L`aménagement du temps de travail

Transcription

L`aménagement du temps de travail
Brochure
L’aménagement
du temps de travail
7
Brochure no 7
Editeur:
Société suisse des employés de commerce
Hans-Huber-Strasse 4
Case postale 1853
8027 Zurich
Téléphone
044 283 45 45
Téléfax
044 283 45 65
E-mail
[email protected]
La reproduction, même partielle, n’est possible qu’avec
l’autorisation de la SEC Suisse.
Prix de vente: CHF 15.–,
sous réserve de modifications.
Avantpropos
Chère lectrice, cher lecteur,
Le monde du travail est en profonde mutation. La mondialisation de l’économie, les
changements structurels consécutifs aux évolutions techniques et à la rationalisation,
ainsi qu’une pression concurrentielle toujours plus marquée influent sur la conception du
travail rémunéré et sur la notion du temps à lui consacrer. De plus, le taux de chômage
relance les débats sur la durée du travail et sur l’aménagement des horaires qui est de
plus en plus souhaité.
L’aménagement du temps de travail offre des opportunités mais comporte aussi des
risques tant pour les salarié(e)s que pour les entreprises. Les premiers espèrent obtenir une marge de manœuvre accrue dans la structuration de leurs activités ainsi qu’une
meilleure adéquation entre les exigences du monde du travail et celles découlant de la
vie de famille. Les entreprises espèrent exploiter ainsi leurs moyens de production avec
une plus grande efficacité à compenser les fluctuations de la demande. On décèle aussi
dans la volonté d’aménager le temps de travail un moyen de contribuer à réduire le
chômage. Mais des risques réels peuvent apparaître lorsque les partenaires sociaux
rechignent à collaborer sur les questions d’aménagement des horaires. Dans ce cas,
cela peut précariser les conditions de travail comme c’est le cas avec le travail sur appel.
En publiant la présente brochure, la Société suisse des employés de commerce souhaite
notamment garantir que l’aménagement des horaires ne soit pas défini unilatéralement
par les entreprises. Cette brochure concrétise aussi les exigences et les objectifs que la
Société suisse des employés de commerce a élaborés en 1996 dans le cadre de sa politique en faveur des employé(e)s et de sa politique en faveur de l’égalité:
• réduction de la durée du travail dans le but qu’elle ait un effet direct sur l’emploi,
• promotion de modèles d’horaires favorisant les notions d’égalité et de préservation
de la vie familiale,
• participation des employé(e)s à l’élaboration de nouveaux modèles de temps de
travail,
• possibilité de travail à temps partiel à tous les niveaux hiérarchiques.
Nous vous renvoyons aussi à la brochure no 5 «Travail à temps partiel».
Nous vous souhaitons une lecture instructive et constructive.
Susanne Erdös
Secrétaire centrale, SEC Suisse
3
Introduction
Activité lucrative et autres formes de travail
Rétrospective sur la durée et la répartition du travail
4
5
5
6
Activité lucrative: faits et tendances actuels
Economie nationale: essor du secteur tertiaire, avec davantage de femmes
et de postes à temps partiel
Evolution de l’emploi, ou du chômage, en Suisse
Horaires de travail contractuels et effectifs
Réglementation sur le temps de travail en Suisse
10
10
14
16
21
Considérations générales sur les nouveaux modèles de temps de travail
Mutations économiques dans les entreprises
Les modèles de temps de travail en tant qu’instruments susceptibles d’éviter le chômage
Nouvelles priorités et autres choix de vie
De bonnes raisons pour une meilleure redistribution du temps de travail
Résistances contre la réduction et l’assouplissement des horaires
Bases juridiques
24
24
24
28
31
32
33
Tour d’horizon de différents modèles d’horaires de travail
Horaire de travail mobile (HTM)
Horaire de travail annualisé
Horaire libre ou variable
Système d’éléments modulaires
Système de fourchettes
Horaire de travail modulé en fonction de la charge de travail (HTMCT)
Travail à temps partiel (TTP)
Job-sharing (partage des postes)
Horaire en tandem
Répartition variable du temps de travail au cours de différentes périodes de l’existence
Congé sabbatique (congé de longue durée)
Retraite progressive et retraite à la carte
34
34
35
36
37
37
37
38
40
42
42
43
44
Application du principe de l’aménagement du temps de travail
Conditions préalables à son application
Objectifs
Exemples appliqués
46
46
48
51
Partager les postes: chances accrues pour femmes et cadres
Critères de partage des postes
Potentiel des femmes en terme d’emploi
Potentiel de travail à temps partiel des cadres
54
54
55
57
Tendances dans l’organisation du temps de travail
59
Bibliographie
60
Société suisse des employés de commerce
Une association forte offrant de nombreux avantages
Publications de la SEC Suisse en matière d’emploi
62
62
65
Impressum
66
Introduction
Activité lucrative et autres formes de travail
Le travail remplit plusieurs fonctions. Il structure le temps, donne à l’individu son identité et son statut, favorise le développement personnel, stimule les contacts sociaux et
assure un revenu à celui qui l’exerce.
Le travail peut se classer en cinq catégories: le travail lucratif, les tâches familiales, les
loisirs créatifs, les activités de perfectionnement et le bénévolat social.
• C’est le travail lucratif qui occupe la place la plus importante dans l’ensemble du
budget «temps» d’un ménage. Il procure de l’argent (fonction de revenu) et de la
considération (statut social et identitaire).
• Les tâches familiales et éducatives se situent en deuxième position. En terme d’économie publique, elles constituent une plus-value qui se chiffre par milliards et influent
directement sur la qualité de vie.
• Les loisirs créatifs permettent de réaliser des économies et de se délasser.
• Les activités de perfectionnement stimulent le travail lucratif.
• Le bénévolat social apporte son soutien à la communauté (aide au voisinage, etc.).
On entend par travail lucratif les activités pour lesquelles on perçoit une contre-prestation financière (salaire, traitement). Le sociologue Ralf Dahrendorf attribue cinq fonctions au travail lucratif. Elles découlent directement des conditions cadres du marché
du travail:
1. Le travail est la principale source de revenu.
2. Le travail donne accès aux prestations sociales, y compris à l’assistance en cas de
maladie ou de vieillesse.
3. Le travail contribue à l’estime de soi et à la considération de la part d’autrui.
4. Le travail favorise les contacts sociaux.
5. Le travail est le principal instrument de contrôle social.
La définition du travail en tant qu’activité lucrative – activité rémunérée – est issue du
monde de l’économie. Elle reflète l’attitude de la société qui lie étroitement la valeur
personnelle et le sens de la vie à la forme d’activité. En revanche, cette définition n’intègre pas l’expérience personnelle (mères, pères, parents, partenaires, etc.) acquise au
travers des soins prodigués aux enfants, personnes âgées ou malades, qui représentent pourtant des activités exigeantes en temps et en efforts.
5
Pour certaines personnes, le travail dépasse la notion de ressource lucrative. C’est pour
cette raison que l’on voit émerger de nouveaux modèles de temps de travail. Mais
faisons d’abord un petit retour en arrière…
Rétrospective sur la durée et la répartition du travail 1
Travail et industrialisation
A l’époque préindustrielle, la durée du travail était très variable. Il ne visait pas seulement à couvrir ses besoins matériels, mais suivait l’évolution du niveau des commandes
et le temps nécessaire pour accomplir les travaux. Il laissait une large place aux activités personnelles et aux habitudes culturelles et religieuses. A l’époque préindustrielle,
la journée de travail de l’artisan dépendait de l’importance des tâches à effectuer et du
rythme personnel. Travail et loisirs n’étaient pas strictement délimités; la durée et
l’intensité du travail variaient notablement. On n’avait pas l’habitude de constituer des
stocks et l’on ne produisait pas à l’avance pour un marché dont on ne connaissait pas
les exigences. La quantité de travail dépendait donc du volume des commandes. Il y avait
ainsi alternance de journées de travail interminables, du lever au coucher du soleil, et
de jours chômés pendant lesquels on ne gagnait rien. La durée annuelle de travail était
nettement plus courte à cette époque qu’à l’ère industrielle qui suivit: les recherches
historiques ont fait apparaître que l’on ne travaillait guère plus de 180 jours par an.
Cette situation se modifia avec l’industrialisation. L’émergence des fabriques détruisit
les repères temporels traditionnels de la société. Sur le plan culturel, l’instauration
d’une toute nouvelle structuration chronologique qui découpla le temps de toutes ses
composantes culturelles et religieuses et en fit la référence de tous les processus de
travail constitua l’une des plus importantes retombées de l’industrialisation. La devise
se résumait désormais en une phrase: «Le temps, c’est de l’argent».
On élabora des directives très strictes et introduisit des contrôles. Des surveillants
furent chargés d’inculquer aux ouvriers et ouvrières des fabriques les nouvelles règles
basées sur le temps. Le travail devint monotone et répétitif; les gestes s’adaptèrent à
la cadence des machines. Les conditions qui étaient de mise dans les usines étaient
catastrophiques. Soucieux de rentabiliser au maximum les installations entraînées par
des machines à vapeur, les employeurs accrurent la durée de la journée de travail. Les
machines qui ne s’arrêtaient jamais étaient très rentables. Les patrons introduisirent le
travail de nuit et du dimanche pour maximiser leurs bénéfices. La durée moyenne du
travail s’allongea.
1
6
D’après: Holenweger, Toni/Conrad, Hanspeter (éd.): Arbeit & Zeit. Neue Arbeitszeitmodelle aus der Praxis.
Kontrast, Zurich 1998, pp. 51–57.
Rares étaient les ouvrières et ouvriers qui protestèrent car ils n’étaient pas organisés
et manquaient d’expérience en matière de luttes des classes. Par ailleurs, la surabondance de main-d’œuvre freina pendant longtemps les chances de réussite de leurs
revendications. Ce n’est qu’à partir de la seconde moitié du 19e siècle que les conditions
de travail de la classe ouvrière commencèrent à s’améliorer. Leur lutte porta alors
essentiellement sur la réduction des heures de travail.
Evolution de la durée légale maximum du travail en Suisse
1848 Semaine de 78 heures
Première loi cantonale sur les fabriques: introduction de la journée de 13 heures
à Glaris.
1864
Semaine de 72 heures
Introduction de la journée de travail de 12 heures dans la loi sur les fabriques
du canton de Glaris.
1877
Semaine de 66 heures
Première loi fédérale sur les fabriques, avec effet de signal dans toute l’Europe.
Pour la première fois, un «contrat type de travail» prévoit que toutes les fabriques doivent introduire la journée de travail de 11 heures.
1889 Au congrès de la Deuxième Internationale, on exige pour la première fois la
journée de travail de 8 heures.
1905
Journée de travail de 9 heures le samedi
La loi fédérale sur les fabriques est modifiée: la journée de travail est ramenée
de 11 à 9 heures le samedi.
1914
Semaine de 59 heures
La loi fédérale sur les fabriques est à nouveau modifiée: on ne travaille plus
le samedi après-midi.
1918
Lors de la grève générale, on formule l’exigence de la semaine de 48 heures.
1919
Semaine de 48 heures
Introduction de la semaine de 48 heures dans la loi sur les fabriques.
1964
Loi sur le travail (loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce). Elargissement du champ d’application de la loi, dispositions échelonnées selon les branches (45 ou 50 heures hebdomadaires).
1998
Révision de la loi sur le travail (en vigueur dès le 1.1.2000)
Adaptations à l’impératif de l’égalité et libéralisation partielle avec nouvelles
dispositions de protection des travailleurs.
7
En Suisse, plus de 60 ans s’écoulèrent entre la première législation cantonale de 1848,
qui prévoyait une limite maximale de 78 heures hebdomadaires de travail, et la semaine de 59 heures inscrite dans la loi fédérale sur les fabriques de 1914. Ce n’est que cinq
ans plus tard, après les bouleversements de la Première guerre mondiale et sous la
pression de la grève générale, que la loi sur les fabriques retrancha 11 heures à la durée
du travail hebdomadaire. Il fallut encore attendre 50 ans pour qu’elle se réduise de trois
heures supplémentaires.
Depuis 1964, la durée légale maximale de la semaine de travail est de 45 heures pour
les salarié(e)s des entreprises industrielles ainsi que pour le personnel de bureau, technique et les autres employé(e)s, y compris le personnel de vente des grandes entreprises du commerce de détail. Elle est de 50 heures pour tous les autres salarié(e)s. En
1958, le peuple rejeta l’initiative de l’Alliance des indépendants en faveur de la semaine
de 44 heures; en 1976, l’initiative du POCH pour la semaine de 40 heures connut le
même sort.
Une première tentative visant à libéraliser la loi sur le travail de 1964, ou tout au moins
à en atténuer les dispositions relatives à la protection des salariés, échoua sous la pression des syndicats. En 1998, la version remaniée – loi sur le travail révisée – fut adoptée
sans grande difficulté par le peuple. Une initiative populaire «pour une durée du travail
réduite» lancée par l’Union syndicale suisse (USS) fut rejetée par le peuple le 3 mars
2002. L’initiative demandait que l’horaire de travail maximal ne dépasse pas 1872 heures
par année, ce qui correspondait à une semaine de travail de 36 heures.
Aller vers la normalisation – et retour?
La lutte pour l’amélioration des horaires de travail ne se limita pas à essayer d’en réduire
la durée. Patrons et ouvriers cherchaient aussi à normaliser les horaires en visant à ce
que la durée de la journée, de la semaine et de l’année de travail soit aussi uniforme
que possible pour tous les salarié(e)s. Même si les entreprises et les syndicats se sont
livrés des luttes acharnées à propos de la durée du travail, ils étaient largement d’accord sur la question de sa normalisation.
L’émergence de l’ère industrielle bouleversa la culture du travail par rapport à celle qui
régnait au Moyen Age. Cette évolution fut marquée par différentes phases:
• La normalisation engendra une réduction du temps de travail et une bipolarisation
entre travail et loisirs. La durée du travail et le temps libre sont réglementés et soustraites à la décision personnelle des salarié(e)s.
• En raison de la réduction des horaires et de leur normativation ainsi que sous la pression d’exigences accrues et d’impératifs de délais qui en découlèrent, les cadences
de travail ne cessent de s’accroître.
8
• En raison de l’accroissement des coûts de la production ainsi que de l’informatisation et de l’essor des services, on adopte le travail en équipes et de nuit, et prolonge
les heures d’ouverture des entreprises. La notion de durée normale du travail s’effrite. Les dispositions uniformes normatives disparaissent.
Qui accomplit le travail lucratif?
Durant toute cette phase d’évolution, la notion de travail et du temps à lui consacrer a
fortement changé. Mais c’est surtout la répartition de ses différentes formes qui s’est
modifiée. Au début de l’industrialisation, le travail rétribué reposait – par exemple dans
les ateliers de tissage à domicile installés à la campagne – sur une collaboration de tous
les membres de la famille. Dans les premières fabriques du 19e siècle, ce n’était pas
seulement les hommes qui travaillaient, mais aussi les femmes et les enfants. Avec
l’amélioration du niveau de vie, on vit apparaître de nouvelles formes de répartition du
travail qui détermina les conditions de la société bien au-delà de la Seconde guerre
mondiale. Elles perdurèrent jusque dans les années 60 et même au-delà: les hommes
se consacraient au travail lucratif alors que les femmes mariées, avec ou sans enfants,
effectuaient les tâches ménagères. Seules les jeunes filles ou les célibataires
travaillaient à l’extérieur pour subvenir à leurs besoins.
