l`evolution du capital investissement en europe et en france

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l`evolution du capital investissement en europe et en france
MEMOIRE DE DESS INGENIERIE
FINANCIERE
L’EVOLUTION
DU CAPITAL INVESTISSEMENT
EN EUROPE ET EN FRANCE
Guillaume GUHUR
DESS ingénierie financière
UBO de BREST
Promotion 2002-2003
Responsable de mémoire : Dominique NAMUR
1
INTRODUCTION
La création d’entreprise et son financement sont au cœur du débat économique en
France. De nombreux exemples étrangers, et en particulier les pays anglo-saxons,
montrent le rôle que les petites et moyennes entreprises (PME) jouent dans
l’innovation et son application dans les technologies avancées, et donc dans
l’expansion économique et l’emploi. Aux Etats unis, le dynamisme des petites
entreprises nouvelles qui ont fleuries dans la Silicon Valley a largement contribué aux
récentes évolutions technologiques (micro-informatique, microélectronique, NTIC,
biotechnologies). Ces entreprises sont désormais de taille moyenne ou grande et
sont à l’origine de la création de millions d’emplois nouveaux. C’est le capital
investissement qui a permis à ces entreprises de trouver les financements
nécessaires.
Le capital investissement ou « Private Equity » peut être défini comme
l'investissement en fonds propres ou quasi-fonds propres dans des sociétés non
cotées en bourse lors de leur démarrage, leur développement, leur transmission ou
l'acquisition d'une entreprise. On regroupera donc sous ce terme le capital risque, le
capital développement, le capital transmission et les opérations de reprise avec effet
de levier.
Il permet d'associer au sein de l'entreprise, existante ou à créer, un entrepreneur et
son équipe et des investisseurs financiers. Ceux-ci deviennent actionnaires de
l'entreprise en contrepartie des fonds apportés et supportent le même risque d'échec
que les autres actionnaires. Ils participent à la réussite de l'entreprise, concrétisée
par la croissance de l'activité, le versement de dividendes ou la réalisation de plus
values lors de la cession de la participation ou de l'introduction en bourse.
Fondamentalement différent de l'endettement, pour lequel les prêteurs perçoivent un
intérêt, attendent le remboursement du capital prêté et sont des créanciers souvent
dotés de garanties, le capital investissement est une opération de fonds propres qui
ne trouve sa rentabilité que dans la croissance et la capacité bénéficiaire de
l'entreprise. Le capital investissement est un placement à moyen ou long terme par
lequel l'investisseur apporte une contribution active à la réussite des entreprises, en
accompagnant leur croissance pour leur permettre de devenir les principales
sociétés de leur secteur.
Le marché du capital investissement, sur lequel les premiers opérateurs
institutionnels sont apparus dans les années 1970, n’a commencé à jouer de façon
significative dans notre système de financement qu’au milieu des années 1980, du
fait d’un ensemble de circonstances favorables : redressement des marges des
entreprises, meilleure liquidité potentielle des investissements dans un marché
boursier élargi et porteur, incitations européennes et changement progressif des
mentalités.
L’évolution du capital investissement s’est accéléré au cours de ces dernières
années, tant au niveau européen que national. Dans un contexte de développement
généralisé, chaque pays connaît un modèle et un rythme propre d’investissement.
2
Après avoir fait l’Etat des lieux du capital investissement en Europe, la question sera
de déterminer dans quelle direction s’orientent actuellement les investissements
européens et français, suite à la crise financière que le monde a connu en 2000.
S’oriente-t-on vers plus de prudence ou au contraire vers plus de risque dans nos
investissements en capital? Quels sont les stades de développement des entreprises
qui seront privilégiés par les investisseurs et à quoi ressemblera donc le tissu
économique suite à ces choix ?
3
1 – LA MONTEE DU CAPITAL INVESTISSEMENT EN
EUROPE
1.1 – PRESENTATION DE L’ACTIVITE
Détecter le plus tôt possible des sociétés non cotées prometteuses fortes d’une idée
innovante afin d’acquérir des parts de leur capital en vue de réaliser ensuite des plus
values en cédant ces participations lors de la revente de la société à un groupe ou
lors de son introduction en bourse : tel est l'objectif du capital investissement.
L'ensemble du processus d'investissement, de l'engagement à "la sortie" (vente de
l'entreprise, fusion ou introduction en bourse), s'étale sur une durée de trois à dix ans
avec une moyenne de 7 ans.
Les interventions en capital sont fondées sur une approche diagnostique de
l’entreprise. Il s’agit d’affaires à potentiel qui doivent en principe se valoriser au delà
de leur actif net. Un équilibre doit être trouvé entre fondateur et investisseur.
L’investissement en capital constitue donc tout à la fois un placement à long terme
dans des entreprises à potentiel et un véritable accompagnement de la part du
financier. Mais l’investissement en capital peut également accompagner un projet
ponctuel sans pour autant susciter un partenariat aussi global.
Le financement par capitaux propres1
Les capitaux propres externes sont un financement de dernier recours, lorsque
l’autofinancement est insuffisant et que la capacité d’endettement est saturée. Ils représentent
le financement le plus coûteux et entraînent une dilution du résultat (s’il y a versement de
dividendes). Lorsque les anciens actionnaires ne souhaitent pas souscrire à l’augmentation de
capital, la structure du contrôle de la firme peut être remise en cause. Mais le recours à
l’émission d’actions permet à l’entreprise de franchir des seuils de croissance (gros
investissements, achat de sociétés).
L’entrée d’entreprise du secteur financier dans le capital de leurs clients n’est pas un
phénomène nouveau. En effet, les plus grandes sociétés d’aujourd’hui ont été, à un
moment ou un autre de leur développement, financées par des fonds de capital
investissement (Amazone, Amora, Apple, Microsoft, Laboratoires Boiron, Oracle
Darty, Séphora, Business Objects, Alain Afflelou,…).
Le développement du capital investissement, dont on salue à juste titre l’effet
accélérateur sur la croissance de l’entreprise et/ou la liquidité de ses fondateurs, est
la traduction, appliquée à la moyenne entreprise, de l’intérêt que porte le monde de
la finance aux affaires à fort potentiel. On remarquera cependant que jamais les
financiers n’avaient jusqu’ici accepté de cumuler les trois risques fondamentaux de
l’intervention en capital, en tant que minoritaire et dans la sphère du non coté. Est-ce
nécessaire de préciser que la prise de risque n’est pas une finalité dans le domaine
de la finance, mais qu’elle correspond légitimement à la recherche d’un rendement
supérieur ?
1
Source : E GINGLIGER, Les décisions de financement des entreprises, Nathan université, 1997.
4
Certains investissements ont permis aux fonds de capital investissement de réaliser
des plus values très importantes (Cf. graphiques 1 et 2), performances d’autant plus
attrayantes que faiblement corrélées aux marchés financiers traditionnels (faible
sensibilité aux fluctuations boursières). (Cf. graphique 2 et 3).
Graphique 1 : performances du capital investissement (fonds européens sur 5 ans. Juin 2000)
Graphique 2 : rendements comparés du capital investissement et du Dow Jones
Graphique 3 : corrélation du capital investissement par rapport aux actions et aux obligations
5
Les jeunes entreprises étant mono-produit, leur courbe de développement épouse la
courbe de vie du produit (lancement, croissance ou échec, maturité, déclin). Pour
éviter le déclin (« l’entreprise est une succession de projets »2), les produits seront
renouvelés ou améliorés, cette nouvelle phase devant alors être financée par
autofinancement.
A chaque stade de développement de l’entreprise correspondent des financements
spécifiques en capital investissement ainsi qu’un niveau de risque décroissant avec
le temps. On distingue traditionnellement trois types d'interventions :
•
Le capital-risque et de démarrage (seed capital and early stage financing)
finance la phase technique (de l’idée à l’industrialisation) et les phases
industrielle et marketing.
•
Le capital développement (expansion financing) finance la croissance, le
management et l’organisation (après le passage du point mort d’exploitation).
•
Le capital transmission, et offre publique initiale (acquisition, LMBO3 and initial
public offering) finance les opérations de cession de tout ou part de
l’entreprise.
Exemple : Le parcours d'une start-up américaine du berceau à la Bourse.4
Création
Des amis inventifs créent leur société en réunissant 15 000 dollars pour acheter des
ordinateurs, et se partagent 100 % du capital.
Démarrage
Afin de pouvoir développer leur prototype, les fondateurs vendent 25 % de leur capital à des
« business angels » pour 100 000 dollars, ce qui valorise leur société à 400 000 dollars.
« Venture capital »
La société doit affiner son projet et le commercialiser. Des venture capitalists investissent 2
millions de dollars en échange de 50 % du capital, ce qui valorise la société à 4 millions de
dollars.
Développement
Il faut motiver tous les employés recrutés, la société leur distribue 15 % du capital. La
concurrence est rude, il faut investir pour séduire le marché. Les venture capitalists apportent
13 millions de dollars en quatre ans et contrôlent 69 % du capital. La société vaut alors 32,5
millions de dollars.
