Protégez votre portefeuille contre l`inflation

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Protégez votre portefeuille contre l`inflation
L’ECHO MERCREDI 30 MARS 2016
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vosfonds
Édito
Hélicoptère
L
e langage utilisé par les banques centrales semble parfois hermétique. Il suffit
de penser aux acronymes cryptés tels
que QE4 et LTRO, qui représentent pourtant des
outils financiers ayant un objectif commun: injecter de l’argent dans l’économie pour lui insuffler de l’oxygène et relancer l’inflation.
La Banque Centrale Européenne a déjà fortement réduit ses taux
Les injections
de capitaux
des banques
centrales
finiront par
relancer
l’inflation.
et injecté plus de 700
milliards d’euros dans
l’économie. Mais les
résultats se font attendre. La croissance économique est anémique et l’inflation
reste inférieure à l’objectif de 2%. L’explication réside en partie
dans les banques, qui
conservent une partie de l’argent de la BCE au
lieu de le réinjecter davantage dans l’économie
réelle.
Aujourd’hui, la question est de savoir si la
BCE dispose d’autres armes. Ces dernières semaines, on a vu apparaître un nouveau terme:
«helicopter money». Il s’agit d’un concept où
Protégez votre
portefeuille
contrel’inflation
En pratiquant une «stratégie
d’argent gratuit», les banques
centrales font tout ce qui est
en leur pouvoir pour faire
remonter l’inflation en
Europe et aux Etats-Unis.
Les obligations liées à
l’inflation vous permettent de protéger votre
portefeuille.
CHRISTIAN DE GREEF ET
PETER VAN MALDEGEM
une banque centrale crée de l’argent et le redistribue directement aux gouvernements ou aux
ménages. On ne sait pas avec certitude si cet
«helicopter money» verra le jour rapidement,
mais il est certain que les injections de capitaux
planifiées et celles déjà réalisées finiront tôt ou
tard par relancer l’inflation.
Pour les investisseurs, c’est
le signe qu’ils doivent
commencer à penser à se
hausse des prix.
PETER VAN MALDEGEM
COORDINATEUR ‘FONDS’
PHOTOMONTAGE: FILIP YSENBAERT
protéger contre cette
L’ECHO MERCREDI 30 MARS 2016
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vosfonds
L
’arsenal utilisé par la Banque Centrale
Européenne pour relancer à la fois
l’économie et l’inflation est impressionnant. Son arme principale – à
savoir diminuer les taux que les
banques perçoivent lorsqu’elles placent de l’argent auprès de la BCE – est épuisée. Le
taux des dépôts est même devenu négatif. Aujourd’hui, les banques payent 0,4% à la BCE pour y
placer leur argent. A contrario, elles peuvent emprunter gratuitement des liquidités auprès de la
BCE. Par ailleurs, la banque centrale injecte tous les
mois 80 milliards d’euros sur les marchés pour racheter des obligations européennes.
«Jusqu’à présent, ces mesures se sont avérées peu efficaces», estime Paul Smets, gestionnaire du fonds
obligataire «Inflation» chez CapitalAtWork. En outre, le marché semble douter de la capacité de la BCE
à atteindre l’objectif annoncé de 2% d’inflation dans
les années à venir. «En comparant les rendements des
obligations nominales et ceux des obligations liées
à l’inflation, nous pouvons déduire les attentes
du marché en termes d’inflation: sur base des
obligations allemandes, nous constatons
que le marché s’attend à une inflation
moyenne de 0,9% par an au cours des
dix prochaines années», explique
Paul Smets.
Malgré tout, il estime raisonnable d’opter dès aujourd’hui
pour des obligations liées à
l’inflation. «Les banques centrales disposent de tout un arsenal, y compris les fameuses
presses à billets et la pratique
de «l’helicopter money», une
option de moins en moins improbable. Dans ce sens, il est
sage – ne serait-ce que pour des
raisons défensives – d’investir
une partie de ses avoirs dans des
obligations liées à l’inflation. Si
l’inflation est finalement plus élevée que le taux attendu de 0,9%,
nous serons gagnants. Chez CapitalAtWork, 20% des investissements en
obligations sont consacrés aux obligations
‘inflation linked’», ajoute-t-il.
Marion Le Morhedec d’AXA Investment
Managers est tout aussi positive. «Les attentes
actuelles en matière d’inflation ne reflètent pas des niveaux réalistes d’inflation à long terme», estime-t-elle.
«L’inflation restera limitée au cours des prochains mois,
mais nous nous attendons à une reprise de la hausse des
prix au cours de la seconde moitié de 2016. Nous estimons aussi que c’est le bon moment de s’intéresser à ces
obligations», poursuit-elle. Ludo Geris, gestionnaire
du fonds obligataire chez KBC, se rallie à cette analyse et se dit même «optimiste».
Obligations liées à l’inflation
Pour les investisseurs s’intéressant à ces obligations,
il est important de distinguer celles-ci des obligations classiques. Ces dernières tiennent compte des
prévisions d’inflation au moment de l’émission mais
avec un coupon nominal fixe et des conditions de
remboursement qui ne seront pas réévaluées.
