L`écotourisme peut-il sauver les espèces menacées ?

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L`écotourisme peut-il sauver les espèces menacées ?
L’écotourisme peut-il sauver les espèces menacées ?
http://abonnes.lemonde.fr/biodiversite/article/2016/03/09/l-ecotourism...
L’écotourisme peut-il sauver les espèces menacées ?
Le Monde.fr | 09.03.2016 à 14h21 • Mis à jour le 09.03.2016 à 14h50 | Par Clémentine Thiberge
Dans un zoo de Singapour, le 26 février. ROSLAN RAHMAN / AFP
Observer les guépards, randonner parmi les orangs-outans ou plonger avec les lions de mer ? Un
choix cornélien pour les amoureux de la nature. A mesure que ces voyageurs se multiplient, les
activités liées à l’écotourisme se diversifient. Mais ce « tourisme vert » est-il bénéfique pour ces
animaux vivant dans les lieux prisés des vacanciers ? Dans l’ensemble oui, répond une étude
menée par l’université australienne de Griffith. Ce travail, publié le 17 février dans la revue PLOS
One (http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0147988) , démontre que l’écotourisme peut faire la
différence entre la sauvegarde ou l’extinction des espèces menacées.
Principale source de financement pour les parcs nationaux et la conservation de la biodiversité à
l’échelle mondiale, l’écotourisme progresse d’environ 20 % par an. Ce mode de voyage, tourné vers
la nature et le développement durable, séduit de plus en plus. Selon une enquête du cabinet
d’études GMV (http://www.developpement-durable.gouv.fr/Le-tourisme-en-quelques-chiffres.html) , 88 % des Français se
disent prêts à agir en faveur de l’environnement lorsqu’ils prévoient des vacances.
Mais en gagnant du terrain, l’écotourisme entraîne un recul des espaces naturels. Infrastructures,
hôtels, transports en 4x4 ou hélicoptère, les conséquences négatives sont nombreuses. « Nous
savons que l’écotourisme s’étend à l’échelle globale, en nombre de visiteurs et en surfaces
protégées. Nous savons également que cette activité peut avoir des impacts positifs comme
négatifs », explique le professeur Ralf Buckley, cosignataire de l’étude.
Effet important sur la préservation des orangs-outans
Alors que des recherches précédentes avaient évalué séparément les effets positifs et négatifs, ce
travail est le premier à développer un modèle calculant le bilan total du tourisme vert et à quantifier
précisément ses impacts sur les espèces menacées. L’équipe australienne a estimé le risque
d’extinction des populations pour neuf espèces, réparties sur cinq continents, par rapport à leur
taille, leur structure et leur habitat, en fonction de différentes intensités d’écotourisme.
Les résultats montrent que l’écotourisme a un effet globalement favorable sur les animaux
menacés : huit des neuf espèces étudiées en bénéficient. Mais cet appui passe par des moyens
différents selon les espèces : installation de réserves pour les guépards, restauration de l’habitat
pour les gibbons et les tamarins, diminution des prédateurs sauvages pour les manchots ou
mesures antibraconnage pour les aras.
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L’effet le plus frappant est observé sur les orangs-outans de Sumatra. Alors que, sans écotourisme,
cette espèce est vouée à s’éteindre, une pratique largement diffusée permettrait la sauvegarde de
cet animal. En adoptant le tourisme vert à grande échelle, les bénéfices seraient suffisants pour
surpasser les impacts de la déforestation et ainsi sauver l’habitat des primates.
Unique point noir de l’étude : le lion de mer de Nouvelle-Zélande. Cette espèce marine est la seule
pour laquelle le tourisme vert a des conséquences globales négatives. Menacé par l’industrie de la
pêche qui diminue ses sources de nourriture, cet animal marin voit sa mortalité infantile augmenter.
La présence humaine liée à l’écotourisme ne fait qu’accroître cet effet, interférant dans la relation
mère-petits.
Implication des populations locales
Pour optimiser les effets de l’écotourisme, l’équipe de recherche insiste sur l’implication des
populations locales, facteur déterminant pour la conservation des espèces. « Les habitudes et les
modes de vie doivent être pris en compte pour mettre en place un écotourisme adapté à la région. »
Les habitants de ces régions, premiers acteurs de la conservation, peuvent maximiser les
ressources provenant des animaux en empêchant, par exemple le braconnage. Car avec
l’écotourisme, ces espèces deviennent intéressantes d’un point de vue économique, certains
touristes allant jusqu’à faire le tour de la planète pour les observer dans leur habitat naturel.
« Les communautés sont prêtes à se battre quand elles se rendent compte que des animaux
comme les tigres valent plus vivants que morts », explique Julian Matthews, président de Travel
Operators for Tigers, une campagne indienne militant pour que l’industrie du tourisme joue un rôle
actif dans la conservation des espèces. En quatre ans, la population de tigres observés a augmenté
de 30 % dans le pays (http://projecttiger.nic.in/WriteReadData/LetestNews/Document
/Tiger%20Status%20booklet_XPS170115212.pdf) , surtout grâce aux efforts de conservation mis en place à l’aide
de l’écotourisme.
Alors, peut-on généraliser ce résultat à l’ensemble des animaux en voie de disparition ? « Il n’y a
pas de modèle universel, tout dépend de l’espèce et du niveau d’intensité d’écotourisme, répond
Ralph Buckley. Il est nécessaire d’étudier chaque espèce pour permettre à l’écotourisme d’évoluer
en faveur de la conservation. »
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