Ce n’est qu’à partir des années 60 que les femmes s’intégrèrent peu à peu au monde
du travail indépendamment de leur état civil. Mais leur participation croissante au
travail lucratif n’entraîna nullement une égalité automatique au niveau des salaires et
des opportunités de carrière. Et cette égalité – en faveur de laquelle la SEC Suisse s’engage depuis longtemps – n’est toujours pas entièrement acquise.
9
Activité lucrative:
faits et tendances actuels
Economie nationale: essor du secteur tertiaire,
avec davantage de femmes et de postes à temps partiel
De la société industrielle à la société de services
L’économie suisse poursuit sa mue en direction d’une société de services. Aujourd’hui,
quelque 70 % des personnes actives travaillent dans le secteur tertiaire, alors qu’elles
ne représentaient qu’à peine 40 % en 1960. De 47 % qu’elle était en 1960, la proportion
de personnes employées dans le secteur secondaire (industriel) atteint aujourd’hui
environ 25 %.
On peut l’attribuer aux progrès techniques (nouveaux procédés, nouveaux produits,
informatique, etc.) ainsi qu’au développement de la mondialisation (globalisation);
phénomènes qui ont contribué à voir émerger de nouveaux marchés et sites de production (notamment avec la délocalisation dans des pays à bas salaires).
Evolution de l’effectif des personnes actives * par secteur (1960–2002)
Personnes (en milliers)
5000
Personnes
actives
total
4000
Secteur
tertiaire
(services)
3000
2000
Secteur
secondaire
(industrie
et artisanat)
1000
Secteur primaire
(agriculture)
0
1960
Année
1965
1970
1975
1980
1985
1990
1995
2000
* Selon la définition du Bureau international du travail, est active une personne qui exerce une activité
professionnelle au moins une heure par semaine. Cette définition est appliquée en Suisse depuis 1991.
Précédemment, la durée minimale du travail était de six heures par semaine.
Source: OFS, Annuaire statistique 2003
10
Dans le secteur tertiaire également, on a assisté – et l’on assiste encore – à de profonds
changements: depuis les années 60, les domaines de la santé et social, de même que
celui de la formation, ont énormément gagné en importance. Le secteur financier
(banques, assurances et divers autres acteurs) ainsi que les services proches des entreprises, tels que l’informatique, les fiduciaires ou le conseil, ont également beaucoup
évolué, connaissant des phases alternées de forte progression et de régression. En
revanche, les parts à l’emploi dans l’hôtellerie et le commerce de détail ont diminué.
L’évolution vers une société de services n’est toutefois pas achevée; de nombreux
signes laissent à penser que les secteurs secondaire et primaire perdront encore de l’importance.
Proportion croissante de femmes
Depuis les années 60 environ, les femmes participent toujours plus à la vie active. Sur
l’ensemble de la population féminine (dans la tranche d’âge de 0 à 99 ans et plus), la
part des femmes actives (taux d’activité brut) a passé de 33 % en 1960 à près de 50 %
actuellement. Durant cette même période, le pourcentage des hommes actifs a diminué de 66 % à 63 %. Ce phénomène est notamment dû à l’allongement des périodes de
formation et aux mises à la retraite anticipée.
Taux d’activité brut selon le sexe (1960–2002)
Personnes actives en % de la population résidante permanente
70%
60%
Taux d'activité
total
Taux d'activité
hommes
50%
Taux d'activité
femmes
40%
30%
1960
Année
1965
1970
1975
1980
1985
1990
1995
2000
A noter: pour 1961–1970, il n’y a pas de données distinguant les femmes et les hommes (interpolation).
* Le taux d’activité brut exprime la proportion de personnes actives par rapport à la population résidante
permanente (0–99+ ans). Selon la définition du Bureau international du travail, est active une personne
qui exerce une activité professionnelle au moins une heure par semaine. Cette définition est appliquée en
Suisse depuis 1991. Précédemment, la durée minimale du travail était de six heures par semaine.
Source: OFS, Annuaire statistique 2003
11
Le taux d’activité net (proportion des femmes actives entre 15 et 64 ans par rapport à
l’ensemble des femmes de ce groupe d’âge) atteint aujourd’hui 70 %. Cela signifie
qu’au sein de ce groupe d’âge, sept femmes sur dix exercent une activité lucrative. Pour
ce qui est des hommes, ce taux atteint 87,5 % 2. La population, l’économie et même les
«philosophies» varient pourtant d’une région à l’autre. Ces différences se répercutent
inévitablement sur le niveau de participation au travail lucratif 3. Ainsi, en Suisse, le taux
d’activité des hommes et des femmes est souvent supérieur aux valeurs enregistrées
dans les pays de l’Union européenne. Seuls les Pays-Bas, la Grande-Bretagne et les
pays nordiques font apparaître des valeurs analogues 4.
Si de plus en plus de femmes exercent effectivement une activité lucrative, cette
ressource en main-d’œuvre n’est de loin pas pleinement exploitée. Le graphique ci-dessous permet de bien le visualiser: en 2001, les hommes représentaient encore 57,3 %
des personnes actives. Mais les 6340 millions d’heures effectuées ne correspondaient
pas à cette répartition. 64 % du travail fourni l’était par les hommes et le 36 % par les
femmes. Cela provient du fait que les femmes occupent beaucoup plus fréquemment
des postes à temps partiel que les hommes.
Part des hommes et des femmes à la population active et au volume de travail (2001)
Personnes actives
57,3 %
Volume
de travail effectif
0%
42,7 %
36,0 %
64,0 %
20 %
Hommes
40 %
60%
80%
100%
Femmes
Source: OFS, Indicateurs du marché du travail 2002
Plein temps et temps partiel 5
En 2001, sur 3,75 millions de personnes actives (à l’exception des personnes en apprentissage, des frontalières et frontaliers, des travailleuses et travailleurs saisonniers, etc.),
2
3
4
5
12
Office fédéral de la statistique (OFS): Communiqué de presse concernant le recensement fédéral 2000 (population active). Neuchâtel, 6.6.2003.
Ainsi, la Suisse allemande enregistre des valeurs un peu plus élevées pour les hommes et les femmes que la
région lémanique, alors que les valeurs du Tessin sont inférieures à la moyenne.
Office fédéral de la statistique (OFS): Annuaire statistique suisse. Editions NZZ, Zurich 2003, p. 168.
Sur le modèle de: Strub, Silvia: Le travail à temps partiel en Suisse: étude axée sur la répartition du travail à
temps partiel entre femmes et hommes et sur la situation familiale des personnes actives occupées. Bureau
d’études de politique du travail et de politique sociale (BASS). Berne 2003.
Strub définit tout emploi à moins de 100 % comme travail à temps partiel. Les statistiques officielles (OFS,
seco), en revanche, considèrent l’emploi entre 90 et 100 % comme travail à plein temps.
1,25 million de personnes étaient occupées à temps partiel, dont les quatre cinquièmes
étaient des femmes. 60 % des femmes actives travaillent à temps partiel alors que cette
proportion n’est que de 12 % environ en ce qui concerne les hommes.
Nombre de personnes actives avec postes à temps partiel/à plein temps (2001)
Hommes 250000
Femmes
1 830 000
1000000
660 000
0,5 mio.
0
1,0 mio.
Temps partiel
1,5 mio.
2,0 mio.
2,5 mio.
Plein temps
Source: Strub 2003
Les femmes travaillant à temps partiel sont nettement plus nombreuses en chiffres
absolus et relatifs. Les emplois à 50 % semblent être la forme la plus fréquente d’occupation à temps partiel pour les deux sexes.
Nombre de personnes actives selon le taux d’activité (2001)
Personnes
2,0 mio.
1830000
1,5 mio.
1,0 mio.
660000
0,5 mio.
170 000
53 000
219 000
44 000
276 000
63 000
167 000
41 000
166000
51000
0 mio.
0 – 19 %
20 – 39 %
40 – 59 %
60 – 79 %
80–99%
100%
Taux d'activité
Femmes
Hommes
Source: Strub 2003
L’importance du travail à temps partiel diffère selon les branches et les professions.
Dans le secteur bancaire et des assurances, mais aussi en partie dans l’industrie et l’artisanat, la part des femmes occupées à temps partiel atteint 40 %; dans ceux de la santé
13
et social, les taux culminent à 70 % et même plus. Les hommes occupés à temps partiel
travaillent surtout dans l’enseignement, la santé et le social, ainsi que dans d’autres
services; ils sont moins répandus dans l’industrie et les activités transformatrices.
On constate souvent une certaine dicotomie entre le travail à temps partiel et la position professionnelle des personnes actives. Les hommes sont rarement occupés à
temps partiel dans les postes à responsabilités alors que les femmes le sont davantage.
A tort ou à raison, on pense que les postes dirigeants exigent une plus grande disponibilité. Ainsi, on trouve moins de personnes travaillant selon un horaire réduit dans les
postes à responsabilités.
Le travail à temps partiel en plein essor
Depuis le début des années 90, la proportion des femmes actives a continué d’augmenter et le travail à temps partiel des femmes s’est également renforcé. Cette évolution a été favorisée par l’essor de la société de services et par l’acceptation plus large
des postes à temps partiel. Au cours de la période considérée, la part du travail à temps
partiel est passée de 50 % à 60 %. Chez les hommes, le taux d’activité a légèrement baissé alors que, simultanément, la proportion du temps partiel par rapport au plein temps
augmentait légèrement. Malgré la faiblesse de la conjoncture économique actuelle
(2003), le nombre de femmes occupées à plein temps et à temps partiel tend à progresser; en revanche, le nombre d’hommes travaillant à temps partiel recule, tendance
notamment due à la multiplication des retraites anticipées 6.
En Suisse, le travail à temps partiel est principalement exercé par les femmes. La répartition dominante des rôles les empêche souvent de travailler à plein temps. En outre,
les postes à temps partiel proposés s’adressent surtout aux fonctions figurant au bas
de la hiérarchie.
Revendication de la SEC Suisse:
Le travail à temps partiel doit être attrayant tant pour les femmes que pour les hommes.
Il doit être structuré en conséquence, et être proposé aussi pour des postes hautement
qualifiés et pour des fonctions d’encadrement.
Evolution de l’emploi, ou du chômage, en Suisse
Dans le débat relatif à la durée du temps de travail et ses divers modèles, la situation
réelle du marché de l’emploi détient un rôle déterminant. Après la Seconde guerre
mondiale, contrairement à d’autres pays, la Suisse a longtemps été épargnée par le
chômage. Si le fléchissement de la croissance déclenché par la crise du pétrole de
6
14
Source: Strub 2003, p. 10.
1973/74 a engendré d’importantes suppressions d’emplois, elle a laissé relativement
peu de traces dans les statistiques du chômage. Il en a été de même pour les crises intervenues dans la première moitié des années 80. En revanche, la longue période de
fléchissement économique des années 90 a généré, en Suisse également, un taux de
chômage encore jamais atteint jusqu’ici, à l’instar du nombre des personnes en quête
d’emploi. Dans cette crise, des causes conjoncturelles et structurelles se sont superposées (mondialisation, progrès technique, etc.).
Evolution du chômage (1960–2003)
Chômeuses/chômeurs (moyenne annuelle)
200000
150000
100000
50000
0
1960
Année
1965
1970
1975
1980
1985
1990
1995
2000
A partir de 2000, sur la base du recensement de la population 2000; pour 2003, prévision.
Sources: OFS, seco
En mars 1997, le chômage atteignit un record historique. Quelque 200 000 personnes
étaient inscrites auprès des offices régionaux de placement. Dans la crise des années
90, le secteur tertiaire fut également fortement touché par le chômage. Avec la reprise
amorcée vers la fin 1997, le chiffre des personnes officiellement inscrites au chômage
retomba à moins de 60 000 en juin 2001, alors que plusieurs secteurs du marché du
travail enregistraient à nouveau un manque de personnel.
La crise de l’automne 2001 confirmait ainsi qu’en temps de crise, des créneaux créateurs
de valeur au sein du secteur tertiaire et occupant des personnes dotées de qualifications très élevées, pouvaient aussi être concernés par les compressions d’emplois et le
chômage. La fin abrupte du boom de la nouvelle économie, le fléchissement mondial
des marchés financiers et la désécurisation après les attentats de New York et leurs
conséquences (guerres en Afghanistan et en Irak) ont non seulement ralenti la demande
15
Chômeurs/chômeuses
Taux de chômage
Moyenne annuelle
2001 2002 Juillet 2003
Moyenne annuelle en %
2001 2002 Juillet 2003
Total
67 197 100 504
Secteur 1
674
869
Secteur 2
13 989 22 784
Secteur 3
45 290 65 081
• Commerce
9 807 14 647
• Banques
1 447
2 708
• Assurances
574
915
• Conseils, planification
informatique
7 275 12 505
Pas d’information
7 244 11 770
141 699
1 014
31 295
93 844
21 764
4 872
1 675
1,7
0,5
1,3
2,1
1,9
1,0
0,9
2,5
0,6
2,1
3,0
2,8
1,9
1,5
3,6
0,7
2,9
4,3
4,2
3,5
2,8
17 454
15 546
3,6
…
6,2
…
8,7
…
Source: seco
en biens industriels, mais également mis sous pression le secteur financier et ses
domaines apparentés (conseils, informatique) alors qu’il venait de connaître une croissance rapide. A fin juillet 2003 7, tous secteurs confondus, on dénombrait quelque
142 000 chômeuses et chômeurs (46 % de femmes, 54 % d’hommes), ce qui induisit un
taux de chômage de 3,6 % 8. Pour illustrer la situation régnant plus particulièrement
dans le secteur financier, les banques et les assurances subirent de fortes compressions
d’emplois lors de la crise des années 90: Cette période fut suivie d’un essor tout aussi
marqué. Dans ces deux secteurs, le taux de chômage était toutefois demeuré sensiblement plus bas (50 % et plus) que dans le reste de l’économie. A mi 2003, le taux de
chômage enregistré dans le secteur bancaire atteignit quasiment le même niveau que
dans les autres secteurs. La différence s’amenuisa sensiblement dans les assurances.
Il est difficile de prévoir l’évolution du marché du travail; diverses analyses ne laissent
guère présager une amélioration avant 2005. Elément essentiel cependant: les périodes
de chômage croissant conduisent généralement à relancer le débat sur une meilleure
répartition du travail et sur sa durée (cf. pp. 31s.).
Horaires de travail contractuels et effectifs
Bien que le travail à temps partiel gagne constamment en importance, les postes à plein
temps demeurent la référence sur laquelle les autres modèles se basent dans une plus
7
8
16
DFE/seco: La vie économique. Revue de politique économique. 9/2003, p. 99.
Ou, selon le mode de calcul en usage jusque-là, fondé sur les chiffres du recensement de 1990, 3,9 %. Etant
donné que, depuis 1990, la population active (base de la répartition) a augmenté, il en résulte, si on utilise
les données du recensement de 2000, un taux plus faible de 3,6 %. Les chiffres des différentes branches, en
revanche, se fondent encore sur la base de 1990.
ou moins large mesure. A cet égard, il est intéressant d’analyser comment les horaires
de travail types définis dans les contrats individuels ou les conventions collectives de
travail des entreprises se sont développés sur le plan global et selon les branches.
Horaires de travail contractuels
L’évolution des horaires de travail est résumée dans l’introduction (cf. pp. 6ss) de la
législation.
Horaires de travail contractuels (1960–2002)
Heures hebdomadaires contractuelles *
50
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
1960
Année
1965
1970
1975
1980
1985
1990
1995
2000
* 1960–1972: heures payées (y c. heures supplémentaires); secteur secondaire seulement.