Introduction en Bourse
En six ans, le produit s'est bien développé. Pour financer sa croissance, la société vend 19 %
de son capital en Bourse, et collecte 21 millions de dollars. Elle vaut 112 millions de dollars.
Les fondateurs n'ont plus que 9 % des actions, mais ils sont riches.
1.1.1 – LE CAPITAL RISQUE ET LES START UP
Le capital risque, souvent utilisé comme terme générique de l’ensemble des produits
de capital investissement correspond stricto sensu au financement en capital des
affaires récemment créée, souvent « High Tech » (mais pas toujours), et suppose de
2
Source : M. TEISSIER DU CROS
LMBO: leveraged management buy out
4
Source : Fenwick & West
3
6
la part des financiers qui s’y intéressent une prise de risque importante dans l’espoir
de très fortes plus values.
Le capital-risque s'adresse à des de jeunes entreprises à fort potentiel de croissance
qui ont moins de cinq années d'existence (les start-up). En France, ces jeunes
pousses étaient près de 1300 en 2001, dont un peu moins de la moitié en phase
d’amorçage et de démarrage (la troisième phase - de développement - ne relève plus
du capital risque mais du capital développement).
A ces niveaux précoces de développement, leur carence en ressources internes les
empêche de s’autofinancer. Elles cumulent également de nombreux risques : la
viabilité du projet est à démontrer, l'équipe de dirigeants doit être constituée et rodée.
Elles rencontrent donc naturellement des difficultés pour obtenir des financements
bancaires ou accéder aux marchés financiers non spécialisés, en raison de leur
absence de passé comptable et de bénéfices.
Enfin, les plus-values attendues sont incertaines (le taux des sinistres est
relativement élevé) et différées à une échéance éloignée (cession de la
participation). Les fonds levés par les capital risqueurs sont en effet immobilisés pour
une durée de dix ans en moyenne, ce qui rend ces investissements illiquides.
En contrepartie de ce risque, les mises initiales pour des entreprises en création sont
relativement faibles (100 000 Euros en moyenne), et en cas de succès, les
perspectives de rentabilité sont très importantes. Les capital risqueurs réalisent en
moyenne des performances nettement au-dessus des actifs sans risque. Ainsi, pour
les investissements qu’ils ont réalisés entre 1992 et 2001, le taux de retour brut est
de 28,2 %, contre 6,5 % pour les obligations assimilées du Trésor (OAT)5.
Les trajectoires de ces jeunes entreprises sont très diverses, seules quelques-unes
connaissant des succès mémorables :
Ø 10 % des start-up financées par le capital risque au cours des dix
dernières années rapportent plus de cinq fois la mise initiale. Dans les
portefeuilles des capital risqueurs, ces succès compensent les très
nombreuses pertes.
Ø 44 % des firmes financées disparaissent ou ne rapportent pas la
mise initiale des investisseurs.
Ø Entre ces deux extrêmes, près d’un tiers des firmes financées
rapportent au moins deux fois la mise initiale.
La complexité des techniques développées par la plupart de ces entreprises, leur
fragilité financière, la polarisation de l’entrepreneur sur les problèmes technologiques
ou techniques rencontrés, son souci d’indépendance, constituent autant d’obstacles
à la mise en place d’un partenariat.
Le volume des capitaux prêts à s’investir sur des projets de cette nature sont encore
faibles en France, alors que ce sont ceux là qui ont fait la fortune et la renommée du
capital risque américain (Silicon Valley .dans les années 1970), moins entreprenant
aujourd’hui que dans le passé après avoir essuyé quelques échecs.
5
Source : AFIC (Association Française des Investisseurs en Capital).
7
La faiblesse des réalisations nationales dans ce domaine peut s’expliquer de
plusieurs façons6 :
Ø La pénurie de projets de qualité en raison de la petite taille du marché
français.
Ø La rétention de technologies dans des filiales de grands groupes alors
qu’elles ne les intéressent pas directement.
Ø La lourdeur de l’instruction d’un dossier : la forte connotation technologique
suppose une approche pointue de la filière retenue et du potentiel du marché,
donc l’intervention de spécialistes de haut niveau. Il faut aussi beaucoup de
temps pour mettre en forme le plan de développement, en discuter les
hypothèses, de mettre d’accord avec l’entrepreneur (en général peu
compétent dans ce domaine) sur les scénarii les plus probables aux plans
commercial et financier.
Ø La lourdeur du suivi : le chargé d’affaires en capital risque doit être impliqué
en permanence pendant toute la durée de vie de l’investissement.
L’insuffisance du rendement : peu d’affaires étant en mesure de supporter la
charge financière d’obligations convertibles ou même d’un dividende, la
rentabilité résulte uniquement de la plus value réalisée lors du
désinvestissement ultérieur (sortie de l’investisseur).
Ø Le risque de devoir participer à un deuxième tour de financement est élevé.
Ø Le risque de perdre la totalité de sa mise est plus que réel.
Ø Lorsque l’investisseur est issu du milieu bancaire, le risque de conflit
d’intérêt entre la position de prêteur et celle d’actionnaire vient se greffer aux
autres risques. Cette position étant gênante, voire dangereuse.
On distinguera donc deux façon de s’intéresser à ce marché :
La première consiste en une approche systématique d’une ou deux activité
bien délimitées en lesquelles on croit. Ce schéma exclue la gestion du risque par
diversification sectorielle des investissements. La meilleure protection contre le
risque de perte ou d’insuffisance de rentabilité passe ici par le recours à un
spécialiste du métier concerné qui sera associé à la prise de risque en investissant
marginalement à titre personnel ou, plus fréquemment, qui sera intéressé à la
performance et à la sortie ( attribution de bons de souscription lors du montage de
l’opération). Cette approche systématique est celle d’outils spécialisés, indépendants
ou missionnés par une grande structure selon un projet bien précis (X millions à
investir dans Y entreprises sur une , deux ou trois activités déterminées).
La deuxième tactique est de s’intéresser au capital risque à titre occasionnel,
parce qu’un dossier jugé intéressant a été porté à la connaissance d’un décideur,
dans une structure plus généraliste (comme une entité opérant sur le segment du
capital développement). Cette approche peut s’inscrire dans le souci d’une répartition
de portefeuille. La motivation pourra être la quête d’une image de dynamisme du
fonds de l’investisseur généraliste. Cette approche occasionnelle n’est pas exempte
de dangers : Le professionnalisme requis pour gérer un partenariat en capital risque
n’est pas forcement présent lors de la saisie épisodique d’une opportunité
contrastant avec le type de dossiers habituellement traités.
6
Source : A CHOINEL, Introduction à l’ingénierie financière, Banque Editeur, 1998.
8
Aujourd’hui, les fonds de capital risque sont essentiellement levés auprès
d’investisseurs traditionnels : les banques et leurs filiales (40%), les compagnies
d’assurances (11%), les fonds de pension (7%) et les caisses de retraite (6%)
dominent le marché français (les capitaux étrangers investis dans les entreprises
françaises représentent 30% des fonds levés)7.
Les grands groupes industriels sont relativement peu actifs sur le marché du capital
risque (11% des fonds levés en 2000 et seulement 5% en 2001) mais se situent plus
généralement en amont du financement : ils favorisent la création des jeunes
entreprises, les financent parfois, les rachètent souvent. En effet, quand les jeunes
pousses atteignent un stade de développement suffisant, les capital risqueurs
revendent le plus souvent leurs participations à de grandes entreprises, l’entrée sur
le Nouveau Marché étant plus rare.
Les personnes physiques (12% des fonds levés en 2001) investissent
majoritairement par l’intermédiaire des fonds communs de placement dans
l’innovation, les « business angels » ne représentant qu’une part minoritaire des
capitaux disponibles.
Les dix premiers capital risqueurs français en 1999 :
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
en nombre d'opérations
Innovacom
Spef
CDC Innovation
Natexis Vantech
3i France
Sofinnova
Galiléo
Auriga
Siparex
Dassault Développement
47
43
31
25
24
22
16
13
12
9
et en sommes investies (en M deFRF)
1 3i France
274
2 Apax Partners
236
3 Innovacom
201
4 Galiléo
139
5 Spef
132
6 ABN Amro Venture
131
7 Sofinnova
128
8 Viventures
119
9 CDC Innovation
117
10 PAI (Paribas)
63
Le capital risque peut poser plusieurs problèmes aux banques, et en particulier celles
de réseau :
Ø S’agissant en général de petites entreprises, l’exploitant généraliste,
interlocuteur principal de son client, n’est pas forcement bien formé pour
appréhender les opportunités qui se présentent à lui en capital risque.
Ø L’entrepreneur, quant à lui, sera divisé entre deux comportements lors de
sa quête de participation : Ecarter sa banque habituelle de la réflexion pour ne
pas l’inquiéter si la recherche de capitaux propres est plus longue que prévue
et surtout pour diversifier ses bailleurs de fonds afin d’ éviter une trop grande
dépendance face à un partenaire présent en haut et en bas de bilan. L’autre
tentation de l’entrepreneur est au contraire de pratique avec sa banque un
partenariat complet, de façon à gérer globalement sa relation financière mais
aussi pour impliquer la banque durablement, le banquier actionnaire étant
supposé plus attentif à la pérennité du financement de l’entreprise.
