Travailler dans les titres-services

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Travailler dans les titres-services
Travailler dans les
titres-services : pas
de tout repos…
Fiche juridique
Travail salarié
Le succès du système des titres-services n’est plus { démontrer.
Ce système, qui a commencé à prendre son envol en 2004, a incontestablement
créé de l’emploi dans un secteur jusque-là cantonné en grande majorité dans le
circuit informel du travail, a permis à un nombre important de travailleurs
d’accéder { notre système de sécurité sociale et { un bon nombre d’utilisateurs
de bénéficier pour un prix plus que raisonnable jusqu’ici d’un service d’aide
ménagère à domicile.
Fin septembre 2013, on comptait 2.512 entreprises agréées, 929.271 utilisateurs
et environ 129.000 travailleurs (pour environ 66.800 équivalents temps plein) 1.
1
Les deux premiers chiffres proviennent des statistiques du SPF Emploi. Le 3ème des statistiques de
l’ONSS.
Certes, le système coûte cher { l’Etat. On n’essaie plus de le cacher.
Notre expérience nous amène toutefois { constater qu’être un travailleur titresservices n’est pas de tout repos, et que la réalité des conditions de travail dans
ce secteur contraste sur certains points avec le succès affiché du système.
Le politique semble en être conscient. Régulièrement, depuis le lancement du
système, des modifications législatives sont intervenues afin de
« professionnaliser » au mieux ce jeune secteur d’activités dans lequel force est
de constater que la gestion des ressources humaines n’est pas toujours la
priorité des entreprises qui se sont lancées dans ce système { l’équilibre fragile.
Le nombre de conditions d’agrément des entreprises n’a cessé de croître, ainsi
que les moyens mis en œuvre pour contrôler au mieux ces nouvelles
entreprises. Et on ne peut qu’encourager cette voie.
À travers cet article, nous voulons refaire brièvement le point sur les spécificités
juridiques de la relation de travail dans les titres-services et mettre le doigt sur
les difficultés les plus fréquentes rencontrées par les travailleurs. Difficultés qui
remettent parfois en cause, dans la pratique, certains des principes pourtant
élémentaires de notre droit du travail, que sont entre autres : l’obligation pour
l’employeur de faire travailler le travailleur dans les conditions, au temps et au
lieu convenus dans le contrat et l’obligation de payer la rémunération aux
conditions convenues dans le contrat de travail2.
Nous sommes conscients d’avoir un regard légèrement biaisé sur la situation,
dans la mesure où les travailleurs qui nous consultent dans le cadre des
permanences juridiques font cette démarche lorsqu’un problème se pose à eux.
C’est parce que les problèmes sont toujours du même ordre que nous nous
permettons d’en parler ici.
Nous savons bien sûr qu’il y a aussi des entreprises titres-services qui gèrent au
mieux les relations de travail et que les employeurs doivent composer avec une
difficulté majeure et inhérente au système : le fait de ne pas être maître à
long terme et parfois même à moyen terme du volume de travail qu’ils
peuvent garantir à leurs travailleurs, celui-ci dépendant exclusivement de la
demande de services émanant des utilisateurs.
2
Obligations contenues dans l’article 20 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.
2
1. RAPPEL DES GRANDES LIGNES DU FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME TITRES-SERVICES
Ce système met en présence trois acteurs principaux :
• l’employeur : à savoir une entreprise du secteur marchand ou non marchand
(entreprise de travail intérimaire, entreprise de nettoyage, ASBL, ALE, CPAS,
entreprise du secteur de l’économie sociale…) qui a reçu un agrément
spécifique pour agir en qualité d’employeur titres-services ;
• l’utilisateur : tout particulier, personne physique domiciliée en Belgique qui
veut faire appel { un service d’aide { domicile de nature ménagère ;
• le travailleur, lié à une entreprise agréée par un contrat de travail titresservices, qui se rend chez des particuliers pour y effectuer des tâches de
nature ménagère.