1972–1983: heures de travail normales; 3 secteurs (secteurs primaire et tertiaire couverts en partie seulement).
Dès 1984: heures de travail normales dans les secteurs secondaire et tertiaire ainsi que dans la culture maraîchère et la sylviculture.
Source: OFS, Indicateurs du marché du travail 2002
Entre 1960 et le début des années 90, la durée hebdomadaire du travail est passée de
46,2 à 42,2 heures. Depuis, et jusqu’en 2001, le temps de travail moyen effectué ou
convenu contratuellement a encore légèrement diminué pour atteindre 41,7 heures.
Dans le secteur des services, on travaille actuellement en moyenne 41,8 heures par
semaine, dans le secteur industriel 41,5 et dans le secteur primaire 43,1.
Si l’on fait abstraction de ces valeurs moyennes, la situation est encore plus hétérogène.
La fourchette des heures de travail réglementées dans les conventions collectives de
travail (CCT) s’étend de 39 heures aux Chemins de fer fédéraux (CFF) à 46 heures dans
le secteur des transports. Des CCT importantes comme celles de l’industrie des
machines, la chimie bâloise ou l’industrie horlogère prévoient la semaine de 40 heures,
alors que chez les leaders du commerce de détail, Migros et Coop, on travaille 41
heures, et 42 heures 30 dans les banques et les assurances (état mi-2003).
17
CCT avec horaires de travail
les plus courts (heures hebdomadaires)
CCT avec horaires de travail
les plus longs (heures hebdomadaires)
Service public
SBB
Swisscom
Administrations
cantonales
39
40
Les horaires sont
divers; en règle
générale, semaine de 42 heures.
Industrie
Chimie bâloise
Industrie des machines
Industrie horlogère
40
40
40
Brasseries
Industrie des produits en béton
Papier et cellulose
41–45
42
42
Artisanat
Plâtriers/peintres
Technique des bâtiments
Construction métallique
40 Transports routiers généralement 46
40 Industrie du bois Suisse
42,25
40,5
(dès 2004: 40)
Hôtellerie et restauration, vente, produits alimentaires
Coop
Migros
Hôtellerie et restauration
41
41
41
Bouchers
Boulangers pâtissiers
43
42
Secteur financier
Assurances
Banques
42,5
42,5
Source: work, 12.9.2003
En comparaison internationale, le nombre d’heures de travail accomplies au sein des
entreprises suisses demeure relativement élevé. Dans l’UE, la semaine de travail
moyenne équivaut à 38,6 heures.
Toutefois, les horaires de travail usuels prévus dans les entreprises ne correspondent
pas toujours aux heures de travail effectuées réellement par les salarié(e)s.
18
Horaires de travail effectifs
Pour calculer les heures de travail réelles – ou, par déduction, effectuées par chaque
travailleur –, on tient compte du temps de travail annuel normal en déduisant les
absences annuelles 9 pour raison de santé, service militaire, chômage partiel, changement d’emploi et autres raisons personnelles ou familiales. Il faut par contre inclure les
heures supplémentaires. On obtient ainsi respectivement le volume de travail annuel
effectif et celui de chaque employé.
En 2001, les personnes actives appartenant à la population résidante permanente
(c’est-à-dire sans les travailleuses et travailleurs saisonniers, frontaliers, etc.) ont effectué 6340 millions d’heures de travail. Entre 2000 et 2001, le volume des heures de
travail effectuées a légèrement diminué (-0,5 %), bien que le nombre des personnes
occupées avait augmenté de 1,2 % durant la même période. La réduction du volume de
travail s’explique par une légère diminution de la semaine de travail type de 41,8 à 41,7
heures et par l’augmentation des absences qui, en 2001, ont représenté une moyenne
de 86 heures par employé. Ainsi, le temps de travail annuel effectué par personne active à plein temps a été de 1937 heures; celui des personnes actives à temps partiel
compris entre 50 et 89 % a atteint 1195 heures en moyenne alors que celui des personnes travaillant à moins de 50 % a été de 444 heures. En 2001 également, chaque
personne employée (à plein temps) a en outre effectué environ 40 heures supplémentaires, soit une heure par semaine et par personne.
Heures supplémentaires
Au premier abord, il peut paraître paradoxal que des heures supplémentaires soient
effectuées non seulement en période de plein emploi, mais aussi lorsque la conjoncture se détériore. Les raisons en sont évidentes: dans un contexte incertain, nombreuses
sont les d’entreprises qui s’efforcent de réduire le coût de la main-d’œuvre, donc les
emplois. Elles exercent une pression croissante sur les salarié(e)s pour qu’ils compensent le manque de main-d’œuvre et absorbent les pointes éventuelles en effectuant des
heures supplémentaires.
La statistique définit les heures supplémentaires comme étant des heures de travail,
payées ou non, effectuées en plus de l’horaire de travail normal et non compensées par
des congés correspondants durant l’année. En 2001, les personnes actives domiciliées
en permanence en Suisse ont effectué au total 164 millions d’heures supplémentaires
non compensées. Si on divisait ce volume par le temps de travail effectif des personnes
actives à plein temps, cela correspondrait à environ 85 000 postes à plein temps.
9
Les vacances et jours fériés ainsi que les absences consécutives à la flexibilisation du temps de travail ne sont
pas considérés comme des absences. Cf. Office fédéral de la statistique (OFS), Indicateurs du marché du travail
2002. Neuchâtel 2003, p. 33.
19
Heures supplémentaires des salarié(e)s et équivalent en emplois à plein temps
(1997–2001)
Volume annuel des heures supplémentaires
en millions d'heures
Volume annuel des heures supplémentaires
converti en emplois à plein temps *
180
100 000
163
160
163
164
164
152
82096
82085
83193
84541
1998
1999
2000
2001
80 000 77 286
140
120
60 000
100
80
40 000
60
40
20 000
20
0
0
1997
1998
1999
2000
2001
1997
* L’équivalent est calculé en divisant les heures supplémentaires par le temps de travail effectif des personnes occupées à plein temps.
Source: OFS, ESPA-News 8/2003
Les 40 heures supplémentaires prises en compte – une heure par semaine et par personne – représentent une valeur moyenne qui diffère fortement d’un secteur et d’une
entreprise à l’autre. Il ressort des statistiques qu’avec 72 heures supplémentaires par
personne, le secteur bancaire et des assurances détient la plame, suivi par l’enseignement, avec 51 heures. Quant au secteur «immobilier, informatique, recherche et développement», il totalise 41,5 heures supplémentaires. Les enquêtes démontrent aussi que
les heures supplémentaires sont effectuées surtout par les personnes occupant des
fonctions dirigeantes et d’encadrement. Suivant les secteurs et entreprises, les simples
collaborateurs ou les personnes accomplissant des travaux répétitifs ou des activités
auxiliaires sont pourtant également touchées.
En temps de crise, nombreuses sont les entreprises qui réduisent autant que faire se
peut leurs effectifs et ne peuvent fonctionner que parce que leurs employé(e)s effectuent de nombreuses heures supplémentaires. Ainsi, les personnes actives sont
souvent surchargées, alors que le nombre des chômeuses et chômeurs s’accroît. La SEC
Suisse condamne ce mouvement; au lieu d’exiger autant d’heures supplémentaires, elle
demande que l’on crée plutôt davantage d’emplois. A moyen et à long terme, cela se
révèlerait aussi bénéfique pour les entreprises.
20
Réglementation sur le temps de travail en Suisse
En Suisse, les salarié(e)s bénéficient très souvent d’une certaine souplesse dans l’aménagement de leur temps de travail. Pourtant, selon l’Enquête suisse sur la population
active (ESPA) 10, environ 57 % d’entre eux travaillent selon des horaires fixes et contraignants. De telles exigeances sont cependant plus fréquentes pour les femmes que pour
les hommes. Ces dernières sont en effet sous-représentées dans les modèles d’horaires
flexibles, jouissant plus rarement d’horaires variables, avec ou sans heures bloquées,
ou d’horaires de travail annualisés.
Modèles d’horaire de travail en Suisse (2003)
Salarié(e)s uniquement (sans les apprenti(e)s) (en milliers)
2000
56,7 %
1500
1000
17,5 %
500
10,9%
8,2 %
6,7%
0
Début et fin
du travail à
heures fixes
(horaire fixe)
Hommes
Base hebdom./ Base hebdom./
mens.
mens. avec
heures bloquées sans heures
bloquées
(horaire mobile
avec heures bloquées)
Base
annuelle
Autres
modèles
Femmes
Source: OFS, ESPA 2003
En 2003, quelque 220 000 hommes et 210 000 femmes, soit au total 14 % des salarié(e)s, travaillaient en équipes, une des formes d’horaires fixes de travail.
Jours de travail
En incluant également les travailleuses et travailleurs indépendants (et les membres de
la famille collaborant à l’entreprise), environ 69 % de l’ensemble des personnes actives
10
Office fédéral de la statistique: Enquête suisse sur la population active (ESPA). Neuchâtel 2003.
21
travaillent de manière réglementée du lundi au vendredi, les hommes plus fréquemment que les femmes. Ce pourcentage s’avère le même pour ce qui est des personnes
travaillant – selon un horaire réglementé – aussi le samedi et le dimanche. Le travail limité au week-end demeure à raison de 70 % l’apanage des femmes qui sont également
plus fortement représentées que les hommes dans les autres modèles.
Types d’horaires hebdomadaires (2003)
Salarié(e)s et indépendant(e)s, y c. membres de la famille (en milliers)
3000
68,7%
2500
2000
1500
1000
21,9 %
500
8,4 %
1,0 %
0
Lundi
à vendredi
Le week-end
uniquement (Sa/Di)
Hommes
Femmes
Les jours ouvrables
et le week-end
(horaire réglementé)
Autres
modèles
Source: OFS, ESPA 2003
Périodes de travail
Selon l’ESPA, environ 61 % des personnes actives – indépendantes inclues – travaillent
uniquement le jour. Il s’agit plus fréquemment d’hommes que de femmes. On constate aussi que 15 % de la population active travaille durant la journée selon un horaire
réparti sur sept jours, les femmes étant plus nombreuses que les hommes dans cette
catégorie. Par ailleurs, 11 % d’entre elles travaillent durant des périodes réglementées
qui peuvent englober le soir ou la nuit et 10 % d’entre elles sont assujetties à d’autres
modèles. Ces deux dernières catégories concernent en majorité des hommes. En
revanche, ce sont surtout les femmes qui travaillent uniquement le soir ou la nuit.
22
Types d’horaires quotidiens (2003)
Salarié(e)s et indépendant(e)s, y c. membres de la famille (en milliers)
2500
61,2%
2000
1500
1000
15,4 %
500
11,1 %
9,9 %
2,4 %
0
La journée
uniquement,
Lu–Ve
Hommes
La nuit ou le soir
La journée
La journée
uniquement
uniquement,
et le soir
Lu–Ve, Sa ou Di
ou la nuit
(horaire réglementé)
Autres
modèles
Femmes
Source: OFS, ESPA 2003
Les formes de travail atypiques
Selon l’ESPA 2003, environ 185 000 personnes, soit 6 % des salarié(e)s, pratiquent le
travail sur appel. Seules 42 % d’entre elles reçoivent une garantie minimale d’heures
de travail. Dans cette catégorie, la part des femmes est nettement plus importante. La
différence est encore plus marquée pour ce qui est du travail sur appel sans garantie
de durée minimale.
Selon l’ESPA 2003, environ 115 000 personnes pratiquent un travail minimal, soit des
périodes de travail totalisant moins de 6 heures hebdomadaires. 83 % sont effectuées
par des femmes, pour la plupart entre 25 et 54 ans, avec ou sans enfants. Chez les
hommes, cette forme de travail n’est présente que chez les très jeunes – sans doute
pour des raisons de formation – ainsi que chez les travailleurs proches de la retraite ou
retraités.
Quelque 230 000 personnes cumulent plusieurs activités, dont 42 % d’hommes et
58 % de femmes, en majorité âgées entre 25 et 54 ans.
23
Considérations générales sur
les nouveaux modèles de temps de travail
Mutations économiques dans les entreprises
Ces dernières années, les investissements ont été considérables, tant dans l’industrie
que dans le secteur tertiaire. Le déploiement des nouvelles technologies a en particulier engendré des frais élevés. De ce fait, les entreprises ont ainsi tout intérêt à prolonger les journées de travail de manière à accroître la rentabilité des outils de production
ainsi que la productivité de la main-d’œuvre.
Pour les entreprises, il devient en outre toujours plus important d’être à disposition de
la clientèle au moment voulu. En raison de l’accroissement de la pression concurrentielle, du comportement plus critique de la clientèle et de la fluctuation de sa fidélité,
les entreprises doivent plus que jamais respecter les délais. Les entreprises ont intérêt
à ce que les horaires coïncident avec les périodes d’ouverture et la disponibilité de la
clientèle.
Dans le secteur des services, la capacité concurrentielle des entreprises s’améliore si
elles offrent un service 24 heures sur 24. On touche ici à l’épineuse question des heures
d’ouverture des magasins.
De manière générale, la SEC Suisse ne peut considérer la libéralisation des horaires de
travail de manière positive que si on améliore parallèlement la protection des
employé(e)s. La libéralisation doit donc impliquer un horaire de travail aménagé en
fonction des souhaits des salarié(e)s, et le travail du soir doit s’effectuer sur une base
volontaire. Dans le cadre de tels modèles, il faut en outre offrir des postes qualifiés à
temps partiel.
La SEC Suisse rejette en revanche le travail sur appel.
Les modèles de temps de travail
en tant qu’instruments susceptibles d’éviter le chômage
Remarques générales
Le chômage peut être d’origine conjoncturelle ou structurelle. La question est de savoir
si les conditions cadres et les réglementations institutionnelles contribuent à générer
24
du chômage. Le risque semble faible: quasiment toutes les études menées au niveau
international montrent qu’en Suisse, le marché du travail est bien adapté aux besoins
des entreprises.
Logiquement, on peut se demander si des modèles de temps de travail novateurs ne
pourraient pas compenser, ou tout au moins atténuer, les fluctuations de l’emploi et
les restructurations. Actuellement, les propositions se traduisent par des réductions
générales des horaires définis par la législation, des accords différenciés entre partenaires sociaux selon les branches ou les entreprises – voie suivie par la SEC Suisse – ou
encore, ce qui est souvent prôné sans beaucoup de réflexion, par une politique du laisser-faire misant exclusivement sur la libéralisation du marché et sur la recherche de la
croissance (quantitative).
Réduction générale du temps de travail
Pour réduire le chômage, on est en droit de se demander dans quelle mesure l’énorme
volume des heures supplémentaires effectuées pourrait déboucher sur une meilleure
répartition du travail. Une telle question doit être abordée non seulement sur un plan
théorique mais aussi dans la réalité. Il semblerait alors logique de songer à une réduction générale de la durée du travail de l’ensemble des salarié(e)s. Des propositions
allant dans ce sens ont déjà été formulées en Suisse, sans rencontrer jusqu’ici l’assentiment des milieux politiques 11.
Economiquement parlant, il convient de s’interroger sur les effets incitatifs d’une telle
mesure. Certaines études révèlent qu’en réduisant de manière générale la durée du
travail par personne active, cela ne se traduit pas directement par un accroissement
proportionnel du niveau de l’emploi. Les conditions cadres qui sont de mise sur le plan
juridique et économique au niveau indigène ou à l’étranger sont également déterminantes. Des calculs effectués pour la France et l’Allemagne ont par exemple démontré
qu’une réduction de la durée du travail de 1 % n’avait fait progresser l’activité lucrative
que de 0,6 à 0,8 %. En Grande-Bretagne, l’incidence de ces mesures a été encore sensiblement inférieure. Elle a varié de 0,05 à 0,37 %.