Ø En cas d’accord, une position de banquier principal ajoutée à une position
d’actionnaire peut rendre délicate l’obtention ultérieure par l’entreprise de
concours supplémentaires.
7
Chiffres 2001 fournis par le ministère de l’économie et des finances.
9
1.1.2 – LE CAPITAL DEVELOPPEMENT
Le capital développement consiste à accompagner en capital ou en quasi capital
l’entreprise déjà positionnée sur ses marchés, de façon à accélérer sa croissance,
tout en réalisant une plus value significative en fin de période.
Destiné à des entreprises en développement, il s'avère moins risqué, le potentiel de
l'entreprise pouvant être évalué sur des bases tangibles. Au moment de cette phase,
les organismes de capital-risque jouent le rôle d'accompagnateurs. Leur intervention
au titre du capital développement se justifie encore parce que les risques et les
besoins de financements restent élevés au regard des ressources. Lors de cette
phase de développement, les capitaux servent plus à développer les capacités de
production que l’innovation.
La différence entre capital risque et capital développement est assez floue pour
permettre dans certains cas au rapporteur d’un dossier d’en modifier la catégorie
d’appartenance. Elle correspond pourtant à des situations et à des modes de
raisonnement différents dans leur principe :
Ø Le risque de capital est moins important, la société étant déjà structurée. Le
débat porte plus sur l’appréciation du taux de croissance futur de l’entreprise
que sur ses chances de survie.
Ø L’instruction et le suivi du dossier sont facilités par la présence au sein de
l’entreprise de gestionnaires aptes à dialoguer sur les questions budgétaires
et financières avec les investisseurs.
Ø L’éventualité d’un conflit d’intérêt entre les actionnaires et les banquiers est
improbable.
1.1.3 - LE CAPITAL TRANSMISSION ET LE LBO
Le capital transmission est une branche du capital investissement qui consiste à
Financer (avec effet de levier) la cession d'une entreprise non cotée établie de
longue date, souvent à l'occasion du départ à la retraite du dirigeant fondateur, ou
encore d'un renouvellement des cadres dirigeants. Ces opérations de reprises
d’entreprises se situent donc en dehors du financement de l’innovation.
Afin de ne pas faire une énumération exhaustive des différentes formes de capital
transmission (LBI, BIMBO, IPO ?…), seul le LBO, qui connaît depuis plusieurs
années un engouement certain de la part des financiers et des entreprises, sera
développé dans cette partie.
Introduits en France depuis seulement le milieu des années 80, les LBO ont d'abord
concerné les petites entreprises, puis se sont étendus par la suite à des affaires plus
importantes. Aujourd'hui la taille des sociétés cibles ne semble plus connaître de
barrière, et les plus grosses opérations peuvent mobiliser jusqu'à plusieurs milliards
d’euros de capitaux. Ce sont maintenant même des sociétés cotées qui se retirent de
la bourse au moyen d’un LBO (« public to private » ou P to P). Le LBO est devenu
l'opération la plus prisée des capital investisseurs, car elle assure généralement de
façon "mécanique" des revenus substantiels et crée une croissance artificielle de
l'investissement.
10
Un LBO peut être défini comme l’achat d’une entreprise, financé partiellement par
emprunts, dans le cadre d’un schéma juridique spécifique et fiscalement optimisé où
les dirigeants sont associés en partenariat avec des investisseurs professionnels
spécialisés.
Une opération de LBO implique en principe un changement du contrôle au niveau de
l’entreprise achetée (la cible), les investisseurs financiers acquérant la majorité du
capital du holding de reprise.
Les prêts sont apportés principalement par les banques qui élaborent des
financements structurés. La structure d'endettement comprend le plus souvent
plusieurs tranches ainsi qu’une fraction intermédiaire entre fonds propres et
emprunts, appelée dette mezzanine. Plus la dette de la holding sera élevée, plus
l’effet de levier financier sera fort et donc meilleure sera la rentabilité des capitaux
propres (Cf. graphique ci dessous). D’un autre côté, le levier fiscal permettant la
déductibilité des intérêts de la dette jouera également en faveur de ce type
d’opération.
Les opérations de LBO sont orchestrées par un ou plusieurs fonds ou sociétés
d’investissement, qui interviennent de façon spécialisée sur ce segment du capital
investissement. Les investisseurs financiers mettent en œuvre les diligences
permettant de valider le business plan, mais n’ont pas vocation à prendre en charge
la direction opérationnelle de l’entreprise, et limitent en principe leur rôle à celui
d’actionnaire de référence et de contrôle.
Evolution des taux de rentabilité des fonds de LBO comparée à celle des autres fonds
d’investissement 8
Le LBO apparaît comme une solution de transmission d'entreprise particulièrement
intéressante, et souvent idéale :
8
Statistiques 2001 publiées par l’EVCA (European Private Equity and Venture Capital Association).
11
Ø Les opérations de LBO s’appuient sur les dirigeants en place. L’opération,
peu traumatisante pour le corps social des entreprises, est presque toujours
très bien accueillie par l’ensemble du personnel.
Ø Les fonds LBO, qui ont une approche très compétitive en matière de
valorisation des entreprises, offrent aux vendeurs une contrepartie de nature à
répondre à leurs objectifs patrimoniaux dans de très bonnes conditions.
Ø Dans les plus petites sociétés, où les actionnaires vendeurs assurent
également la direction de l’entreprise, le LBO peut s’accompagner de l’entrée
de nouveaux dirigeants qui, sans avoir à disposer personnellement de
capitaux importants, apportent le sang neuf nécessaire à la pérennité de
l’affaire.
Avec tous ces avantages, il n’est pas surprenant que les LBO soient en progression
rapide. A l’intérieur de la Communauté européenne, la France est devenue dans ce
domaine le leader continental, mais elle demeure encore en retard par rapport au
Royaume Uni et aux Etats-Unis, où le poids économique du LBO est plus que deux
fois celui que nous observons en France. De plus, si la France est bien le premier
marché d’Europe continentale en terme de volume d’opérations de LBO, il faut
observer un très fort déséquilibre dans l'origine des capitaux investis dans ces
opérations, qui proviennent en majorité d'investisseurs institutionnels étrangers.
1.2 – DES DEBUTS LENTS PAR RAPPORT AUX ANGLO-SAXONS
1.2.1- L’INDUSTRIE DU CAPITAL INVESTISSEMENT AUX ETATS UNIS,
EN EUROPE ET EN FRANCE EN 1996-97
1.2.1.1-
Aux Etats unis
Le venture capital américain se caractérise par des fonds importants et croissants
levés pour moitié auprès des fonds de pension et en partie auprès des nombreux et
richissimes business angels. Son marché de la technologie est très dynamique avec
une demande soutenue d’innovation de la part des groupes industriels. Les fonds
investis sont relativement liquides grâce au NASDAQ, réservé aux affaires de
croissance, qui prend le relais des venture capitalists lors des introduction en bourse
et leur permet de réinvestir dans de nouveaux projets. Enfin, du point de vue
sociologique, le capital investissement est majoritairement reconnu par la population
comme indispensable à la création d’entreprises et d’emplois.
En 1996, on comptait 1000 fonds d’investissements dont les deux tiers étaient
spécialisés dans l’innovation et le High tech. Les deux tiers des investissements
étaient réalisés dans les hautes technologies.
12
Les investissements étaient importants et en forte croissance :
1995
Années
Investissements en Mrds d’USD 7,6
1.2.1.2-
1996
9
1997
13
En Europe 9
L’activité de venture capital a démarré en Europe, au début des années 80, de façon
un peu disséminée avant que l’action ne soit coordonnée par l’association
européenne de capital investissement (european venture capital association EVCA),
cette dernière ayant été créée par Bruxelles. L’activité européenne de venture capital
est estimée, sous ses différentes formes (capital risque, capital développement et
capital transmission), grâce aux rapports annuels de cette association qui font office
de statistiques officielles.
Les capitaux levés en Europe et en France :
capitaux levés (en Mrds d’euros)
Europe
France
% de la collecte européenne
1996
8
1,1
13%
1997
20
0,7
3,5%
variation
+150%
-36%
-
L’origine des fonds européens de capital investissement : les banques (27%), les
fonds de pension (24%), les compagnies d’assurance (11%), les capitaux réinvestis
(16%).
Montant des investissements en Europe :
investissements (en Mrds d’euros)
Europe
Royaume Uni
France
% de la européenne
Allemagne
Pays Bas
1996
6,7
3
0,8
12,5%
0,7
0,6
1997
10
Variation
+42%
ND
1,3
+50%
13%
ND
Les types d’interventions réalisées (moyenne sur 5 ans) : buy out (43% notamment
au Royaume Uni), capital développement (43%), capital risque (6%). Ces chiffres
nous montrent l’aversion générale au risque que connaît l’Europe durant cette
période.
