La France à table. Dégustation d`une recette d`Auguste Escoffier

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La France à table. Dégustation d`une recette d`Auguste Escoffier
BLOIS 2015 - La France à table. Dégustation d’une recette d’Auguste Escoffier
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Michèle Barrière
BLOIS 2015 - La France à table. Dégustation
d’une recette d’Auguste Escoffier
par Déborah Caquet
Mise en ligne : dimanche 18 octobre 2015
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Enthousiaste, passionnée, gourmande, tels sont les mots qui reviennent spontanément pour
qualifier Michèle Barrière, historienne de la gastronomie, qui fait la promotion de son dernier
livre : La France à table (Les arènes, 2015). L’ouvrage se présente comme un livre objet, contenant
pêle-mêle cartes, recettes manuscrites, anecdotes autour de la cuisine française et de ses usages
depuis 1870 jusqu’à la Nouvelle Cuisine.
Pour débuter sur une note plaisante à l’heure du déjeuner, des assiettes rouges sont distribuées
aux assistants, garnies d’une étrange mixture sucré-salé. Il s’agit de la salade du Brésil du célèbre
Escoffier, c’est-à-dire un mélange de riz, d’ananas, de crème et de citron. Une préparation plus
simple à présenter que le bœuf Frascati…
Comment commencer sans parler du fameux Maître Auguste Escoffier, cuisinier des rois, rois des
cuisiniers, dont le règne ne s’achève véritablement qu’avec la Nouvelle cuisine. Escoffier est
réputé être l’inventeur du restaurant. Ce n’est pas un cuisinier inventif au sens où on l’entendrait
aujourd’hui mais un cuisinier qui veut mettre en avant les produits nobles, les truffes, le caviar ou
le foie gras. C’est aussi un cuisinier soucieux de la bonne organisation de son personnel : il invente
la brigade, hiérarchisée et organisée, où chacun met la main à la pâte pour préparer un plat. Sa
chance est d’avoir croisé la route en 1884 de César Ritz, venu du Valais, serveur raté mais
directeur bientôt très talentueux d’hôtels de luxe comme le Carlton sur la Côte d’Azur. En 1898,
Escoffier se retrouve ainsi aux fourneaux du majestueux Hôtel du Ritz place Vendôme. Son sens
du détail est tel qu’il exige de faire raboter les pieds des tables jugées trop hautes pour les clients.
Cette exigence, Escoffier sait aussi l’avoir pour le bien-être de ses commis : il leur obtient une
retraite, pour la première fois dans l’histoire de la cuisine.
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C’est l’époque des restaurants en général, de la gargote aux établissements de qualité en passant
par la brasserie et la table d’hôtes. C’est aussi le moment où la cuisine change, où l’on abandonne
la plupart des épices, où l’on aime les plats mijotés, la daube, le pot-au-feu, où l’on découvre de
nouvelles salades, l’endive, le flageolet, etc. On apprécie la viande, notamment le gibier mais on
craint la goutte. Les classes moyennes suivent. Avec l’industrialisation, on découvre les produits
Maggi, les biscottes Heudebert ou les biscuits Petit Lu. C’est enfin l’époque de l’épicerie, avec sa
machine à jambon et son vin à la tireuse, ainsi que celle des magasins Félix Potin. L’hypermarché
ne vient que bien plus tard, dans les années 1960 seulement. A côté des restaurants traditionnels,
on vend des gâteaux et des pâtisseries. Le mille-feuilles apparaît en 1867, le Paris-Brest en 1891, à
peu près en même temps que l’éclair et le mont-blanc.
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Des pages, linéarité chronologique oblige, sont consacrées à la cuisine des tranchées. Le sujet est
difficile mais son traitement révèle quelques surprises. Outre les inévitables différences de
traitement entre généraux et hommes de troupe, la ration est certes bien chiche mais elle est
agrémentée du contenu des colis envoyés des quatre coins du pays par les familles. On peut ainsi
manger du confit de foie gras du Sud-Ouest avec de l’Emmental. Quelques recettes de cuisine des
poilus sont d’ailleurs inscrites dans le livre à toutes fins utiles.
Après la guerre, la cuisine des palaces est moins à la mode. On préfère la cuisine régionale,
découverte à la faveur du Guide Michelin. Cette cuisine se présente comme traditionnelle même si
elle est de conception récente. La figure emblématique de cette cuisine est la Mère Brazier de
Lyon. Eugénie Brazier est la première femme à avoir obtenu deux étoiles pour ses deux
restaurants. La dame est connue pour sa cuisine de l’artichaut au foie gras, de la volaille demideuil et aussi pour son épouvantable caractère qui ne rebute pourtant pas E. Herriot, maire de la
ville et grand habitué. A côté de cette cuisine de province, se développe celle des paquebots. Le
livre reproduit quelques menus servis à bord du Normandie et même ceux servis à la clientèle
...canine. Dans un autre registre, le salon des arts ménagers diffuse les premiers fours à gaz tandis
que l’exposition coloniale initie le public parisien aux goûts exotiques.
L’Occupation est une seconde éclipse culinaire, où l’on apprend à faire du pâté de foie sans foie,
où l’on accommode les rutabagas comme l’on peut, où l’on compose avec les restrictions
tatillonnes qui ne disparaissent qu’à la veille des années 1950.
Les années 1960 approfondissent les nouveautés de l’Entre-deux-guerres. Au chapitre des
nouveautés, on découvre la cocotte minute, les émissions de cuisine à la télévision comme celle de
Catherine Langeais et de Raymond Olivier, etc. La cuisine conquiert également l’aviation. Après le
fruste panier-repas vendu à l’embarquement, les restaurants d’aéroports fréquentés à chaque
escale, de vrais repas sont servis à bord. Des cuisines sont aménagées à Orly et des grands chefs
sont sollicités. A l’Elysée, haut lieu de la diplomatie à table, la grande cuisine française sert les
intérêts de la France. Pour l’illustrer, le menu servi à la reine Elizabeth II lors de sa visite d’Etat
est reproduit, ainsi que le plan de table.
Le livre s’achève par un commentaire sur la Nouvelle Cuisine, promue par Gault et Millau. La
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cuisine est plus simple, plus légère, plus inventive, même si cette dernière est parfois poussée
jusqu’à la caricature.
Il n’y a pas vraiment eu de séance de questions à l’issue de la conférence, un homme du public
s’étant accaparé le micro pour se plaindre du manque d’inventivité des chefs d’aujourd’hui, du
coût exorbitant des restaurants chics de Blois, du déclin de la France...
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