La diminution du temps de travail quotidien produit également d’autres effets. Elle
réduit les phénomènes de fatigue et, dans une certaine mesure, stimule la productivité.
L’absentéisme tend également à diminuer, les visites chez le médecin pouvant par
exemple être prévues durant le temps libre. Par contre, parallèlement à la réduction du
temps de présence, on assiste à un accroissement des tâches liées à la préparation du
travail (durée de mise en train), des besoins en matière de communication, d’organisation et de gestion, de même qu’à une augmentation des coûts de la main-d’œuvre et
des besoins de formation.
11
Cf. chapitre «Introduction», pp. 5ss.
25
La compensation des salaires constitue aussi un critère déterminant dans l’analyse des
effets des réductions de la durée du travail. En réduisant conjointement la durée normale du travail et les salaires contre la volonté des salarié(e)s, ceux-ci tenteront d’améliorer leur revenu en effectuant des heures supplémentaires ou en s’adonnant à des
occupations accessoires. Si les entreprises prévoient des compensations de salaire, les
frais par salarié(e) s’accroissent. L’effet souhaité sur l’emploi risque donc de s’atténuer.
En outre, la réaction des entreprises à une réduction du temps de travail pourrait
dépendre de la part que représentent les frais de personnel fixes par rapport à la masse
salariale dans sa globalité: plus cette part est importante, plus la réduction de la durée
du travail sera onéreuse.
Des réductions généralisées du temps de travail risquent d’engendrer des réactions
négatives. Elles pourraient compromettre ou neutraliser les effets escomptés sur l’emploi. Si l’on veut qu’elles jouent un rôle bénéfique, il faut d’abord étudier soigneusement la situation effective à laquelle est confrontée l’entreprise, les conditions de base
et les conséquences potentielles des mesures incitatives envisagées.
Solutions par secteur et entreprise: assouplissement du temps de travail
Compte tenu des difficultés évoquées ci-dessus pour tenter de réduire le chômage, on
songe de plus en plus souvent à organiser les horaires de manière plus souple en faisant
appel à des modèles différenciés selon les secteurs économiques ou les entreprises.
Du point de vue de l’entreprise, l’aménagement des horaires de travail favorise la
productivité et une vision basée sur les exigences de la clientèle. Il permet aussi de
prendre en compte les besoins individuels des salarié(e)s de manière plus appropriée.
Les bons modèles renforcent donc la compétitivité des entreprises, ce qui contribuera
aussi à prévenir le chômage.
26
Si l’on veut assouplir les horaires de travail, il faut démanteler les structures rigides et
standardisées des entreprises. Il s’agira de remanier les conditions et la durée du temps
de travail de manière à ce qu’elle satisfassent tant le personnel que l’entreprise. Les
salarié(e)s doivent donc être associés directement à la réflexion que l’on doit engager
à ce sujet. Ce n’est que s’ils participent à la recherche de solutions que l’on aboutira à
aménager fructueusement les horaires de travail. La cogestion doit prévaloir sur les
décisions imposées de l’extérieur.
La réussite de ces mesures découlera de solutions réfléchies, adaptées et spécifiques
à chaque entreprise. Elles doivent prévoir différents modèles d’horaire moins astreignants que le plein temps et susceptibles de répondre aux besoins de toutes les parties.
Du point de vue de l’entreprise, il convient de prendre en compte en priorité les facteurs
susceptibles d’améliorer sa capacité concurrentielle:
1. Augmentation de son attractivité sur le marché du travail.
2. Meilleure adéquation entre les effectifs et le niveau des ventes.
3. Amélioration de la productivité.
4. Elargissement de la durée d’exploitation et de l’utilisation d’installations ayant
nécessité de gros investissements.
5. Démarquage par rapport à la concurrence.
6. Amélioration de la qualité, productivité et satisfaction de la clientèle.
Pour les entreprises, l’assouplissement des horaires est avantageux quand cela permet
d’allonger la durée durant laquelle les client(e)s peuvent trouver des interlocutrices ou
interlocuteurs ou obtenir un service, de même que lorsqu’il a des effets bénéfiques sur
la productivité. Par ailleurs, l’absence d’incidences sur les coûts (principe de «neutralité» des mesures) constitue l’un des principaux motifs ou attraits de l’adoption d’horaires flexibles.
Dans certains cas, la diminution du temps de travail ne parvient cependant ni à éviter
des fermetures d’entreprises, ni à lutter contre le chômage. En revanche, dans des
secteurs souffrant de surcapacité de production, les horaires de travail flexibles permettent de contenir les licenciements.
La SEC Suisse estime que l’instauration de mesures de réduction des horaires dans le
cadre de négociations entre partenaires sociaux, en se basant sur les conditions sectorielles ou, le cas échéant, la situation particulière des entreprises, constitue un moyen
judicieux et prometteur de prévenir le chômage. Les solutions soutenues par les partenaires sociaux offrent aux entreprises de bonnes chances de sortir d’une situation de
crise.
27
Nouvelles priorités et autres choix de vie
L’environnement et les aspirations des personnes actives changent en fonction de
l’évolution économique. Une nouvelle répartition du travail engendre une diversification des structures. Le rôle de la famille ainsi que l’environnement sont en pleine mutation. Ce processus n’est pas encore arrivé à son terme. De nouveaux besoins modifient
les comportements. Dans le monde du travail, on aspire à plus d’indépendance, d’autonomie et de souplesse. Au cours de ces dernières décennies, les salariés ont souhaité
bénéficier de loisirs accrus. Ce désir n’a rien perdu de son intensité. Compte tenu des
horaires hebdomadaires relativement élevés et un minimum légal de seulement quatre
semaines de vacances par an, cela n’est guère étonnant. Par ailleurs, bien des ménages
ou couples disposent de plusieurs revenus. En ayant désormais acquis une plus grande
aisance, les travailleuses et travailleurs aimeraient pouvoir bénéficier d’horaires offrant
une plus grande souplesse.
Au sein des familles, ce sont toutefois essentiellement les femmes qui réduisent leur
horaire de travail. Aujourd’hui encore, ce sont surtout elles qui assument l’éducation
des enfants et prodiguent des soins à des personnes malades, handicapées ou dépendantes. Pour cette raison, elles effectuent de fait un travail supplémentaire qui n’est pas
rémunéré. Quant aux femmes divorcées, elles sont souvent confrontées à des problèmes
économiques qui les contraignent à exercer une activité lucrative. Si, de plus, elles
doivent assumer des tâches d’assistance, elles ne peuvent envisager autre chose qu’un
emploi à temps partiel. Leur choix est de ce fait extrêmement limité.
Selon une étude publiée récemment 12, 53 % des femmes travaillant à temps partiel
évoquent les obligations familiales comme motif de leur choix, alors que seuls 8 % des
hommes les mentionnent. Si ces derniers réduisent leur horaire de travail, c’est essentiellement à des fins de perfectionnement professionnel (24 %) ou, entre autres raisons,
parce qu’ils exercent une activité accessoire. Toutefois, cette aspiration croissante des
salarié(e)s pour des postes à temps partiel n’est pas pleinement satisfaite car il n’existe
pas suffisamment de possibilités correspondantes.
Selon la même étude, parmi les personnes exerçant une activité à plein temps, une
femme sur trois et un homme sur six préféreraient travailler à temps partiel. Cela correspond à 190 000 femmes et 290 000 hommes. Cela n’englobe pas les femmes qui travailleraient volontiers à temps partiel mais qui, pour des raisons familiales et/ou par
manque de postes à temps partiel attrayants, ont abandonné toute activité professionnelle. A l’inverse, un nombre non négligeable de femmes (80 000) et d’hommes
(40 000) travaillant à temps partiel préféreraient s’adonner à une activité lucrative à
temps complet.
12
28
Strub, Silvia: Le travail à temps partiel en Suisse. Berne 2003.
Motifs présidant à l’adoption d’un emploi à temps partiel
Mentions en %
60%
53%
50%
40%
30%
24 %
21 %
20%
18%
16 %
14%
10 %
10 %
10%
8%
7%
7%
6%
3%
3%
0%
Raisons
familiales
Pas d'intérêt
pour le plein
temps
Femmes
Autres
motifs
En
formation
Activité Pas trouvé Handicap/
accessoire de poste
maladie
à 100%
Hommes
Source: Strub 2003
L’obligation d’assumer d’autres tâches constitue un autre facteur important influant sur
les besoins en matière d’aménagement du temps de travail 13. C’est ainsi qu’en l’an
2000, les femmes suisses consacraient en moyenne 34 heures par semaine aux activités
domestiques et familiales, y compris les soins aux enfants, alors que les hommes n’y
contribuaient que pour 18 heures. En travaillant 42 heures par semaine, les femmes
n’ont donc guère de temps libre.
Le volume des tâches domestiques et familiales est particulièrement élevé chez les
couples avec enfants. Dans ce cas, la durée hebdomadaire moyenne varie entre 42 et
60 heures pour les femmes et de 23 à 26 heures pour les hommes. En moyenne, un
couple avec enfants y consacre donc 42 heures par semaine. Sans aide extérieure et
même avec une répartition du travail lucratif et ménager fondée sur le partenariat, il est
donc indispensable d’aménager en conséquence le temps de travail. Dans ce sens, les
femmes bénéficient rarement d’une large marge de manœuvre pour exercer une activité lucrative car ce sont elles qui assument la plupart des tâches domestiques et familiales. Elles sont donc contraintes d’opter pour un travail à temps partiel ou d’accepter
des horaires permettant de concilier les activités professionnelles et familiales.
13
Strub, Silvia/Bauer, Tobias: Répartition du travail entre les sexes. Etat des lieux. Etude comparative de la répartition du travail non rémunéré et rémunéré dans les familles en Suisse et au niveau international. Etude menée
sur mandat du Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes. Berne 2002 (www.fairplay-at-home.ch).
29
Tâches domestiques: contribution des hommes en comparaison de celle des femmes
(couples avec enfant de moins de 7 ans)
Préparer les repas
24 %
Laver la vaisselle
39 %
Achats
46 %
Nettoyage,
rangement
Lessives,
repassage
17 %
7%
Animaux domestiques, plantes
64 %
Nourrir, laver
les petits enfants
44 %
Jouer avec les
enfants, faire
les devoirs
70 %
Total
0%
45 %
20 %
40 %
60%
80%
100%
Seules apparaissent ici les activités qui représentent au moins quatre heures de travail par semaine (à noter
que les hommes consacrent un peu plus de temps que les femmes aux activités manuelles et aux travaux
administratifs, non représentés sur ce tableau).
Source: Strub/Bauer 2002
En plus des 27 heures hebdomadaires de leur activité lucrative à temps partiel, les
femmes en consacrent presque deux fois plus aux tâches domestiques, ce qui représente bien davantage qu’un travail à plein temps. La situation est différente pour les
hommes. Qu’ils travaillent à temps partiel ou à plein temps, ils ne consacrent que 14
heures par semaine aux tâches ménagères. Ainsi, les besoins en matière d’aménagement des horaires de travail sont différents selon que l’on est une femme ou un homme,
car le temps libre dont disposent les femmes en exerçant un travail à temps partiel est
généralement consacré aux tâches ménagères, ce qui n’est pas le cas des hommes.
Le temps consacré aux tâches domestiques varie non seulement d’un sexe à l’autre,
mais également en fonction des différentes tranches de vie. Ainsi, pour les jeunes de
15 à 24 ans, il est relativement modeste alors qu’il augmente très sensiblement à partir
de 30 ans. Jusqu’à 39 ans, les femmes y consacrent jusqu’à environ 40 heures par
semaine. Cette période est celle durant laquelle la plupart des enfants naissent et grandissent. Les hommes en revanche consacrent le maximum de temps au travail ménager
lorsqu’ils sont âgés de 70 à 79 ans, et donc à la retraite.
30
Il est prouvé que l’aménagement du temps de travail est largement souhaité. Qu’ils
vivent seuls ou en partenariat, les salarié(e)s aimeraient pouvoir choisir eux-mêmes
quand et combien de temps ils veulent travailler afin de répartir librement leur activité
lucrative et leur temps libre.
On obtient ainsi une meilleure humanisation du travail. Le travail ne doit porter atteinte
ni à la santé, ni au bien-être de ceux qui l’assument. En répondant aux besoins, le travail
que l’on peut qualifier d’humain doit permettre un épanouissement personnel tout en
agissant favorablement sur le marché du travail.
De bonnes raisons pour une meilleure redistribution
du temps de travail
Les débats relatifs aux modèles d’horaires novateurs ou une nouvelle répartition du
travail reposent sur plusieurs facteurs incitatifs. On fait en outre la distinction entre la
«grande» et la «petite» redistribution. La petite redistribution porte uniquement sur la
participation au travail lucratif. Elle vise à un équilibre entre les personnes en recherche
d’emploi et les actifs dans le but de réduire le chômage et de réaliser ou d’assurer le
plein emploi. La grande redistribution inclut au contraire le travail non rémunéré. Elle
vise à modifier la répartition du travail entre les sexes afin que les femmes et les
hommes se partagent équitablement le travail rémunéré et non rémunéré.
Actuellement, pour que l’on puisse appliquer la petite redistribution, il faudrait créer
au moins 200 000 emplois supplémentaires 14. Selon la définition de l’Enquête suisse
sur la population active (chômeuses et chômeurs inscrits et personnes en quête d’emploi), ce chiffre couvre aussi bien le nombre de chômeurs que le nombre supposé de
personnes exclues du marché du travail.
La grande redistribution se situe à un tout autre niveau: dans notre société, on consacre
presque autant de temps au travail familial non rémunéré qu’au travail lucratif. Si l’on
en considère la répartition entre les sexes, les femmes travaillent plus que les hommes.
Elles fournissent environ 55 % du volume de travail comprenant aussi bien le travail
lucratif que les tâches domestiques (sans compter le travail d’assistance non rémunéré accompli en dehors de la famille).
En conséquence, la redistribution de la totalité du travail effectué constitue une condition essentielle à l’instauration de l’égalité entre les sexes. La seule réduction des
heures de travail n’y suffit pas. La grande redistribution influerait aussi sur la situation
du marché du travail, qui varie beaucoup selon le sexe: en Suisse, les femmes ne
14
Estimation personnelle.
31
perçoivent qu’à peine le quart de la totalité des revenus provenant du travail lucratif
(cf. Commission fédérale pour les questions féminines: «Qui perd gagne. Réflexions sur
une redistribution du travail entre les sexes». Berne, 1997).
De nouveaux horaires plus souples et générant des effets positifs sur le marché de l’emploi constituent des conditions préalables essentielles pour assurer une redistribution
équitable du travail entre personnes sans emploi et personnes actives ainsi qu’entre les
sexes.
Résistances contre la réduction et l’assouplissement des horaires
L’aménagement des horaires comporte de nombreux avantages. On peut s’étonner dès
lors que, dans notre pays, on se heurte à autant de résistance lorsqu’il s’agit de les
adopter. En aménageant les horaires, les salarié(e)s pourraient travailler et être payés
en fonction de leurs besoins réels, et les entreprises en bénéficieraient en raison d’une
plus grande souplesse et d’un accroissement de la productivité. De plus, l’assouplissement du temps de travail impliquant une réduction des horaires pourrait favoriser le
maintien, voire la création d’emplois. Il est donc important d’analyser les craintes des
salarié(e)s et des entreprises à l’égard de l’aménagement des horaires de travail.