On constate de fortes disparités nationales au niveau de l’allocation des fonds entre
les différentes branches du venture capital en 1996 :
Ÿ Les pays leader en matière de capital risque sont la Finlande (23% de ses
investissements), la Belgique (18,5%) et les Pays Bas (15,5%).
9
Source : EVCA
13
Ÿ Les pays finançant le plus la phase de capital développement sont la
Belgique (72% de ses investissements), l’Allemagne (66%) et la France
(43%).
Ÿ les pays finançant le plus les opérations de capital transmission sont le
Royaume Uni (71% de ses investissements), la Suède (44%) et l’Italie (30%).
En 1996, l’essentiel des investissements est réalisé dans les industries classiques :
biens de consommation (20%), produits industriels (15%), services et autres produits
(21%). Seulement 19% des investissements concernent les hautes technologies.
Plusieurs conclusions se tirent d’elles même. Les petits pays comme la Finlande et
les Pays Bas sont dynamiques et soutiennent fortement la création d’entreprises. En
1996, la France est le pays du capital développement tandis que le Royaume Uni
celui du LBO.
1.2.1.3-
En France
10
La forte augmentation des capitaux investis en 1997 s’explique par le développement
des opérations de capital transmission (610 millions d’euros soit 49% des
investissements français). 95% de ces investissements ont été réalisés en France,
cette rétention des fonds démontrant l’intérêt du tissu économique et des projets
nationaux mais aussi leurs besoins de financement.
En 1997, le portefeuille investi est de l’ordre de 12,2 Mrds d’euros et 1,5 à 1,8 Mrds
sont disponibles pour investissements.
Investissements par stade de développement en 1997 :
Capital risque
Capital développement
Capital transmission
Rachat de positions
minoritaires
TOTAL
En Nb d’opérations
526
34%
559
36%
181
12%
En montant (M euros)
167
13%
382
30%
613
49%
Concours moyen (K euros)
320
686
3384
285
18%
96
8%
335
1551
100%
1259
100%
808
Investissements par secteur en 1997 : Biens de consommation (18%), produits
industriels (21%), services et autres produits (40%), hautes technologies (19%).
L’origine des fonds français levés en 1997 (655 M euros) : Les banques (58%), , les
compagnies d’assurance et caisses de retraite (10%), les industriels (28%) et les
apporteurs divers (4%).
En conclusion, pour l’année 1997, 160 fonds d’investissement ont investi 1,3 Mrds
d’euros, soit 8 millions d’euros en moyenne par fonds, ce qui est dérisoire. Ces
chiffres montrent que le capital investissement n’a pas réellement démarré. Les
investisseurs français doivent gérer la pénurie de ressources à laquelle ils font face.
10
Source : AFIC
14
Force est de constater qu’en 1997 l’Europe continentale, malgré le développement
de son marché, est très largement en retard par rapport aux pays anglo-saxons. Les
fonds d’investissement américains investissent plus à eux seuls que l’ensemble des
fonds européens, Royaume Uni compris, alors même que ce dernier est le leader
européen du capital venture. De plus, contrairement à la majorité des investisseurs
du vieux continent, les Etats unis se démarquent par la prédominance du capital
risque, stimulant de la croissance et de l’emploi, alors que l’Europe plébiscitera plutôt
le capital développement et le capital transmission, moins risqués.
Le constat est donc que l’Europe, à travers ses investisseurs et ses apporteurs de
fonds, était trop frileuse pour pouvoir bénéficier des effets positifs du capital risque.
1.2.2- L’IMPULSION NECESSAIRE DES POUVOIRS PUBLICS
1.2.2.1- Au niveau européen
Une communication de la Commission Européenne du 31 mars 1998 soulignait que
les marchés de capital investissement (marchés boursiers spécialisés dans le
financement des sociétés à forte croissance et marché du capital risque), jouent un
rôle crucial dans le démarrage et le développement de nouvelles entreprises, et donc
dans la création d'emplois. Une comparaison avec les États-Unis révélait que ces
marchés étaient encore manifestement sous-développés dans l'Union européenne.
Les entrepreneurs européens n’avaient pas suffisamment accès au capital
nécessaire au démarrage et au développement de leur entreprise. D'autre part, les
investisseurs de capital investissement manquaient de bonnes opportunités de
placement. Ce manque de dynamisme avait des répercussions négatives sur la
capacité de l'Union européenne à exploiter ses propres idées novatrices et à réaliser
tout son potentiel de création d'emplois.
Dans son étude, la Commission avait identifié six catégories de barrières à la
création de marchés de capital investissement à l'échelle européenne 11 :
•
•
•
•
11
les marchés nationaux étaient encore fortement cloisonnés, ce qui réduisait à
la fois la capitalisation et la liquidité des marchés ;
des barrières institutionnelles et réglementaires persistaient, faute d'un cadre
réglementaire satisfaisant aux niveaux européen et national. Ceci était
notamment le cas pour la réglementation relative aux fonds de capital-risque,
aux investisseurs institutionnels (entreprises d'assurance, fonds de pension),
aux services d'investissement et aux règles comptables ;
les systèmes fiscaux nationaux des États membres semblaient pénaliser les
investissements en capital investissement. Premièrement, les dividendes
étaient généralement soumis à des taux d'imposition plus importants que les
intérêts bancaires et obligataires. Deuxièmement, il apparaissait important que
les impôts sur les plus-values ne soient pas un frein à l'investissement.
Troisièmement, les régimes fiscaux applicables aux fonds de capital-risque
manquaient généralement de clarté ;
dans le secteur de la haute technologie, la pénurie de nouvelles PME, et le
manque d'opportunités d'investissement qui en résultait, étaient
Source : rapport 2001 de la commission européenne sur le PACI
15
•
•
particulièrement aigus. Cette pénurie était accentuée par la rareté des réseaux
ou concentrations géographiques de PME de haute technologie et par un
environnement juridique et réglementaire (règles en matière de propriété
intellectuelle et exigences administratives lors de la création d'entreprises) peu
favorable à l'innovation et à la création d'entreprises ;
les ressources humaines disponibles pour des projets d'investissement en
capital-risque (entrepreneurs et experts qualifiés) étaient insuffisantes ;
des facteurs « culturels », comme le comportement des investisseurs à l'égard
du risque et l'absence d'une culture d'entreprise dans les écoles et les
universités, freinaient la formation d'une nouvelle génération d'entrepreneurs
européens.
La commission a donc proposé un plan d'action sur le capital investissement (PACI)
pour éliminer ces obstacles et améliorer ainsi que les conditions de développement
du capital investissement dans l'Union Européenne. Certaines des actions proposées
(comme, par exemple, la réforme du système de brevet européen) nécessitaient un
effort au niveau de l'Union européenne, tandis que d'autres (comme la clarification de
l'environnement fiscal pour les entreprises) devaient être exécutées par les États
membres eux-mêmes.
1.2.2.2- Au niveau national
Conscients de l’intérêt économique et des lacunes en matière de financement des
projets innovants, les pouvoirs publics français ont mis en place des mesures visant
à favoriser les investissements en matière de capital risque.
La politique de soutien au capital-risque s’est développée autour de deux axes
principaux : La recherche d’effets de levier et les incitations fiscales
(assouplissement de l’imposition).
Les pouvoirs publics ont cherché à soutenir l’activité du capital-risque sans
l’administrer, ni se substituer à l’initiative privée. En amorçant la mise initiale, l’Etat
souhaite stimuler la disponibilité des fonds à investir pour le capital-risque. Cet effet
de levier financier prend la forme de "fonds de fonds".
Ainsi, le fonds public pour le capital-risque (FPCR), géré par la caisse des dépôts et
consignations (CDC), a été doté en 1998 de 90 millions d’euros par l’Etat français et
de 45 millions d'euros par la Banque européenne d’investissement (BEI).
Cette initiative a été relayée en 2000 par le Fonds de promotion pour le capital
risque, doté de 150 millions d’euros à part égale entre l’Etat, le fonds européen
d’investissement et la caisse des dépôts. Il a axé ses interventions dans les secteurs
où les financements privés sont les plus difficiles à mobiliser : biotechnologies,
électronique, environnement.
Autre effet de levier, l’ANVAR (Cf. encadré) soutient financièrement les projets
innovants des PME, le plus fréquemment sous forme d’avances remboursables. En
1998 et 1999, près de 350 entreprises aidées par l’Agence ont levé près de 610
millions d’euros auprès de capital risqueurs. Depuis début 2001, l’ANVAR apporte, à
titre expérimental, des fonds propres sous forme de bons de souscription d’actions
(BSA), qui lui permettent de ne pas intervenir directement dans la gestion. Une
vingtaine d’entreprises étaient concernées fin 2001 pour un montant de 9,5 millions
d’euros.
16
Enfin, la banque de développement des PME (BDPME), en partenariat avec les
banques, mutualise les risques des PME innovantes. Fin 2001, elle est recapitalisée
à hauteur de 70 millions d’euros.
