétaires, des conditions de qualité sont imposées et les obligations de résultat sont calquées sur celles du service public. 51 – Le recours aux appels à projets plutôt qu’aux appels d’offres en Wallonie et à Bruxelles crée un obstacle supplémentaire à l’entrée de nouveaux opérateurs privés. La raison est double. Premièrement, un appel à projets se prête plus facilement à la fixation et à l’évaluation de critères en matière d’expertise, de méthodologie et d’expérience spécifiques. Deuxièmement, un appel à projets implique que le prix est moins un élément de concurrence. Ces éléments peuvent dissuader les nouveaux entrants en général, et les opérateurs commerciaux en particulier, de soumissionner. Pour lever cet obstacle, l’introduction d’un instrument d’appel d’offres est nécessaire. Toutefois, cela ne constitue pas une condition suffisante. Les choix posés dans les appels d’offres en Flandre sont tels qu’ils constituent, à leur tour, un obstacle supplémentaire à l’accès de nouveaux opérateurs privés. La présence des acteurs commerciaux sur le marché en développement dans les différentes régions le prouve. En dépit du modèle de l’appel d’offres, la Flandre compte à peine plus d’entreprises privées que la Wallonie parmi les prestataires avec lesquels elle conclut un contrat. 5.2 Principaux problèmes et défis Ceci nous permet d’identifier les principaux problèmes suivants: – un développement difficile du marché; – une absence d’objectifs univoques en matière de fonctionnement du marché et une confusion des formes de recours aux opérateurs; – une description de la mission, des critères de sélection, une formation des prix et une mesure du résultat selon le modèle du prestataire public. Ces principaux problèmes et les défis qui en résultent sont communs aux trois régions de notre pays. Nous détaillons ces points ci-dessous. 5.2.1 Un développement difficile du marché Le bilan des premières expériences d’appel aux acteurs privés commerciaux n’est pas très concluant. Le nouveau marché ne se développe que dans une mesure limitée. Le nombre de nouveaux acteurs n’augmente guère. Certains opérateurs abandonnent même la partie. Le système actuel d’appels d’offres ou appels à projets est au moins en partie responsable de cette situation. Plusieurs aspects de la manière dont sont conçus les appels aux opérateurs suscitent un certain mécontentement sur le marché: volumes trop faibles; description trop limitative des missions; fragmentation des appels d’offres/à projets (appels ad hoc; allotissement sur des territoires réduits); manque de continuité dans la politique visant à mettre en place le recours au marché; pression trop forte sur les prix (e.a. par la pratique de prix indicatifs qui fonctionnent finalement comme des forfaits); 52 la formule de gestion et de financement axés sur le résultat; l’influence parfois forte exercée par le donneur d’ordre sur le contenu et les méthodes. L’approche actuelle présente donc de sérieuses carences. De ce fait, le nombre d’acteurs qui décrochent risque d’augmenter, et le potentiel des acteurs privés commerciaux est largement sous-utilisé. Et, par voie de conséquence, l’objectif d’élargir l’offre de parcours d’accompagnement et d’améliorer les résultats – en termes de placement des demandeurs d’emploi et d’accroissement des compétences – se trouve compromis. Jusqu’ici, il n’entre pas explicitement dans le rôle du régisseur de favoriser le développement du marché et de bien organiser ce marché. A cet égard, l’implémentation actuelle du rôle de régisseur ne favorise pas vraiment le fonctionnement du marché. C’est le cas en Flandre, mais aussi en Wallonie et à Bruxelles où la mission du régisseur est entièrement définie en termes des stimulation des partenariats. Le premier défi des régisseurs du marché de l’emploi dans notre pays consiste à élaborer une approche permettant de combiner simultanément les avantages de bonnes relations de collaboration et de relations de marché saines. En termes de types d’opérateurs, cela signifie un mix d’opérateurs de grande et de petite taille, commerciaux et non commerciaux, dans le cadre d’une répartition claire des tâches avec le service public de l’emploi et d’une stratégie politique cohérente en matière de constitution d’un marché public. 