Réticences évoquées par les salarié(e)s:
• Les entreprises instaurent des horaires variables pour accroître le rendement: le
même travail doit être effectué dans une laps de temps réduit.
• La dissociation du temps d’exploitation et de l’horaire de travail permet d’utiliser des
technologies et des machines, ce qui a comme conséquence des suppressions d’emplois et une augmentation du chômage.
• L’employé devient dépendant des décisions arbitraires de l’entreprise. Il ne lui est
plus possible de planifier son temps qui varie alors de manière hebdomadaire, voire
quotidienne.
Réticenses émises par les entreprises:
• Le déroulement du travail doit être réglementé pour que les salarié(e)s soient en
mesure de s’organiser eux-mêmes. L’assouplissement des horaires conduit à un relâchement au niveau de la conscience au travail.
• Vouloir travailler moins démontre un manque de loyauté à l’égard de l’entreprise. Les
salarié(e)s qui s’identifient à leur entreprise et s’investissent pleinement dans leur
travail ne se préoccupent pas d’assouplir leurs horaires.
• L’aménagement des horaires nécessite de gros efforts d’organisation. Il est par
conséquent trop coûteux.
• Autre argument rarement exprimé mais néanmoins présent, la crainte d’une perte de
contrôle et de pouvoir.
32
De telles résistances doivent être prises au sérieux. On ne peut les atténuer ou les
vaincre que si les partenaires sociaux se concertent et cherchent des solutions en
commun.
Bases juridiques
Le contrat de travail se base sur des dispositions de droit public (loi sur le travail), de
droit privé (code des obligations), des accords collectifs (conventions collectives de
travail) et des règlements d’entreprise. Plusieurs dispositions juridiques relevant des
assurances sociales sont également liées au contrat de travail. Le travail à temps partiel
est désavantagé au niveau de la LPP (deuxième pilier) et de l’assurance accidents non
professionnels.
Contrairement à d’autres pays, en Suisse, il existe relativement peu de limitations juridiques à l’application de modèles de temps de travail flexibles. Les limites de durée
maximale ainsi que l’interdiction du travail dominical et de nuit prescrites dans la loi
sur le travail doivent être impérativement respectées. Dans la pratique, des problèmes
juridiques apparaissent toutefois fréquemment. Ils sont surtout dus aux nombreuses
réglementations d’exception prévues par la loi sur le travail.
La SEC Suisse souhaite et agit en sorte que l’aménagement du temps de travail soit
appliqué dans le cadre du partenariat social et non pas sur la base d’accords unilatéraux. Certaines assurances sociales doivent également être revues.
Dans le cadre de l’aménagement des horaires, le travail à temps partiel ne doit plus être
prétérité, en particulier en ce qui concerne la déduction de coordination LPP. Il convient
encore de la réduire, ou même de la supprimer dans les prochaines révisions.
33
Tour d’horizon de différents modèles
d’horaires de travail
Horaire de travail mobile (HTM)
En Suisse, l’horaire de travail mobile constitue la forme la plus courante de temps de
travail flexible. Il a fait son apparition en Allemagne, à la fin des années 60, dans l’entreprise Bölkow. Destiné en priorité aux personnes employées à plein temps, il est largement appliqué en Suisse tant dans les administrations et les entreprises de services que
dans la production.
L’horaire mobile s’applique selon différents modèles qui ont cependant tous un point
commun. Les salarié(e)s choisissent eux-mêmes leurs heures d’arrivée et de départ
à l’intérieur de certaines limites, en fonction de leurs propres besoins. Le temps de travail est divisé en plages bloquées et plages mobiles. Durant la plage bloquée, les
employé(e)s doivent impérativement être présents. Dans la plage mobile, ils peuvent
répartir librement leur temps de travail à condition de respecter certaines contraintes.
Formes d’horaire de travail mobile
En principe, il existe trois formes d’horaire de travail mobile:
• l’horaire de travail étalé,
• l’horaire de travail à la journée, à la semaine, au mois ou à l’année,
• l’horaire de travail variable.
Avec l’horaire de travail étalé, le temps de travail quotidien et hebdomadaire est fixe.
La marge de décision se limite à déterminer quand commence et prend fin la durée d’occupation quotidienne. En règle générale, l’horaire de travail est fixé de manière individuelle et il est valable pour un mois, un semestre ou une année entière.
Dans l’horaire de travail à la journée, à la semaine, au mois ou à l’année, les possibilités d’organisation sont multiples. La période de décompte des heures peut être choisie par les salarié(e)s de diverses manières. La plus fréquente est le mois: sur un mois,
le moment pendant lequel s’effectue le travail est librement choisi dans les limites des
conditions cadres. L’horaire de travail annualisé tend aussi à se répandre de plus en
plus. La période de décompte des heures s’étend alors à l’année.
34
Dans le modèle d’horaire de travail variable, la distinction entre temps bloqué et temps
mobile disparaît. Le moment du temps de travail peut être choisi librement avec les
supérieur(e)s dans les limites d’un horaire cadre. Cette forme exige une large dose d’organisation et de communication.
L’organisation de l’horaire de travail mobile doit prendre en compte le volume des
crédits ou des débits de temps de travail. La marge des écarts autorisés durant le mois
se situe généralement entre 10 et 15 heures en plus ou en moins. La manière de compenser les crédits en temps de travail ou de distinguer les heures en plus autorisées des
heures supplémentaires peut alors poser certains problèmes. Dans la plupart des entreprises, à l’inverse des heures en plus, les heures supplémentaires doivent être imposées par les supérieurs pour être payées avec majoration. Les heures en plus sont quant
à elles compensées par autant d’heures de congé.
Du côté de l’entreprise, une compensation des heures supplémentaires ou des heures
en plus par des demi-journées ou des journées entières de congé est souhaitable. Cela
simplifie la planification du personnel. Certaines entreprises ne remplacent pourtant
pas les heures effectuées en plus et déduisent du salaire les heures en moins ce qui,
du point de vue de la SEC Suisse, est inacceptable.
Autres points à débattre dans les entreprises, le laps de temps et la durée des heures
bloquées qui restreignent la liberté individuelle. De longues plages de travail ininterrompues limitent en effet la flexibilité des salarié(e)s. Enfin, l’horaire de travail mobile
soulève la question du contrôle du temps. Les formes possibles de contrôle sont l’autocontrôle transcrit manuellement, les horloges pointeuses et la saisie électronique du
temps.
Horaire de travail annualisé
Dans le modèle d’horaire annualisé, le temps de travail s’établit sur la base d’une année
civile ou d’un exercice fiscal. Il doit être recalculé chaque année. Les heures de travail
hebdomadaires sont multipliées par 52 (nombre de semaines par an); on en déduit
ensuite les vacances et les jours fériés prévus dans le contrat.
Ce modèle permet aux entreprises de faire face aux fluctuations du volume de travail au
cours de l’année. Il se présente sous la forme d’horaires fixes ou variables en fonction
du travail à fournir. Ils sont généralement fixés par l’entreprise, le personnel ayant néanmoins un droit de consultation.
Ce modèle ne comporte toutefois des avantages pour les salarié(e)s que si ceux-ci participent aux décisions portant sur le moment et la durée du temps de travail à effectuer,
et peuvent exprimer leurs désirs personnels.
35
Bien que le nombre d’heures effectuées fluctue de mois en mois, la rémunération est
versée généralement selon des acomptes mensuels réguliers, indépendamment du
temps de travail effectivement accompli. L’horaire annuel peut s’appliquer aussi bien
au travail à temps partiel qu’à celui à plein temps. En cas d’accumulation d’heures
supplémentaires, il convient d’établir un décompte régulier et de rémunérer les heures
supplémentaires avec une majoration de 25 % (également celles des salarié(e)s à temps
partiel effectuées dépassant le nombre contractuellement convenu).
Avantages et inconvénients pour les employé(e)s
+
+
+
+
+
–
–
Souplesse accrue dans l’aménagement du temps
Plus grande liberté dans l’organisation du temps libre
Meilleure conciliation entre activités professionnelles et privées
Planification à plus long terme
Temps d’occupation adapté à l’état de santé
Diminution éventuelle du revenu
Un faible pouvoir de décision quant à l’aménagement du temps de travail
Avantages et inconvénients pour l’entreprise
+
+
+
+
Diminution du coût des heures supplémentaires, puisque compensées en congé
Amélioration de la productivité
Davantage de souplesse dans la gestion du personnel
Diminution du nombre d’auxiliaires et de temporaires; concentration sur le personnel permanent
+ Optimisation du rendement à l’heure et diminution de l’absentéisme dues à des
horaires moins chargés
– Coût du personnel plus élevé
Horaire libre ou variable
Ce modèle est aussi appelé horaire individuel ou horaire à la carte. Il permet d’organiser personnellement le nombre et la répartition dans le temps de ses heures de travail.
Dans ce type d’horaires, les besoins et les désirs des salarié(e)s sont prépondérants. Les
membres d’un groupe ou d’un département définissent eux-mêmes le moment et la
durée du travail.
Ce type d’horaire exige une bonne collaboration et une parfaite entente entre les
employé(e)s, notamment en ce qui concerne les remplacements. En exigeant de
grandes compétences techniques (procédures de travail) et sociales (relations entre
collègues), cet aménagement souple contribue aussi à les renforcer.
36
A l’inverse de l’horaire de travail mobile, l’horaire libre ou variable ne comporte pas de
plage horaire imposée ou bloquée. Son objectif primordial consiste à répondre aussi
bien aux exigences de l’entreprise en matière de temps de travail qu’aux besoins et
désirs des salarié(e)s. La communication entre les employé(e)s ainsi que la satisfaction
des fournisseurs et de la clientèle doivent être préservées.
Système d’éléments modulaires
Le système repose sur divers modules de temps, quotidiens, hebdomadaires, mensuels
ou annuels. Les employé(e)s ou les groupes de collaborateurs peuvent déterminer euxmêmes leurs modules. Une telle forme permet de dissocier l’horaire de travail de l’horaire d’exploitation.
Système de fourchettes
Le système de fourchettes permet aux salarié(e)s de déterminer leur temps de travail
et le revenu correspondant à intervalles réguliers (par exemple tous les six mois), dans
les limites des fourchettes prévues. Ainsi, ils peuvent travailler 26, 30 ou 40 heures par
semaine. Dans le cadre de ce système, un horaire de travail mensuel moyen est convenu entre les employé(e)s et l’entreprise. L’entreprise fixe une limite inférieure et la limite
supérieure correspond au temps de travail normal.
Selon les évaluations établies jusqu’ici, un tel modèle d’horaire de travail semble satisfaire aussi bien les salarié(e)s que les entreprises. Pour les employé(e)s, le fait de
pouvoir choisir plus librement leur horaire se répercute favorablement sur leur motivation au travail. Quant aux entreprises, ce système leur permet de répondre aux fluctuations du volume de travail selon les périodes.
Horaire de travail modulé en fonction de la charge de travail (HTMC)
Dans ce modèle, le temps de travail est variable et dépend du volume de travail à effectuer. L’entreprise gère le temps de travail, mobilisant sur appel les employé(e)s restant
à disposition. Ces derniers ne sont rémunérés qu’en fonction du temps de travail réellement effectué.
Cette forme typique de temps de travail flexible se rencontre surtout dans le commerce
de détail et l’hôtellerie où les femmes travaillent majoritairement. L’aménagement du
temps de travail ne peut être ni planifié ni influencé, l’horaire étant fixé par des tiers. La
question de savoir si un tel contrat de travail relève encore du principe de la flexibilité
37
se pose puisque les avantages et la fixation du temps de travail demeurent exclusivement du ressort de l’entreprise.
Le système HTMC se caractérise par:
• un travail qui est planifié selon un laps de temps qui varie en fonction du volume de
travail
• une grande disponibilité des personnes susceptibles de répondre sur appel aux
sollicitations de l’employeur
• une maîtrise du temps de travail qui est exclusivement du ressort de l’entreprise
• une norme de référence fondée sur le nombre de mandats
• une rémunération se limitant au nombre effectif d’heures travaillées sans tenir
compte du temps de présence réel durant lequel le personnel ne travaille pas
• le fait que l’entreprise en retire tous les avantages et les employé(e)s tous les inconvénients
La SEC Suisse rejette catégoriquement le système de l’horaire de travail modulé en fonction de la charge de travail (HTMC). Dans de tels contrats sur appel, elle exige comme
condition minimum la fixation d’une durée du travail indicative ainsi que la communication suffisamment à l’avance des plans d’engagement qui doivent être établis d’entente avec les employé(e)s.
Travail à temps partiel (TTP)
On englobe sous le vocable de travail à temps partiel tout type de relation de travail
prévoyant une durée de travail inférieure à l’horaire ordinaire (qui pourrait par exemple
correspondre à un plein temps de 42 heures par semaine). Le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) définit un emploi inférieur à 90 % de l’horaire de travail normal comme
étant un travail à temps partiel. On distingue le travail à temps partiel traditionnel classique du travail à temps partiel flexible. Le travail à temps partiel régulier (classique)
effectué selon un horaire fixe, tel que le travail à la demi-journée, est plus largement
répandu que le travail à temps partiel irrégulier (flexible), basé sur un horaire de
travail variable.
Travail à temps partiel traditionnel classique
Il peut être effectué à la journée (deux jours par semaine par exemple), à l’heure (quatre
à six heures par jour), à la demi-journée (le matin ou l’après-midi), à la semaine (trois
jours à huit heures) ou en pourcentage (80 %). Ce genre de travail à temps partiel est
considéré comme régulier (art. 319 al. 2 CO) et correspond à une réduction du temps de
travail.
38
Travail à temps partiel flexible
Il est déterminé par les salarié(e)s ou par l’entreprise, tant en ce qui concerne le moment
que la durée. Ce genre de travail est irrégulier et répond en tout point à la notion de flexibilité.
Une multitude de motifs émanant aussi bien des individus que des entreprises milite
en faveur des emplois à temps partiel.
Motifs individuels
• indépendance financière
• tâches familiales et intérêts professionnels rendant impossibles une occupation à
plein temps
• désir de profiter de plus de temps libre
• existence de nombreux ménages constitués d’une ou deux personnes
• salaire du/de la partenaire insuffisant
• besoin de plus de temps libre en dehors des travaux domestiques
• mère ou père élevant seul(e)s leur(s) enfant(s)
• l’accroissement du niveau de vie permet d’envisager un travail à temps partiel
• d’autres aspects de la vie privée priment (famille, hobby, perfectionnement),
• désir de travailler à temps partiel
• besoin de contacts sociaux
Motifs propres aux entreprises
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
diminution de l’absentéisme
amélioration de la productivité
plus grande motivation des travailleurs
amélioration de la qualité du travail
meilleure exploitation des capacités lors d’investissements coûteux par l’allongement des heures d’exploitation des installations techniques
rendement optimisé par rapport aux personnes occupées à plein temps
suppression des heures en plus ou supplémentaires
allégement des horaires pour les personnes employées à plein temps
meilleure perception de l’entreprise sur le marché du travail
distinction entre les horaires d’exploitation et de travail
assouplissement dans l’aménagement du temps
meilleure orientation sur la clientèle
meilleure qualité de recrutement (prospection)
maintien d’un personnel qualifié
meilleure adaptabilité aux besoins de l’entreprise
39
Le travail à temps partiel recèle cependant aussi des inconvénients pour les individus
et pour les entreprises.
