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La dimension économique de l’espagnol Matilde Alonso Perez Université Lyon 2 [email protected] Elies Furio Blasco Université Lyon 3 [email protected] Christel Birabent Camarasa Université Lyon 3 [email protected] Resumen ¿Qué representa el español? ¿Un idioma? ¿Una cultura? ¿Unas empresas exitosas tanto dentro como fuera del país? El valor del español es el de su lengua, de sus embajadores del mundo cultural, del deporte, la gastronomía, las empresas. El idioma español es el más hablado del mundo occidental y es estudiado cada vez más en el mundo. Según ciertas estimaciones, el conjunto de la industria del idioma genera, 15% del PIB español. Sin embargo, a pesar de la internacionalización creciente de su política y de su economía, España sigue siendo una sociedad cerrada al exterior. La convergencia en el sector cultural y el consumo de masas la sitúan a nivel de cualquier país desarrollado pero, más allá de estos dos factores, lo que hace de España una sociedad abierta es el turismo y la inmigración. Así pues, la apertura es más por recepción que por emisión. Résumé Quelle est l’image de l’espagnol ? Une langue ? Une culture particulière ? ou bien des entreprises de succès en Espagne et à l’international ? Concentrons-nous sur la valeur de l’espagnol, de sa langue, de ses ambassadeurs du monde culturel, du sport, la gastronomie et les entreprises. La langue espagnole est la langue la plus parlée dans le monde occidental et elle est de plus en plus étudiée dans le monde entier. L’ensemble de l’industrie de la langue génère, selon certaines estimations, 15 % du PIB espagnol. Cependant, malgré l’internationalisation croissante de sa politique et de son économie, l’Espagne reste encore une société relativement fermée à l’extérieur. La convergence dans le domaine de la culture et la consommation de masse placent l’Espagne au même niveau que n’importe quel pays développé. Mais, si l’on dépasse ces deux facteurs, les aspects qui font de l’Espagne une société ouverte sont le tourisme et l’immigration. L’ouverture va dans le sens de la réception et non de l’émission. Abstract: What is Spanish? A language? A specific culture? Or successful companies both in Spain and internationally? Let us leave stereotypes apart and concentrate on the value of Spanish, its language, its ambassadors from the cultural, sports, and gastronomical world, and its companies. Spanish language is the language most spoken in the western world, and everyday more people around the world study it. According to some estimates, the whole language industry generates 15% of the Spanish GDP. Yet, even if 1 its economy and its policies are more and more international, Spain is still relatively closed to the outside. Indeed, the factors which make Spain an open society are tourism and immigration. The opening is more inwards than outwards. Une langue internationalisée Almodóvar est l’une des valeurs sûres de la liste élaborée par Forbes en 2007. Mais on a pu y trouver, à d’autres occasions, l’architecte Santiago Calatrava, ou le gastronome José Bandrés. Ces classements reflètent la fièvre hispanique de Forbes. En effet, les noms d’autres réalisateurs mexicains, Alfonso Cuarón, Alejandro González Iñárritu, Guillermo del Toro… sont cités aux côtés de Pedro Almodóvar. La liste de Forbes est la preuve que les tendances sociales parlent espagnol et que la culture hispanique est à la mode. L’Espagne joue à l’étranger un rôle très dynamique, grâce à sa modernisation, notamment après la transition démocratique et son développement économique. Tous ces éléments lui ont permis d’améliorer sa capacité d’influence et de valeur à l’étranger, ce qui signifie un meilleur enracinement et un développement de la culture espagnole et de la langue dans le monde. Par ailleurs, dans la société de l’information et des connaissances, la langue représente plus qu’un signe d’identité et de civilisation ; c’est un facteur économique puissant. La culture et la langue sont deux vecteurs du patrimoine espagnol mis en avant par l’Espagne et l’Amérique latine. Ainsi, le nombre d’hispanophones est un potentiel énorme. On en dénombre actuellement 440 millions, en tenant compte des hispanophones des États-Unis, et on en prévoit 530 millions pour 2050. L’espagnol est la deuxième langue la plus parlée en Occident. Un chiffre important auquel il convient d’ajouter la dimension qualitative du prestige culturel et le rôle de générateur des bénéfices économiques et commerciaux substantiels. La langue et l’économie sont ainsi ensemble comme un actif économique. En effet, l’ensemble de l’industrie de la langue génère, selon certaines estimations, 15 % du PIB espagnol et stimule la croissance de la demande de biens et services liés génériquement à l’idée espagnole : la gastronomie, le design, la mode ou le tourisme. Tous ces éléments permettent de penser que l’Espagne peut fournir plus d’efforts en matière d’action culturelle à l’étranger et remporter un vif succès. La matérialisation majeure de l’intérêt pour la culture hispanique est l’apprentissage de l’espagnol. 