5.2.2 Absence d’objectifs univoques en matière de fonctionnement du marché et confusion des formes de recours aux opérateurs Dans la pratique actuelle du VDAB, du Forem et d’Actiris, on ne voit plus très clairement quel est l’objectif qui est poursuivi dans le cadre du recours au marché des prestataires privés. Si nous considérons la pratique dans les régions belges jusqu’à ce jour, nous constatons qu’il faut reconsidérer l’objectif du fonctionnement du marché. Contrairement à ce que l’on observe pour les organisations de type marchand, l’initiative privée des organisations non marchandes est depuis longtemps impliquée dans la réalisation de tâches financées par le public. Par le biais de la régulation, de la planification et du financement, ces organisations sont devenues l’’agent d’exécution’ des pouvoirs publics. Sous l’influence d’une pression plus forte sur le plan politique et sur le plan des performances, et sous l’influence aussi de la politique de concurrence, on a débloqué de manière croissante des flux de financement – d’où l’augmentation du recours à la sous-traitance ou aux appels d’offres. C’est aussi ce qui a guidé le VDAB, le Forem et Actiris dans le cadre du recours à des organisations non commerciales. Actuellement, on peut distinguer grosso modo trois formes d’appel au marché (nous ne prenons pas en compte ici les formes de cofinancement telles qu’elles existent en Wallonie et à Bruxelles): 1. dans le cadre de la subsidiation d’initiatives agréées ou non agréées (par exemple FSE); 53 2. dans le cadre du recours à la sous-traitance par les services régionaux de placement: il s’agit ici de missions décrites de manière précise et d’une ampleur limitée, comme des missions de formation; 3. et enfin dans le cadre du recours à des appels d’offres pour des parcours d’accompagnement complets. Dans les deux premières formes, il s’agit en général uniquement d’organismes tiers non commerciaux; la troisième forme est nouvelle et s’adresse en premier lieu aux opérateurs commerciaux, sans toutefois exclure les opérateurs non commerciaux. La première forme peut aussi en principe être accessible aux opérateurs commerciaux, comme le montre la pratique du côté francophone. Le problème est que les différentes formes s’entremêlent et que la distinction initiale s’estompe. Le principe qui devrait s’appliquer ici, c’est celui qui consiste à choisir la forme qui colle le mieux aux objectifs poursuivis. Ainsi, le VDAB utilise la même formule de ‘tendering’ pour la subsidiation d’organismes tiers avec des fonds du FSE que pour la conclusion de contrats avec des entreprises commerciales pour l’accompagnement de demandeurs d’emploi dans le cadre du Plan d’emploi pour les jeunes ou du projet pour les centres urbains. Le VDAB ne jure pour ainsi dire que par une seule et même forme de recours au marché (l’instrument des appels d’offres), indépendamment du type de fonctionnement du marché et du type d’acteurs qui sont visés. Le principe initial du tendering - la mise en place d’un marché public avec peu de barrières à l’entrée pour les nouveaux acteurs - est donc altéré. Le Forem et Actiris appliquent, eux aussi, une seule et même formule, à savoir la subsidiation, pour des pratiques différentes. L’appel aux opérateurs du marché demeure donc sous-utilisé. En ce qui concerne Actiris, l’arrêté récent du Gouvernement de la Région de BruxellesCapitale (28/02/2008) prévoit que les appels d’offres sont exclus pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. D’autre part, les choses sont présentées comme si les acteurs commerciaux et non commerciaux étaient concurrents, alors que leur complémentarité est beaucoup plus importante. Cela nécessite une plus grande différenciation dans les appels au marché, en tenant compte des segments et spécialisations existant sur le marché. Prenons des missions très spécialisées, par exemple des actions de formation spécialisées qui exigent de gros investissements