L`ACTION ORGANISÉE -Acquis et usages - Jean-Claude - M-Lab

Transcription

L`ACTION ORGANISÉE -Acquis et usages - Jean-Claude - M-Lab
L’ACTION ORGANISÉE
-Acquis et usages -
Jean-Claude Thoenig
Dauphine Recherche en Management
Intervention dans le cadre de la conférence « Les outils pour décider
ensemble. Nouveaux territoires, nouveaux paradigmes », université Paris
Dauphine, 2 novembre 2006
Le thème
• Comment rendre compatibles des logiques
d’action hétérogènes en situation d’interaction?
• Une vieille question, beaucoup de réponses
nouvelles
• En examiner quelques apports concernant:
- contextes publics et privés
- acquis de la sociologie des organisations, de la
sociologie économique et de l’analyse des
politiques publiques
Le constat
• La frontières formelles de l’action organisée sont une
question pour la recherche. De la théorie standard à la
théorie étendue. La force des liens faibles.
• Il y a une logique propre des outils. Et il y a usage
stratégique de ces logiques par les acteurs.
• Marchés, polities, hiérarchies = mondes ou formes
d’action organisée socialement construits. Les
dynamiques de prix, de pouvoir, etc. sont des
hypothèses parmi d’autres, donc sujettes à recherche.
• Les modes d’analyse et de raisonnement utilisés par les
sciences sociales pour comprendre le monde ont au
moins autant évolué que ce monde lui-même. Le piège
du tout est nouveau et de l’historicisme.
La décision en contexte organisé
• La décision est le produit de l’activité d’un acteur en
situation de décideur (capacités cognitives, incertitude
psychologique, conformité à un modèle de rôle).
• La décision est fonction de répertoires, de conventions
(tyrannie des procédures et des structures formelles,
« rules of thumb », etc)
• La décision résulte d’une dynamique de pouvoir, de
coalition et de concurrence entre des acteurs ne
partageant pas les mêmes intérêts.
• La décision est le produit quasi-aléatoire d’activités et
d’interactions, de malentendus et d’inattention (Cohen,
March and Olsen 1972)
• La décision reflète l’oeuvre de langages pour l’action,
partagés ou non. Les configurations organisées sont des
acteurs qui pensent et interprètent (Michaud et Thoenig 2001).
Langages pour l’action organisée
• Critères fondant les actes. Outils pour la décision que mobilisent et
élaborent les acteurs en situation de décision.
• Ni jargon ni culture. Théories, interprétations,représentations en actes
• Donc à fonder sur les comportements effectifs. Sur ce que les gens
font et comment (pas sur ce qu’ils disent, ce qu’ils ont dans la tête ou
sur leurs opinions = échec de la technique des cartes cognitives). Et
c’est contextualisé (non pas des invariants par nature)
• Langages communs (pas nécessairement unique) existent si un ou
plusieurs critères partagés (ne gomment pas des critères spécifiques) =
recouvrements partiels, donc chaînages cognitifs au fil des interfaces
et des interdépendances. Donc coordination endogène.
• Créent fiabilité et prévisibilité comportementales, donc confiance.
• Types de construction-diffusion dans les entreprises: codification
discrétionnaire, accumulation tacite, articulation. Dessinent des
corridors d’action étroits ou larges.
MARKETING
STRATÉGIQUE
2
3
PRODUCTION
INDUSTRIELLE
4
HOMOLOGATION
1
5
MANAGEMENT
PROJETS
CRITÈRES DE CHOIX COMMUNS
1. Délai de livraison + coût + qualité-fiabilité des molécules
2. Capacité de production + délai de livraison + coût des molécules
3. Temps de mise sur marché + acceptabilité par filiales ventes clés
4. Défense des produits stratégiques
5. Temps de mise sur marché + acceptabilité par filiales ventes clé
RECOUVREMENTS DE LANGUAGE DANS UNE
ORGANISATION ORIENTÉE VERS LA RÉGÉNÉRATION
L’apport de l’analyse des politiques publiques
• L’activité dite de décision explique une partie faible de la
variance des politiques publiques. Elle est un moment du
travail collectif parmi d’autres. Son importance relative
devient une question pour la recherche.
• D’autres activités du travail gouvernemental expliquent
les politiques publiques: la mise en œuvre, la mise sur
agenda, l’évaluation, etc. Il faut ouvrir la boîte noire.
• Policy matters (et non pas politics matters).L’action
organisée structure la polity (et non pas le régime
institutionnel). Regarder les scènes locales. La
discontinuité relative.
• D’autres politiques publiques peuvent avoir une influence
décisive sur une politique publique (effets liés)
Gestion publique et management des
politiques (Gibert 1985)
Ressources,
moyens
Réalisations,
produits, outputs
FP interne
Gestion
Conduite par des outils et fonctions agréés
Effets,impacts,
outcomes
FP externe
Management
Efficience instrumentale
Conduite par de la connaissance
sur le problème
Efficacité sur la société//le pb
Horizon de temporalité défini par convention
Horizons non consensuels et flous
Intra - gouvernemental
Multi-acteurs
Accountability hiérarchique
Impacts sur la société/le pb
perçus et jugés de façon non
consensuelle
Politique publique et théorie du
changement social
• Prémisses factuelles (pas normatives). Si A est
choisi, c’est parce que B en est attendu.