150.000 étudiants se rendent tous les ans en Espagne en vue d’étudier l’espagnol, ce qui génère plus de 270 millions d’euros. Ce chiffre est cependant bien inférieur aux possibilités réelles, ce qui est exactement le cas avec l’étude de l’espagnol en Europe. 3,4 millions de personnes étudient l’espagnol, alors que les experts considèrent qu’il existe un potentiel de 20 millions d’étudiants. La croissance de la demande a été multipliée par deux et n’a été dépassée que par la demande d’enseignement en langue anglaise. Les chiffres publiés par l’Institut Cervantes sont éloquents et font la preuve de cette situation. En 1999-2000, il y avait 48.000 étudiants inscrits dans ses centres. Ils sont à présent plus de 100.000. L’espagnol occupe une place de choix en tant que deuxième langue aux États-Unis et au Brésil, où son développement a été spectaculaire, en Extrême Orient et dans les pays de l’Union Européenne, dans le monde arabe et dans les PECO, où il fait preuve d’une grande vitalité. Ces tendances peuvent se renforcer à l’avenir si elles s’accompagnent d’une politique de promotion et de défense qui œuvre en faveur d’une augmentation du 2 prestige de la langue, de l’utilisation accrue de l’espagnol dans les institutions internationales et de son intégration dans des projets culturels. L’espagnol aux États-Unis Aux Etats Unis, l’espagnol est, après l’anglais, la langue la plus parlée et la plus étudiée. Ce succès est dû à des motifs historico-académiques. Depuis le 18e siècle, l’espagnol jouit d’une place prestigieuse. Certains personnages, tels que Benjamin Franklin, lisaient les classiques en espagnol. Aujourd’hui, l’enracinement de la langue espagnole en Amérique du Nord est également dû à la croissance de la communauté hispanique, qui compte 40 millions d’hispanophones et devient ainsi la minorité la plus nombreuse des États-Unis. Les estimations démographiques prévoient qu’en 2050 un quart de la population des États-Unis sera d’origine hispanique, et que, dans ce cas, 60 % des américains parleront l’espagnol, soit en tant que langue maternelle, soit en tant que langue apprise. On trouve aux États-Unis 500 journaux en espagnol, dont certains au tirage important : Nuevo Herald de Miami, La Opinión à Los Ángeles, El Día à Houston et La Prensa à Nueva York. Les chaînes de télévision ne sont pas en reste ; on citera l’exemple d’Univisión et Telemando. La Maison Blanche a sa version espagnole (www.whitehouse.gov/espanol), de même que les réseaux sociaux (Twitter @lacasablanca) ou les vidéos de YouTube où une partie séparée est aussi en espagnol, (www.youtube.com/view_play_list?p=9A864BFE2639C8A4). L’enseignement des langues étrangères n’est généralement pas obligatoire dans le système éducatif américain. Malgré tout, l’enseignement des langues modernes attire environ la moitié des 13,5 millions d’élèves inscrits en secondaire. Dans les centres d’enseignement, plus de 4 millions d’élèves étudient l’espagnol. C’est actuellement la première langue moderne choisie par plus de 70 % des élèves. Graphique 1 – Evolution de l’étude des langues étrangères dans l’enseignement secondaire aux Etats-Unis (%) 80 70 60 50 40 30 20 10 0 1934 1948 1958 1968 Español 1978 Francés 1985 1994 2000 Alemán (Pourcentage des trois premières langues étrangères sur le total des langues étrangères modernes dans les établissements publics) Source : Subdirección General de Cooperación Internacional (2005). 