rapport

Transcription

rapport
RAPPORT
INCIDENT
www.bea.aero
Bas niveau carburant, atterrissage d’urgence sur un aérodrome,
de nuit
Sauf précision
contraire, les
heures figurant
dans ce rapport
sont exprimées
en heure locale
d’hiver (UTC + 1 h).
(1)
Aéronef
Date et heure
Exploitant
Lieu
Avion Robin DR 400-140B immatriculé F-GXPP
5 novembre 2013 à 7 h 00(1)
Club
Aérodrome militaire d’Avord (18)
Aviation générale, convenance personnelle,
Nature du vol
voyage
Personne à bord
Pilote
Conséquences et dommages Aucun
1 - DÉROULEMENT DU VOL
Le lundi 4 novembre, veille de l’événement, le pilote avait décidé d’effectuer un vol
aller et retour dans la journée au départ de l’aérodrome de Toulouse Lasbordes (31) à
destination de Toussus-le-Noble (78) afin d’y déposer deux passagers.
La licence « pilote »
de la FFA inclut une
offre d’assurance,
dont l’assistance
permet, notamment
en cas de mauvaises
conditions
météorologiques, de
prendre en charge
le rapatriement
ou l’hébergement
du pilote et de ses
passagers. En cas
de rapatriement,
le trajet d’un pilote
pour ramener l’avion
est également
pris en charge.
(2)
Le 5 novembre,
le soleil se lève à
Toussus-le-Noble
à 7 h 46, pour se
coucher à 17 h 27.
(3)
Aérodrome non
ouvert à la circulation
aérienne publique.
(4)
Il avait décollé et, compte tenu de conditions météorologiques défavorables, il
avait fait une escale pour se ravitailler en carburant sur l’aérodrome de ClermontFerrand (63). Arrivé à Toussus-le-Noble vers midi, il avait constaté que les conditions
météorologiques ne lui permettaient plus d’effectuer le vol retour. Il estimait alors
son autonomie restante à moins de deux heures de vol.
Des échanges téléphoniques avec le chef pilote de son club l’avaient incité à mettre à
profit l’assurance hébergement souscrite auprès de la FFA(2) et à reporter son retour au
mardi 5 novembre. Le soir, en raison des prévisions météorologiques à sa disposition,
le chef pilote avait considéré que le vol du lendemain n’était pas réalisable et avait
proposé de faire un point sur la situation le matin à neuf heures.
Le pilote indique que, le mardi 5 novembre, il décolle vers 5 h 30 (3) de l’aérodrome
de Toussus-le-Noble (78), sans déposer de plan de vol. Il a l’intention d’avitailler à
Orléans Saint-Denis-de-l’Hôtel (45) qu’il contacte sans succès vers 6 h 00.
A 6 h 20, il atteint le FL100 et poursuit en direction de l’aérodrome de Bourges (18) qu’il
veut contacter à 6 h 30 mais sans y parvenir car il a affiché par erreur la fréquence de
Poitiers Approche. Il informe le contrôleur (de Poitiers) qu’il est « à court de carburant »,
« en situation critique » et lui signale son intention de se dérouter vers Bourges.
Le contrôleur informe le pilote qu’en raison de l’heure, le service AFIS de Bourges
n’est pas actif et qu’il n’est pas possible de faire allumer le balisage lumineux. Le
pilote demande alors si la base aérienne d’Avord(4) est ouverte et se dirige vers elle.
Le contrôleur coordonne en urgence avec l’Armée de l’air l’ouverture de l’aérodrome
et l’allumage du balisage lumineux.
Les enquêtes du BEA ont pour unique objectif l’amélioration de la sécurité aérienne
et ne visent nullement à la détermination de fautes ou responsabilités.
1/4
f-pp131105 / Juillet 2014
La capacité des
réservoirs de
l’avion est de 159 l
utilisables. Il n’a
pas été possible
de vérifier la
quantité restante
à cet instant-là.