ANVAR : Agence Nationale pour la Valorisation de la Recherche12
L'ANVAR est un établissement public français de co-financement de l'innovation dans
l'entreprise, placé sous la tutelle du ministère chargé de l'Industrie, des PME et de la
Recherche. Pour être habilitée à recevoir des capitaux collectés par un FCPI, une société doit
avoir été reconnue comme innovante par l'ANVAR, ou encore consacrer 33% au moins de
son chiffre d'affaires à la recherche/développement.
La politique publique s’est efforcée de faciliter le drainage de l’épargne vers les
placements à risque en proposant une fiscalité favorable. En France, l’effort fiscal en
faveur des investisseurs dans le non coté s’est concrétisé à partir du milieu des
années 1980 avec la mise en place des sociétés de capital risque (SCR) et des
fonds communs de placement à risque (FCPR), qui sous certaines conditions
permettent une neutralité fiscale.
SCR (Société de capital risque)13
Société anonyme créée par la loi du 12 juillet 1985 visant à encourager le financement de
sociétés non cotées et bénéficiant pour ce faire de la transparence fiscale pour les opérations
de capital investissement qu'elle réalise : l'imposition est reportée sur les actionnaires à qui
ces revenus sont reversés, ce qui évite une double imposition. C'est la première structure
juridique en France à aménager la transparence fiscale à fin d'encourager le capital
investissement. La SCR est pénalisée par des règles comptables compliquées, visant à isoler
les revenus issus d'activités autre que le capital investissement (dépôts, prêts, contrats à
terme), pour les soumettre à un régime fiscal séparé. Le FCPR a largement supplanté la SCR.
Sa situation nette comptable doit être présentée de façon constante à concurrence de 50%
des parts, actions, obligations convertibles, titres participatifs ou certificats d’investissement
émis par des sociétés ayant leur siège dans un Etat de l’Union Européenne, non cotées sur
un marché réglementé, exerçant une activité industrielle ou commerciale et soumises à l’impôt
sur les sociétés.
Une SCR ne peut détenir en titres d’une même société plus de 25% de son capital. Elle ne
peut servir d’instrument de contrôle à un groupe (aucun actionnaire direct ou indirect ne peut
détenir 40% des droits de vote).
14
FCPR : Fonds Communs de Placement à Risque
Créés par la loi du 3 janvier 1983, les FCPR ont pour but de favoriser le financement du non
coté par les particuliers, à travers un régime juridique et fiscal incitatif. L'actif d'un FCPR doit
être composé pour 50% au moins de sociétés européennes non cotées (ou cotées au seul
Nouveau Marché). Les FCPR et leurs souscripteurs bénéficient d'avantages fiscaux : la
transparence fiscale fait que le FCPR, qui n'a pas de personnalité juridique, n'est pas soumis
à l'impôt ; les revenus (plus-values et dividendes) perçus par le souscripteur et provenant de
parts de FCPR conservées cinq ans sont exonérés d'impôts.
Le fonds doit être géré par un organisme agréé (banque) qui détiendra un quantum de parts.
Le calcul de la valeur liquidative s’effectue sous le contrôle d’un commissaire aux comptes.
Les types d’interventions sont limitées par la réglementation (pas d’intervention en compte
courant ou sous forme de prêt à plus de deux ans).
12
Source : 123 Venture
Source : 123 Venture
14
Source : 123 Venture
13
17
Lancé en 1997, le fonds communs de placement innovation (FCPI) est un produit
d'épargne publique bénéficiant d'avantages fiscaux particulièrement attrayants pour
les particuliers. Ces fonds ont vocation à investir dans des entreprises innovantes
non cotées, axées essentiellement sur les secteurs de l'industrie, l'informatique, les
sciences médicales, les biotechnologies et les technologies de l'information. Les
raisons de se pencher sur ce type d'investissement sont nombreuses : performance
élevée, avantages fiscaux, décorrélation par rapport au marché du coté. Fin 2001, on
dénombre ainsi 31 FCPI.
Le montant des fonds collectés chaque année suit une progression constante,
s'élevant de 100 millions d'euros en 97, 250 millions en 99, 430 millions en 2000 et
enfin 600 millions d'euros en 2001.
En 2001, le Ministère des Finances a validé le cadre juridique des FCPI en
reconduisant ce dispositif pour 5 ans. Autrefois réservé à une élite, l'investissement
dans le non coté a ainsi réussi sa démocratisation avec succès. Ce nouveau véhicule
d'investissement, alliant adroitement mutualisation du risque et incitation fiscale,
semble en effet avoir de beaux jours devant lui.
FCPI : Fonds Communs de Placement dans l'Innovation15
Créés par la loi du 30 décembre 1996, les FCPI sont une sous catégorie de FCPR destinés à
favoriser le financement de l'innovation industrielle. L'actif d'un FCPI doit être composé pour
60% au moins d'actions de sociétés françaises dites " innovantes ". Une entreprise est "
innovante " si elle a été reconnue comme telle par l'ANVAR, ou encore si elle consacre au
moins 33% de son chiffre d'affaires à la recherche/développement. Les FCPI et leurs
souscripteurs bénéficient d'avantages fiscaux : la transparence fiscale fait que le FCPI, qui n'a
pas de personnalité juridique, n'est pas soumis à l'impôt. Pour le souscripteur, le placement
initial est partiellement déductible de l'assiette de l'impôt sur le revenu, à concurrence de 25%,
et dans une limite de 75.000FF par personne (ou 150.000FF/couple) ; les revenus (plusvalues et dividendes) perçus par le souscripteur et provenant de parts de FCPI conservées
cinq ans sont exonérés d'impôts.
De plus, les contrats, dits "DSK", ont permis de drainer près de 700 millions d’euros
pour le financement de l’innovation (5 % des placements). Ils exonèrent de l’impôt le
produit financier des contrats d’assurance vie de plus de huit ans investis dans des
actions françaises à risque. Les investisseurs privés (business angels) se
développent, encouragés par exemple par le report des plus-values réinvesties dans
les nouvelles entreprises (1998). Enfin, les bons de souscription pour les créateurs
d’entreprise incitent fiscalement à la création d’entreprises.
15
Source : 123 Venture
18
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Le 25 octobre 2001, la Commission a présenté un texte qui dressait un bilan de miparcours analysant les progrès accomplis depuis la mise en œuvre du PACI dont
l’échéance est prévue courant 2003.
Si la Commission s’est satisfait des performances spectaculaires des marchés de
capital investissement en Europe et du fait que tous les Etats membres ont profité de
cette croissance, elle a rappelé que des différences importantes subsistent et que le
marché européen reste fragmenté. La chute des marchés boursiers, le
ralentissement de la croissance économique et les événements du 11 septembre
2001 aux Etats-Unis ont eu un impact négatif sur l'évolution du secteur en Europe.
Même si la mise en place d'un cadre réglementaire adapté au capital investissement
s'est poursuivie, nombre d'obstacles demeurent tels que l'absence de brevet unique
et certaines discriminations fiscales.
D'autre part, le développement et la promotion de l'esprit d'entreprise en Europe ont
été favorisés et des mesures importantes ont été prises en ce qui concerne les
financements publics : la Commission a par exemple clarifié sa position par rapport
aux aides d'État.
En conclusion, malgré les progrès réalisés, l'activité de capital investissement doit
encore beaucoup se renforcer avant que l'Europe ne prenne la tête de ce secteur au
niveau mondial comme cela a été envisagé à Lisbonne.
19
2 – VERS LA CONSOLIDATION DE L’ACTIVITE
2.1 – L’AGE D’OR DU CAPITAL INVESTISSEMENT : les année 1999
et 2000
2.1.1- AUX ETATS UNIS 16
Dans les années fastes, les Etats-Unis comptaient plus de 1 000 officines de capitalrisque. Les 80 plus gros établissements gèraient au total plus de 50 milliards de
dollars. En 1997, les fonds de capital risque ont collecté 10,4 milliards de dollars.
Cette manne a permis aux chasseurs de start-up d'investir 11,5 milliards de dollars
dans 1 850 jeunes entreprises. Les technologies de l'information ont accaparé 60 %
des opérations recevant 7,1 milliards de dollars.
Même si les performances passées ne sont jamais garanties pour le futur, elles ont la
vertu de séduire les clients. Les ultimes financiers de l'innovation ont été les fonds de
pension, qui ont vu dans le capital risque une diversification encore plus rentable à
long terme que la Bourse. Le seul problème est qu'il est aussi plus risqué. Les
investissements en actions non cotées des fonds de pension seraient passés de 0,5
% de leurs réserves en 1982 à plus de 4 % en 1999.
Aux Etats unis, le venture capitalism est un maillon indispensable de la chaîne de
financement des entreprises innovantes, mais il ne serait rien sans le Nasdaq, le
marché des valeurs de croissance, où les start-up bien cotées peuvent réaliser une
plus-value réinvestissable dans d'autres projets. L'envolée de WallStreet dans les
années 90 a eu un effet multiplicateur sur ce recyclage des investissements. Non
seulement les jeunes entreprises entraient en bourse à des cours élevés, mais la
hausse des autres actions réinjectait plus d'argent dans le circuit.
