101 Perspectives on Organizational Communication: Finding

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101 Perspectives on Organizational Communication: Finding
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Perspectives on Organizational Communication: Finding Common Ground. Edited
by Steven R. Corman & Marshall Scott Poole. New York: Guilford Press, 2000. 265 pp.
ISBN 1572306025.
Publié à l’issue du panel « Finding Common Ground between Metatheoretical Perspectives
on Organizational Communication », ce livre tente de cerner les problèmes inhérents à la
multiplicité des perspectives théoriques en communication organisationnelle. Organisé par
la National Communication Association en novembre 1997, ce panel s’inscrit dans la
foulée des débats entourant la recherche d’un terrain commun en communication organisationnelle. Les actes de cette table ronde ont le mérite de donner la parole à des chercheurs
reconnus pour leur contribution dans ce domaine et qui se sont penchés sur les moyens de
transcender leurs différents horizons paradigmatiques. Le questionnement porte sur la pertinence de développer une approche métathéorique permettant l’identification d’un terrain
commun à l’ensemble des différents chercheurs qui travaillent sur la communication dans
les organisations. Pour trouver cet hypothétique terrain commun, diverses pistes de solution
sont évoquées, bien que la plupart soient envisagées avec beaucoup de réticence, voire de
scepticisme; certains chercheurs vont même jusqu’à remettre en question la légitimité d’un
cadre intégrateur unique.
L’introduction présente une argumentation en faveur d’un terrain commun, en dépit de
l’envergure des débats qui polarisent actuellement les prises de position théoriques. Organisateur du panel, Steven R. Corman signe cette entrée en matière en rappelant aux chercheurs qu’ils ne doivent pas perdre de vue l’objet fondamental de leurs travaux de
recherche, soit la communication organisationnelle, et non les affrontements entre divers
paradigmes. Il met en relief le vocabulaire « guerrier » des controverses actuelles et le
danger que représente l’absence d’un terrain d’entente.
Suivent trois essais, composant la seconde partie du livre, où George Cheney, Katherine I. Miller et Dennis K. Mumby livrent leurs commentaires sous forme d’une critique de
la critique, selon leurs différentes postures méthodologiques. Il s’en dégage une vision plurielle de la communication organisationnelle, une incommensurabililté dont la nature
même permet difficilement de cerner un espace où pourrait se situer le terrain commun
recherché. Au souhait d’un dialogue est rapidement opposée la difficulté de trouver un
langage commun. Lorsque les représentants des divers paradigmes tentent de se parler, la
crainte du soliloque d’un paradigme dominant se profile en toile de fond, pouvant miner la
confiance requise pour établir un réel dialogue.
George Cheney ouvre le débat en proposant une interprétation de la recherche interprétative, dans l’espoir de trouver les matériaux pouvant servir à la construction d’un cadre
d’ensemble pour élaborer un terrain commun. Il évoque la possibilité d’une perspective de
l’incongruité comme piste permettant d’établir un dialogue entre les divers paradigmes.
Selon la perspective post-positiviste, Katherine I. Miller développe un argument en
faveur de la coexistence pacifique, « collaborative » et créatrice de nouvelles assises métathéoriques pour éviter les attaques contre les boucs émissaires ( straw persons ) en communication organisationnelle. S’appuyant sur les typologies de Burrell et Morgan, Miller trace
l’évolution du positivisme vers le post-positivisme en dépassant la traditionnelle dichotomie fonctionnalistes / interprétatifs. Elle arrive à dégager des considérations épistémologiques et axiomatiques plus larges, afin de tisser des liens basés sur les régularités
empiriques.
Du point de vue critique, Dennis K. Mumby propose quant à lui de mettre l’accent sur
les points centraux, communs aux diverses approches en communication organisationnelle.
Il développe une argumentation visant à surmonter les oppositions binaires, simplistes et
manichéennes, pour éviter ainsi le piège du réductionnisme, principal obstacle à l’élaboration d’un terrain commun, selon lui.
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Canadian Journal of Communication, Vol. 26 (4)
Dans la troisième partie de l’ouvrage, les participants à ce panel sont invités à commenter les positions avancées par Cheney, Miller et Mumby. La diversité des prises de position et des méthodes exprime tout à fait le paradoxe de la communication organisationnelle.