• Les outils d’intervention sont porteurs de
postulats, de théories sur l’action et le problème.
(coercition sur les comportements des assujettis, Salisbury 1968; inventaire
des outils publics, Hood 1983; structure des utilités pour les assujettis, Mény et
Thoenig 1989; etc)
• Les dispositifs de mise en œuvre importent (par
ex.: critères des objectifs à atteindre, ciblage des
publics, choix des metteurs en œuvre).
• Le jeu politique autour des outils et dispositifs.
Rationalité politique et rationalité de contenu: des
usages ambivalents et équivoques
Des politiques publiques à l’action publique
• Le piège étatocentrique: l’autorité publique
exercerait une hégémonie sur les problèmes et leur
traitement. Une politique publique est une coproduction le plus souvent asymétrique (Thoenig
1998).
• Chaque domaine ou problème constitue une scène
spécifique, avec des acteurs, des enjeux et du
pouvoir spécifiques.
• Les tables de jeu sont à la fois séparées et liées
entre elles (on a besoin des autres pour autre chose
dans d’autres circonstances).
• Les acteurs les plus puissants ne sont pas toujours
les plus visibles ou présents
Les systèmes d’action organisée
Une boîte à outils
• Les acteurs sont interdépendants et leurs logiques d’action
sont hétérogènes
• C’est le problème (et non pas une structure formelle) qui
dessine ces interdépendances et les enjeux
• Des phénomènes de régulation sociale (des modes
d’arrangements croisés) assurent une fonction
d’intégration
• Des normes secondaires, des règles implicites bordent la
mise en compatibilité (ex: récompenser ses « amis » sans
trop punir ses « ennemis »)
• Les conséquences des arrangements sont « payées » soit
par des parties prenantes du système, soit par des tiers
• Il existe une relative permanence des systèmes problèmes: communautés de politiques, réseaux, etc
L’administration territoriale des affaires
publiques en France (Thoenig 2005)
•
Depuis une trentaine d’années, modifications profondes:
- des outils (moins de règle et d’argent de l’Etat, plus de politiques constitutives démocratie administrative, arènes spécifiques -, décentralisation,transferts, cofinancements, fin des monopoles de l’expertise, etc)
- du modèle (déclin de la régulation croisée, généralisation de
l’institutionnalisation de l’action collective et du marché des partenariats compétences, etc)
•
En même temps permanence du contrôle par la classe politique (agenda):
- refus de relations de subordination entre autorités sub-nationales
- maintien du cumul de mandats électifs
- maintien de la centralisation du pouvoir dans les mains du président du conseil
sub-national (refus de la séparation accrue des pouvoirs et de la démocratie
directe)
- maintien des trois niveaux de gouvernement local à suffrage universel
- refus de la régression massive de l’intervention et de l’influence locale exercée
par les services extérieurs de l’Etat
FORMES ORGANISÉES D’ACTION
ÉCONOMIQUE
Les classiques
• Le marché
• La hiérarchie
• Les économies de la qualité
• Les mondes sociaux ou la coordination entre acteurs par
des conventions partagées (Becker 1976)
• Le réseau inter-organisationnel ou la dépendance des
ressources entre entreprises (Pfeffer et Salancik 1978)
• L’acteur-réseau ou l’enrôlement d’acteurs autour
d’équipements (Callon 1986)
• Le territoire ou le marquage sociétal par des parties
prenantes partageant les mêmes valeurs et
cognitions(Thoenig et Waldman 2005)
Le territoire de la nutrition et de la santé
Les parties prenantes
Chercheurs
universitaires
Distributeurs
spécialisés
Vétérinaires
Fabricants
d’ingrédients
Eleveurs
Chats, chiens
Producteurs
Cynotechniciens
Félinotechniciens
Associations
Propriétaires de
consommation
chiens et chats
Presse animale
Clubs
d’animaux
de race
Associations
d’amis des
animaux
Comment l’entreprise construit un territoire
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Agréger des parties prenantes autour de connivences morales,
culturelles et fonctionnelles: en faire un public spécifique.
Equiper ce public de références cognitives, techniques et culturelles
Coopter des créateurs de savoir qui soient garants de l’impartialité
des références
Produire des réputations (par des « banquiers symboliques » qui
prêtent leurs propre prestige à des produits, etc)
Construire des processus de confiance et des contextes de
prescription entre toutes les parties prenantes
Individualiser la consommation finale
Mettre en place du contrôle croisé
Animer une surveillance des frontières et des sources de risque
Publiciser les succès et créer des jeux à somme positive: toutes les
parties prenantes doivent se sentir propriétaires des succès.