3 Dans le domaine universitaire, les étudiants nord-américains affichent également une nette préférence pour l’espagnol par rapport aux autres langues. En 2002-03, on comptait plus de 750 000 étudiants d’espagnol dans l’enseignement supérieur, un effectif trois fois plus important que celui des étudiants inscrits en français (200 000). Le pourcentage des étudiants d’espagnol avait augmenté de 14 %, contre 1,5 % pour le français et 2,3 % pour l’allemand. L’espagnol en Europe. Le cas de la France L’Union Européenne représente l’un des premiers marchés culturels pour la langue et la culture espagnoles. On dénombre 130 départements universitaires d’espagnol ou lieux d’enseignement en Europe et l’intérêt pour l’espagnol est en augmentation constante. En ce qui concerne l’Europe, le cas de la France est particulièrement favorable à l’espagnol. En premier lieu grâce au cadre institutionnel qui lie les deux pays, avec des relations d’excellence en faveur d’une action éducative très intense. Ensuite parce que l’Espagne met en œuvre en France un grand nombre d’activités éducatives et culturelles, ainsi que ses principaux programmes culturels et éducatifs étrangers. C’est pourquoi la France dispose de plusieurs centres d’enseignement, de sections espagnoles internationales, d’associations de Langue et Culture, ainsi que d’un corps enseignant de 130 professeurs espagnols affectés en France de façon temporaire. Le programme éducatif espagnol en France englobe les enseignements officiels impartis dans les centres titulaires de l’État espagnol de Paris. L’Espagne dispose également de sections internationales, dont la première a été créée à Paris en 1981. Sont ensuite venues d’ajouter les sections de Bordeaux, Strasbourg, Grenoble, Lyon, Nice, Brest,… Ces sections espagnoles ont pour objectif de faciliter l’insertion des élèves étrangers dans le système éducatif français en leur garantissant un contact avec le système éducatif d’origine, mais également de créer un cadre propice à l’apprentissage et à la connaissance en profondeur, par les élèves français, d’une langue et d’une culture étrangères. Les élèves peuvent, grâce à ce programme, valider leurs études dans le système éducatif français et les faire reconnaître par le système éducatif espagnol. On dénombre environ 3 000 élèves dans les sections espagnoles de France. Le troisième volet de l’enseignement de l’espagnol en France a été créé spécifiquement pour les enfants de résidents espagnols scolarisés dans des établissements français. Ce mode d’enseignement est en perte de vitesse. Son objectif était de combler les besoins de la population de nationalité espagnole résidente à l’étranger pendant les années de grands flux migratoires. L’espagnol est, également, de plus en plus présent à l’école française. La France a une population scolaire de plus de 12,2 millions d’élèves, répartis entre tous les niveaux d’éducation non universitaire. Parmi eux, 6,5 millions d’enfants sont inscrits dans l’enseignement de premier niveau (maternelle et primaire) et 5,5 millions dans l’enseignement secondaire. La promotion de l’étude des langues étrangères est un objectif prioritaire du gouvernement français, qui souhaite que les élèves maîtrisent deux langues vivantes à la fin du cycle secondaire. C’est ainsi que, depuis 2004, l’enseignement des langues étrangères a été consolidé en primaire. L’anglais est la première langue étudiée (82 %), suivi de l’allemand (11,5 %) et de l’espagnol (2 %). Dans l’enseignement secondaire français, l’anglais reste toujours en position de force comme première langue, avec 90 % des élèves. L’allemand rassemble un peu moins de 8 % d’entre eux et l’espagnol se situe aux alentours de 1 %. C’est à ce niveau éducatif 4 que l’on introduit une seconde langue et l’espagnol a, ici, le statut de langue la plus étudiée. L’intégration de l’Espagne en Europe, le poids grandissant de l’espagnol aux États-Unis, les opportunités que l’Amérique latine représente, ont contribué à cet essor. Une majorité des élèves étudient une seconde langue et 70 % d’entre eux choisissent l’espagnol. Cette première place a été acquise au détriment de l’anglais et de l’allemand (Graphique 2). Graphique 2 – Évolution de l’enseignement de la seconde langue étrangère en France 70 60 50 40 % 30 20 10 0 1965-66 1971-72 1980-81 Alemán 1986-87 Español 1992-93 Inglés 1998-99 2002-03 2004-05 Italiano Source : Davó (2001), Legendre (2003) et Estaire & Secundino (2005). La situation à l’université est similaire. Parmi les 103 langues proposées, l’anglais exerce une suprématie indiscutable, avec 64 % des étudiants de langue et civilisation étrangère. L’espagnol arrive en deuxième place, suivi par l’allemand, avec, respectivement, 30 % et 13 % des effectifs. L’italien est très loin derrière, avec 6 % de la population étudiante. Dans la filière spécialisée LEA, où les choix de langues sont plus restreints (une vingtaine environ), 94 % des étudiants choisissent l’anglais, 50 % l’espagnol et 25 % l’allemand. Signalons également que le japonais et le chinois progressent de plus en plus, et qu’ils sont plus présents à l’université que dans les établissements d’enseignement secondaire. Une économie internationalisée L’Espagne se situe parmi les dix plus grandes économies du monde et c’est l’une des plus ouvertes. Cette grande ouverture engendre une dépendance vis-à-vis des cycles internationaux et le secteur extérieur est alors plus sensible aux hausses et aux baisses de croissance. Par ailleurs, ceci signifie également plus de concurrence. Le poids international de l’Espagne se traduit dans le domaine des investissements étrangers. Elle est le huitième investisseur mondial et le sixième récepteur de capitaux. 