La méthode PICS de conservation du niébé sans insecticides

Transcription

La méthode PICS de conservation du niébé sans insecticides
La Nouvelle Tribune
La méthode PICS de conservation du niébé sans
insecticides chimiques (3 com.)
Jeu 28
Oct 2010
Écrit par Emmanuel Tachin (Transcription Blaise Ahouansè)
« La technologie la mieux adaptée aux conditions de nos paysans»
La saison du niébé est en cours et les paysans, pour certains, selon les régions agroecolologiques, rentrent actuellement leurs récoltes. D’autres vont bientôt s’y mettre. Tous
autant qu’ils sont manifestent déjà leurs inquiétudes, surtout ceux qui n’avaient pas pris
part aux opérations de vulgarisation de la technologie de conservation de niébé, celle dite du
triple ensachage.
Commencée l’année dernière, au Bénin et au Togo, la campagne de sensibilisation à
l’adoption de la trouvaille par les communautés productrices de la légumineuse est en cours,
pour une dernière saison. Pour marquer le lancement de la campagne media qui est dédiée à
la technologie, Dr Dieudonné Baributsa de l’Université Purdue aux Etats-Unis, en sa qualité
de coordonateur international du projet PICS a accordé une interview à votre quotidien. Il y
expose de façon globale les tenants et aboutissants de l’ambition de la recherche scientifique
de voler au secours des paysans-producteurs de niébé en lui apportant l’un des meilleurs
outils du moment en matière de conservation de cette denrée alimentaire très prisée encore
appelée «viande du pauvre».
LNT: Votre inspiration de développer la technologie vient de quoi?
Dr Dieudonné Baributsa:
Le grand problème dans la filière niébé c’est celui de la conservation. Les paysans se sont
toujours plaints de leur mécanisme de conservation en disant que c’est ça qui les empêche
de cultiver la légumineuse en grandes quantités. A partit de cet instant, l’Université Purdue,
en collaboration avec les institutions de recherche en Afrique de l’Ouest et centrale
particulièrement l’Institut de Recherche agricole pour le Développement (IRAD) à Maroua
au Cameroun ont commencé à travailler sur la technologie du tripe ensachage. Cette
technologie s’est appuyée sur les méthodes traditionnelles, par exemple, l’utilisation de la
cendre pour conserver le niébé grâce au système de fermeture hermétique. C’est sur cette
base que nous avions commencé déjà à développer notre technologie. Celle-ci a évolué a
travers l’utilisation des fûts métalliques, des bidons et nous en sommes arrivés à la
technologie la plus raffinée et la plus simple du moment, celle qui facilite la conservation du
niébé.
En votre qualité d’économiste, comment évaluez-vous la rentabilité de
l’utilisation de ladite technologie?
Nous avons même envisagé au-delà de la rentabilité économique. Nous y voyons différents
bénéfices. Il y a un bénéfice lié à la santé. Vous les connaissez tous, nos braves paysans. Ils
utilisent beaucoup de produits chimiques qui ne sont pas appropriés pour les cultures
alimentaires encore moins bons pour la santé avec des conséquences néfastes sur leur vie. Il
y a un bénéfice économique: au lieu de brader sa récolte quand les prix sont à leur bas
niveau, le producteur a la possibilité et la flexibilité de pouvoir attendre cinq à six mois,
juste avant les semis de la saison suivante, pour doubler ses gains. La technologie en ellemême est moins chère et est un ensemble de trois sacs appelés Pics, d’un cout un peu
supérieur à 2 dollars américains ou 1100F Cfa.
Quelle garantie ont les paysans que c’est vraiment la meilleure technologie du
moment?
Nous avons concentré nos efforts en Afrique de l’ouest et centrale pour certaines raisons.
Première raison, c’est que la grande production du niébé revient à l’Afrique de l’ouest et à
l’Afrique centrale. Par exemple, le Nigeria est le plus grand producteur de niébé au monde,
avec a lui tout seul plus de 60% de la production africaine de cette denrée. A partir de cet
instant, nous nous sommes dit que nous pouvions mettre nos efforts là où il y a la plus forte
production afin d’aider à stimuler les marchés. Car l’objectif du projet en réalité est d’aider
les acteurs de la filière à pouvoir donner de la valeur à leurs récoltes; les aider à pouvoir se
servir des sacs PICS afin que, si les prix sur le marché sont élevés, ils puissent vendre leur
niébé pour augmenter leurs revenus.
