Nouvelle fiscalité de l`assurance vie en cas de décès

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Nouvelle fiscalité de l`assurance vie en cas de décès
Date : 12 MAI 16
Journaliste : Mireille Weinberg
L'OPINION
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La question se pose pour l'assurance non dénouée du conjoint survivant
Nouvelle fiscalité de l'assurance vie en cas
de décès : faut-il tout défaire ?
Placement préféré
Une réponse ministérielle est venue
en chasser une autre. Elle apporte une
bonne nouvelle aux épargnants mariés
sous le régime de la communauté : la
fiscalité de l'assurance-vie est allégée pour
les enfants. Mais, que faire des stratégies
de contournement mises en place par le
passé ?
Mireille Weinberg
Vu DE LOIN, CELA ressemble à un débat pointilleux entre juristes. Mais à y regarder de plus
près, la réponse ministérielle Ciot, parue au
journal Officiel du 23 février, intéresse plus
largement tous les détenteurs de contrats
d'assurance vie, mariés sous le régime de la
communauté, soit la majorité de la population
française. Et c'est même une excellente nouvelle pour les épargnants, puisque la nouvelle
doctrine fiscale conduit à l'allégement de la fiscalité de l'assurance vie en cas de décès pour
les enfants.
De quoi s'agit-il ? Du sort fiscal du contrat
d'assurance vie non dénoué, en clair, celui de
madame, en cas de décès de
monsieur, ou l'inverse, bien Un placement
sûr. Attention, il n'y a aucun qui séduit surtout
changement pour le contrat du les seniors
défunt, qui lui est dénoué par
le décès et qui est donc versé Plus l'épargnant français
avance en âge, plus il se
normalement aux bénéficiaires tourne vers l'assurance
désignés avec la fiscalité très vie. Alors que les seniors
avantageuse de l'assurance vie. représentent 21% de la
La question se pose pour l'assu- population majeure en
rance non dénouée du conjoint France, ils détiennent près
survivant, car si le contrat a été de la moitié des sommes
placées en assurance vie
alimenté par des deniers com- (44%). A contrario, si les
muns, il appartient alors pour jeunes âgés de moins de 35
moitié à chacun des époux et ans représentent 27% de
doit donc, toujours pour moi- la population majeure, ils
tié, être versé dans l'actif suc- « pèsent » seulement 5%
l'assurance vie.
cessoral du défunt. Avant la de
Si l'encours moyen d'un
récente réponse ministérielle contrat d'assurance vie se
Ciot, la réponse ministérielle situe à 10 700 euros chez
Bacquet du 29 juin 2010, expli- les 25-34 ans, il atteint
quait que la moitié du contrat 63 DOO euros chez les 75
du survivant qui intégrait l'actif ans et plus.
successoral devait être taxé.
Pour le conjoint, qui est exonéré de droit
de succession, cela n'avait aucun impact, mais
pour les enfants, c'était moins drôle. La moitié
du contrat d'assurance vie du survivant venait
grossir l'actif successoral du défunt et donc la
part de chacun dans l'héritage. Cela pouvait
entraîner une taxation des enfants, si du fait
de l'intégration de l'assurance vie, leur part
venait à dépasser le montant de l'abattement
de 100 DOO euros, auquel ils ont chacun droit
au titre de la fiscalité sur les successions. « Ils
Avec la clause de
préciput, le conjoint
survivant conserve le
contrat en propre au
premier décès. C'est un
avantage matrimonial
étaient donc taxés sur des sommes qu'ils ne
percevaient pas tout de suite, puisque l'assurance-vie continuait au profit du conjoint survivant, et que pire, ils ne percevraient peutêtre jamais, si le conjoint utilisait ensuite son
contrat par retraits successifs, explique Corinne Caraux, directrice juridique de l'ingénierie patrimoniale chez Le Conservateur. Avec la
réponse ministérielle Ciot, la réintégration de
la moitié du contrat du conjoint survivant dans
l'actif successoral est uniquement civile et sort
désormais du champ de l'impôt, les enfants
n'étant plus taxés au premier décès mais au
moment du dénouement du contrat lors du décès de leur second parent, s'ils sont les bénéficiaires du contrat et selon les règles habituelles
et avantageuses de l'assurance-vie. » II faut
saluer au passage l'action de Gérard Beckermann, le président de l'association d'assurés
Afer, qui a bataille ferme pour obtenir ce changement de la part de Bercy.