Bien que plusieurs questions soient récurrentes, les auteurs soulèvent des voies nouvelles
de solution pour arriver à établir une ébauche de dialogue transparadigmatique. En fait, on
va même jusqu’à poser la question : pourquoi se limiter à un seul terrain commun alors que
plusieurs terrains seraient peut-être la solution? Cette idée est évoquée par James R. Taylor,
Seibold et Flanagin, soulignant le danger de la recherche d’un terrain exclusif dont l’effet
pervers serait de viser à devenir LE seul référent intégrateur. Selon eux, il faut se méfier
d’un terrain commun qui procéderait de cette posture hégémonique, réductrice autant que
pernicieuse.
Seibold et Flanagin proposent plutôt une intégration des niveaux micro et macro en
refocalisant chez le chercheur, dans sa propre démarche, le développement d’une ouverture
face aux autres paradigmes. Chaque théoricien est invité à prendre lui-même l’initiative
d’un changement d’attitude bien que le problème de base, selon Taylor, demeure l’absence
d’une théorie générale de la communication. Il constate qu’en dépit de la multiplicité des
recherches actuelles, cette théorie de la communication reste encore à élaborer : selon lui,
ce vacuum théorique rend fragiles les efforts investis à définir un terrain commun en communication organisationnelle.
La diversité des points de vue exprimés dans ce livre témoigne de la fracture épistémologique et méthodologique qui sépare les théoriciens de diverses perspectives. Pour
contrer cette difficulté, Angela Trethwey attire l’attention sur la possibilité de considérer la
diversité unifiée ( unified diversity ) selon une approche féministe. Elle rejoint ainsi l’idée
de Krone recommandant que chaque chercheur se mette à l’étude des autres perspectives
pour élaborer ce fameux terrain commun en communication organisationnelle. Une idée
que reprend Trethewey lorsqu’il souligne l’importance de vivre de manière plus tolérante
les contradictions inhérentes aux ambiguïtés des approches multiparadigmatiques.
Le mot de la fin est laissé à Marshall Scott Poole et Owen Hanley Lynch qui proposent
une synthèse des débats effectués dans le cadre de ce panel. La diversité des points de vue
leur semble témoigner de la vitalité de la discipline. Ils rappellent qu’en dépit de l’absence
de solution claire, la nécessité de trouver un ou des terrains communs est tout de même porteuse d’avenir pour les jeunes chercheurs qui débutent une carrière en communication
organisationnelle.
En somme, des voies d’intégration sont évoquées. Des modes de dialogue sont
avancés. Reste à dépasser le stade de l’intention pour aborder l’étape de la création d’un
réel terrain d’entente qui serait, selon le terme d’Eisenberg, « hospitalier » envers
l’ensemble des chercheurs en communication organisationnelle.
De manière évidente, le livre n’arrive pas à créer consensus, ce qui est paradoxal pour
un sujet tel que la recherche d’un terrain d’entente en communication organisationnelle.
Mais des pistes de solution sont tout de même suffisamment documentées pour susciter une
évolution vers l’élaboration d’une métathéorie en communication organisationnelle, du
moins une théorie en communication tout court, selon le vœu de James R. Taylor. Pour ce
faire, Eric M. Eisenberg propose une voie intéressante en rappelant qu’il faut d’abord développer une attitude d’ouverture aux autres pour que soit réellement acceptées les différentes
postures épistémologiques de ceux qui travaillent selon d’autres perspectives. Eisenberg
arrive ainsi à situer la solution au plan de la tolérance individuelle, par la lutte au sectarisme
théorique et par le développement d’une forme de xénophilie paradigmatique. D’ailleurs,
comme le rappellent Poole et Lynch, la qualité du questionnement est souvent plus importante, en tant que processus créateur de réflexions fécondes, que l’élaboration triomphante
d’une solution définitive qui limite, en le concluant, le potentiel d’évolution critique : en ce
sens, l’ouvrage atteint son but en permettant des échanges qui arrivent à créer des passe-
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relles de traduction transthéorique vers un nouvel espace d’intégration micro/macro,
comme le proposent avec justesse David R. Seibold et Andrew J. Flanagin.
Danielle Maisonneuve
Université du Québec à Montréal