L`enquête du CHSCT après un accident du travail

Transcription

L`enquête du CHSCT après un accident du travail
Service Prévention de la Cram Midi-Pyrénées
Membres des CHSCT du BTP
NUMÉRO 13 • Printemps 2010
Bonne pratique
« Dans notre entreprise, ça fait plus de
vingt ans que les monteurs assemblent
les charpentes métalliques avec des
nacelles. Notre patron a décidé de
supprimer les échelles et on travaille
mieux comme ça.
Avec la nacelle, il faut un sol plat et
résistant sinon on risque de basculer.
Sur ce chantier d’extension d’hypermarché, l’état de la plate-forme de
montage était déplorable. Il y avait des
ornières profondes comme la moitié de
la roue de la nacelle et même les engins
tout terrain s’embourbaient.
Le conducteur de travaux a demandé
trois fois sans succès, en réunion de
chantier, que la boue soit enlevée et que
l'eau soit évacuée.
Le chef de chantier m'a alors appelé en
pensant que le CHSCT pouvait faire
quelque chose.
J'ai contacté mes trois autres collègues
membres de CHSCT, ainsi que le
président du CHSCT sur leur portable et
on en a discuté en réunion extraordinaire. On a décidé de faire comme
on avait déjà fait une fois.
Nous avons écrit au coordonnateur SPS
en lui joignant des photos du chantier
pour lui demander de nous aider à régler
rapidement cette non conformité.
Et là, en deux jours, une solution a été
trouvée : la plate-forme a été renforcée
et l’équipe a pu continuer le travail tout
autour du bâtiment dans de bonnes
conditions de sécurité. »
Philippe USON
secrétaire du CHSCT,
06 24 49 12 29
L'enquête du CHSCT
après un accident du travail
Comprendre ce qui s’est passé sans rechercher les responsabilités
Depuis un mois, c’est au moins la dixième fois que José raconte en détail ce qui s’est
passé ce lundi matin. D’abord à son chef de chantier qui est arrivé en courant dès qu’il a
entendu Manuel crier. Ensuite aux pompiers qui lui ont demandé combien de temps
Manuel était resté conscient. Puis à tous ses collègues. Et encore aux gendarmes, à
son patron, au conducteur de travaux, à l’inspectrice du travail, au responsable sécurité,
au coordonnateur SPS, au contrôleur de la Cram.
Il a été convoqué à la réunion extraordinaire du CISSCT, puis du CHSCT. Il a vraiment
l’impression que ça ne s’arrêtera jamais. Pourquoi l’interrogent-ils tous, chacun leur
tour ? Ne pourraient-ils pas s’entendre pour échanger les informations ?
Un seul accident, plusieurs enquêtes, des objectifs différents !
Qui est responsable ? Comment ça a pu arriver ? Que peut-on faire pour éviter que
ça ne se reproduise ?
Lors d’un accident, une fois passée l’émotion, la première démarche consiste souvent à chercher les responsables, qui risquent rapidement de devenir les coupables.
Policiers, gendarmes et inspecteurs du travail ont pour mission de rechercher si l’accident a été la conséquence d’infractions à la Loi. Leurs enquêtes doivent permettre
à la justice de comprendre si quelqu’un a commis des fautes et de décider comment
il doit être jugé et sanctionné.
La recherche de responsabilités peut également être un des objectifs de l’enquête
interne effectuée par l’entreprise. Il ne s’agit plus, dans ce cas, d’infraction à la loi,
mais de faute professionnelle souvent liée au non respect d’une consigne de travail.
Il n’est pas rare qu’après un accident grave on assiste à des sanctions disciplinaires
voire au licenciement.
On comprend mieux alors pourquoi personne ne se sent très détendu et serein
quand il est interrogé dans ce genre d’enquête, et que le réflexe humain consiste à
se placer sur la défensive. Dans ces situations, on a tendance à privilégier la démonstration de son innocence : « Tout ce que je dirai pourra être retenu contre moi ! »
On entend souvent dans ces moments un florilège de justifications : « Il n’avait rien à
faire à cet endroit » ; « Tout le matériel est à leur disposition, il suffit d’aller le chercher
chez le loueur ! » ; « La note de service (ou la procédure qualité) n° 2007-1243, interdit de faire… » ; « Il avait le Caces ! » ; « Je lui avais bien dit au conducteur de travaux, que la nacelle qu’il m’avait fait livrer n’allait pas… »
Lorsque ce genre de climat s’est installé, il n’est pas aisé de raconter sans inquiétude les faits à d’autres personnes qui disent être là uniquement pour faire progresser la prévention. L’animateur QSE, le coordonnateur SPS ou le contrôleur de la
Cram sont pourtant là dans l’objectif de comprendre ce qui s’est passé afin d’éviter
qu’un tel accident se reproduise.
Mais comment José peut-il être sûr que ce qu’il dira à l’animateur QSE ne sera pas
utilisé par son patron pour sanctionner ses collègues ? Le coordonnateur SPS n’est-il
pas motivé uniquement par le fait de pouvoir dégager sa propre responsabilité ?
Peut-il vraiment tout leur dire ou doit-il réserver certaines informations à ses collègues du CHSCT ?
Question-Réponse
Le CHSCT doit-il
enquêter quand la
responsabilité d’un tiers
est engagé ?
Pour certains accidents du travail,
de la circulation, mais également
accidents sur chantier, une
responsabilité extérieure à
l’entreprise peut être identifiée et
reconnue.