La technologie en elle même est l’une des meilleures; nous n’oserons pas dire qu’elle est la
meilleure. Mais dans les conditions de moyens de nos petits producteurs, elle est la
meilleure du moment, tous critères confondus: elle permet de stocker 100, 200, 300,
500kgs sans faire dépenser beaucoup d’argent. Et comme on n’utilise pas de produits
chimiques avec les sacs à triple fond, le niébé peut être stocké à domicile et a l’intérieur des
maisons. Mais si vous utilisez une autre technologie, par exemple, les produits chimiques,
vous serez condamnés à éloigner vos stocks de la maison. La performance de la technologie
vise à priver les insectes de l’air par la fermeture des sacs. A la fermeture du sac, il y a une
manière de minimiser la quantité de l’air y contenu, de sorte que les insectes ne sont pas
capables de respirer ni de s’y reproduire. Ils ne peuvent donc pas détruire le niébé du
producteur qui a pris ses dispositions en utilisant la technologie PICS.
Peut-on aussi se servir des sacs Pics pour conserver d’autres cultures
notamment les céréales comme le maïs, le mil… ?
Jusque là, nous n’avons développé la technologie que pour le niébé. Parce que c’est à ce
niveau qu’il y avait urgence. C’est parce le niébé se retrouve beaucoup plus fréquemment
dans le commerce que cela valait la peine de s’y intéresser; c’est aussi parce qu’il y a un
important revenu que les acteurs impliqués dans la filière niébé peuvent avoir en
investissant peu dans la technologie. Par rapport aux autres cultures, nous sommes très
formel:, nous n’avons pas encore fait de recherches liées à l’utilisation des sacs PICS
actuellement disponibles que pour le niébé. Mais certains producteurs pilotes ont essayé la
chose sur le voandzou et ça a marché, ont-ils dit. Donc pour les légumineuses, nous pensons
que la technologie peut marcher. Mais jusque là, nous n’avons pas encore de données
scientifiques pour valider les observations des producteurs quant à l’utilisation de la
technologie PICS sur d’autres cultures.
Nous venons juste d’initier la recherche quant a l’utilisation des sacs PICS pour la
conservation
d’autres cultures comme le maïs, le sorgho et le blé. Nous continuons donc à explorer pour
voir si les mêmes sacs peuvent servir à conserver plusieurs cultures. Et si nous arrivons, un
jour, à trouver que les
sacs peuvent être utilisés pour la conservation d’autres cultures, ça serait un avantage de
plus pour les producteurs.
Un an après la mise en route du projet, quelle évaluation pouvez-vous en faire?
L’évaluation pourrait être qualifiée de très positive. Parce que quand nous avions eu à
interagir avec les agents impliqués dans la vulgarisation de la technologie, comme l’IITA et
les CeRPA au Benin et l’ITRA au Togo, nous nous sommes aperçus de l’engouement qu’il y
a eu au tour de la technologie. Les producteurs ont vu comment la technologie marche.
Nous leur avons laissé cinq sacs, par village, pour qu’ils essayent eux-mêmes la technologie.
Cela s’est déroulé dans à peu près 950 villages au Bénin, et dans toute cette
expérimentation, il n’y a eu aucun problème. La technologie a marché comme elle se
devait. Donc les perspectifs sont vraiment positives et les paysans sont très contents de la
performance des sacs PICS. Et moi je dirai que les choses marchent comme nous les avions
pensées.
Et quelles sont vos autres perspectives à cette étape de la vulgarisation?
Les perspectives sont encore grandes. Ce que nous envisageons est d’informer chaque
producteur de niébé, toute personne impliquée dans la filière niébé tels que les grands
commerçants du niébé doivent être informés de la technologie PICS. En cela, nous faisons
confiance aux médias pour nous aider à diffuser nos messages. Nous avons planifié, a cet
effet, pour cette année des activités de démonstration au niveau des grands marchés où se
vend le niébé. Il y a des villages où nos agents doivent aller continuer le renforcement notre
campagne de sensibilisation et de démonstration afin que d’autres producteurs puissent
tester la technologie et voir comment ça marche.
