Troubles vsico-sphinctriens et maladies neurologiques

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Troubles vsico-sphinctriens et maladies neurologiques
Troubles vésico-sphinctériens et maladies neurologiques. Coordination Ville-Hôpital
Xavier Gamé1, Isabelle Thiry-Escudié2, Philippe Marque2, Pascal Rischmann1
Service d’Urologie, Transplantation Rénale et Andrologie, CHU Rangueil, Toulouse
Service de Médecine Physique et Réadaptation, CHU Rangueil, Toulouse
Plan
Introduction
Le suivi des vessies neurologiques
• Mesure de la clairance de la créatinine par 24 heures
• Echographie rénale et vésicale
Le suivi spécialisé des vessies neurologiques
• Bilan urodynamique
• Fibroscopie urinaire
Examens non systématiques
• Surveillance bactériologique systématique
• Tomodensitométrie spiralée sans injection
Facteurs de risque
• Mictions à haut régime de pression intravésicale
• Port d’une sonde vésicale à demeure ou d’une cystostomie
• Compliance abaissée
• Reflux vésico-urétéral
• Résidu post-mictionnel élevé
• Défaut d’apport hydrique
L’autosondage ou cathétérisme intermittent
Conclusion
Toute atteinte du système nerveux peut entraîner des troubles vésico-sphinctériens. Ils
sont présents chez quasiment tous les patients porteurs d’une lésion médullaire qu’elle soit
traumatique, tumorale, vasculaire, congénitale, inflammatoire ou dégénérative. On les
retrouve chez 80% des patients porteurs de scléroses en plaques depuis plus de 5 ans. Ils sont
présents au moins de façon transitoire chez 80% et de manière définitive chez 30 % des
patients victimes d’accident vasculaire cérébral. Enfin ils s’observent également dans le cadre
des lésions périphériques telles que les queues de cheval, les polyradiculonévrites aiguës et
chroniques, les neuropathies en premier lieu desquelles nous retrouvons la neuropathie
diabétique.
Les troubles vésico-sphinctériens ont un double retentissement, fonctionnel lié aux
conséquences des désordres mictionnels sur la qualité de vie (dysurie, incontinence urinaire
pouvant dans certains cas gêner ou empêcher le retour à domicile ou l’insertion
professionnelle ou bien même justifier le maintien en institution), organique lié aux
complications uro-néphrologiques (infections urinaires fébriles, insuffisance rénale, cancer de
vessie, lithiases) qui représentent la première cause de surmortalité de ces patients.
Après la prise en charge initiale qui fait intervenir le médecin rééducateur, l’urologue et le
neurologue ou le neurochirurgien, la gestion des troubles vésico-sphinctériens fait intervenir
le médecin traitant, pour les maladies dégénératives (sclérose en plaque, maladie de
Parkinson…) le neurologue et les centres experts en neuro-urologie comprenant un urologue
et un médecin rééducateur.
Le suivi des vessies neurologiques
Afin de dépister les complications des troubles vésico-sphinctériens d’origine neurologiques,
un suivi régulier , annuel et à vie doit être réalisé. Il comprend :
• Mesure de la clairance de la créatinine par 24 heures
Chez le patient en fauteuil ou alité, le dosage de la créatininémie ou le calcul simplifié de la
clairance de la créatinine à partir de la créatininémie selon la formule de Cockroft surestime
la fonction rénale réelle de près de 20 à 30 %. La mesure la plus proche est celle de la
clairance de la créatinine par 24 heures. La seule limite est représentée par les fuites d’urine,
en particulier chez la femme qui vont entacher le recueil et donc fausser le résultat.
• Echographie rénale et vésicale
Son objectif est de dépister un retentissement précoce sur l’appareil urinaire. Elle recherche
une urétéro-hydronéphrose, une lithiase rénale ou vésicale et éventuellement une tumeur
vésicale. Chez le patient urinant normalement, une mesure du résidu post-mictionnel y sera
associée.
Le suivi spécialisé des vessies neurologiques
Des examens spécialisés doivent être régulièrement pratiqués chez le patient neurologique.
Leur fréquence varie selon la pathologie neurologique, le type d’atteinte, les données du bilan
initial et l’équilibre mictionnel du patient. Ces examens sont réalisés et demandés par les
médecins référents en neuro-urologie. Il s’agit :
• Bilan urodynamique
Il explore le fonctionnement de l’appareil vésico-sphinctérien et recherche des situations à
risque de complications (Mictions à haut régime de pression intravésicale, Compliance
abaissée).
• Fibroscopie urinaire
Elle recherche des anomalies de la filière uréthrale chez des patients ayant des difficultés
pour se sonder ou des tumeurs de vessie chez des patients ayant plus de 10 ans de vessie
neurologique ou ayant eu une sonde vésicale pendant plus de 5 ans ou ayant été traité par
Endoxan®.