Les activités autorisées dans le cadre des titres-services, énumérées de
manière limitative, relèvent jusqu’{ présent de l’aide { domicile de nature
« ménagère ».
Cette aide doit être :
• soit effectuée au domicile du particulier : nettoyage de l’habitation y compris
des vitres, lessive, repassage, petits travaux de couture, préparation des
repas ;
• soit hors du domicile : courses ménagères du particulier, repassage dans un
local de l’employeur, transport accompagné de personnes { mobilité réduite.
Pour ce qui est du travailleur, celui-ci ne doit répondre à aucune condition
spécifique pour travailler dans les titres-services. La seule contrainte, mais qui
n’est pas une condition pour pouvoir travailler avec un contrat de travail titresservices, est que le travailleur ne peut avoir un lien familial de sang ou par
alliance jusqu’au 2ème degré inclus avec l’utilisateur, ou un membre de sa
famille, ni avoir la même résidence que l’utilisateur chez qui il effectue des
prestations. On ne peut donc, par exemple, pas effectuer le ménage de sa bellemère dans le cadre des titres-services, ni son propre ménage…
3
Le travailleur titres-services a un statut de travailleur salarié à part entière. Il
est soumis à la sécurité sociale des travailleurs salariés et ouvre donc des
droits aux vacances annuelles, allocations de chômage, soins de santé,
indemnités d’incapacité de travail, congé de maternité, pension…
Comment ça marche ? 3
Concrètement, l’utilisateur commande des titres-services au prix actuel de 8,5
€ (ou 9,50 € au-del{ d’un certain nombre) { la société émettrice des titresservices (actuellement Sodexo) et prend contact avec une entreprise agréée de
son choix. Cette dernière lui envoie un travailleur, auquel elle est liée par un
contrat de travail titres-services, pour effectuer des tâches de nature ménagère à
son domicile.
Par heure de travail prestée, l’utilisateur soit remet au travailleur un titreservice papier que celui-ci remet ensuite { l’entreprise, soit met à disposition du
travailleur son téléphone afin que celui-ci encode sa prestation de manière
électronique. Le titre-service est donc un titre de paiement.
L’entreprise se fera ensuite rembourser par la société émettrice des titresservices le montant actuel de 22,04 €4 par titre-service, lui permettant ainsi de
rémunérer ses travailleurs titres-services.
2. SPÉCIFICITÉS DU CONTRAT DE TRAVAIL TITRES-SERVICES
Le travailleur est lié { l’entreprise agréée par un contrat de travail titresservices qui peut être conclu { temps plein ou { temps partiel. Il s’agit d’un
véritable contrat de travail, soumis à la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats
de travail, qui comporte toutefois quelques dérogations importantes aux
dispositions de la dite loi5.
Ces règles dérogatoires reflètent une exigence de flexibilité particulière de la
part des travailleurs, l’idée étant notamment de permettre { l’employeur, dans
la période initiale de la relation de travail, d’adapter le nombre d’heures {
3
Pour une info détaillée sur les démarches à suivre, consultez le site www.titres-services-onem.be.
Montant tel que modifié au 1er décembre 2012.
5
Ainsi qu’{ la loi du 16 mars 1971 sur le travail.
4
4
prester au nombre de clients qui se présentent, l’offre de travail dépendant
directement de la demande de services des utilisateurs. Depuis le véritable
lancement du système en 2004, le législateur a toutefois déjà limité cette
exigence de flexibilité en supprimant certaines des dérogations prévues
initialement.
Actuellement, les dérogations principales, contenues dans la réglementation
titres-services, { savoir la loi du 20 juillet 2001 et l’arrêté royal du 12 décembre
20016, se situent à deux niveaux :
• la possibilité pour l’employeur de conclure des contrats { durée déterminée
successifs pendant les 3 premiers mois d’occupation ;
• ainsi que des dérogations en matière de durée du travail.