(5)
A environ 6 h 45, le pilote informe le contrôleur qu’il aperçoit la piste. Il contacte
le contrôleur d’Avord, se déclare en situation d’urgence et atterrit, moteur arrêté
quelques minutes plus tard(5).
Dans l’après-midi, après un avitaillement partiel, le pilote décolle d’Avord vers
l’aérodrome de Bourges afin d’effectuer un complément de plein. Il atterrit à Bourges
vers 16 h 30.
L’agent AFIS de Bourges explique que compte tenu de l’heure d’arrivée tardive
estimée à Toussus-le-Noble, il a insisté pour que le pilote dépose un plan de vol VFR
de nuit. Il ajoute que celui-ci paraissait fatigué et qu’il a décollé vers 16 h 45, dans des
conditions météorologiques marginales.
Le pilote atterrit de nuit à Toussus-le-Noble et se voit signifier qu’il n’a pas suivi le
cheminement VFR requis.
2 - RENSEIGNEMENTS COMPLÉMENTAIRES
2.1 Renseignements sur le pilote
Le pilote, âgé de 23 ans, titulaire d’une licence de pilote privé avec habilitation au
vol de nuit, totalisait 201 heures de vol depuis 2009, dont 117 heures en tant que
commandant de bord. Il avait effectué 7 heures 24 de vol, toutes sur type, dans les
trois mois précédents.
Le lundi matin, le pilote avait consulté les informations météorologiques disponibles
et précise qu’il les avait examinées de façon succincte, sans anticiper le vol retour. Il
a qualifié la situation météorologique de « peu propice au vol VFR ». Il explique que
la préparation insuffisante du vol serait due à son impatience à voler et à la pression
qu’il ressentait vis-à-vis de ses amis. Il ajoute que ses contraintes professionnelles
l’obligeaient à faire l’aller et retour dans la journée. Il souhaitait également respecter
le créneau de réservation de l’avion. Le matin du mardi 5, toujours préoccupé par ces
contraintes. il a considéré que le vol vers Toulouse Lasbordes « pouvait passer ».
(6)
Garmin GNS 430.
Il précise qu’habitué à voler dans la région toulousaine, il n’emporte dans sa
documentation de vol « papier » que la carte OACI IGN Sud-Ouest et les cartes
d’aérodromes dans un rayon de 150 NM autour de Toulouse (31). Il se repose sur leurs
versions électroniques, téléchargées au préalable sur son « smartphone » et sur le GPS
intégré(6) dont les informations contiennent les fréquences radio.
En avril 2012, en raison d’une préparation insuffisante du vol, le pilote avait commis
une erreur dans la sélection de la fréquence radio. Il s’était intégré, sans contact,
à contre QFU, dans le circuit d’un aérodrome contrôlé et réservé aux aéronefs munis
de radio. Il avait ainsi provoqué la remise de gaz d’un vol IFR commercial, en approche
face à lui. A la suite de cette infraction, il explique que son aéroclub l’avait interdit de
vol pendant trois mois mais qu’il n’a pas ressenti les effets de la sanction car, à cette
période, il volait aux Etats-Unis.
Les enquêtes du BEA ont pour unique objectif l’amélioration de la sécurité aérienne
et ne visent nullement à la détermination de fautes ou responsabilités.
2/4
f-pp131105 / Juillet 2014
2.2 Renseignements météorologiques
Le lundi 4, dans la partie nord de la France, la couverture nuageuse variait entre 3
à 7 octas. La couche était constituée de stratocumulus avec une base située entre
300 ft et 1 500 ft et pouvant atteindre 1 000 à 2 000 ft. La visibilité, supérieure à 8 km,
était localement réduite sous des averses de pluie jusqu’à 1,5 km. Dans la partie sud
du pays, les nuages couvraient 8 octas du ciel. La base des nuages se trouvait entre
2 000 ft et 5 000 ft et leur plafond dépassait le FL100. Du givrage modéré était signalé
à partir du FL080. Enfin, un front froid traversait rapidement la France d’ouest en est.
