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Groupement de Recherches Economiques
et Sociales
http://www.gres-so.org
IFReDE
&
LEREPS
Université Montesquieu-Bordeaux 4
Université des Sciences Sociales Toulouse 1
Cahiers du GRES
Le Mercosur dans les trajectoires
d'internationalisation des firmes automobiles
Yannick LUNG
E3i,
IFReDE-GRES
GERPISA
Université Montesquieu-Bordeaux IV
Avenue Léon Duguit
33608 Pessac Cedex
[email protected]
Cahier n° 2006 – 03
Janvier 2006
Cahier du GRES 2006-03
Le Mercosur dans les trajectoires
d'internationalisation des firmes automobiles
Résumé
Le papier analyse l’intégration de l'Amérique du Sud dans les stratégies
d'internationalisation des principaux constructeurs automobiles : comme un marché
émergent localisé ? comme une base d'exportation de véhicules vers les pays
industrialisation ? comme une base de conception et de production en direction des autres
pays du Sud ?
Prenant en compte la diversité des stratégies d'internationalisation des firmes
multinationales de l'automobile, le papier appréhende quatre principales dimensions : la
politique produit des firmes sur ce marché ; la localisation des activités de conception de
véhicule ; l'organisation productive avec le développement de la production modulaire) ;
enfin, les évolutions en d'intégration régionale du système automobile au sein de l'espace
sud-américain.
Mots-clé : Industrie automobile – Intégration régionale – Mercosur – Firmes
multinationales – Internationalisation – Brésil – Amérique du Sud
Mercosur in carmakers’ internationalisation trajectories
Abstract
The paper analyses how carmakers integrate the Southern America Cone into their
worldwide strategies: As a local emerging market? As a source for production and
exports towards industrialised countries? As a source for design and export to other
emerging markets?
The discussion about Mercosur’s place in the carmakers’ internationalisation strategies
is developed with specific attention to organisation of their local activities in terms of
ƒ
product policy (specific product or adapted product)
ƒ
design policy (local adaptation of a global product or local design of a specific
product)
ƒ
productive organisation (modular production or the role of suppliers)
ƒ
regional integration (spatial division of labour between countries).
Keywords: Automotive industry – Regional integration – Mercosur –
Multinational Firms – Internationalisation – Brazil – South America
JEL : F14, F23, L62
-2-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
1. Introduction*
L’industrie automobile mondiale a connu une profonde transformation au cours de la
décennie avec la nouvelle phase d’internationalisation, caractérisée par le mouvement dit de
globalisation – mais en fait plutôt de régionalisation – qui s'est traduit par une
interdépendance accrue entre les zones de la Triade (Etats-Unis et Canada, Union Européenne
et Japon) et par la montée des pays émergents (Freyssenet, Lung, 2000). Les marchés
émergents qui représentaient à peine 16,2% de la production automobile mondiale en 1990
sont devenus les premiers producteurs : en 2004, ils représentent 30,7% de la production
mondiale, loin devant les trois zones de la Triade1. Cette montée des pays émergents ne
correspond cependant pas à des formes homogènes et l'on peut distinguer trois types de
configuration (Humphrey, Salerno, Lecler, 2000) : les nouveaux pays comme l'Inde ou la
Chine centrés sur eux-mêmes (Protected Autonomous Market) ; l'intégration directe dans les
zones de la Triade (Integrated Peripheral Markes), comme le Mexique dans l'Alena ou les
PECO dans l'UE ; enfin, les intégrations régionales périphériques (Emerging Regional
Market) dont le Mercosur a été le meilleur exemple au cours de la décennie 90.