Profitant de ce climat exceptionnel, les venture capitalists collectaient et
investissaient des sommes exponentielles. A tel point que des vétérans de la Silicon
Valley commençaient à redouter les effets pervers de cette avalanche de capitaux.
Certains fonds n'avaient pas d'expérience et payaient trop cher leurs participations.
En cas de ralentissement de al bourse, les mauvaises sociétés ne pourraient plus s'y
faire coter et les bonnes seraient valorisées moins cher à l'introduction. D'autres
s'inquiètaient pour la santé des affaires. Le risque étaient que plusieurs venture
capitalists financent des entreprises similaires qu'ils croient uniques.
Enfin, certains commençaient à chercher en Europe les futures success stories, où il
y avait moins de capitaux à risques et de tradition entrepreneuriale mais une quantité
de talents technologiques sous utilisés. Mais si la Vallée a engendré un modèle de
création d'entreprises unique au monde, c'est bien la seule de ses inventions qu'elle
ne savait pas exporter .
16
Source : L'Expansion 09/07/1998
20
2.1.2- En Europe
La fin des années 90 a été marquée par une réelle montée en puissance du capital
investissement européen. On a en effet pu constaté les fruits des mesures
européennes et nationales qui se sont soldées par un très net progrès des fonds
levés et investis.
Evolution des fonds de capital investissement levés et investis en Europe (M euros) 17
Preuve de la croissance fulgurante de l’activité, ce sont pas moins de 44% du total
des investissements de ces dix dernières années qui ont été concentrés sur les
années 1999 et 2000.
Parmi les avancées réalisées, on remarquera que le capital risque européen n’est
pas laissé pour compte. Représentant entre un quart et un tiers des investissements
en capital sur les années 1999, 2000 et 2001, les européens semblent avoir enfin
pris exemple sur le modèle américain dont le marché est tout de même encore
quatre fois supérieur à celui de l’Europe des 15.
Montants des fonds investis dans le capital risque selon les stades de développement 18
2.1.3- En France 19
Le capital investissement français est devenu le deuxième marché en Europe
Continentale, derrière l’Allemagne. La croissance des liquidités prêtes à être
17
Source : EVCA
Source : EVCA
19
source : Pierre Briançon (l'Expansion 30/03/2000)
18
21
investies sur le secteur du non coté, l’adaptation du cadre juridique et fiscal, et le
positionnement habile des opérateurs ont permis à la France de rattraper son retard
en la matière.
Montants investis en millions d’euros 20
1995
523
Nouveaux investissements
70%
228
Refinancements
30%
TOTAL
751
1996
596
68%
280
32%
876
1997
978
78%
281
22%
1259
1998
871
49%
917
51%
1788
1999 2000
1951
69%
865
31%
2816
1999 a été marquée par une nouvelle progression du capital investissement français
(+ 57% d’investissements et + 65% d’opérations). Avec 11% du total des
investissements et 23% du nombre total d’opérations réalisés par les membres de
L’EVCA, la France prenait la première place européenne. 2131 entreprises ont
bénéficié d’apports en capitaux pour un montant moyen de 1,1 million d’euros (contre
0,9 en 1998).
La part des nouveaux investissements s’était stabilisé autour de 70%, confirmant la
dynamique de création d’entreprises en France.
Au niveau de la répartition des investissements selon la taille des entreprises
financées, on constate que les entreprises de moins de 100 salariés totalisent 71%
des opérations de financement et 44% des montant investis.
Répartition des investissements par stade de développement (en nombre et en montant) 21
Amorçage
création
Post-création
développement
Transmission succession
Rachat de positions
minoritaires
TOTAL
1995
Nb
Mt
1996
Nb
Mt
1997
Nb
Mt
1998
Nb
Mt
1999
Nb
Mt
1%
14%
16%
41%
13%
0%
5%
6%
34%
34%
0%
5%
20%
36%
8%
0%
10%
7%
41%
29%
1%
16%
17%
36%
12%
0%
7%
6%
30%
49%
1%
12%
15%
36%
24%
0%
7%
7%
33%
46%
2%
13%
18%
38%
18%
2%
5%
11%
38%
38%
15%
21%
20%
13%
18%
8%
12%
7%
11%
5%
2000
Nb Mt
100% 100% 100% 100% 100% 100% 100% 100% 100% 100%
Nb : nombre d’investissements Mt : montant des investissements
L’élément marquant dans l’évolution de la répartition des investissements en capital
est la progression du capital risque (amorçage, création et post-création) qui
totalisent 18% des fonds et 33% des opérations en 1999 (contre 11 et 31% en 1995).
Spécificités du marché Internet qui demande très tôt des capitaux importants, volonté
d’assurer une base solide de fonds propres aux jeunes entreprises, apparition de
nouveaux acteurs (les industriels) et développement des FCPI (investisseurs
individuels) et arrivée de fonds pan-européens sont autant d’éléments explicatifs de
cette évolution. Les montants alloués au capital risque ont ainsi été multipliés par 6
entre 1995 et 1999 et par deux entre 1998 et 1999 (de 259 à 518 millions d’euros).
20
21
données AFIC
données AFIC
22
la tendance était déjà à la consolidation globale du secteur, avec les dix principales
sociétés de capital-risque réalisant 65 % des opérations, et investissant 68 % de
l'argent mobilisé (il y avait 28 fonds de capital-risque en 1999). Dans le top 10 des
capital risqueurs, on retrouvait Apax Partners, 3iFrance, CDC Innovation, Galiléo,
Sofinnova, Dassault Développement, Natexis, Viventures, Innovacom et Paribas
Affaires Industrielles (PAI). En comparaison, le marché américain du capital risque
restait toujours beaucoup plus actif, même si les taux de croissance y étaient
inférieurs à ceux de la France. Ainsi, les 518 millions d’euros investis dans
l'Hexagone en 1999 étaient à rapporter aux 11,7 milliards que les venture capitalists
américains ont investis la même année dans des start-up. Sans oublier que le
montant moyen de l'investissement outre Atlantique était alors de 12 ,6 millions
d’euros - dix fois plus qu'en France.
Les opérations de développement et de transmission représentent à parts égales les
trois quarts des investissements en valeur.
Répartition des investissements par secteur d’activité (en nombre)
Secteurs
Technologies
Biens de consommation
Industrie
Tertiaire
autres
TOTAL
1995
Nb part
483
229
276
116
40
1444
42%
20%
25%
10%
3%
100%
1996
Nb part
695
319
372
235
70
1691
1997
Nb part
41%
19%
22%
14%
4%
100%
611
277
389
239
35
1551
39%
19%
25%
15%
2%
100%
1998
Nb part
609
321
336
197
81
1544
39%
21%
22%
13%
5%
100%
1999
2000
Nb part Nb part
1200
328
469
299
249
2545
47%
13%
18%
12%
10%
100%
La progression des investissements dans le secteur technologique
(télécommunication, informatique, électronique, biotechnologie) est très nette. Elle
s’est en partie faite au détriment des secteurs de l’industrie et des biens de
consommation. La part des opérations réalisées dans les domaines des technologies
de l’information et des sciences de la vie représente 93% du secteur. Le virage
Internet a été efficacement négocié, l’activité pesant à elle seule 10% de l’ensemble
des investissements réalisés en France en 1999 soit 274 millions d’euros.
En croisant les différentes données, on constate que le montant des fonds investis
en 1999 par des sociétés françaises de capital-risque dans les nouvelles
technologies a augmenté de 236 % par rapport à 1998 (346 millions d’euros contre
103). Le nombre des start-up ainsi financées a plus que doublé (281 nouvelles
entreprises ont été financées en 1999 contre 111 en 1998).
Les chiffres confirment également la montée en régime d'Internet qui a recueilli 37 %
des fonds levés en 1999. Au second semestre 1999, Internet représentait 45 % des
investissements réalisés, les logiciels, 22 %, les télécoms et la biotech, 12 % chacun.
Autre constatation : la continentalisation des investissements. Au second semestre
1999, un fonds de capital risque français sur trois a investi dans des start-up
européennes (30 opérations pour un montant de 95 millions d’euros).
Fin 99, les taux de rendements du capital investissement français affichent une
progression spectaculaire pour plusieurs raisons : le TRI des sociétés cédées en
1999 a augmenté (17,3% contre 14,2% en 1998). Les valeurs estimatives des
sociétés en portefeuille se sont appréciées sous l’effet conjugué de la hausse des
23
indices boursiers (hausse du CAC de 50% en 1999), d’une pus grande liquidité
offerte par la création des marchés de croissance (Euro NM, Easdaq) et d’un
environnement économique favorable.