5 Le degré d’ouverture de l’économie espagnole représente 67 % du PIB1. C’est l’un des plus élevés de l’OCDE et il est supérieur à certains des grands partenaires commerciaux du pays, tels que la France, l’Italie ou le Royaume-Uni. Grâce à une ouverture importante, la compétitivité internationale s’améliore, c’est-à-dire la capacité des entreprises espagnoles à vendre sur les marchés internationaux. On assiste néanmoins à un déclin des balances extérieures. Certains éléments renforcent le déficit extérieur, freinent la croissance économique et démontrent, lentement mais sûrement, que, depuis 1999, la compétitivité espagnole est en perte de vitesse. Graphique 3 – Balance commerciale (millions d’euros) 300000 Importaciones Exportaciones Déficit Comercial 250000 200000 150000 100000 50000 0 -50000 -100000 -150000 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Source : Banco de España. Les investissements espagnols à l’étranger sont en plein essor, ce qui s’explique par les acquisitions d’entreprises étrangères par des firmes espagnoles dans des secteurs tels que les télécommunications, la banque ou la construction. Citons par exemple l’acquisition d’Abbey National par le Banco Santander ou l’achat d’O2 par Telefónica. Les flux d’Investissements directs étrangers (IDE) vers l’Espagne et ceux de l’Espagne vers l’extérieur augmentent rapidement dans la seconde moitié des années 90. Le phénomène des investissements directs espagnols vers l’étranger débute à la fin des années 90, alors que l’économie parvient à un degré de maturité suffisant. L’Espagne peut, dans les mêmes conditions que les autres pays de l’OCDE, tirer parti du processus de mondialisation, de la vague de privatisations de monopoles publics et de la déréglementation des marchés qui offrent ainsi de nouvelles occasions d’investissement. 1 Importations et exportations par rapport au PIB (%). 6 Graphique 4 – Investissement étranger direct (millions d’euros) 70 000 60 000 50 000 40 000 30 000 20 000 10 000 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Del exterior en España De España al exterior Source : Banco de España y La Caixa. Au plan géographique, les flux d’investissements espagnols ont deux destinations principales : l’Union Européenne et l’Amérique latine. Entre 1998 et 2000, les investissements dans cette dernière région se concentrent et représentent 42 % des investissements espagnols à l’étranger. 2000 est l’année de transition, et l’Amérique latine perd peu à peu de son importance à la faveur de l’UE. En 2003, cette dernière recueille 73 % des IDE espagnols. Les investissements semblent augmenter maintenant dans les régions à forte croissance de l’économie mondiale : l’Asie et les nouveaux membres de l’UE, ces nouveaux moteurs du monde. Les États-Unis sont également la cible de l’IDE espagnol. Des entreprises internationalisées Les années 70 ont permis à l’Espagne de développer ses exportations manufacturées, notamment à la suite de l’Accord commercial préférentiel avec la communauté économique européenne. Ce phénomène a connu un nouvel essor lors de l’entrée de l’Espagne dans la CEE en 1986. Ce n’est cependant qu’à partir des années 90 que les entreprises espagnoles prennent le chemin de l’international. Elles commencent par l’Amérique Latine, puis se tournent vers l’Europe. Ceci permet de comprendre, en partie, pourquoi l’image internationale de l’Espagne est plutôt diffuse et ne dispose pas d’un « navire amiral » qui reflète une image de qualité et encense l’industrie espagnole. Il a existé également une tendance à éliminer les termes « Espagne » ou « espagnol » des sigles des grandes corporations, voire à utiliser des noms étrangers pour des produits espagnols. On trouve dans le secteur de la mode de nombreux exemples d’entreprises espagnoles qui utilisent des marques anglo-saxonnes et italiennes (Women’s Secret, Pull & Bear, Milano, Mássimo Dutti, Springfield,...). De