Un contrat de travail écrit
Le contrat de travail titres-services doit être établi par écrit, au plus tard dans
les 2 jours ouvrables { compter du moment de l’entrée en service du travailleur.
Le fait que la loi ait prévu ce délai de 2 jours ouvrables pour constater par écrit
le contrat de travail ne dispense pas l’employeur de déclarer le travailleur {
l’ONSS (via la déclaration DIMONA) au plus tard au début de la première
prestation de travail.
En théorie, mais peu d’employeurs suivent ce prescrit, l’employeur doit quand
même faire signer au travailleur, dès sa première prestation, un document
visant { constater l’intention de conclure un contrat de travail titres-services. 7
Le contrat de travail titres-services doit au moins comporter les mentions
suivantes :
- l’identité des parties ;
- le numéro d’agrément de l’employeur ;
- la date du début d’exécution du contrat ;
6
Loi du 20 juillet 2001 visant { favoriser le développement de services et d’emplois de proximité (M.B du
11.08.2001) et arrêté royal du 12 décembre 2001 concernant les titres-services (M.B. du 22.12.2001).
7
Cette obligation s’inspire de la réglementation relative au contrat de travail intérimaire. Voir loi du 24
juillet 1987 sur le travail temporaire, le travail intérimaire et la mise de travailleurs à la disposition
d'utilisateurs, article 8, al.3 et 4.
5
- la date de fin du contrat, s’il est conclu pour une durée déterminée ;
- la durée et l’horaire de travail.
Si le contrat est conclu pour une durée indéterminée, la loi prévoit qu’il doit
déterminer comment et dans quel délai le travailleur est informé de son
horaire de travail ; à défaut de disposition dans le contrat, les horaires
doivent être portés à la connaissance du travailleur au moins 7 jours à
l’avance.
La possibilité de conclure des contrats à durée déterminée successifs durant les
3 premiers mois d’occupation
La réglementation titres-services permet { l’employeur, dans la période initiale
de la relation de travailleur fixée à 3 mois, de conclure avec le travailleur des
contrats à durée déterminée successifs. À partir du 1er jour travaillé du 4ème mois
d’occupation, l’employeur a par contre l’obligation de conclure un contrat {
durée indéterminée avec ses travailleurs titres-services.
Les parties ne sont pas obligées de faire usage de cette possibilité. Rien
n’empêche un employeur d’offrir directement, ou pendant les 3 premiers mois
d’occupation, un contrat { durée indéterminée.
Mais il est donc tout { fait légal, que durant ses premiers 3 mois d’occupation, le
travailleur signe par exemple chaque semaine un contrat à durée déterminée.
Que se passe-t-il si l’employeur continue à faire signer des CDD au-delà des 3
premiers mois ? Au moment où l’employeur décide, pour l’une ou l’autre raison,
de ne plus proposer de nouveau contrat au travailleur, celui-ci sera en droit de
lui réclamer une indemnité de rupture, équivalente à la durée du préavis que
l’employeur aurait dû respecter dans le cadre d’un contrat { durée indéterminée
(par exemple équivalente à 7 ou 28 jours calendriers selon le cas, sous réserve
des changements prévus à partir du 1er janvier 2014).
Dérogation par rapport à la durée minimale de travail par semaine
L’article 11bis de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail établit
qu’un contrat de travail { temps partiel doit porter sur au moins 1/3 de la durée
de travail applicable { un travailleur engagé { temps plein dans l’entreprise.
6
La réglementation titres-services permet de déroger à cette règle, sans limite
inférieure, durant les 3 premiers mois d’occupation. Pendant ces 3 mois, on
peut donc légalement être lié par un contrat de 4 heures par semaine, de 8
heures par semaine,… .
Au-del{ des 3 premiers mois d’occupation, les règles sont les suivantes :
• contrat de minimum 13 heures de travail par semaine pour les travailleurs qui,
pendant leur occupation, ont droit à une allocation de chômage
complémentaire ou { un complément de revenu d’intégration sociale ou d’aide
sociale financière ;
• contrat de minimum 10 heures de travail par semaine, pour les travailleurs
qui, pendant leur occupation, ne bénéficient pas d’une allocation de chômage
complémentaire ou d’un complément de revenu d’intégration sociale ou d’aide
sociale financière.