Votre objectif inavoué ne serait-il pas de faire disparaitre à terme l’utilisation
des produits chimiques? Si oui, êtes-vous optimistes d’y arriver un jour?
Notre objectif n’est nullement de chercher à éliminer les produits chimiques. Nous savons
que les produits chimiques ont leurs rôles dans la conservation des cultures, si ces produits
sont bien utilisés. Mais le problème est que chez nous ici au Bénin, les producteurs ne
savent pas bien utiliser ces produits chimiques dont vous parlez. Récemment, par exemple,
nous avons tous appris qu’il y a eu des cas de décès dans le nord, à Tchaourou et à
Malanville, suite à la consommation de céréales parce que les gens n’avaient pas bien utilisé
les produits chimiques. Donc, si on peut leur apporter un outil de conservation comme le
sac à triple fond avec l’utilisation duquel ils n’ont plus besoin de produits chimiques, un
outil sans risque, sans danger, je pense que c’est plutôt une bonne chose.
Pourquoi n’irez-vous pas au bout de votre démarche et assumer de vouloir
éradiquer l’utilisation des produits chimiques?
Ce que je peux dire à ce propos, c’est que le projet PICS-IITA a ses limites. Par exemple, si
quelqu’un veut conserver 50 tonnes de niébé, quelquefois c’est difficile. Car, s’il faut
refermer des sacs de 100 kg jusqu'à obtenir 50 tonnes, c’est quelquefois pénible. Il y a
d’autres méthodes de stockage à grande échelle. Et pour ces quantités là, des fois on a
besoin d’utiliser les produits chimiques et dans la
plupart des cas, il s’agit de gens qui ont la connaissance et la maîtrise de l’utilisation de ces
produits pour savoir minimiser les risques de danger pour la santé humaine. C’est pourquoi
nous disons qu’au niveau des petits paysans qui produisent 100, 200, 300 kg, voire 2 à 3
tonnes, c’est vraiment conseillé d’éviter les produits chimiques parce que la plupart ne
savent pas comment les utiliser. Nous
pensons qu’il y a encore de la place pour les produits chimiques, surtout, par rapport aux
grands stocks où les gens ont des difficultés à mettre le niébé dans des sacs de 100 kg.
Commentaires
#
Ilovemycountry 28-10-2010 11:21
Quand j'ai lu le nom du Chercheur, et le nom de son universite, j'ai coule des larmes avant de
revenir lire l'article. Et la plethore de Docteur en agronomie que nous avons au Benin, a quoi les
utilisons-nous? Pourquoi leurs recherches ne sont pas publiees par la presse beninoise? Et les
autres qui ne sont experts qu'en achat de machines agricoles?
Voila des gens qui nous prouvent qu'il y a des solutions toutes simples a nos problemes. Rien
que des sachets faconnes d'une maniere plus intelligente et denommes PICS et sur lesquels ils
vont deposer un brevet. Et voila les africains qui vont importer ces sachets PICS pour conserver
leur niebe. Pendant ce temps les notres se battent qui pour bien lecher le c... du ministre pour
etre doyen ou recteur ou pour responsable de projet de mecanisation afin de collecter des 10%
de marches publics. Malheureux.
Citer
#
jacques 15-12-2010 15:49
C'est un béninois emmanuel tachin
Citer
#
gombo 15-12-2010 19:30
Mr Tachin est beninois, mais il semble que Dr Baributsa soit originaire d’Afrique Centrale. Au
fonds peu importe d’ou il est, si ce n’est que c’est un Africain, prouvant une de fois de plus –si
besoin en etait- que les Africains ont les capacites intellectuelles de trouver des solutions
originales (et adaptees) a nos problemes.
Le probleme que pose IloveMyCountry, qui nous interpelle tous est de savoir pourquoi ces
inventions ne peuvent etre faites en Afrique?
Dr Baributsa, qui apparemment, a commence ses etudes d’Agronomie en RDC aurait il accompli
avec succes, ses recherches en RDC ou ailleurs en Afrique ? Le resultat de ses recherches aurait
il ete utilise a des fins productives ?
Les reponses ne sont pas simples ou evidentes, mais maitriser la technologie pour une
innovation adaptee a notre monde est un des defis que nous devons relever pour sortir nos
pays de la misere. Cela passe a mon sens par un “elitisme republicain” dans l’enseignement
superieur....

Documents pareils