Le mardi 5, l’iso 0 °C était située au FL050. Les nuages couvraient 5 à 8 octas du ciel.
La couche était constituée de stratocumulus avec une base entre 1 500 ft et 4 000 ft
et un sommet pouvant atteindre 8 000 à 10 000 ft, laissant place à des altocumulus
dont le sommet dépassait 14 000 ft. La visibilité, supérieure à 8 km était localement
réduite vers 5 km sous des averses de pluie. Du givrage modéré était signalé à partir
du FL065.
Paris
Paris
Avord
Toulouse
Carte TEMSI valide le 04/11 à 6 h 00 UTC,
consultée par le pilote
Carte TEMSI valide le 05/11
à 6 h 00 UTC
et trajectoire aller de l’avion.
et trajectoire retour de l’avion.
2.3 VFR de nuit
Pilot Controlled
Lighting ou
télécommande de
balisage lumineux.
(7)
Règles de l’air
concernant le VFR
de nuit en avion.
(8)
Les cartes VAC indiquent que le service d’information de vol est assuré, en hiver, à
partir de 7 h 30 à Orléans et de 7 h 00 à Bourges. Elles précisent également dans,
les consignes particulières, que ces aérodromes sont chacun équipés d’un PCL (7),
disponible après préavis posé la veille auprès de l’agent AFIS.
La carte VAC de l’aérodrome de Toussus-le-Noble précise que l’aérodrome est interdit
à tout trafic de 22 h 30 à 6 h 00 et réservé aux aéronefs basés de 6 h 00 à 7 h 00.
L’avitaillement n’est pas possible avant 6 h 00.
En VFR de nuit (8), pour un vol de voyage, la réglementation exige le dépôt d’un plan
de vol, la conservation de la vue du sol, un espacement vertical de 1 500 ft avec la
base des nuages, une visibilité supérieure ou égale à 8 km entre les aérodromes de
départ et de destination et l’absence de prévision de précipitations ou d’orage entre
les aérodromes de départ et de destination.
Les enquêtes du BEA ont pour unique objectif l’amélioration de la sécurité aérienne
et ne visent nullement à la détermination de fautes ou responsabilités.
3/4
f-pp131105 / Juillet 2014
3 - ENSEIGNEMENTS ET CONCLUSION
La faible quantité de carburant restante a conduit le pilote à se dérouter et atterrir
en urgence à court de carburant sur un aérodrome non préparé comme aérodrome
de déroutement.
Une forte volonté de réaliser le vol prévu, une faible conscience du risque ainsi qu’un
excès de confiance dans ses capacités ont poussé le pilote à réaliser un vol de voyage
difficile après une préparation insuffisante. Ne tenant pas compte du conseil de
son chef pilote, il a décollé sans disposer des marges de sécurité nécessaires pour
entreprendre le vol.
(9)
http://www.
bea.aero/etudes/
objectifdestination/
objectifdestination.pdf
http://www.
bea.aero/etudes/
pannes.d.essence/
pannes.d.essence.pdf
(10)
Les contraintes personnelles pesant sur un pilote l’incitent parfois à s’affranchir du
cadre réglementaire. La tentation peut notamment être grande si, dans le passé,
celui-ci a déjà enfreint des règles sans encombre et qu’il surestime ses capacités à
gérer une situation difficile.
Les règlements, procédures et consignes n’ont d’autre objectif que d’aider les pilotes
à pratiquer leur activité dans les meilleures conditions de sécurité possibles. Leur
respect permet d’éviter beaucoup de situations de détresse.
Cet événement est à rapprocher des études du BEA « objectif : destination »(9) et « panne
d’essence en aviation générale »(10).
Les enquêtes du BEA ont pour unique objectif l’amélioration de la sécurité aérienne
et ne visent nullement à la détermination de fautes ou responsabilités.
4/4
f-pp131105 / Juillet 2014