Les firmes multinationales de l'automobile ont été les principaux acteurs de cette nouvelle
phase d'internationalisation (Carillo, Lung, van Tulder, 2004), mais elles n'ont pas des
stratégies identiques car celles-ci reposent sur des stratégies de profit différenciées (Boyer,
Freyssenet, 2002 ; Freyssenet, Lung, 2004) qui sont mis en œuvre dans des contextes locaux
spécifiques. Entre les stratégies globales reposant sur des plates-formes mondiales des
constructeurs sloaniens (Ford, General Motors et Volkswagen), le pari de la voiture globale
pour les pays émergents engagé par Fiat ou encore la pénétration progressive des marchés
extérieurs par Toyota, on perçoit que les choix des constructeurs automobiles en matière de
politique produit, d'organisation de la conception et de la production ne sont pas identiques, y
compris dans un même espace comme le Mercosur. Dans cette région, un autre facteur doit
être pris en compte : l'ancienneté de la présence dans la région car celle-ci conditionne les
effets d'échelle et les dynamiques d'apprentissage constitutives des stratégies d'intégration
(Bélis-Bergouignan, Bordenave, Lung, 2000).
Pour appréhender la place du Mercosur dans les stratégies d'internationalisation des
constructeurs automobiles, il est donc nécessaire de distinguer entre d'un côté les firmes
installées, notamment sur le marché brésilien, avant la vague d'investissement des années 90
et, de l'autre, les nouveaux entrants. Quatre firmes ont une présence ancienne en Amérique du
sud : Ford, General Motors (GM) et Volkswagen (VW) qui étaient associés à la politique
automobile mise en œuvre par le gouvernement brésilien dès les années 502 et Fiat qui les a
rejoint dans les années 70 pour y édifier sa principale base productive hors d'Italie.
Avec la reprise de la croissance du marché brésilien au début des années 90, de nombreux
autres constructeurs vont s'y implanter pour produire des véhicules : les Français Renault et
PSA Peugeot Citroën avaient une présence ancienne en Argentine (1959 pour Renault, 1971
*
Ce cahier s'appuie sur le travail minutieux d'étude et d'analyse des évolutions de l'industrie automobile du
Mercosur réalisé par les collègues argentins et brésiliens et régulièrement présentés dans les colloques
internationaux et les publications du GERPISA-réseau international. Les nombreux échanges au sein du réseau
ont joué un rôle essentiel dans la réflexion collective du GERPISA. L'auteur reste responsable des erreurs et
omissions.
1
La progression étant de 2,1 à 3,8% pour les pays du Mercosur pour la même période
2
En fait, Ford et GM sont présents en Amérique du sud dès les années 1920, mais l'activité est limitée à
l'assemblage de quelques milliers de véhicules.
-3-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
pour Peugeot), mais ils s'en étaient désengagé en transférant l'assemblage de leurs modèles à
des entreprises sous-traitantes (CIADEA et SEVEL respectivement). La fin des années 90 a
été marquées par la reprise en main de leurs filiales argentines et, surtout, l'implantation au
Brésil d'où ils étaient absents, mais dans des régions relativement excentrées par rapport au
cœur industriel du pays. Les deux marques de l'actuel groupe DaimlerChrysler décident aussi
de rejoindre le Brésil, Mercedes pour y produire la Classe A, Chrysler le pick-up Dakota.
Quant aux Japonais, leur arrivée est tardive et discrète : si Toyota produit depuis 1959 un
véhicule tout terrain au Brésil, c'est à une faible échelle. Dans la deuxième moitié des années
90, il lance la production d'un pick-up Hilux en Argentine et édifie une nouvelle usine près de
Sao Paulo pour y assembler son modèle phare, la Corolla. C'est aussi dans cette même région
centrale que Honda ouvre une nouvelle unité. Quant à Nissan, il se contente d'assembler des
4x4 sont dans l'usine Ayrton Senna de son partenaire Renault au Brésil.
Ces nouveaux entrants suscitent une réaction des firmes installées : VW réplique par la
production d'un modèle Audi et modernise ses équipements, alors que Fiat se polarise sur la
Palio ; Ford et GM lancent leurs projets Blue Macaw et Amazon pour concevoir un modèle
spécifique pour le Mercosur et ils édifient de nouvelles usines loin de leurs centres
historiques.
