GAME OF THRONES : VIOLENCE, SEXE ET MOYEN ÂGE
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GAME OF THRONES : VIOLENCE, SEXE ET MOYEN ÂGE
20-Journal_Mise en page 1 16/07/14 11:15 Page217 Journal ligne. Si bien que, pour un jeune adulte normalement « connecté », il est quasiment impossible de passer à côté du dernier rebondissement de l’intrigue. Cette omniprésence encourage, oblige, presque, le public à s’intéresser au phénomène. L’épisode sort à la télévision américaine chaque dimanche soir. Il ne faut attendre que le lendemain, en France par exemple, pour qu’il soit disponible sur la chaîne câblée OCS City. Ce délai si court s’explique à la fois par le franc succès de la série, mais aussi par l’obligation d’une diffusion quasi simultanée à l’échelle planétaire. Car comme à chaque fois, les ennemis sont le streaming et le téléchargement illégal. Une diffusion officielle à plus d’une semaine d’intervalle n’est de toute façon plus permise. Qui est encore prêt à attendre, au risque de se faire « spoiler » l’intrigue (gâcher le suspense par des révélations intempestives), alors qu’en un clic, et sans risque, les épisodes sont disponibles quelques heures après leur diffusion ? Tous les records ont été battus pour l’ultime épisode de la saison 4, sorti le 15 juin dernier, regardé (toutes offres confondues, légales ou non) par plus de vingt millions de personnes2. GAME OF THRONES : VIOLENCE, SEXE ET MOYEN ÂGE Jamais une série télévisée n’aura provoqué un tel engouement. Pourtant, rien de particulièrement nouveau dans l’univers et l’intrigue proposés par Game of Thrones. Le genre s’apparente à ce que l’on pourrait appeler de la « fantasy médiévale » : un royaume imaginaire particulièrement complexe, sept couronnes et une lutte de pouvoir pour s’emparer du Trône de fer. L’intrigue, avant tout politique, mêle univers de chevalerie et éléments magiques. Comment comprendre alors qu’elle fascine une audience si large, composée en majorité de jeunes adultes de vingt à trente-cinq ans ? Contrairement aux autres références du genre, la complexité de Game of Thrones la destine à un public plus averti. Car ce n’est pas le surnaturel qui domine, mais bel et bien la lutte politique, comme dans ces autres séries à succès du moment : House of Cards, Borgia, Borgen1. L’une des raisons de ce succès s’explique par les stratégies de diffusion, qui permettent à la série d’occuper tout l’espace médiatique. Chaque nouvel épisode sature les canaux d’informations à l’échelle mondiale. Dès le soir de la première retransmission, les réactions pleuvent sur les réseaux sociaux, sur les blogs et sur les sites de presse en Malmener les spectateurs Les réalisateurs ont d’ailleurs bien compris qu’il fallait, pour entretenir les conversations, « faire le 1. Sur House of Cards, voir l’article de Jean-François Pigoullié dans ce numéro, p. 213. Voir aussi son texte sur Borgen, « Borgen : une réhabilitation de la politique », Esprit, février 2013. 2. Article du Figaro, paru le 23 juin 2014 (http://www.lefigaro.fr/culture/2014/06/20/0300 4-20140620ARTFIG00107-game-of-thronesle-nouveau-culte.php). 217