Evolution des taux de rendement par stade de développement
Capital risque
Capital développement
Capital transmission
Capital investissement
TRI sur 10 ans en 98 TRI sur 10 ans en 99 TRI sur 5 ans en 98 TRI sur 5 ans en 99
21,9%
48,7%
23,8%
45,7%
29,1%
50,6%
16,1%
23,6%
33,3%
47,2%
Le capital transmission, avec les taux de rendement les plus élevés sur 5 et 10 ans,
apparaissait comme le créneau d’investissement le plus profitable.
Taux de rendement moyen dégagé en fonction de l’année d’investissement 22
On remarque que les taux de rendement, en constante augmentation, sont basés sur
des estimations étant donné que la part des sociétés encore en portefeuille s’accroît.
Plus généralement, cette tendance à la croissance des volumes levés et investis et
des rendements du capital investissements s’est poursuivie jusqu’en 2001, année
ayant connu un renversement de tendance : l’éclatement de la bulle internet.
22
source : Arthur Andersen - AFIC
24
2.2 – L’ECLATEMENT DE LA BULLE ET LE RETOUR A LA
PRUDENCE
2.2.1- ECLATEMENT
DE
INVESTISSEMENTS 23
LA
BULLE
ET
CHUTE
DES
L'industrie du capital investissement tient le cap malgré la désillusion engendrée par
la chute des valeurs de la «nouvelle économie». Dans ce contexte économique
difficile, l'industrie européenne du Private Equity a démontré une certaine
robustesse, avec des volumes d'investissement 2002 en augmentation de 12% par
rapport à 2001 (-23% par rapport à 2000), et ce malgré des levées de fonds en forte
baisse (-50% par rapport à 2001 et -59% par rapport à 2000). Telle est la principale
conclusion de l'EVCA fin 2002. « Les statistiques montrent un environnement difficile
pour la levée de fonds en 2002, avec 19,4 milliards d'euros levés et 27,2 milliards
d'euros investis ». Selon l'association, les fluctuations au sein des classes d'actifs ont
forcé les investisseurs institutionnels à rééquilibrer leurs allocations d'actifs, ce qui a
eu un impact sur le niveau des fonds dédiés au private equity ».
«Les années 2001 et 2002 ont été une période de réorganisation des portefeuilles
de capital investissement durant laquelle la valorisation des entreprises a retrouvé
des niveaux plus raisonnables par rapport aux excès des années précédentes»,
déclarait Edoardo Bugnone, directeur de l'EVCA pour l'année 2001-02.
Le marché des levées de fonds est un sujet sensible puisqu'il donne une idée des
moyens à la disposition des professionnels. Si la réduction des fonds de capital
investissement levés en 2001-02 par rapport à 2000 semble drastique, l’année 2002
se classe tout de même au deuxième rang en terme de fonds investis depuis 1990.
En somme, selon Edoardo Bugnone, cette période ne représente qu'une « pause »
dans la croissance du capital investissement.
Fonds européens de capital investissement levés et investis (en millions d’euros)
23
Sources : Enquête 2001 de l’EVCA réalisée par Price Waterhouse Coopers dans 28 pays européens. Et
Enquête 2002 du bureau d'études britannique AltAssets paru dans les Echos.
25
Concernant l’origine des fonds levés, les sources de financement des fonds de
private equity sont demeurées les mêmes, la part des fonds de pension reculant tout
de même de 27% du total en 2001 à 18% en 2002.
Origine des fonds levés en 2001
Quant à la provenance géographique des fonds, le Royaume-Uni constitue toujours
le plus important pourvoyeur de capital investissement avec 77 % des sommes
levées par les fonds locaux. Sur le continent, la principale information à retenir
concerne la très bonne cote des fonds basés en France avec 12 % de « parts de
marché ». Cela reflète l'enthousiasme actuel des investisseurs pour les
professionnels français. A l'inverse, les firmes basées en Allemagne, qui avaient
attiré 10 % du total réuni en 2001, n'ont rassemblé que 2 % en 2002. Un signe de
l'atonie du marché local.
.
26
2.2.2- L’EXCEPTION FRANCAISE
La France n’a bien entendu pas été épargnée par le retournement de la conjoncture
internationale de 2001 qui s’est illustrée par une chute des investissements dans les
entreprises non cotés qui ont baissé de 38% à 3,3 milliards d'euros en 2001. L'étude
annuelle de l’AFIC révélait ainsi la première baisse du capital investissement depuis
le décollage de cette activité en 1997. La morosité du secteur boursier et l’éclatement
de la bulle Internet expliquaient cette frilosité des investisseurs. Sans être une
surprise, ces chiffres traduisent le formidable coup de frein au financement de la
création d'entreprise. La France a subi de plein fouet les déconvenues de l’ensemble
des marchés spécialisés dans les valeurs de croissance.
Pourtant, la France s’est distinguée des autres pays européens par ses
performances en 2002 qui a été une année record en terme d’investissement dans le
non coté. En effet, en dépit d’une conjoncture toujours difficile, les montants investis
en 2002 ont augmenté de 78% par rapport à 2001 et dépassent de 10% le record de
2000. Cette performance provient du dynamisme du marché du LBO, et tout
particulièrement de la réalisation de très grosses opérations telles que Elis, TDF, VU
presse pro, Sigma Kalon et Legrand, cette dernière représentant à elle seule 1,76
milliards d’euros. Le LBO de taille moyenne affiche également une progression
remarquable de 14%.
Par contre, le capital-risque est en repli de 12%, et la plupart des investissements de
ce type sont des refinancements d’opérations passées. Les levées de fonds, en recul
de seulement 18%, reviennent au niveau de 1999. Mais les fonds restant à investir
par les professionnels français représentent 6,2 milliards d’euros à fin 2002.
Malgré la situation de la Bourse, les cessions progressent significativement,
soutenues notamment par le nombre de LBO secondaires et l’apparition des
«leveraged recap».
La France est désormais le premier pays de destination des investissements en
private equity devant le Royaume-Uni, l’Italie et l’Allemagne.
27
Management et destination géographiques des investissements en 2002
Mais la principale leçon à retenir tient au fait que la baisse des levées masque des
fortunes très diverses. En clair, si les firmes spécialisées dans les acquisitions à effet
de levier (LBO) affichent une bonne résistance, les spécialistes du capital risque,
peinent, eux, à séduire les investisseurs.
En revanche, un plus grand nombre d'entreprises a bénéficié de fonds de capital
développement : 64% en 2002, contre 54% l'année précédente. Parallèlement, les
cessions ont été rendues plus difficiles par le contexte déprimé et la crise boursière.
Elles ont atteint 8,1 milliards d'euros en 2002, contre 12,5 milliards d'euros en 2001,
les introductions en bourse ne représentant que 1,1% du total en 2002.
2.2.3- BAISSE DU CAPITAL RISQUE EN FAVEUR DU CAPITAL
TRANSMISSION : LE CAPITAL PRUDENCE
Depuis l’éclatement de la bulle Internet, il n’est pas étonnant que les investisseurs
aient opté pour des secteurs à moindre risque. En France, les opérations de LBO,
ces reprises d’entreprises avec des montages à effet de levier, ont hérité de 59% des
fonds investis par la profession en 2001 (1,94 milliard d'euros) et de 77% des fonds
en 2002. En revanche, les investissements dans l’amorçage ou la création
d’entreprises sont en nette diminution : 560 millions d'euros investis dans la création
en 2001, soit moitié moins que l'année précédente, et 493 millions en 2002.
L’AFIC veut voir dans ces chiffres qui retombent à des montants proches de ceux de
1999 les signes d'une consolidation de l’activité. Sur les six dernières années, les
investissements n'ont-ils pas été multipliés par quatre ? Le capital investissement
continue à jouer un rôle moteur puisqu’il accompagne 1500 entreprises.
28
2.2.3.1- Baisse du capital risque 24
A l’échelle européenne, le capital risque a souffert des difficultés macroéconomiques. La baisse des valeurs technologiques d'avril 2000 a brutalement
changé la donne. Les perspectives de mise en Bourse sont devenues de plus en
plus rares. Les reports d'introduction et les baisses des valorisations foisonnent,
tandis que les dépôts de bilan s'accumulent. Banquiers et capital risqueurs s'arment
de patience. Ceux qui en ont encore les moyens se concentrent sur le refinancement
des sociétés de leur portefeuille, et y regardent à deux fois pour les nouveaux
dossiers qui se présentent. Au total, le montant et le nombre d'opérations en 2002
s'inscrivent en diminution par rapport à 2001.
En 2001, l’activité est inférieure de 25 % à celle de 1999. Les pertes sèches ont
doublé entre 1999 et 2001. Le montant des entrées en bourse des jeunes pousses
sur le Nouveau Marché a été divisé par cinq.
Affairés à réorganiser leur portefeuille, les capital risqueurs européens se réjouissent
de ne pas connaître le sort de leurs homologues américains, victimes d'une vague de
dépôts de bilan. « Ils sont pourtant contraint de consacrer une grande partie de leur
temps au refinancement de leur portefeuille et à la survie de leurs participations »,
assure Philippe Grand, responsable des secteurs biotechnologies et start-up pour
Ernst & Young. Certains envisagent de consacrer une part importante de leurs
investissements à aider les sociétés dans lesquelles ils ont déjà investi. Les
montants investis par les capital risqueurs européens au deuxième trimestre 2001
ont chuté de 45 % par rapport au trimestre précédent, selon le cabinet Venture
Economics.