même, les entreprises espagnoles à la tête de leur secteur sur le marché mondial ont poursuivi une politique de promotion qui ne s’est pas fondée sur l’aspect espagnol du produit. On citera par exemple Freixenet ou Chupa Chups. Ce sont des marques très connues sur de 7 nombreux marchés, mais les consommateurs ne les identifient pas immédiatement comme des produits espagnols. L’étude réalisée par l’ICEX et dirigée par Julio Cerviño (2003) cherche à connaître le lien entre le made in Spain et les marques espagnoles. Il s’agit de comprendre comment les décisions d’achat des consommateurs étrangers sont influencées (de façon positive ou négative) par l’image de l’Espagne. Parmi les aspects positifs, on retiendra le fait d’être considéré comme un pays économiquement développé (13 % du total des réponses portant sur 16 facteurs), le fait d’être perçu comme un pays ayant un bon niveau de vie (12 %), au système démocratique stable (10 %), au bon niveau d’éducation (9 %), et à l’économie stable (9 %). De manière générale, les Espagnols sont perçus comme des individus joyeux, aimables et ouverts. Parmi les aspects négatifs, les facteurs qui ressortent davantage sont : le fait d’avoir des marques peu connues (17 %), un faible niveau de recherche technologique (16 %), un taux de chômage élevé (10 %) et un état providence peu développé (8 %). Cependant, plus les marques espagnoles sont connues et reconnues, plus l’effet négatif et le stéréotype du made in Spain diminuent. Les choses évoluent, et le régime méditerranéen, les stars de la gastronomie, comme Ferran Adriá, ou du basket, tel Pau Gassol, sont des atouts pour la conquête d’une place dans les marchés. Cependant il sera stratégique de faire attention au prestige des marques et à l’innovation. De fait, la présence de marques espagnoles reconnues sur un marché donné a un effet de levier pour d’autres produits ou entreprises du même marché. Il est évident que les stratégies portées sur la visibilité, la qualité, le design, l’innovation, la marque et les services après-vente sont un atout supplémentaire pour l’effet made in Spain. En revanche, les stratégies qui mettent en avant les prix compétitifs n’affectent pas cette évaluation. Le prix ne joue donc pas un rôle essentiel dans le succès des marques espagnoles ou pour l’effet made in Spain. Voilà pourquoi le succès et la rentabilité des marques espagnoles sur les marchés internationaux dépendent avant tout de stratégies fondées sur l’innovation et le prestige de la marque plutôt que sur le prix. Lors de l’analyse de pays, la perception d’une ressemblance sociale et culturelle, tout comme les habitudes et le style de vie, sont les facteurs les plus liés à l’évaluation positive du made in Spain. L’identification des marques espagnoles les plus connues en tant que marques espagnoles n’est pas automatique. Alors que des entreprises telles que Zara, Mango, Teléfonica, Freixenet, Lladró, sont très connues, elles ne sont pas toujours identifiées comme des marques espagnoles. 8 Gráphique 5 – Top 20 des principales marques connues et identifiées comme espagnoles Source : FMRE (2008). Cette situation vient corroborer le comportement de certains consommateurs, qui ne connaissent pas l’origine de certains produits espagnols, et ont tendance à leur attribuer une origine autochtone (tel que Chupa Chups en France) ou italienne. Cette conclusion ne correspond cependant pas au rayonnement international de beaucoup de ces entreprises. Telefónica conserve une présence significative sur le marché latinoaméricain. Elle vient de consolider sa position en Europe, par l’acquisition de l’ancien monopole de la République Tchèque et de la compagnie britannique O2. Les grandes entités bancaires ont connu le même développement géographique, notamment les groupes Santander, Banco Bilbao Vizcaya Argentaria ou, pour l’équipement, Ferrovial. Zara (Inditex), quant à elle, a développé pendant ces 10 dernières années un large réseau de boutiques propres et, dans une moindre mesure, de franchises, sur les cinq continents. Borges est un groupe au capital 100 % espagnol dont le chiffre d’affaires est de 5,4 milliards d’euros. Il exporte vers plus de 110 pays, ce qui représente plus de 70 % de son chiffre d’affaires. Il détient 36 entreprises qui couvrent les différentes phases de la chaîne de valeur. Borges est numéro un sur le marché espagnol de la commercialisation des fruits secs et des fruits séchés emballés. Au plan international, c’est le premier opérateur mondial de noix, le premier exportateur espagnol de fruits secs et d’huile d’olive emballée. C’est la deuxième entreprise espagnole au capital national qui produit et emballe une très large gamme d’huiles comestibles. Au plan international, elle est présente aux Etats-Unis, au Maroc, en Tunisie, en France, en Russie et en Australie. 