de départ, des actions d’alphabétisation ou des programmes d’activation pour des groupes cibles très spécifiques. Les exemples de ce type requièrent des actions ciblées pour lesquelles il faut des appels au marché adaptés qui sont susceptibles de toucher les prestataires spécialisés. Un domaine typique est le programme FSE. Celui-ci n’est pas vraiment à sa place dans les appels d’offres du VDAB. Ce programme de subsidiation n’a pas grand-chose à voir avec le fonctionnement du marché à proprement parler. Pourtant, c’est la forme de l’appel d’offres que l’on utilise actuellement en Flandre pour ce programme, et il s’agit du principal appel d’offres en termes financiers. 54 Le deuxième défi ne consiste donc pas à appliquer le modèle de l’appel d’offres sans distinction. Le défi est, lors de la mise en œuvre des différents instruments, de bien réfléchir aux choix à faire en fonction de la vision du fonctionnement du marché qui les sous-tend. Il y a là une tâche importante pour le régisseur. 5.2.3 Description de la mission, critères de sélection, fixation des prix et mesure du résultat selon le modèle du prestataire public Actuellement, les opérateurs ont trop peu d’opportunités d’investir, de se spécialiser et d’exploiter l’expérience et les savoirs acquis. Cette situation est notamment due au fait que les missions sont décrites de manière trop limitative et trop prescriptive. Ceci est en contradiction avec le principe du fonctionnement du marché qui veut que les directives de l’ensemblier-donneur d’ordre portent plus sur les résultats à atteindre que sur le processus d’accompagnement en lui-même. C’est pourquoi, il convient de décrire uniquement en termes globaux les missions d’accompagnement pour les groupes cibles qui ont été délimités. Dans les applications actuelles du modèle de tendering en Flandre, on observe un mélange de mécanismes de stimulation qui s’adressent aux services publics dans le cadre du contrat de gestion et de mécanismes de stimulation qui s’adressent aux prestataires dans le cadre des appels d’offres. Ce mélange n’est pas souhaitable, car cela enferme les prestataires privés a priori dans un cadre de référence pour la fixation des prix et l’évaluation des résultats, cadre qui ne tient pas compte des exigences spécifiques de la mission. C’est en particulier le cas au VDAB. Tout d’abord, le VDAB utilise des prix indicatifs qu’il mentionne dans les appels d’offres. Ces prix indicatifs sont calculés sur base de l’estimation faite par le VDAB du temps nécessaire à la réalisation de la mission, ce qui fait qu’ils sont trop bas. Pourtant, dans un système de marché, il faut que la fixation des prix soit initiée par le marché afin que les prix soient suffisamment élevés pour permettre au marché de se développer. Il en va de même pour l’évaluation et l’appréciation des résultats. Dans un système de marché, le principe est qu’une partie du financement est fonction du résultat obtenu, tel qu’il est défini dans le contrat avec le prestataire. Cela place le débat (flamand) sur le respect ou non de la norme d’insertion sous un jour nouveau. Tout d’abord, la part du financement basé sur le résultat dans le ‘tendering’ (VDAB) et dans la subsidiation de projets (Forem) évolue pour atteindre respectivement 40% et 20-30% du prix total. La part liée au résultat est fonction du pourcentage de demandeurs d’emploi pour lesquels tel résultat déterminé a été atteint. Au VDAB, la norme d’insertion est actuellement basée sur les normes du contrat de gestion, lesquelles sont fixées sur la base des prestations réalisées dans le passé par le service public pour des (groupes de) demandeurs d’emploi. On suggère ainsi une comparaison avec les prestations du service public, comparaison qui n’est en fait pas juste. La manière actuelle de travailler avec des normes 55 d’insertion prévues dans les appels d’offres n’est pas correcte tant que ces normes ne sont pas adaptées en fonction des missions et groupes cibles spécifiques concernés dans les appels d’offres. Plus encore, la définition même de la notion de résultat est aussi purement et simplement