Inconvénients individuels
• Possibilités de promotion moins importantes, voire inexistantes dans les fonctions
d’encadrement
• Inconvénients financiers, le travail à temps partiel n’étant pas envisageable pour les
faibles revenus
Inconvénients pour les entreprises
• Coûts plus élevés dus à davantage d’information, d’organisation, de recrutement et
mise en place du personnel, d’engagements et de compressions de personnel
• Augmentation des frais d’administration, de coordination, de communication et de
contrôle
• Augmentation des contraintes pour la direction et l’organisation
• Frais supplémentaires engendrés par davantage de places de travail, locaux, bureaux
et infrastructures
Il convient de veiller à ce que le travail à temps partiel n’entraîne pas d’inconvénients
ni pour les personnes, ni pour les entreprises.
Job-sharing (partage des postes)
Le job-sharing est un modèle de temps de travail qui, outre le partage du temps,
implique généralement aussi un partage du travail lui-même. Les personnes qui se
partagent un emploi se répartissent les tâches de manière à ce qu’elles soient assurées
correctement. Idéalement, elles se répartissent les tâches en fonction de leurs besoins,
aptitudes et expériences.
Le job-sharing est une notion générale qui recouvre différentes formes de partage. Dans
le job-splitting, les partenaires se répartissent les tâches, chaque personne n’étant
compétente et responsable que de son propre travail. La situation est différente dans
le job-pairing: toutes les tâches sont planifiées et exécutées en commun, ce qui exige
un haut degré d’information et de coordination. Enfin, dans le split-level-sharing, les
partenaires offrent des niveaux de qualification différents. Cette formule est en particulier valable lorsqu’il faut mettre au courant de nouvelles personnes ou quand le
départ à la retraite d’une personne plus qualifiée est imminent.
40
En Suisse, le job-sharing est peu répandu. Dans la plupart des cas, il n’est offert que
pour des fonctions subordonnées; il n’entre quasiment jamais en ligne de compte pour
des fonctions d’encadrement. Le job-sharing constitue en outre la forme de travail à
temps partiel la plus difficile à mettre en place car il dépend directement des personnes
concernées. Ainsi, il faut que les partenaires présentent chacun les qualités requises
pour le poste, que leurs personnalités ne se heurtent pas, qu’ils soient aptes à communiquer et qu’ils partagent le goût des responsabilités. L’élément motivant pour les
personnes participant au job-sharing est de pouvoir prendre en charge des fonctions et
des tâches correspondant à leurs capacités et à leurs forces. En plus, elles peuvent
adapter leur horaire au volume de travail et gardent ainsi la maîtrise de leur temps.
Avantages et inconvénients pour les salarié(e)s
+ Possibilité de choisir les tâches convenant aux motivations, aux capacités et aux
possibilités temporelles des personnes intéressées
+ Motivation plus élevée
+ Amélioration des possibilités sociales
– Plus d’exigence en matière de performance
– Travail requérant plus de concentration
– Exigences élevées en matière de coopération sociale et technique,
– Revenu plus faible
– Moins de chances de promotion
– Obligation informelle de remplacer un autre collaborateur et cas d’absence
– Dépendance à l’égard du/de la partenaire
Il convient de veiller à ce que le job-sharing n’entraîne pas d’inconvénients pour les
salarié(e)s.
Avantages et inconvénients pour les entreprises
+ Diminution des taux de fluctuations et d’absences (en partie en raison de l’obligation d’assistance)
+ Augmentation de la productivité par un accroissement de la motivation
+ Amélioration de l’efficacité due au fait que les partenaires effectuent des tâches ou
assurent des fonctions correspondant à leurs capacités
+ Poste occupé en permanence
+ Climat de travail et, par conséquent, rendement favorisés par l’intensification de la
collaboration
– Difficultés en matière de communication interne et externe
– Augmentation de la charge administrative
– Productivité ou qualité du travail inégales entre les partenaires du poste
41
Horaire en tandem
L’horaire en tandem se caractérise par le fait que les travaux sont effectués par deux
personnes également qualifiées et présentes successivement. Il implique – dans le cadre
de certaines limites – la prise en charge réciproque des tâches et des responsabités. Ce
n’est qu’à l’arrivée du second collaborateur que le premier peut s’en aller, le poste
devant être occupé en permanence. Les personnes intéressées peuvent convenir entre
elles de leurs heures de présence. Le décompte de leur temps de travail sera établi en
fin d’année afin de vérifier si elles ont effecté chacune les horaires respectifs convenus.
Répartition variable du temps de travail
au cours de différentes périodes de l’existence
Ce modèle offre la possibilité de choisir à quelles périodes de la vie on désire travailler.
Comme les besoins diffèrent au cours de l’existence et que les capacités des personnes
se modifient elles aussi au fil du temps, la souplesse offerte quant à l’entrée dans la vie
active, les éventuelles interruptions (notamment pour des raisons de formation ou de
perfectionnement, de soins aux enfants ou aux membres de la famille) et la retraite
flexible répondent ainsi à leurs désirs.
Le modèle de répartition variable du temps de travail au cours de différentes périodes
de la vie se base sur une division traditionnelle de l’actvité professionnelle qui est de
plus en plus remise en cause:
• formation (école, apprentissage, études)
• phase d’activité lucrative
• retraite
Au cours du siècle dernier, l’espérance de vie des humains s’est considérablement
accrue. Parallèlement, l’âge moyen d’entrée sur le marché du travail s’est élevé, notamment en raison du prolongement des années de formation. Ainsi, l’évolution de l’économie, de l’environnement, de la technologie et des connaissances rend cette différenciation très arbitraire. Cette division stricte en trois phases doit disparaître. Cela en
raison du fait que le perfectionnement professionnel s’intensifie et se poursuit quasiment tout au long de la carrière. Cela implique que les travailleuses et travailleurs
s’aménagent des «pauses» au cours de leur vie active afin de se consacrer à d’autres
tâches, dont le perfectionnement.
Cela peut se faire soit en abandonnant provisoirement la vie active, soit en complétant
sa formation ou poursuivant son perfectionnement en cours d’emploi. La dernière
période du «temps de travail réparti au cours de la vie» ne peut être assouplie que s’il
est possible de prendre une retraite anticipée ou à la carte à partir d’un certain âge.
42
Le modèle de répartion variable du temps de travail au cours des différentes périodes
de la vie part du principe qu’il faut donner la possibilité aux gens d’interrompre une
formation ou une activité professionnelle pour des raisons familiales ou personnelles.
A l’inverse de ce qu’offre un système basé sur la succession linéaire des phases de
formation, d’activité professionnelle et de retraite de la vie active, ces périodes doivent
pouvoir être interrompues et reprises en souplesse. Les calculs relatifs au financement
des formations et des congés s’effectuent sur la base d’un horaire de travail étalé sur
toute la vie. Les résultats sont comptabilisés sur un compte individuel, sous la forme
de «crédits».
Congé sabbatique (congé de longue durée)
Cette forme est étroitement liée au temps de travail effectué ou prévu durant l’ensemble
de sa vie. Comme on a pu le voir, la partition de la vie en trois phases bien délimitées
n’a plus lieu d’être depuis que des changements sont susceptibles de survenir en
permanence. La vie active est dorénavant ponctuée de «ruptures» délibérément choisies et consacrées soit au perfectionnement ou en vue d’un départ progressif ou flexible
à la retraite.
Le congé sabbatique est un congé de longue durée durant lequel les salarié(e)s ne
vaquent pas à leurs activités professionnelles habituelles dans l’entreprise. Il s’agit d’un
congé spécial payé ou non payé étalé sur une certaine durée. Les motivations pour un tel
congé sont multiples: perfectionnement, programmes d’échange, interruption de l’activité professionnelle, besoin de temps libre.
Les conditions posées par les entreprises pour l’obtention d’un congé sabbatique sont
fort diverses. Il peut être obtenu si l’employé compte un certain nombre d’années d’appartenance à l’entreprise, par l’accumulation de jours de congé dans certaines limites,
ou sous forme de congé non payé.
Le congé sabbatique soulève cependant un certain nombre de questions:
1. Le poste de travail devenu vacant est-il garanti?
2. Le congé sabbatique est-il ouvert à tous les salarié(e)s ou seulement à certains
groupes (cadres)?
3. Quelles incidences possibles en matière d’assurances sociales?
43
Retraite progressive et retraite à la carte
La retraite telle que prévue et généralement pratiquée présente l’avantage d’être simple
et équitable sur le plan juridique. Elle ne tient pourtant pas compte des besoins et désirs
personnels des travailleuses et travailleurs. L’un des principaux obstacles à la retraite
à la carte a trait aux questions d’assurance sociale. Chaque année d’anticipation de
l’âge légal de la retraite engendre une diminution de la rente 15, tant en ce qui concerne
l’AVS que la prévoyance professionnelle. Pour de nombreux de salarié(e)s, un telle
réduction n’est pas supportable. Ils deviennent alors dépendants du bon vouloir de l’entreprise (allocation transitoire).
Il existe différents genres de retraite:
• Retraite stricte: abandon de la vie active à 65 ou 63/64 ans 16. Ce système arbitraire
fixe une échéance bien précise.
• Retraite progressive: réduction graduelle, par étapes, des activités professionnelles.
Le temps de travail des employé(e)s d’un certain âge diminue jusqu’à ce qu’ils atteignent la limite d’âge (65 ou 63/64 16 ans) ou jusqu’au moment convenu. Une réduction de l’horaire hebdomadaire constitue une autre possibilité.
• Retraite relativement flexible: départ anticipé/passage à la retraite dans les limites
d’une fourchette donnée (60–65 ans).
• Retraite entièrement flexible: arrêt possible entre 60 et 70 ans, le choix de l’horaire
étant laissé à l’employé(e).
La retraite progressive du point de vue des salarié(e)s
+ Diminution du stress et, par conséquent, amélioration du bien-être grâce à une
réduction du temps de travail
+ Accoutumance progressive au statut de rentier ou rentière à part entière grâce à une
augmentation graduelle du temps libre
+ Atténuation du choc psychologique lié à la retraite
– Risque que les personnes d’un certain âge soient reléguées à des postes subalternes, moins valorisants ou mises à l’écart
– Risque de ne pas déléguer le travail comme cela est prévu par crainte d’une certaine
perte de prestige
– Charge de travail excessive si d’autres collaborateurs ne compensent pas la réduction du temps de travail
15
16
44
Pour les femmes des années 1939–1947, des règles de réduction légèrement atténuées sont prévues dans
l’AVS (cf. 10e révision de l’AVS). La 11e révision de l’AVS, adoptée en automne 2003, prévoit encore une réglementation analogue pour les années 1948–1952; ensuite, les règles de réduction actuarielles sont valables.
Mais la mise en place de la 11e révision de l’AVS est actuellement (décembre 2003) encore fortement contestée; la SEC Suisse préconise une solution qui aille plus loin pour les femmes et les hommes.
L’âge de la retraite AVS pour les femmes a été relevé à 63 ans en 2001; il passera à 64 ans en 2005.
La retraite progressive du point de vue des entreprises
+
+
+
+
+
–
–
–
Diminution de l’absentéisme
Allongement de la mise au courant des successeurs
Facilité en terme de gestion du personnel
Accroissement de la productivité
Maintien du savoir-faire
Accroissement des exigences en matière de planification du personnel
Besoin accru d’organisation et, par conséquent, baisse de la productivité
Augmentation des coûts
La retraite flexible du point de vue des salarié(e)s
+ Prise en considération des besoins individuels (à condition que les collaboratrices et
collaborateurs puissent en décider librement)
– Diminution des possibilités de replacement des travailleuses et travailleurs d’un
certain âge liée au «facteur risque» que constitue une retraite anticipée
– Moins de réticence à imposer une retraite anticipée qu’à procéder à un licenciement
– Tentatives de pression éventuelles pour une retraite «volontaire»
La retraite flexible du point de vue des entreprises
+
+
+
+
Instrument supplémentaire en terme de gestion du personnel
Rajeunissement et réorganisation dans les procédures de travail
Amélioration de la productivité
Diminution de la masse salariale, le successeur étant souvent engagé à un salaire
inférieur
+ Maintien du savoir-faire
+ Meilleure coordination entre le départ à la retraite et l’arrivée de la relève
– Coût de la prestation transitoire
La SEC Suisse approuve les possibilités et modèles offerts par la retraite anticipée.
L’égalité des chances doit pourtant être maintenue aussi pour les personnes à faibles
et moyens revenus.
45
Application du principe
de l’aménagement du temps de travail
Conditions préalables à son application
Les changements et innovations se heurtent très souvent à des réticences et des
obstacles. Il faut parvenir à les cerner pour pouvoir prendre les décisions qui s’imposent.
Dans les entreprises, l’aménagement des horaires de travail exige un temps de réflexion
et d’adaptation car les obstacles à leur application sont nombreux. Cela exige que les
cadres adoptent une attitude positive face au travail à temps partiel. De leur côté, les
collaboratrices et collaborateurs devront faire preuve d’un meilleur esprit de coopération avec leurs collègues dans l’organisation des horaires.
Conditions préalables générales
Après avoir mis en évidence les obstacles, il faut apprendre à les affronter et à prendre
les mesures appropriées destinées à les surmonter.
L’adoption de mesure d’aménagement des horaires est liée aux conditions suivantes:
• Toutes les réticences doivent disparaître:
- celles de la direction face à l’accroissement du nombre de salarié(e)s (coût) que
cela implique
- celles des cadres moyens qui redoutent un surcroît d’organisation
- celles des salarié(e)s par rapport à la sécurité sociale
• Les souhaits des employé(e)s travaillant dans les divers départements doivent être
pris en considération
• Une marge de manœuvre suffisamment large doit être prévue pour mettre en place
des dispositions sectorielles quand cela s’avère nécessaire
• La constitution d’unités de dimensions modestes et maîtrisables au sein desquelles
pourront s’appliquer des modèles d’horaires flexibles dépend d’une multiplicité de
facteurs.
46
Les principaux facteurs indispensables à la réussite de l’introduction de mesures d’aménagement des horaires de travail sont:
• des modèles avantageux pour le personnel et pour l’entreprise
• des modèles présentés sans oublier aucun détail
• une campagne d’information en toute transparence
• la participatiion de toutes les parties concernées
• un coaching idoine des cadres
Conditions préalables particulières: exigences posées aux cadres
L’introduction de modèles de temps de travail flexibles nécessite que les cadres modifient leur comportement. Ils doivent améliorer la prise en compte des intérêts individuels
des salarié(e)s dans l’organisation des horaires en les intégrant dans le processus de
décision; on améliore ainsi la motivation des collaborateurs et le climat de travail.
L’aménagement des horaires de travail implique:
• une gestion basée sur la coopération et la confiance plutôt que sur les contrôles
• de plus grandes exigences de la part des cadres et au niveau des prestations
L’aménagement des horaires modifie la culture d’entreprise et bouleverse les habitudes
au sein de celle-ci. Son introduction ne sera bénéfique aux employé(e)s et entreprises
que si les cadres font preuve de suffisamment de compétences sociales. Il apparaît que
les résistances à son application émanent surtout des cadres moyens. Ils objectent
souvent à l’encontre des modèles de réduction du temps de travail que certaines tâches
exigent une présence permanente. Ces prétendues barrières ne reposent sur aucun
argument rationnel et leurs craintes renforcent encore les résistances.