Avec les obligations liées à l’inflation («inflation
linked»), par contre, à la fois le coupon et le montant
remboursé à l’échéance ne sont pas fixes, tous deux
étant alignés sur l’indice des prix à la consommation
du pays émetteur ou, plus généralement, sur l’indice
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vosfonds
SÉLECTION DE FONDS OBLIGATAIRES INVESTISSANT DANS DES OBLIGATIONS LIÉES À L'INFLATION
Rendement annuel
3 ans
5 ans
Inflation at Work (CapitalAtWork)
1 an
-1 , 5 %
2 , 4%
4 , 5%
10 ans
2 ,7 %
Degroof Bonds EUR Inflation-Linked
- 3 , 1%
3, 5%
4 , 5%
-
Petercam Bonds Global Inflation
- 4 ,7 %
3 ,9 %
4 , 4%
-
KBC Bonds Inflation Linked Bonds
- 3 ,7 %
3 , 4%
4,0%
3,0%
AXA WF Global Inflation Bond
-1 , 5 %
1 ,2%
3 ,9 %
-
SISF Global Inflation Linked Bond
-2 , 3 %
1 , 1%
3,8%
3,3%
Parvest Bond EUR Inflation-Linked (BNP IP)
- 4 , 4%
2 ,7 %
2 , 5%
2 ,3%
Amundi Funds Bond EUR Inflation
- 5 ,9 %
1 , 6%
2,0%
2 ,3%
Source: VWD
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d’inflation européenne, publié par Eurostat. Si l’inflation augmente, le coupon et le montant remboursé augmenteront eux aussi. Cette indexation
protège donc le détenteur de ces titres contre le
risque d’inflation pendant toute la durée de vie de
l’obligation et lui assure un rendement réel, par
opposition aux obligations non-indexées, qui génèrent un rendement nominal. De plus, le remboursement ne tiendra pas compte d’une éventuelle déflation. Dans ce cas, il y aura certes une perte de rendement, mais l’investisseur aura l’assurance de
récupérer au minimum sa mise de départ. Pour les
obligations émises par les gouvernements, qui représentent le gros du volume de cette classe d’obligations, à la fois le capital et les coupons sont généralement indexés.
Mais cette protection a un prix: un rendement
nominal moins élevé. Si pendant la durée de vie de
ce type d’obligation il n’y a pas de hausse inflationniste, le rendement sera inférieur à celui d’une obligation classique. Il est donc prudent de s’assurer
préalablement que l’on anticipe un niveau d’inflation supérieur ou au moins égal au niveau d’inflation implicite.
Pourquoi investir via des fonds?
Le marché des obligations liées à l’inflation étant limité et difficilement accessible aux particuliers, il
est conseillé de passer par l’intermédiaire de fonds
spécialisés. Les fonds restent en effet le maître choix
en termes de diversification: rating, répartition géographique, maturité et sensibilité par tranche de
maturité. Mais aussi parce que les gestionnaires peuvent avoir recours à des produits dérivés – en particulier des Swaps de défaut de crédit – et à des stratégies de couverture.
Les différences entre les portefeuilles de sicav et
de trackers sont minimes. Les obligations sous-jacentes sont globalement identiques: les porte-
«Nous nous
attendons à
une reprise de
la hausse des
prix au cours
de la seconde
moitié de 2016.»
MARION LE MORHEDEC
GESTIONNAIRE DE
FONDS, AXA
INVESTMENT
MANAGERS
feuilles se composent en général de 50% d’obligations françaises, de 30% d’italiennes, le reste étant investi principalement en obligations allemandes ou
espagnoles. Les coûts peuvent être un bon guide
pour vous aider à faire votre choix. Marion Le Morhedec d’AXA Investment Managers indique sa préférence pour les fonds gérés activement au sein de
cette catégorie d’actifs. «Ce marché est très spécifique
et en grande partie influencé par des facteurs techniques,
tels que l’offre et la demande. Dans le segment des obligations liées à l’inflation, les fonds gérés activement sont
selon nous le meilleur choix pour les particuliers», précise-t-elle.
Risques
0,9%
Sur base des cours
actuels des obligations
allemandes liées à
l’inflation, on s’attend
à une inflation de 0,9%
par an au cours des dix
prochaines années.
Le niveau de risque repris dans les prospectus est habituellement médian (3 ou 4), compte tenu du fait
que le capital n’est pas garanti. Bien que le rendement des obligations soit lié à l’inflation, les investisseurs doivent savoir que si les fonds contiennent
des obligations dont l’échéance est très éloignée, ils
ne seront pas immunisés contre une hausse des taux
et donc contre une baisse de la valeur du fonds.
On parlera de «sensibilité» aux variations de taux
d’intérêt. Les fonds qui privilégient les maturités
courtes limitent ce risque de perte tout en bénéficiant de la couverture de l’inflation.
En outre, l’investisseur en fonds gardera à l’esprit
que les fonds indexés au sein de la zone euro sont
constitués principalement d’obligations d’État françaises, allemandes… et italiennes. En fonction de sa
composition, le fonds présentera un risque de crédit
variable mais de toute manière très limité, compte
tenu de l’implication des gouvernements et des notations individuelles des obligations de ces fonds.
Pour un portefeuille majoritairement obligataire,
les experts conseillent une exposition de 10 à 20%.
Ce rempart contre l’inflation concerne davantage les
personnes qui vivent des revenus de leur capital et
qui souhaitent se protéger à court terme contre le
risque d’inflation.