Ces implantations récentes des constructeurs sont accompagnées de l'arrivée des
équipementiers qui prennent en charge un part croissante de la production du véhicule. Les
investissements réalisés dans le secteur automobile ont ainsi atteint des records historiques :
16,6 milliards de US $ pour le seul Brésil de 1992 à 2001, soit trois fois plus qu'au cours de la
précédente décennie.
Pour les constructeurs européens, le Mercosur est un enjeu majeur car il s'agit du premier
marché et de leur première base productive hors de l'Union Européenne. Incapable de rivaliser
sur les marchés japonais et nord-américain, Fiat, PSA Peugeot Citroën et Renault - VW dans
une moindre mesure3 - considèrent donc le Mercosur comme une étape stratégique dans leur
stratégie d'internationalisation même si les nouveaux entrants (les Français) n'ont pas les
mêmes atouts que les constructeurs installés Fiat et VW sur ce marché.
C'est loin d'être le cas pour les Japonais préoccupés par la consolidation et l'expansion de
leurs activités en Amérique du Nord, en Europe et maintenant en Chine et qui privilégient leur
présence dans la zone Asie-Pacifique en ce qui concerne les marchés émergents. Sans
négliger cette région, leur présence en Amérique du sud n'est pas au centre de leurs
préoccupations et ils n'opèrent aucun effort pour offrir un modèle spécifique, se contentant de
proposer leurs modèles de base. Dans cette région du monde, on est loin de l'idéal de la
"glocalisation" souvent associé à ces constructeurs. Quant aux constructeurs US Ford et
General Motors, l'Amérique du Sud est évidemment leur premier marché dans les pays
émergents et ils se sont efforcés d'adapter leurs stratégies de plates-formes globales au
contexte local.
Le présent chapitre détaille la façon dont ces firmes multinationales de l'automobile intègre le
Mercosur dans leur stratégie d'internationalisation en se focalisant sur quatre questions qui
reprennent les problématiques des travaux du GERPISA (Boyer, Freyssenet, 2002). Quels
modèles de véhicules sont produits et mis sur le marché dans cette région ? Quelle place tientelle en matière de conception des produits automobiles ? Comment y organisent-ils leurs
activités de production ? S'inscrivent-ils dans le schéma d'intégration régionale dont le
Mercosur est porteur ?
3
VW est présent en Amérique du nord (Alena).
-4-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Identifiant les stratégies différenciées des firmes multinationales, il est organisé de la façon
suivante : la prochaine section met en évidence les hésitations des constructeurs automobiles
en matière de politique produit dans cette région. La suivante s'attache au développement des
compétences locales en matière de conception et de recherche-développement. La section 4
rappelle le rôle majeur du Mercosur dans l'expérimentation des nouvelles pratiques de
production modulaire. Enfin, la dernière section souligne les incertitudes dans la trajectoire
d'intégration régionale du marché automobile sud-américain.
2. Les hésitations des constructeurs automobiles au sein
du Mercosur sur la politique produit
La relation au marché est évidemment cruciale pour un constructeur car ses profits et même sa
survie dépendent de sa capacité à proposer une gamme ou un modèle correspondant aux
attentes du marché. Or un marché en forte croissance comme celui du Mercosur est très
difficile à cerner, ce qui explique les hésitations des constructeurs en matière de politique
produit.
Il s'agit d'un marché segmenté, compte tenu des disparités entre les catégories sociales et les
différents usages des véhicules. Il convient donc d'anticiper les segments nouveaux porteurs
d'une croissance rapide et de proposer une gamme couvrant des besoins diversifiés. Faut il
produire une voiture de petite cylindrée ? un véhicule utilitaire léger ? un modèle différencié?
C'est aussi un marché très instable (Lung, 2000), ce qui pose la question de son étendue
géographique. Faut il viser principalement les pays du Mercosur ? viser l'ensemble de
l'Amérique latine ? les pays du sud des autres continents ? les marchés des pays du nord ?