Durée minimale de chaque prestation
La loi du 16 mars 1971 sur le travail prévoit que la durée minimale de chaque
période de travail doit être de 3 heures. Contrairement à ses débuts, la
réglementation titres-services ne prévoit plus de dérogation à cette règle.
Notons toutefois qu’il est admis qu’une prestation chez un particulier soit
prévue pour moins de 3 heures (par exemple, pour 2 heures), pour autant
qu’elle soit suivie d’une prestation chez un autre particulier. Curieux, mais la
logique juridique veut que le temps de déplacement entre différents lieux de
travail étant considéré comme du temps de travail 8, la règle de la durée
minimale de 3 heures par période de travail est alors considérée comme
respectée.
Le S.P.F. Emploi, Travail et Concertation sociale donne les exemples suivants9 :
- prestation de 8h à 10h chez l'utilisateur A et de 10h30 à 12h30 chez
l'utilisateur B: dès lors que la demi-heure est nécessaire pour se déplacer
8
9
Contrairement au temps de déplacement du domicile du travailleur à son lieu de travail.
Clés pour… Travailler dans le système des titres-services, Déc. 2010, pp.22-24.
7
d'un utilisateur à l'autre, elle constitue du temps de travail et n'interrompt
pas la période de travail qui peut être considérée comme continue ;
- prestation de 4h chez l'utilisateur C suivie d'une pause de midi, elle-même
suivie d'une prestation de 2h chez l'utilisateur D : si les prestations
présentent effectivement un caractère continu et homogène, on peut
considérer que ces deux prestations constituent une prestation unique
parce qu'il n'y a pas de véritable interruption entre elles. Si par contre, les
prestations chez l'utilisateur D n'interviennent pas directement après la
pause de midi, l'horaire de l'après-midi n'est pas légal, car la prestation
n'atteint pas 3h minimum.
Le petit hic est que le temps de déplacement entre les domiciles des utilisateurs
successifs ne pouvant être « couvert » par un titre-service, celui-ci étant un titre
de paiement exclusivement destiné { payer la prestation d’aide { domicile de
nature ménagère, il n’est pas rare d’entendre des travailleurs titres-services se
plaindre du fait que les heures consacrées aux déplacements d’un particulier {
un autre ne sont pas rémunérées. En effet, ne pouvant introduire et se faire
rembourser des titres-services pour assumer le coût salarial de ce temps de
travail, les employeurs préfèrent parfois ne pas s’encombrer de cette
« charge ».
Soulignons juste qu’une convention collective de travail10 de la commission
paritaire du secteur titres-services (voir ci-dessous) prévoit une indemnisation
minimale « modeste » de ce temps de déplacement entre les domiciles des
utilisateurs successifs : il s’agit d’une indemnisation forfaitaire de 0,0936 €/km,
avec un minimum de 0,57 € par déplacement11…
Conditions de travail et de rémunération établies au niveau sectoriel
Sans entrer dans le détail, signalons qu’une commission paritaire spécifique au
secteur des titres-services a été mise sur pied, la Sous-commission paritaire
322.01 pour les entreprises agréées fournissant des travaux ou services de
proximité. Relèvent en principe de cette C.P. toutes les entreprises qui exercent
10
C.C.T. du 9 novembre 2011 relative { l’indemnisation du temps de déplacement et remboursement des
frais de déplacement entre le domicile des utilisateurs successifs.
11
Montants tels qu’indexés au 1er février 2013.