Des biopsies sont réalisées devant la vision de toute lésion suspecte en association à la
réalisation de cytologies urinaires.
Examens non systématiques
• Surveillance bactériologique systématique
Un examen cytobactériologique des urines ne doit être réalisé que lorsque les patients ont des
symptômes (fièvre, hyperréflexie autonome (hypertension artérielle, bradycardie, sueurs,
frissons), contractures…) ou en cas d’exploration invasive (fibroscopie urinaire, bilan
urodynamique) ou de traitement endoscopique ou de biopsies prostatiques.
Une bactériurie asymptomatique est normale et presque systématique chez tous les patients
urinant par autosondages. Par conséquent, elle ne doit pas être traitée au risque d’entraîner
des résistances.
• Tomodensitométrie spiralée sans injection
Elle est réalisée à la recherche de lithiases urinaires. Elle sera réalisée lors du bilan initial et
servira d’examen de référence. Elle ne sera répétée qu’en cas de persistance de facteurs de
risque, de lithiases en particulier.
Facteurs de risque
Le principal facteur de risque de survenu d’une complication des troubles vésicosphinctériens d’origine neurologique est un mode mictionnel inadapté. Lors de l’évaluation de
la fonction vésico-sphinctérienne du patient qui sera réalisée dans un centre expert en neurourologie, les facteurs de risque seront systématiquement recherchés et un mode mictionnel
adapté corrigeant l’ensemble de ces derniers sera proposé. Dans la majorité des cas, ce mode
mictionnel sera l’autosondage.
• Mictions à haut régime de pression intravésicale
Les pressions intravésicales sont augmentées lors de la miction car il y a un défaut de
relaxation sphinctérienne. Cela entraîne un reflux vésico-rénal, des lésions ischémiques
pariétales vésicales, une fibrose vésicale, des diverticules de vessie et peut entraîner un résidu
post-mictionnel.
• Port d’une sonde vésicale à demeure ou d’une cystostomie
Une sonde à demeure, constituant un corps étranger intravésical, est associée à une infection
urinaire au bout d’un mois dans 100 % des cas. De plus, elle favorise la survenue de lithiases
et étant responsable d’une irritation chronique, elle favorise la survenue d’un cancer de vessie
au bout de cinq à sept ans.
• Compliance abaissée
La vessie ne se laisse plus distendre. Les pressions intravésicales augmentent pendant le
remplissage, ce qui favorise les complications.
• Reflux vésico-urétéral
La présence d’un reflux vésico-urétéral est le reflet soit de mictions à haut régime de pression
intravésicale, soit d’une compliance abaissée, soit, plus rarement, d’un trajet trans-mural
insuffisant.
• Résidu post-mictionnel élevé
La persistance d’urine favorise la pullulation microbienne et ainsi les infections urinaires.
• Défaut d’apport hydrique
Afin d’éviter les fuites d’urine, le patient va très souvent diminuer ses apports hydriques ce
qui favorise la survenue d’infections urinaires. Pour les éviter, il faut que les apports
hydriques soient compris entre 1,5 et 2 litres par 24 heures.
L’autosondage ou cathétérisme intermittent
L’autosondage permettant une vidange vésicale complète et à basse pression constitue le
mode mictionnel répondant le mieux aux facteurs favorisants des complications. Cependant, il
impose d’être exclusif car l’alternance cathétérisme intermittent et mictions « normales »
favorise la survenue de complications.
Le nombre de sondage quotidien est au moins de 5 par jour, ce qui correspond à un nombre
normal de mictions par 24 heures. Nous y associons très fréquemment la prise d’un
anticholinergique afin de diminuer au maximum les pressions intravésicales, éviter les fuites
d’urine entre les sondages et traiter l’hyperactivité vésicale, syndrome très fréquemment
présent dans les troubles vésico-sphinctériens d’origine neurologiques.
La réalisation de l’autosondage diminue très significativement la survenue d’infections
urinaires par rapport aux patients ayant un mode mictionnel non adapté à leur pathologie
neurologique. En revanche, il s’y associe presque systématiquement une bactériurie
asymptomatique qui ne doit être ni traitée ni dépistée au risque de faire émerger des germes
résistants.
Pour éviter toute infection avec la réalisation des autosondages, il faut que ces derniers soient
propres et non stériles (ne pas utiliser d’antiseptiques) et que les apports hydriques soient
supérieurs à 1,5 litres par jour.
Conclusion
La prise en charge des troubles vésico-sphinctériens d’origine neurologique fait intervenir le
médecin traitant et les médecins spécialisés (médecin rééducateur-urologue).
Un suivi annuel et à vie comprenant la réalisation d’une échographie rénale et vésicale et la
mesure de la clairance de la créatinine sur 24 heures doit être pratiqué. Il a pour but de
dépister les complications des troubles vésico-sphinctériens d’origine neurologique.
Parallèlement, un suivi spécialisé dont la fréquence varie selon le patient est également
nécessaire.