JAMILA BINOUS LE SITE EST SON ÉVOLUTION

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JAMILA BINOUS LE SITE EST SON ÉVOLUTION
JAMILA BINOUS
Née à Tunis, elle a étudié l’histoire et la géographie à l’Université de Tunis et l’urbanisme à l’Université de Tours (France). Elle a fait sa carrière dans la recherche au sein de
l’Association de Sauvegarde de la Médina de Tunis, depuis 1968. Elle a par ailleurs mené des études sur d’autres Médinas tunisiennes, couronnées par des publications
(Hammamet, Sousse et Gafsa). Sur le plan international, elle a été expert auprès de l’UNESCO (mission à la ville historique de Sanâa, 1982), de l’UNEP dans le programme
« réhabilitation et reconstruction des établissements humains méditerranéens » (1984-1986) ; membre du Comité International des Villes Historiques et co-auteur de la Charte
Internationale des Villes Historiques (ICOMOS-UNESCO, 1987) ; membre du Comité International et coordinatrice du projet Ifriqiya auprès de l’OING Musée sans frontières
(200). A participé au Musée virtuel et au Livre « Découvrir l’art islamique en Méditerranée » (2004-2007) auprès de l’OING Musée sans frontières.
Adresse postale : 25 Rue Bir Jemaa, 2080 Ariana, Tunisia
Adresse électronique : [email protected]
Téléphone : 216 22539808
LE SITE EST SON ÉVOLUTION HISTORIQUE
Tunis accrochée au flanc d’une colline est coincée entre deux lacs salés ; l’un à l’Ouest, la protégeant des incursions terrestres et l’autre à l’Est, la séparant de la mer. Au
VIIIème siècle, un canal creusé en travers du Lac El Behira, aboutit à la Goulette, l’avant-port de Tunis, permettant à cette ville d’hériter du prestige de Carthage en tant que
puissance maritime, commandant le détroit de Messine, passage obligé entre les bassins oriental et occidental de la Méditerranée. La ville entourée d’une enceinte percée de
portes, s’est tellement développée, qu’au XIIIe siècle. Les deux quartiers extra-muros se confirment, ils prennent le nom de faubourgs Rbat Bab al Jezira et Rbat Bab Souika.
Une deuxième ligne de fortification vient les envelopper. La ville et son organisation urbaine restent inchangées jusqu’à la fin du XIXe siècle.
Le modèle urbanistique de la Médina historique
Le principe fondamental sur lequel repose le modèle urbanistique de la Médina est la séparation très nette entre l’espace public et l’espace privé.
On distingue :
les parcours principaux où sont localisés les équipements et les activités de niveau urbain.
Les parcours secondaires, ayant surtout une fonction de raccord et de desserte.
L’espace définit par l’entre-croisement de ces parcours constitue les noyaux d’habitation, espace où se réfugie la vie du groupe familial.
Les voies d’accès aux noyaux résidentiels, souvent en impasses, sont destinés uniquement à la desserte des habitations.
Dès le XIIIe siècle, le siège du pouvoir quitte le centre pour s’installer sur les hauteurs de la ville, sur la frange ouest du site. Ce fut la fondation de la citadelle ou Kasbah extramuros.
A la Médina s’ajoute un Tunis moderne
Avant le protectorat français, les communautés européennes présentes à Tunis, occupaient un quartier intra-muros, appelé le quartier franc, situé sur les terrains bas de la
frange. Il sera le point de départ d’une nouvelle ville. Dès l’installation du régime colonial sur la Tunisie (1881).
Tunis se dédouble : à la Médina s’ajoute un Tunis moderne qui s’affirme comme métropole et confisque à la Médina une partie de ses fonctions, notamment la fonction
économique. C’est la fin de la polarité unique de l’ensemble urbain mais pas la fin de la Médina. Celle-ci étonne par son adaptation aux exigences de la situation nouvelle. Le
pouvoir administratif et militaire du protectorat choisit, quant à lui, de s’installer sur les hauteurs de la Kasbah à l’Ouest, confortant ainsi la vocation historique de cet
emplacement.
L’organisation spatiale séculaire est en mutation
Causes des mutations :
la généralisation des moyens de communication modernes qui a favorisé la frange au détriment du centre historique.
Le déclin des activités artisanales a libéré des espaces autour de la Grande Mosquée où de nouvelles activités sont venues prendre place.
Par le fait que la Grande Mosquée, n’étant plus l’unique centre universitaire et religieux, d’autres pôles et notamment la ville « coloniale » ont accaparé la centralité.
La combinaison de ces causes et effets a profondément marqué l’espace de la Médina où l’on parle « d’extraversion économique ». En effet, le centre de gravité s’est déplacé
du centre vers la périphérie.
Dans ce nouveau système d’organisation de l’espace, les portes deviennent les points forts par excellence. Elles sont l’espace charnière entre la ville historique et les quartiers
nouveaux alors qu’auparavant, elles marquaient la fin de l’urbanisation et le début de la campagne. Celles qui s’ouvrent sur les quartiers les plus dynamiques de
l’agglomération ont connu le développement le plus remarquable.
Ainsi donc la porte par son activité propre ou par celle qu’elle commande, influe sur le fonctionnement interne de la Médina et engendre des transformations au niveau de la
hiérarchie des artères. Certains axes, grâce à la recrudescence de leurs activités économiques, sont passés de la catégorie d’axes secondaires de desserte à celle des axes
principaux qui structurent la cité. Le tissu traditionnel s’est avéré d’une flexibilité étonnante qui s’est traduite par des réajustements et des adaptations en fonction des
nouvelles données.
Conclusion
La Médina de Tunis est un site où ne confrontent et s’affrontent les activités d’une société en continuelle évolution et où s’épanouit la créativité de plusieurs générations de
bâtisseurs. Elle est issue d’une adaptation progressive du modèle originel. Pour revitaliser le patrimoine architectural et urbain, il faut engager l’aménagement dans la voie
d’une sauvegarde active qui s’inscrit dans un processus de développement urbain continu.
Modification du fonctionnement
Interne de la médina:
parcours principaux
Frange
Pole
Plan 1 – Médina et Faubourgs (1860)
Plan 2 – La Médina dans la ville
Fonctionnement Historique
parcours principaux