9 Une société peu internationalisée Malgré l’internationalisation croissante de sa politique et de son économie, l’Espagne reste encore une société relativement fermée à l’extérieur. Ce phénomène est dû à la faible mobilité géographique des Espagnols, à leur méconnaissance des langues étrangères, etc. On appelle ces facteurs les limites sociales à l’internationalisation. D’après le Baromètre du Real Instituto Elcano de 2003 (Noya, 2004), qui étudie un ensemble d’indicateurs d’internationalisation sociale, seul un Espagnol sur quatre déclare parler une langue étrangère et 37 % d’entre eux affirment être déjà partis en vacances à l’étranger. La corrélation entre les variables étudiées donne comme résultat que seuls 24 % d’entre eux ont voyagé à l’étranger et ils entretiennent des relations avec des étrangers en Espagne, et que seuls 15 % d’entre eux part régulièrement à l’étranger et parle une ou plusieurs langues étrangères. On obtient alors un indicateur accumulatif d’activités et de comportements très faible : 1,74 sur une échelle de 1 à 6. Le plus regrettable concerne l’avenir des jeunes Espagnols. Une grande majorité de ces derniers ne connaît ni l’anglais, ni une quelconque langue étrangère (60 % et 39 %), si on les compare à la moyenne européenne (46 % et 29 %) et notamment aux pays nordiques (10 et 0 %), on constate la faiblesse des pourcentages. En mars 2010, le Baromètre du CIS révèle que plus de 63 % des Espagnols ne connaissent pas l’anglais, seul 8,3 % l’étudient et que 74 % ne se sentent pas lésés par le fait de ne pas parler de langues étrangères. Ce phénomène est lié à la faible mobilité des Espagnols et à leur faible propension à changer de pays ou de continent afin d’améliorer leurs conditions de vie ou de travail. Un trait de caractère retrouvé chez les jeunes qui ne voyagent pas assez à l’étranger (70 %). L’Europe est synonyme de mobilité et de rapprochement pour uniquement 23 % des jeunes Espagnols (35 % des jeunes européens). Dans le domaine de l’identité, les Espagnols s’identifient : avec l’Europe (4 %), leur quartier (5 %), leur communauté autonome ou région (16 %), le monde (18 %), l’Espagne (27 %), leur ville ou leur village (27 %). Les sentiments d’identification infranationale sont ceux qui prédominent et ils s’identifient plus facilement avec le monde qu’avec l’Europe. En comparaison avec les autres pays du monde développé, les Espagnols s’identifient plus que la moyenne avec leur environnement local et régional. En Europe, le rapport est de 23 % et 64 %, respectivement, alors que pour les Espagnols il est de 9 % et 66 %. Malgré l’internationalisation de l’économie espagnole et l’ouverture politique, l’Espagne, par rapport à d’autres sociétés développées, est moins internationale. Les attitudes des jeunes ne laissent en outre pas présager de changement significatif à court terme. La société espagnole ne s’est pas internationalisée. La convergence dans le domaine de la culture et la consommation de masse placent l’Espagne au même niveau que n’importe quel pays développé. Mais, si l’on dépasse ces deux facteurs, les aspects qui font de l’Espagne une société ouverte sont le tourisme et l’immigration. L’ouverture va dans le sens de la réception et non de l’émission. La société espagnole reste une société aux attitudes provinciales, aux relations et aux comportements sociaux fermés et peu mobiles. 10 Bibliographie ALONSO, Matilde; FURIÓ, Elies, BIRABENT, Christel (2008) : Panorama de l’Espagne contemporaine, Paris, Ellipses. CERVIÑO, Julio (2003): Made in Spain. Hecho en España. La imagen de España y de sus marcas en el mundo, ICEX, Madrid. DAVÓ, José María (2001): El español como recurso económico en Francia, ICEX, Oficina Económica y Comercial de Paris. FMRE (2003): Made in Spain. Hecho en España. La imagen de España y sus marcas en el mundo, Foro de Marcas Renombradas, Madrid. FMRE (2008): La imagen del Made in Spain. La Imagen de España, Sus Marcas y Empresas en el Mundo, Foro de Marcas Renombradas, Madrid. GONZÁLEZ SILVESTRE, Eduardo; CASILDA BÉJAR, Ramón (2002): “La marca país como ventaja competitiva. El valor de la marca España”, Información Comercial Española, avril-mai, nº 799, pp 101-113. 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