8
uniquement une activité dans le cadre des titres-services. Les entreprises qui
exercent également une autre activité doivent en théorie suivre la commission
paritaire de cette autre activité pour leurs travailleurs titres-services. Tous les
travailleurs titres-services ne relèvent donc pas de la C.P. 322.01.12
Sans toutes les citer, signalons que la C.P. 322.01 a adopté des conventions
collectives de travail (C.C.T.) obligatoires pour toutes les entreprises relevant de
sa compétence, en matière de salaire minimum, d’intervention dans les frais de
transport, du droit { la mise { disposition et { l’entretien de vêtements de
travail, de prime de fin d’année…
C’est donc une source de droit très importante pour les travailleurs titresservices.
Toutes ces C.C.T. peuvent être consultées sur le site du SPF Emploi
(www.emploi.belgique.be << Concertation sociale << Conventions collectives
de travail).
3. LE « NŒUD DES DIFFICULTÉS »
Une des clés de compréhension du système titres-services, et de ses failles,
réside dans cette donne : le titre-service, qui pour rappel est un titre de
paiement, ne peut être utilisé que pour régler une prestation effective d’aide de
nature ménagère. Ce qui implique que l’employeur ne percevra l’intervention
financière de l’Etat que pour les heures de travail réellement prestées par ses
travailleurs et pour lesquelles il a pu introduire et se faire rembourser un titreservice.
A contrario, il aura à sa charge propre (en d’autres mots, sans intervention
financière dans le coût salarial), les heures que le travailleur aurait dû prester en
vertu de son contrat de travail, mais qu’il n’a pas prestées pour une raison soit
liée au travailleur (comme le fait d’être incapable de travailler pour une raison
médicale), soit liée au fait que l’employeur n’a pas été en mesure de fournir du
12
En 2009, le rapport de la Cour des comptes estimait à 89 % les travailleurs titres-services relevant de la
C.P. 322.01.
9
travail au travailleur, souvent parce qu’un utilisateur a renoncé ponctuellement {
une prestation, ou a décidé de ne plus faire appel { l’entreprise.
La grande majorité des travailleurs titres-services qui nous consultent le font
pour la raison suivante : ils ne sont pas payés mensuellement sur base du nombre
d’heures prévues dans leur contrat de travail, mais en fonction du nombre
d’heures de travail qu’ils ont réellement prestées, et encore dans certains cas
pour autant que les utilisateurs aient bien remis les titres-services.
Beaucoup de travailleurs titres-services, et apparemment certains employeurs,
pensent qu’il est légal de n’être rémunéré (ou de ne rémunérer) que les heures de
travail effectivement prestées13. Et bien non, comme tout autre travailleur
salarié, lié par un contrat de travail, le travailleur titres-services doit être payé en
vertu du nombre d’heures de travail prévu dans le contrat qui le lie { l’entreprise
titres-services. Si pour l’une ou l’autre raison, l’employeur n’est pas en mesure de
fournir le nombre d’heures de travail prévu au contrat, c’est { lui de trouver une
solution afin que le travailleur perçoive, chaque mois, la rémunération convenue.
Outre le fait de ne pas avoir un revenu régulier sur lequel il peut compter chaque
mois, ce qui ne facilite pas la gestion d’un budget souvent assez serré, le
travailleur subira également des conséquences négatives au niveau de ses droits
{ la sécurité sociale (allocations de chômage plus faibles,…).
Les solutions qui s’offrent { l’entreprise sont :
• essayer de trouver une prestation de remplacement au travailleur ;
• si ce n’est pas possible, essayer de faire appel au « chômage temporaire » afin
que le travailleur perçoive, pour les heures non prestées, une indemnité de
chômage temporaire de la part de l’ONEm. Ce qui implique un certain nombre
de démarches dans le chef de l’employeur. Chaque demande n’est pas reçue
positivement, étant donné qu’il y a toute une série de conditions que l’ONEm va
vérifier pour accorder ou non l’indemnité ;
13
Une travailleuse nous a récemment rapporté que dans le règlement de travail de l’entreprise avec laquelle
elle était sur le point de signer un contrat, un article prévoit que l’entreprise se réserve le droit de suspendre
le paiement du salaire { partir du moment où le travailleur n’a pas remis plus de 30 titres-services pour des
heures qu’il a prestées. Ce genre d’article nous semble totalement illicite.