Refaire le point sur les contrats
à adhésions conjointes
C'est une très bonne nouvelle pour les épargnants, mais du coup, que faire des stratégies de contournement de l'ancienne règle
qui avaient pu être mises en place ? Première
manière de contourner l'ancien obstacle :
Date : 12 MAI 16
Journaliste : Mireille Weinberg
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souscrire un contrat a adhésion conjointe avec
dénouement au premier deces L'intérêt ' Sl
chacun des conjoints a son propre contrat, il en
reste forcement un non dénoue et potentielle
ment taxable au deces du premier d'entre eux
Avec l'adhésion conjointe en revanche, plus
de souci, puisqu'il n'y a qu un seul contrat, les
deux conjoints étant simultanément assures
Au deces du premier, le contrat échappait a
l'ancienne taxation, puisque dénoue
Ces contrats n'avaient généralement
d'autre avantage que de contourner l'an
cienne taxation Maintenant qu'elle est levée,
ils ne présentent plus grand intérêt « Difficile
d'envisager une transformation en adhésion
conjointe avec dénouement au second deces,
cette modification pourrait etre considérée
comme un nouveau contrat (novation), avec
perte de l'antériorité fiscale Nous ne souhai
tons faire prendre ce risque a nos clients », dit
Corinne Caraux La plupart des assureurs sont
sur la même ligne Ce contrat conjoint avec
dénouement au deuxieme deces, permet au
conjoint survivant de conserver l'épargne sur
le contrat en bénéficiant de l'antériorité fiscale
Alors qu'avec dénouement au premier de
ces, le contrat est ferme, les sommes retires et
versées au conjoint, qui du coup doit les repla
cer avec une nouvelle date d'ouverture fiscale
et éventuellement avec un autre regime fiscal
beaucoup moins avantageux (si le conjoint
a plus de 70 ans au moment ou il replace ces
sommes, la fiscalite avantageuse du contrat
d'assurance vie ne s'applique plus) « Pour
les personnes fortunées ou l'impact peut etre
important, une nouvelle reflexion s'impose
au cas par cas autour des contrats d'assurance
vie et de leur repartition », confirme Corinne
Caraux
Les avantages matrimoniaux
restent dè bonnes solutions
Autre solution utilisée intégrer le contrat d'assurance vie au sem d'une clause de preciput
« Avec la clause de preciput le conjoint survi
vant conserve le contrat en propre au premier
deces C'est un avantage matrimonial, et les
enfants qui ne perçoivent rien sur le contrat,
n'ont pas non plus la fiscalite a supporter Maîs,
la clause de preciput n'a généralement pas ete
mise en place juste pour regler cette question
On y met tous les biens qu'on souhaite que le
conjoint conserve en propre et notamment la
residence principale Cette clause conserve
donc a priori son intérêt D'autant que le
conjoint n'est pas oblige de l'exercer II décide
au deces d'appréhender ou pas les biens et
notamment l'assurance vie, couverts par cette
clause Qu'il I exerce ou pas, les enfants ne sup
portent aucune imposition II n'y a donc rien a
défaire C'est même une plus grande securite
juridique que de conserver l'assurance vie au
sem de la clause de preciput, si d'aventure, la
fiscalite devait a nouveau être modifiée »,
explique Sophie Gonsard, du reseau notarial
Althemis Derniere solution, le changement de
regime matrimonial, pour passer en commu
naute avec attribution universelle « Je n'ima
gine pas une seconde que des gens aient opte
pour cette solution dans le simple but d'alléger
la fiscalite sur l'assurance vie ' S'ils l'ont fait,
c'est qu'il y avait des raisons plus sérieuses,
qui a priori existent toujours », conclut Sophie
Gonsard Rien a défaire non plus donc
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