empruntée au contrat de gestion. Dans ce domaine, la pratique adoptée au Forem témoigne d’une plus grande différenciation des résultats en fonction des objectifs et des groupes cibles des actions. Ainsi, dans les appels à projets visant des personnes difficiles à placer, le résultat est défini d’une manière plus large qu’une sortie vers l’emploi. Indépendamment de la définition du résultat et de la norme à atteindre, la question se pose de l’opportunité de travailler avec des normes d’insertion imposées unilatéralement par le donneur d’ordre. En effet, le principe du système de marché est que l’on rémunère les résultats effectivement obtenus par le prestataire au moyen d’une rétribution dont le pourcentage est fixé en fonction du degré de difficulté du groupe cible. Ce principe n’est pas seulement plus clair, il est aussi plus simple. Cela rend superflue la pratique qui consiste à travailler avec des normes d’insertion fixées à l’avance dans les appels d’offres, sans bien entendu pour autant renoncer au principe du financement basé sur le résultat. Cette approche de l’implémentation du rôle de donneur d’ordre est fortement inspirée par le souci de maîtriser les risques potentiels liés à la conclusion de contrats avec des partenaires externes. Le troisième défi, dans le cadre de l’implémentation du rôle de donneur d’ordre, consiste en premier lieu à bien soupeser, pour chaque choix de conception, les avantages et désavantages potentiels pour un marché à développer et, dans un second temps seulement, à se focaliser sur les risques. 5.3 Conclusions La formulation de ces trois défis nous amène au terme de notre tour d’horizon. Il n’est pas inutile de le souligner une fois encore: il n’est pas aisé de tracer la voie à suivre pour les trois régions belges. Il conviendra d’abord de partir de leur contexte politico-institutionnel propre et du marché public qui existe déjà en Belgique. Tout en étant conscient de cette importance du contexte, il faudra ensuite tenir compte des leçons suivantes tirées des expériences britannique et néerlandaise: 1. il est préférable de sortir de la phase des appels au marché limités et morcelés et d’opter résolument à l’avenir pour le système de marché public, et ce pour un groupe suffisamment important, et de préférence clairement délimité, de demandeurs d’emploi; 2. le marché est organisé sur la base de relations de concurrence saines et d’une complémentarité entre les acteurs commerciaux et non commerciaux; 3. les prix reflètent le coût réel et sont différenciés en fonction du degré de difficulté présenté par les demandeurs d’emploi, et ce afin d’inciter les 56 opérateurs à investir suffisamment d’énergie dans les demandeurs d’emploi plus difficiles à placer; 4. le demandeur d’emploi a la possibilité de choisir parmi les services fournis et même parmi les prestataires: en ce sens, le système de marché peut augmenter l’implication et la responsabilisation des demandeurs d’emploi et le travail individuel sur mesure, à condition qu’une variété suffisante soit instaurée dans l’offre de services et sur le marché des opérateurs. Ces conclusions sont développées dans le cinquième article, à savoir la note de recommandations (Struyven & Van Parys, 2009). 57 Bibliographie Behaghel L., Crépon B., Guitard J. & Gurgand, M. (2008), Evaluation d’impact de l’accompagnement des demandeurs d’emploi par les Opérateurs Privés de Placement et le programme Cap Vers l’Entreprise (Rapport Intermédiaire), Paris, 69 p. De Cuyper P., Struyven L. & Vanhoren I. (2005), Private bedrijven in het arbeidsmarktbeleid. Ervaringen met marktwerking in Nederland en Groot-Brittannië vanuit het perspectief van de private sector, HIVA-K.U.Leuven, Leuven, 138 p. Department for Work and Pensions (DWP) (2007), In work, better off: next steps to full employment, DWP, London, 85 p., http://www.dwp.gov.uk/welfarereform/in-work-better-off/in-work-betteroff.pdf (12 avril 2009). Department for Work and Pensions (DWP) (2008a), Transforming Britain’s labour market. Ten years of the New Deal, DWP, London, 14 p. 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