Pour conserver les faveurs de leurs actionnaires, les capital risqueurs préfèrent
revenir aux sociétés technologiques et biotechnologiques et délaissent les sociétés
d’e-commerce qui ne trouvent plus d'investisseurs.
Autre conséquence, les pactes d'actionnaires sont plus serrés, renforçant les
garanties des investisseurs (utilisation de clauses d'ajustement si les objectifs n'ont
pas été respectés). Ce qui risque de provoquer une hécatombe chez les incubateurs,
confrontés à des conditions toujours plus draconiennes à chaque tour de
refinancement de leurs jeunes pousses.
En 2001, la position de la France s’est fortement détériorée en termes d’intensité des
investissements en capital-risque : elle rétrograde de la troisième position en 2000, à
la dixième au sein de l’Union européenne.
24
Source : l’Expansion (19/07/2001)
29
En 2001, le marché français des investissements technologiques, dont les flux ont été divisés par trois
en un an, a constaté le recul des technologies de l’information et de la communication (TIC) et de
l’électronique qui ne représentent plus que 61% des investissements contre 86% en 2000.
Répartition des investissements technologiques du capital investissement en France
Le poids du capital risque dans le financement de l’innovation est très modeste. Avec
1,3 milliard d’euros investis en 2001, le capital-risque ne couvre qu’une faible part
des besoins des entreprises. Les financements publics de l’innovation représentaient
quand à eux 2,8 milliards d’euros. Pour l’ensemble de l’économie, les entreprises ont
émis 87 milliards d’euros d’actions, et l’encours des crédits à long terme a atteint 19
milliards d'euros.
2.2.3.2- Développement du capital transmission
Alors que le marché du « venture capital » a été stoppé net dans son expansion par
le dégonflement de la bulle Internet, les opérations de LBO de taille supérieure au
30
milliard d'euros se multiplient : TDF, Legrand et Aprovia en France ; NCP, Unique
Pub au Royaume Uni, Smurfit en Irlande, Demag/stabilus en Allemagne. On a pu
constaté à ce sujet la présence de «méga-fonds LBO» qui représentent une part
importante des investissements 2002. Une tendance qui confirme l'appétit du secteur
pour les très grosses opérations.
« La déprime du marché des fusions et acquisitions, ainsi que le marasme
économique qui ont joué leur part dans les restructurations des entreprises et la
vente d'actifs non stratégiques, a constitué de belles opportunités pour d'importantes
opérations de LBO en 2002 », a précisé l'EVCA. Ce sont ces opérations qui ont
largement dominé les statistiques de l'investissement.
7 raisons sont avancées pour justifier le développement des LBO 25 :
Ÿ Des levées de fonds récentes et importantes. Les fonds de capital
investissement ont levé durant les années fastes du marché des sommes
importantes (85 Mrds d’euros en 2000 et 2001) dont environ 45% pour des
opérations de LBO. Il existe donc aujourd'hui des véhicules dotés de capacités
d'investissement importantes qui ne sont que partiellement investies.
Ÿ La formation des équipes de LBO mais également des avocats, des
banques et des investisseurs à ce type d'opération a permis de fluidifier ce
marché et d'innover, par exemple par les techniques de titrisation ou de
securitization buy-out.
Ÿ La concentration accentuée de certains secteurs : De nombreux secteurs
sont aujourd'hui tellement concentrés que lorsqu'une entreprise d'une taille
significative doit être cédée, seuls des acheteurs financiers peuvent acquérir
l'entreprise dans son ensemble.
Ÿ Les problèmes de succession des entreprises familiales : Un grand nombre
de PME européennes se sont créées ou fortement développées sous
l'impulsion de leur actionnaire majoritaire dirigeant durant les années 60-70.
Arrivant à l'âge de la retraite, ces dirigeants actionnaires souhaitant céder leur
entreprise sont tentés par les fonds de LBO comme alternative à la cession au
concurrent direct ou à une sortie par la bourse devenue quasiment impossible.
Ÿ L'incessant recentrage des groupes : La crise financière actuelle contraint
des groupes à céder des filiales pour résoudre des difficultés financières ou
des crises de liquidité.
Ÿ La contraction et la volatilité actuelle du marché actions rendent beaucoup
plus complexe la cession par introduction en bourse. Au contraire se
développe le P to P (Public to Private) qui consiste à racheter une entreprise
cotée à l'aide d'une structure à effet de levier. La chute des valorisations
boursières est clairement un élément favorisant les LBO.
Ÿ Le développement des LBO secondaires : Le marché du LBO génère son
propre renouvellement par le développement des LBO secondaires (ou LBO
sur LBO) qui consistent à organiser un nouveau financement par dette et un
nouveau tour de table sur une société qui a déjà fait l'objet d'une opération de
LBO. Cette opération revient à décapitaliser à nouveau la société. Le récent
rachat d'Elis par PAI a constitué le plus gros LBO secondaire jamais réalisé en
France.
25
Source : Pierre Vernimmen.
31
L'année 2001 a donné lieu à une redéfinition notable des intentions des
investisseurs, désireux de réduire leur exposition au risque. Ainsi, les investisseurs
interrogés prévoyaient d’utiliser 56 % des fonds levés en 2001 dans des opérations
de buyout. Ces prévisions ce sont avérées proches de la réalité.
En 2002, les fonds LBO européens sont parvenus à lever 65 % (52% en 2001) du
total des investissements en capital, soit 17,7 milliards d'euros, tandis que les fonds
de capital risque n'en réunissaient que 10% (2,7 milliard d'euros). Pis, alors que 65 %
des premiers ont dépassé leurs objectifs de levée, plus de la moitié des seconds ont
dû réviser leurs ambitions à la baisse.
Deux éléments perturbent toutefois les statistiques.
En France, 3,3 milliards d'euros ont été investis en 2001 dans plus de 1500
entreprises. 18% étaient consacrés au financement des start-up, 29 % au
financement du développement des entreprises et 52% à leur transmission.
.
32
CONCLUSION
Le capital investissement européen a beaucoup évolué ces cinq dernières années,
sous l’impulsion de l’Union Européenne qui a pris conscience de l’intérêt économique
(innovation, création, développement et transmission d’entreprises) et social
(création d’emplois) de ces modes de financement.
Cette évolution a été double. Avant de pouvoir constater l’augmentation des fonds
investis, il a fallu convaincre les investisseurs de détourner leurs capitaux des
placements plus classiques et parfois moins risqués. Les incitations fiscales et les
taux de rentabilité des investissements ont largement contribué à l’évolution des
mentalités.
Pourtant, le tableau n’est pas totalement rose. La formidable montée en puissance
du capital investissement européen, malgré l’éclatement de la bulle Internet en 2000
que l’on peut assimiler à une crise de croissance, n’a pas masqué une lacune
importante : la faiblesse des investissements de capital risque dans la plupart des
pays européens qui ont globalement opté pour des opérations de transmission
(LBO), rentables mais peu génératrices d’emplois. De plus, la crise qu’a connu le
secteur n’a fait qu’aggraver ce constat en stoppant net les modestes progrès
réalisés.
C’est pourquoi une réelle prise de conscience des bienfaits de l’investissement dans
des projets innovants est souhaitable dans un avenir proche, afin de laisser
s’exprimer les compétences des entrepreneurs talentueux dont l’Europe regorge.
33
BIBLIOGRAPHIE
AFIC. Rapports annuels et études particulières. Guide du capital investissement.
BATTINI P., Capital risque : mode d’emploi, Editions d’organisation, 1998.
BLONDEL D., l’Innovation pour le meilleur et pour le pire, Hatier, 1990.
BORDERIE A., Financer les PME autrement, Maxima, 1998
CHOINEL A., Introduction à l’ingénierie financière, Banque éditeur, 1998.
EVCA, rapports annuels et études particulières.
GINGLINGER E., Les décisions de financement des entreprises, Nathan université,
1997.
LACHMANN J., Le financement des stratégies de l’innovation, Economica, 1993.
SITES INTERNET
www.latribune.fr
www.lexpansion.fr
www.apce.com
(agence pour la création d’entreprise)
www.afic.asso.fr
www.anvar.fr
www.bei.org
(banque européenne d’investissement)
www.evca.com
(association européenne de venture capital)
www.finances.gouv.fr
www.alnsv.com
(ministère de l’économie, des finances et de
l’industrie)
(site d’Aurel Leven)
www.boursorama.com
www.business-angels.com
www.caissedesdepots.fr
www.capital-investissement.com
(site de la British VCA)
www.clubbusinessangels.com
www.leonardofinance.fr
(association des anciens de Stanford)
www.sofinnova.fr
(1ère société française de capital risque)
www.vernimmen.net
www.123venture.com
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