Les principales réticences relèvent de:
• la perte de pouvoir, car la décision quant à la répartition du temps est déléguée aux
employé(e)s
• la perte de contrôle, car les heures de présence des cadres et des employé(e)s sont
modifiées
• l’accroissement du travail des cadres qui, en tant que responsables, doivent exercer
un contrôle plus important
• nouvelles exigences pour des tâches d’encadrement toujours plus lourdes au détriment des tâches spécialisées maîtrisées jusqu’ici
47
Le succès de l’application des mesures d’aménagement des horaires de travail rencontrent le succès escompté, il faut que les cadres disposent de compétences et démontrent
un comportement exemplaire. Les cadres doivent remplir deux fonctions essentielles:
1. Fonction d’exemple:
Le comportement des cadres a une influence directe sur les normes et les valeurs des
employé(e)s et, par conséquent, sur la culture d’entreprise. C’est la raison pour
laquelle l’aménagement des horaires de travail doit aussi inclure les cadres.
2. Fonction d’application et d’orientation:
La flexibilité des personnes concernées dépend de leur marge de manœuvre. La
gestion des horaires comporte trois aspects: les cadres doivent établir les limites de
la flexibilité et, dans ce contexte, harmoniser les besoins des salarié(e)s avec ceux
de l’entreprise. Ainsi, les cadres sont responsables de la mise au point et de l’organisation du modèle de temps de travail. De plus, il leur incombe d’apprécier l’aptitude et la motivation des employé(e)s vis-à-vis de la flexibilité, et de les y encourager en prenant des mesures appropriées.
Les horaires de travail flexibles accroissent le volume de travail des cadres, jusque-là
limité aux activités de planification, de prise de décision, d’attribution des tâches et de
contrôle. Ils doivent non seulement assumer les fonctions susmentionnées, mais également maîtriser la gestion des conflits, l’élaboration de stratégies et la planification à long
terme de l’acquisition de compétences spécifiques. Il faut donc tenir compte de cet
accroissement des exigences posées aux cadres lors de l’aménagement des horaires
de travail. Dans cette perspective, il est recommandé d’analyser les compétences des
cadres dans ce domaine et, au besoin, de les compléter par une formation appropriée.
Objectifs
Lors de la mise en place d’une nouvelle réglementation sur les conditions de travail, il
convient de prendre en compte les objectifs de chaque partie concernée. Les horaires
de travail doivent répondre aux exigences des salarié(e)s comme des entreprises,
condition préalable indispensable pour parvenir à un entente sur leur introduction.
Nous examinons ci-après quels sont les objectifs des employé(e)s et des entreprises.
Objectifs des employé(e)s
Lors de l’introduction des mesures d’aménagement des horaires, le principal objectif
des employé(e)s vise à accroître leur qualité de vie: leurs conditions de travail doivent
être mieux harmonisées à leurs besoins personnels qui évoluent en fonction de
nouvelles valeurs.
48
A l’heure actuelle, les salarié(e)s accordent une plus grande importance au perfectionnement, à la vie de famille et aux loisirs. Cette situation influe sur le travail qui a tendance à s’humaniser. En raison de l’ augmentation du taux de chômage, l’aménagement
des horaires pourrait contribuer aussi à renforcer la sécurité du travail.
Les principaux arguments et objectifs des salarié(e)s sont les suivants:
• Maîtrise du temps, marge de manœuvre et autonomie:
En déterminant eux-mêmes leur horaire de travail, les employés accroissent leur
marge de manœuvre individuelle et leur pouvoir de décision (autonomie).
• Répartition des rôles plus équitable:
En aménageant les horaires de manière appropriée, il est possible de répartir de
manière individuelle les obligations professionnelles et familiales. Les femmes pourraient accroître leur activité professionnelle et les hommes assumer davantage de
tâches ménagères et éducatives.
• Participation:
Si les entreprises et employé(e)s établissent ensemble la réglementation relative aux
horaires de travail, il faut, dans la mesure du possible, prendre en compte tant les
exigences de l’entreprise que les besoins des salarié(e)s.
• Partenariat social actif:
Les réglementations convenues dans le cadre du partenariat social permettent de
répondre à la pression du marché pour un allongement des horaires d’exploitation.
• Humanisation du travail:
Les postes de travail et les prestations peuvent être organisés avec plus de souplesse. Plus attrayant, le travail s’effectuera dans un meilleur climat.
• Adaptations individuelles et modulables:
Les conditions de travail peuvent être adaptées périodiquement aux nouveaux
besoins des employé(e)s.
• Protection de la santé:
Les salarié(e)s bénéficient de meilleures opportunités pour se reposer et se ressourcer.
49
• Sécurité des emplois:
Une meilleure répartition du travail et une diminution des heures supplémentaires
permettent d’éviter les licenciements et de réduire le chômage.
Objectifs des entreprises
Objectifs économiques:
• Stabilité des coûts:
L’aménagement des horaires ne doit pas forcément générer une augmentation des
coûts.
• Variation de main-d’œuvre:
Les salarié(e)s doivent pouvoir répondre avec une plus grande souplesse aux pointes
de production ou aux besoins de la clientèle.
• Garantie des procédures de travail de l’entreprise:
L’aménagement des horaires ne doit pas mettre en péril le bon déroulement du
travail.
• Pas d’augmentation des risques commerciaux:
Tant l’exécution que la qualité du travail ou des services durant les heures de présence ou d’ouverture doivent répondre aux attentes de la clientèle. Aucun mandat ne
doit être perdu par manque de disponibilité ou insuffisance de qualité.
Objectifs en matière de gestion du personnel:
• Motivation des salarié(e)s:
L’aménagement des horaires doit déboucher sur une augmentation de la satisfaction au travail
• Diminution du taux de rotation du personnel et de l’absentéisme
• Stimulation du travail en équipe
• Acceptation par les salarié(e)s et les délégués du personnel
• Amélioration de la sécurité ou maintien des emplois:
En période de récession, la pression sur les emplois est moins forte. L’entreprise
maintien intact son savoir-faire et assume sa responsabilité sociale.
50
Revendications de la SEC Suisse
Les avantages générés par l’aménagement des horaires de travail doivent être répartis
de manière équitable entre les salarié(e)s et les entreprises. L’aménagement des
horaires ne doit pas détériorer les conditions de travail des employé(e)s, ni se faire au
seul bénéfice de l’entreprise. Contrairement à la «symétrie des sacrifices», il convient
d’établir ici une «symétrie des avantages», condition indispensable pour préserver la
motivation et, par conséquent, garantir le succès de l’aménagement des horaires.
L’aménagement des horaires de travail contribue également à sauvegarder les emplois
et à prévenir les licenciements conjoncturels.
Exemples appliqués
Les nouvelles formes d’horaires de travail ne sont pas toujours abordées dans les
débats car on les juge souvent peu sérieuses, théoriques et onéreuses. De nombreuses
démarches allant dans ce sens ont pourtant été entreprises et des modèles ont été
appliqués depuis un certain temps déjà tant dans les grandes entreprises que dans les
petites et moyennes entreprises (PME). La définition des objectifs reflète dans une
certaine mesure la conjoncture économique ou la situation du marché du travail dans
les différents secteurs concernés. Si certains modèles – comme le «modèle pionnier»
de VW – visent clairement au maintien et/ou à la création d’emplois, d’autres estiment
que l’aménagement des horaires relève des mesures générales de la gestion d’entreprise. Comme le démontrent certains modèles d’application, il est indispensable d’examiner et de prendre en compte les conditions particulières d’un secteur ou d’une région.
Les trois exemples ci-après donnent un aperçu de l’éventail des solutions envisageables.
Volkswagen (VW): un modèle expérimental de grande envergure
En 1996, l’entreprise Volkswagen AG qui a son siège à Wolfsburg (Allemagne) a introduit la semaine de quatre jours et réduit la durée hebdomadaire de travail de 36 à 28,8
heures. La réduction du temps de travail de 20 % – impliquant une diminution du revenu annuel d’environ 15 % – a permis de conserver 20 000 emplois, soit autant de salarié(e)s.
Etonnamment, ce sont les travailleurs touchant les plus bas salaires qui ont accueilli le
mieux cette réglementation. En dépit de l’approbation générale, les personnes plus
âgées ou mieux qualifiées se sont montrées moins satisfaites que les plus jeunes. Les
femmes en distinguèrent un plus grand nombre d’avantages que les hommes.
51
L’autre élément à relever du modèle VW est que, depuis le 1er janvier 1996, il inclut un
«relais des générations». Avec l’accord de l’entreprise, les salarié(e)s plus âgés peuvent
prendre progressivement leur retraite en travaillant 24, 20 puis 18 heures par semaine.
Au cours de ces trois étapes, ils touchent en moyenne 85 % du revenu qu’ils percevaient
à plein temps.
Quant aux jeunes ayant achevé leur apprentissage, ils ne peuvent travailler que 20
heures pendant les deux premières années, et seulement 24 heures pendant les 18 mois
suivants.
ABB Suisse: aménagement des horaires dans une grande entreprise suisse
Le modèle d’horaire basé sur la convention collective de travail (CCT) de l’industrie des
machines offre aux collaboratrices et collaborateurs et à l’entreprise une grande
souplesse dans l’aménagement des horaires de travail. Chez ABB Suisse, plusieurs
modèles de temps de travail individuel ou de travail à temps partiel sont appliqués,
également pour les cadres. On pratique essentiellement le travail à temps partiel classique, le job-sharing, ainsi que l’horaire de travail en groupe en tant que développement
logique du concept du job-sharing.
ABB Suisse mise sur la retraite à la carte et progressive. La prévoyance professionnelle
est assurée par trois institutions de prévoyance complémentaires. Les plans de
prévoyance sont uniformes et les trois institutions offrent des options identiques. Les
assuré(e)s choisissent comment ils souhaitent percevoir leurs prestations de retraite,
en l’occurrence sous la forme d’une rente ou du versement du capital en une fois. Différentes formes mixtes de rente et de paiement du capital sont en outre possibles. Pour
les hommes comme pour les femmes, l’âge de la retraite ordinaire est fixé à 65 ans. Les
employé(e)s peuvent partir à la retraite dès l’âge de 57 ans, mais au plus tard à 70 ans.
Ils sont libres de choisir une retraite anticipée, flexible, ordinaire ou différée.
En cas de retraite anticipée (entre 57 et 62 ans), la rente de vieillesse est amputée des
réductions actuarielles nécessaires. Celles-ci sont considérables: peu nombreux sont
les assuré(e)s qui peuvent se permettre financièrement de choisir la retraite anticipée.
Dans le cas de la retraite à la carte (de 62 à 65 ans), la rente vieillesse est moins fortement réduite que cela n’est prévu statutairement. Les coûts correspondants sont supportés par la masse des assurés et par l’entreprise, à raison d’une moitié chacune.
Wandfluh: flexibilisation dans une PME
La fabrique de machines Wandfluh, à Frutigen, emploie environ 200 personnes. Elle produit des soupapes hydrauliques et pneumatiques ainsi que des éléments électroniques
52
pour les secteurs des mines, des chemins de fer et de la construction automobile, de
l’énergie hydraulique et éolienne, etc. Cette PME orientée sur le monde applique depuis
plus de 15 ans des horaires de travail à la carte: une fois par an, les employé(e)s choisissent individuellement leurs heures de travail hebdomadaires et leurs semaines de
vacances. Chacun travaille de manière polyvalente et peut constituer des crédits de
temps mobile élevés (+100/-15 heures, extensible), puis les compenser par des journées de congé. Environ 40 % des employé(e)s de Wandfluh choisissent aujourd’hui un
tel type d’horaire.
Autres exemples
Modèles qui, selon les conditions cadres, ont été conçus soit comme projets pilotes
sur une longue période, soit temporairement au cours d’une restructuration: 17
Modèles d’horaires tendant à la «flexibilisation de la période de travail»
• Hewlett-Packard (Suisse SA): horaire de travail à la carte
• ABB Suisse: horaire de travail annuel à la carte
• Ciba Spécialités chimiques: travail à la carte par rotation d’équipes
• Schwarz AG, technique de tôle fine: modèle «à 5 vitesses»
Modèles d’horaires tendant à la «flexibilisation de la durée du travail»
• La Poste: modèle de solidarité, modèle des apprenti(e)s, modèle des cadres
• Direction de la Santé du canton de Zurich: modèles de temps de travail avec effet
sur l’emploi (BAM)
• Käppeli Holding AG (construction): modèle d’horaire «TravailPlus»
• CERN, Genève: modèle «compte de temps libre»
Retraite à la carte 18
• ABB Consulting AG: modèle «carrière alternative»
• Leica Geosystems AG
• Frutiger AG (secteur principal de la construction): temps partiel pour les travailleuses et travailleurs d’un certain âge
Pour d’autres modèles et expériences en Suisse et à l’étranger, nous renvoyons aux
indications bibliographiques (p. 60–61).
17
18
Graf, Stefan/Henneberger, Fred/Schmid, Hans: Flexibilisierung der Arbeit. Erfahrungen aus erfolgreichen
schweizerischen Unternehmen. Haupt, Bern/Stuttgart/Wien 2000.
Une réglementation remarquable au niveau d’une branche a été adoptée en 2002 dans l’industrie du bâtiment, dans le cadre de la «Convention collective de travail pour la retraite anticipée dans le secteur principal
de la construction» (CCT RA); www.far-suisse.ch.
53
Partager les postes:
chances accrues pour femmes et cadres
Critères de partage des postes
Les modèles d’horaires à la carte visant à réduire la durée du travail et à partager les
postes ne peuvent être instaurés à la légère. Pour les appliquer de manière satisfaisante, il faut tenir compte de plusieurs critères.
Critères généraux
• Volonté commune: tant l’entreprise que les employé(e)s concernés souhaitent le
partage du poste.
• Volonté de la direction: celle-ci doit être manifestement favorable au travail à temps
partiel et l’encourager par des mesures incitatives.
• Solutions spécifiques à un département: aucune forme de réduction du temps de travail ne peut convenir à l’ensemble des secteurs d’activité, entreprises, départements
ou postes. Il est donc indispensable de différencier les modèles en fonction de
critères spécifiques.
• Compensation partielle des salaires: le gain de productivité escompté ne se réalisera
que si un grand nombre de salarié(e)s l’accepte.
• Aucune diminution des prestations ou des service à la clientèle.
• Respect des dispositions du droit du travail.
Critères spécifiques
La divisibilité objective des postes à plein temps dépend du genre de tâches à effectuer, de leur répartition et de la potentialité de changement de l’organisation du travail.
La divisibilité subjective dépend des besoins de l’entreprise et de la volonté des employé(e)s. Il est indispensable que l’ensemble des cadres et des membres d’une équipe adhèrent au changement. Les employé(e)s doivent pouvoir organiser librement leur
travail tout en restant ouverts à la coordination et à l’information. Les personnes concernées doivent également être satisfaites de la souplesse offerte, du système d’horaire
de travail, de l’entreprise elle-même et de l’allègement de leur charge (stress). La divisibilité subjective comprend aussi l’attitude des collègues et des supérieur(e)s les uns
vis-à-vis des autres, souvent appelée à évoluer. Le maintien de la satisfaction au travail
en dépend directement.
54
Pour estimer le nombre d’emplois pouvant potentiellement être mutés en postes à
temps partiel, on doit tenir compte de deux éléments. Il faut d’une part connaître le
nombre de personnes prêtes à travailler à temps partiel et, d’autre part, savoir si le
travail à temps partiel n’est pas limité par les emplois eux-mêmes. Toutes les fonctions
ne se prêtent en effet pas au travail à temps partiel.
On peut toutefois s’attendre à l’avenir à un renforcement de tendance en faveur du
partage des postes. Les modèles de temps de travail flexibles sont favorables au principe d’égalité. Ils prennent en compte tant les besoins des salarié(e)s que ceux des
entreprises, constituent des instruments efficaces pour créer des postes à temps partiel
à tous les niveaux hiérarchiques.