10
• si le chômage temporaire n’est pas accepté par l’ONEm, il ne reste plus {
l’employeur qu’{ sortir « de sa poche » la rémunération de ces heures non
prestées ;
• bien que cela soit insuffisant pour couvrir le coût salarial, certaines entreprises
prennent la précaution, dans la convention qui les lie { l’utilisateur, de prévoir un
dédommagement dans le cas où l’utilisateur n’informe pas d’une absence dans
un délai fixé, ou ne respecte pas un certain délai de préavis en cas de
renonciation aux services de l’entreprise.
Dans les faits, force est de constater que certains employeurs optent plutôt pour
les solutions suivantes :
• pour les heures qui manquent ponctuellement { l’horaire, du fait de l’absence
d’un utilisateur, se contenter de ne pas rémunérer ces heures, qui seront souvent
reprises sur la fiche de paie sous des intitulés « absence autorisée » ou « congé
sans solde ». Ces intitulés fallacieux laissant entendre que c’est le travailleur qui a
demandé l’autorisation se s’absenter du travail (pour une circonstance qui
n’implique pas de maintien de la rémunération) ou qui a demandé un congé sans
solde ;
• demander au travailleur de lui-même trouver d’autres clients (utilisateurs) pour
combler son horaire. En agissant de la sorte, certains employeurs manquent à
une de leurs obligations de base qui, pour rappel, est de fournir le travail aux
conditions convenues. Un travailleur salarié n’est pas censé, en effet, se fournir
lui-même du travail ;
• si le problème persiste, certains employeurs, confrontés au fait qu’ils n’ont plus
suffisamment de travail { fournir au travailleur et conscients qu’ils ne peuvent
décider unilatéralement de diminuer la durée du travail14, vont alors proposer au
travailleur de signer un « avenant au contrat de travail » établissant une
diminution de la durée du travail. Ayant marqué son « consentement » à cette
diminution de part sa signature, le travailleur ne sera plus en mesure de réclamer
son dû… .
14
La durée du travail est en effet considérée par la jurisprudence comme un élément essentiel du contrat
de travail, et ne peut donc en principe faire l’objet d’une modification unilatérale.
11
La question « est-ce que je suis obligé de signer un avenant prévoyant que mon
temps de travail diminue ? » est devenue très fréquente lors de nos permanences
juridiques, la pression mise par l’employeur étant parfois importante. Il n’y a
évidemment aucune obligation de consentir une modification des conditions de
travail convenues { l’origine, mais nombre de travailleurs dans le besoin se diront
que cela vaut mieux que de prendre le risque de tout perdre… Le travailleur doit
toutefois être conscient que s’il est amené { perdre son travail, le montant de
son allocation de chômage sera dans certains cas fonction de son dernier régime
de travail et de la rémunération perçue en dernier lieu…
Pas de tout repos donc, parce qu’en plus d’effectuer son travail, le travailleur
titres-services est parfois amené à courir après « son » travail et après « sa »
rémunération. Certes, le fait que les entreprises ne sont pas maîtres de la
quantité de travail qu’elles peuvent garantir au travailleur est une difficulté
inhérente au système, mais il faudrait à notre sens pouvoir donner davantage de
garanties et de recours au travailleur afin d’améliorer la stabilité et donc la
qualité des emplois titres-services.
Pour une information détaillée, nous vous invitons à consulter le site
www.titres-services-onem.be ainsi que le site du SPF Emploi
(www.emploi.belgique.be) où vous pouvez télécharger la brochure « Clés pour…
Travailler dans le système des titres-services ».
Marie-Caroline Menu
Novembre 2013
Pour toute question,
contactez le service Emploi-Sécurité sociale de
l’Atelier des Droits Sociaux
4 rue de la Porte rouge
1000 Bruxelles
Tel. : 02/512.71.57 ou 02/512.02.90
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