Par exemple, un électricien peut
être écrasé par le basculement d’une
banche de maçon, un platrier
déchargeant son véhicule peut être
renversé par un automobiliste.
Dans ces cas, à quoi peut servir
l’enquête du CHSCT puisque a
priori d’autres (assureur, police…)
ont déjà désigné le coupable ?
La mission du CHSCT contribue à
l’action de prévention des risques :
dans ces deux exemples, est-on sûr
que rien ne peut être amélioré dans
l’entreprise pour éviter de tels
accidents ?
Pouvez-vous laisser la vie d’un
salarié exposée aux automobilistes
distraits ou aux chauffards ? Ne
devez-vous pas proposer des
améliorations des conditions de
livraison en ville ? L’analyse des
risques du chantier (retranscrite
dans le PPSPS) prend-elle en
compte le danger représenté par
l’activité des autres entreprises ?
Lorsque vous donnez votre avis sur
un PPSPS ou un plan de
prévention, sur quels critères vous
appuyez-vous ?
Chaque accident est source
d’expérience et d’information, n’en
négligez aucun ; il doit vous aider
à sauver une vie.
L’ENQUÊTE DU CHSCT : quels sont les faits qui ont conduit à quelles
conséquences ?
Pour faire des propositions et contribuer à l’amélioration de la prévention dans l’entreprise, le CHSCT s’appuie sur sa connaissance des pratiques de travail. Cette
connaissance est alimentée par les visites de chantier, les remarques et informations faites par les salariés, et les enquêtes réalisées après chaque accident du travail et maladie professionnelle.
Après chaque accident grave, le CHSCT est réuni très rapidement pour partager les
informations entre ses différents membres et définir les mesures conservatoires qui
permettront la poursuite du chantier en sécurité.
Cette réunion permet aussi de prendre en compte la gestion du stress post-traumatique auquel ont été soumis les salariés de l’entreprise témoins ou non de l’accident.
Cette réunion est obligatoire selon le code du travail. Mais sa tenue quelques jours
après l’accident, alors que l’enquête en responsabilité est toujours en cours, et en
présence de l’inspection du travail, n’est pas forcément propice à la réflexion
sereine sur des mesures de prévention à long terme.
Il est donc souhaitable que l’enquête du CHSCT, prévue également par le code du
travail, se déroule un peu plus tard, dans un climat plus apaisé. La délégation du
CHCST qui réalise l’enquête doit être être constituée au moins de l’employeur ou de
son représentant et d’un salarié. Cette enquête consiste à recueillir dans la plus
grande neutralité possible l’ensemble des faits qui ont contribué à la survenue de
l’accident. Trop souvent, un jugement hâtif limite la réflexion à la désignation d’une
responsabilité individuelle (le fameux « facteur humain ») à laquelle on considère
qu’il n’existe aucune autre parade qu’un changement de comportement.
L’ENQUÊTE DU CHSCT : éviter que le même accident ne se répète.
L’analyse des résultats des enquêtes est inscrite à l’ordre du jour des réunions
périodiques au même titre que l’examen des comptes-rendus de visites de chantier.
A cette occasion, les membres du CHSCT présentent à l’ensemble du comité les
faits recueillis. De la qualité de ces informations dépend la pertinence des actions de
prévention proposées .
Si les faits recueillis sont : « Philippe est tombé du 3e étage. Il s’est approché du bord
du balcon dont le garde corps avait été enlevé », l’action de prévention proposée
sera surement : « Rappel : il est interdit d’enlever les garde-corps et il interdit de s’approcher du bord ».
Si les faits recueillis sont : « Philippe est tombé du 3e étage. Il s’est approché du
bord du balcon pour guider le chariot élévateur qui approvisionnait une palette de
fenêtres. Le garde-corps avait été enlevé pour permettre le passage de la palette »,
une réflexion plus détaillée sera nécessaire : « Peut-on guider l’élévateur sans s’approcher du bord ? Peut-on approvisionner sans enlever la protection collective en
place ? Peut-on approvisionner avec un autre moyen, à un autre emplacement ?… »
La plus-value du CHSCT apparait plus évidente dans le 2e exemple, car il s’agit de
faire diminuer les risques de façon durable, plutôt que de se limiter à répéter les
consignes.
Des formations existent pour permettre d’acquérir les techniques de recueil d’informations après accident, d’analyser les faits, et d’en déduire les mesures de préventions les plus efficaces.
“
Donnez de la force à votre CHSCT,
parrainez les nouveaux membres !
„
■ CONTACTS et ABONNEMENT : Tél. 06 24 49 12 29 - Fax 05 62 14 26 92 - [email protected] - www.cram-mp.fr
■ PRÉVENIR ENSEMBLE : bulletin trimestriel gratuit n° ISSN : en cours Directeur de la publication : Francis De Block Comité de rédaction : Jean-Loup
Pulicani, Bruno Vinci Rédaction : Fabienne Chiarelli Maquette : François Monsérat Impression : Cram Midi-Pyrénées Adresse : Cram Midi-Pyrénées 2, rue Georges Vivent - 31065 Toulouse cedex 9
•
•
•
•
•
•
•
Conformément aux articles 39 et suivants de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, toute personne peut obtenir communication et, le cas échéant,
rectification ou suppression des informations la concernant, en s’adressant à Jean-Philippe Caussade, correspondant à la protection des données de la Cram Midi-Pyrénées, 2 rue Georges
Vivent 31065 Toulouse cedex 9, ou sur le site www.cram-mp.fr