Vous en saurez plus sur les conditions d’engagement et les bases juridiques du travail
à temps partiel en consultant la brochure n° 5 de la SEC Suisse intitulée «Travail à temps
partiel».
Potentiel des femmes en terme d’emploi
Le potentiel professionnel des femmes a longtemps été sous-estimé et peu mis en
valeur. Et quand on l’exploitait, c’était essentiellement à des niveaux hiérarchiques inférieurs, pour des tâches simples, monotones et non qualifiées. Par ailleurs, les femmes
désirant faire carrière ne sont pas facilement acceptées, ni aisément reconnues par la
société. Pourtant, la promotion et l’intégration des femmes aux échelons supérieurs de
la hiérarchie constitueraient un enrichissement pour la direction et l’entreprise ellemême. Tentons d’appréhender l’importance et l’utilité de ce potentiel.
La valeur et l’importance des femmes dans la vie professionnelle n’ont cessé d’évoluer.
Autrefois
Pendant longtemps, le rôle de la femme consista à rendre service, l’activité lucrative
restant l’apanage de l’homme.
Aujourd’hui
Les femmes exerçant une activité lucrative se heurtent encore aux mêmes préjugés ou
réserves:
• manque de continuité
• manque de résistance physique
• manque de savoir-faire
• absences fréquentes
55
Au début de l’intégration des femmes, les postes qu’elles occupaient correspondaient
au rôle qu’elles assumaient au sein de leur famille en se consacrant à des activités de
service et elles ne pouvaient pas accéder aux postes hiéararchiquement supérieurs.
Cette conception évolue pourtant peu à peu, les femmes bénéficiant désormais de
qualifications et d’une formation analogues à celles des hommes. Aujourd’hui, elles
peuvent également se faire seconder dans leurs tâches domestiques ou la garde de
leurs enfants.
Demain
• La répartition des rôles basée sur le principe du partenariat poursuivra son évolution.
• L’importance de l’activité lucrative des femmes continuera d’augmenter et se rapprochera de celle des hommes.
• Les inégalités en matière de salaire et de carrière devraient diminuer. Les femmes
devront pourtant continuer à lutter pour que le principe de l’égalité soit respecté.
• Les structures sociales et les conditions de travail continueront à se modifier et
deviendront plus souples.
Dans ce processus de changement, les formes d’horaires de travail flexibles apportent
une aide précieuse dans la mesure où elles permettent aux personnes qui assument des
tâches d’assistance – concrètement, avant tout les femmes – de mieux participer à la
vie professionnelle que ce n’est le cas aujourd’hui. En revanche, les horaires de travail
fixes et les conditions cadres rigides en matière de politique familiale bétonnent la
répartition traditionnelle des rôles entre les femmes et les hommes.
La voie de l’avenir est ainsi toute tracée. Elle ne pourra cependant se concrétiser que si
l’attitude de la société à l’égard du travail lucratif des hommes et des femmes continue
de s’éloigner des clichés qui persistent encore aujourd’hui.
56
Potentiel de travail à temps partiel des cadres
A l’image de ce qui se fait pour les femmes, il est également possible de concevoir de
nouveaux postes à temps partiel pour les cadres supérieurs. L’apparition de tels
horaires à la carte dépendra cependant de la manière dont on parviendra à vaincre les
résistances encore bien perceptibles à l’égard du travail à temps partiel chez les cadres.
Les demandes de réductions d’horaires dans les fonctions d’encadrement sont plus
nombreuses que les offres. Dans le même sens, les tâches de conduite sont généralement considérées comme étant indivisibles. Une étude portant sur les postes d’encadrement partagés dans le service public fait pourtant apparaître que, sous certaines
conditions et à des degrés de qualifications spécifiques, les postes de cadres sont effectivement divisibles. Les préjugés subsistent pourtant dans maintes entreprises et dans
l’esprit de nombreux cadres, notamment par manque d’information.
Les réticences à l’égard du temps de travail à la carte sont certainement dues au fait que
la plupart des cadres ne connaissent guère d’exemples de collègues travaillant à temps
partiel. Le travail à temps partiel est d’autre part souvent assimilé à une activité non
qualifiée, plutôt réservée aux femmes, et pouvant être exécutée avec un faible engagement personnel. On estime aussi à tort qu’une fonction hiérarchique élevée nécessite forcément une omniprésence des cadres concernés. Enfin, on rejette le travail à
temps partiel des cadres sans aucune motivation objective, souvent en argumentant
que leurs tâches ne peuvent être effectuées dans les limites d’un temps partiel.
Obstacles au travail à temps partiel des cadres
• Résistance au changement: manque d’engagement pour oser innover
• Attitude sceptique à l’égard de la réduction de la durée du travail: manque d’opportunité pour tenter des expériences positives
• Situation économique: la conjoncture n’est pas favorable à l’innovation en matière
de gestion du personnel
• Manque d’expérience du travail à temps partiel au niveau des cadres: personne ne
veut être le premier ou la première
• Attitude conservatrice des cadres
• La structure hiérarchique des fonctions fait souvent obstacle à l’introduction de modèles individuels de temps de travail
• Les entreprises se montrent généralement sceptiques quant au travail à temps
partiel pour des postes qualifiés
• Les entreprises sans expérience en matière de travail à temps partiel émettent de très
fortes réserves à l’égard des modèles de temps de travail à la carte
• Un manque d’information renforce les effets négatifs présumés des réductions des
horaires de travail
57
L’introduction de modèles basés sur la réduction des horaires de travail chez les cadres
exige que l’on examine les points suivants:
• divisibilité, contenu ainsi que durée du travail des personnes affectuées au poste
• corrélation et communication avec d’autres instances (internes/externes)
• aspiration à l’omniprésence des cadres
• possibilités de carrière, formation et perfectionnement
• aspects financiers
• coût généré par le changement d’organisation du travail
En ce qui concerne l’aménagement du temps de présence, une position de cadre est
potentiellement réceptive à la flexibilisation quand l’absence de la personne n’exige pas
de prévoir de remplaçant et qu’elle n’induit pas de dégradation du niveau d’efficacité.
Cela dépendra dans une large mesure du style de conduite et de la culture d’entreprise.
Pour ce qui est de l’horaire partagé, une fonction est jugée réceptive à la flexibilisation
quand elle peut être assurée par toutes les personnes désigné à cet effet. Une fonction
remplit d’autant mieux les conditions du partage quand elle est standardisée et normalisée, que la personnalité des individus qui l’assurent joue un rôle secondaire et que le
transfert des informations d’une personne à l’autre est facilement réalisable.
La SEC Suisse souhaite que l’on crée davantage de postes d’encadrement à temps
partiel pour permettre aux femmes et aux hommes de mieux concilier leurs obligations
familiales ou communautaires et leurs activités lucratives.
58
Tendances dans l’organisation
du temps de travail
Les tendances actuelles en matière d’organisation des horaires de travail sont les
suivantes:
1. Passer de l’horaire de travail hebdomadaire à l’horaire de travail annualisé.
2. Passer de la semaine de cinq jours à la semaine de quatre jours:
La réduction du temps de travail individuel et l’allongement de l’horaire de l’entreprise conduira naturellement à la concentration de l’activité professionnelle sur
quatre jours par semaine.
3. Passer de l’uniformité à l’individualité:
Les horaires de travail uniformes dans toute l’entreprise deviennent de moins en
moins courants.
4. Passer de l’organisation centrale du travail à la délégation de la compétence temporelle:
Négocier, organiser et gérer le temps de travail relèvent de plus en plus souvent des
compétences des unités opérationnelles et des groupes de travail.
5. Passer d’une organisation basée sur le temps à celle axée sur les tâches:
Le temps comme mesure du travail cède le pas à la tâche à effectuer.
A l’avenir, la réorganisation des horaires de travail constituera un important défi pour
les instances chargées de la gestion du personnel. L’instauration de structures décentralisées ne manquera pas d’influencer la réglementation du temps de travail. L’élément
déterminant de la flexibilisation consiste à dissocier l’horaire d’exploitation du temps
de travail individuel. Des solutions propres aux entreprises et adaptées aux postes de
travail peuvent apporter des avantages aux employé(e)s, aux entreprises et à la société, réfutant ainsi la plupart des préjugés formulés à l’encontre des horaires de travail
flexibles. La clé du succès repose sur un modèle individuel, souple, conçu avec la participation de toutes les parties concernées.
La SEC Suisse représente les intérêts des employé(e)s et veille à ce que l’assouplissement de l’horaire de travail se fasse à leur avantage. Elle s’engage dans cette voie lors
de la négociation de conventions collectives de travail et par son service de conseils.
En cas de menace de licenciement collectif, les organisations d’employé(e)s telles que
la SEC Suisse doivent être aussitôt conviées à participer à la recherche de nouveaux modèles de temps de travail permettant de maintenir les emplois.
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Bibliographie
Au sujet des modèles de temps de travail
D’une lecture facile, cet ouvrage constitue une bonne introduction à ce thème:
Holenweger, Toni/Conrad, Hanspeter (Hrsg.): Arbeit & Zeit. Neue Arbeitszeitmodelle
aus der Praxis. Kontrast, Zurich 1998.
Les ouvrages suivants complètent le sujet:
Baillod, Jürg/Holenweger, Toni/Ley, Katharina/Saxenhofer, Peter: Handbuch Arbeitszeit. Perspektiven, Probleme, Praxisbeispiele. 2e édition. vdf, Zurich 1993.
Baillod, Jürg/Davatz, Felix/Luchsinger, Christine/Stamatiadis, Martin/Ulich, Eberhard:
Zeitwende Arbeitszeit. Wie Unternehmen die Arbeitszeit flexibilisieren. vdf, Zürich 1997.
Baillod, Jürg (Hrsg.)/Blum, Adrian/Erdös-Schärer, Susanne/Schär Moser, Marianne/
Stamatiadis, Martin: Chance Teilzeitarbeit. Argumente und Materialien für Verantwortliche. vdf, Zurich 2002.
Blum, Adrian: Integriertes Arbeitszeitmanagement. Ausgewählte personalwirtschaftliche Massnahmen zur Entwicklung und Umsetzung flexibler Arbeitszeitsysteme.
Haupt, Berne 1999.
Blum, Adrian/Zaugg, Robert J.: Praxishandbuch Arbeitszeitmanagement. Beschäftigung durch innovative Arbeitszeitmodelle. Verlag Rüegger, Coire/Zurich 1999.
Böringer, Peter: Die neue Arbeitswelt. Flexibilisierung der Erwerbsarbeit und atypische
Arbeitsverhältnisse. KV Zürich, Zurich 2001 (Collection de la KVZ).
Graf, Stefan/Henneberger, Fred/Schmid, Hans: Flexibilisierung der Arbeit. Erfahrungen
aus erfolgreichen schweizerischen Unternehmen. Haupt, Berne 2000.
Ulich, Eberhard (Hrsg.). Beschäftigungswirksame Arbeitszeitmodelle. vdf, Zurich 2001.
Au sujet du travail à temps partiel
et de la répartition du travail entre femmes et hommes
Buchmann, Marlis/Kriesi, Irene/Pfeifer, Andrea/Sacchi, Stefan: Halb drinnen – halb
draussen. Analysen zur Arbeitsmarktintegration von Frauen in der Schweiz. (Mit einem
Ländervergleich von Maria Charles). Verlag Rüegger, Coire/Zurich 2002.
Bürgisser, Margret: Concilier le travail et la famille. Brochure n° 13 de la Société suisse
des employés de commerce. Zurich 2000.
Büro für die Gleichstellung von Frau und Mann der Stadt Zürich: Flexibel, aber nicht prekär. Ein Handbuch zur gleichstellungsgerechten Gestaltung flexibler Arbeitsverhältnisse für Betriebe, Gewerkschaften, Gleichstellungsbeauftragte, Personalfachleute
und Personalvertreter/innen. Büro für die Gleichstellung von Frau und Mann der Stadt
Zürich, Zurich 2002.
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SEC Suisse: Travail à temps partiel. Brochure n° 5 de la Société suisse des employés de
commerce. Zurich 2001.
Strub, Silvia: Le travail à temps partiel en Suisse. Etude axée sur la répartition du travail
à temps partiel entre femmes et hommes et sur la situation familiale des personnes
actives occupées. Bureau d’études de politique du travail et de politique sociale
(BASS). Berne 2003.
Strub, Silvia/Bauer, Tobias: Répartition du travail entre les sexes. Etat des lieux. Etude
comparative de la répartition du travail non rémunéré et rémunéré dans les familles
en Suisse et au niveau international. Etude menée sur mandat du Bureau fédéral de
l’égalité entre femmes et hommes. Berne 2002 (www.fairplay-at-home.ch).
Internet
Le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (Schwarztorstr. 51, 3003 Berne,
tél. 031 322 68 43, fax 031 322 92 81, [email protected]) gère les pages Internet suivantes, avec commentaires explicatifs, indications sur les documents, bibliographie, etc.:
- www.fairplay-at-home.ch
Une liste bibliographique détaillée et commentée sur le thème «concilier le travail et
la famille» se trouve sous «www.und-online.ch/fr_materialien.htm».
- www.fairplay-at-work.ch
Bases statistiques
L’Office fédéral de la statistique (OFS) (www.statistique.admin.ch) publie un grand nombre de données sur le thème «vie professionnelle et marché du travail». L’Enquête suisse
sur la population active (ESPA), menée chaque année et dont les résultats sont publiés
dans un programme de publication à plusieurs niveaux, offre une source de données
importante. D’autres informations sur la vie professionnelle sont fournies par le recensement des entreprises, la statistique de l’emploi et des activités lucratives et le recensement populaire. Ces résultats sont également publiés sous diverses formes par l’OFS.
On trouvera une bonne vision d’ensemble dans:
- OFS: Indicateurs du marché du travail 2003. Neuchâtel 2003 (publication annuelle).
- OFS: Enquête suisse sur la population active (ESPA). Résultats commentés et
tableaux 2002. Neuchâtel 2003 (publication annuelle).
On trouvera des informations sur le chômage dans les statistiques du chômage publiées
par l’OFS sur la base des recommandations internationales ainsi que dans les statistiques du chômage publiées par le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco)
(www.seco.admin.ch, rubrique «travail») qui recensent les personnes au chômage et
demandeuses d’emploi inscrites auprès des offices de placement régionaux (OPR). En
raison de différences dans les définitions et les méthodes, les deux statistiques ne
recouvrent pas exactement les mêmes données.
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Impressum
Mars 2005.
Nouvelle édition entièrement remaniée de la publication de 1997:
(Auteurs: Karin Oberholzer, lic. oec. HSG, et Sophia Maria Würmli, lic. oec. publ.)
Remaniement du contenu/nouveaux articles:
Larissa Kihm, lic. oec. publ., Zurich
Susanne Erdös, secrétaire centrale de la SEC Suisse, Zurich
Hans-Ulrich Schütz, collaborateur chargé des questions économiques, Secrétariat général de la
SEC Suisse, Zurich
Graphiques, mise en pages et réalisation:
Gabriele Wessicken, Zurich
Traduction:
Françoise Nagy, Arzier
Adaptation française:
Pierre-Henri Badel et Clairemonde Hirschmann, Les Editions du Couchant SA, Nyon
Présentation graphique:
GFS Communications AG, St-Gall
Coordination:
Margot Zimmermann, SEC Suisse, Zurich
Impression:
Stämpfli AG, Berne
Editeur:
Société suisse des employés de commerce (SEC Suisse), Zurich
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