On peut considérer trois principales politiques produit pour les constructeurs implantés au
sein du Mercosur : la production de modèles conçus pour les pays industrialisés, la production
de voitures globales pour les pays émergents et l'adaptation locale des produits, y compris la
dérivation de véhicules spécifiques pour le marché sud américain.
2.1 Les productions locales de modèles conçus pour les pays
industrialisés
Les premières implantations sont toujours associées à la production locale, moyennant une
adaptation minimale, de produits conçus pour les pays industrialisés, ce qui tient à la fois au
jeu des économies d'échelle et aux économies d'apprentissage : d'une part, les volumes sont
insuffisant pour justifier un modèle spécifique et, d'autre part, les constructeurs localisent des
process qui ont été mis en place et stabilisés dans leurs usines domestiques. Avant l'ouverture
internationale des économies, il était même fréquent que les constructeurs se contentent
d'assembler un véhicule à partir de pièces détachés importés (CKD) ou délocalisent des
équipements ayant déjà été utilisés au nord pour assembler au sud un produit en fin de vie.
Les modèles offerts sur le marché local étaient alors largement obsolètes (comme la VW
Coccinelle), mais ceci était compensé par des prix inférieurs compte tenu de l'amortissement
déjà réalisé des investissements. Ces pratiques étaient largement tolérées, voire encouragées,
dans le cadre des politiques de substitution aux importations car elles permettaient un
approvisionnement local susceptible de favoriser des effets d'entraînement dans l'industrie
équipementière.
L'ouverture internationale des pays du Mercosur a conduit à la disparition des modèles
obsolètes et toutes les firmes multinationales offrent sur le marché sud-américain des modèles
récents qui sont aussi proposés sur leur marché domestique. Les nouveaux entrants produisent
-5-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
ainsi au Brésil ou en Argentine des modèles qui sont au cœur de leur gramme dans leur
marché domestique, qu'il s'agisse des Japonais Honda (Civic) et Toyota (Corolla), ou des
Français Renault (Clio, Scenic) et PSA Peugeot Citroën (Peugeot 206). Les européens sont
particulièrement positionnés sur le segment des monospaces (Mercedes Classe A, Renault
Scenic, Citroën Picasso), mais il s'agit de niches étroites avec au plus 15,000 véhicules
assemblés en 2004. L'essentiel de leur production concerne le segment des petites voitures
pour les Européens (Renault Clio ou Peugeot 206) ou le segment moyen inférieur pour les
Japonais (Corolla, Civic) qui produisent un nombre très limité de véhicules (un ou deux
modèles). Les volumes totaux de production restent, sauf exception, largement inférieurs au
seuil de 100,000 véhicule par an (cf. tableau 1).
Tableau 1 – La production automobile des nouveaux entrants au Mercosur en 2004 (voitures
particulières et véhicules utilitaires légers)
Voitures
particulières
Modèles
DC
Mercedes Classe A
Honda
Civic, Fit
Nissan
Renault
Xtera, Frontier
Peugeot 206, 307, Partner, Boxer
Citroën Picasso, C3, Berlingo, Jumper
Clio (Sedan), Kangoo, Mégane, Scenic, Master
Toyota
Corolla, Hilux
PSA
Véhicules
utilitaires
légers
5 050
56 544
10 196
108 911
7 601
68 067
10 548
53 131
19 355
Source: ANFAVEA, ADEFA
Les constructeurs présents depuis longtemps en Amérique du Sud continuent eux aussi de
produire en faible volume des modèles identiques à ceux qui sont proposés sur le marché
européen (VW Golf ou Polo, Fiat Stilo, Ford Focus, etc.). L'essentiel du volume produit dans
les usines sud-américaines de Ford et GM correspond cependant à des versions plus adaptées
au marché local de leurs véhicules, parfois dérivés de plates-formes globales, ou encore aux
voitures mondiales pour les pays émergents.
2.2 Le Mercosur englobé dans la stratégie de la voiture pour pays
émergents : le projet Fiat 178 et la Renault Logan
Fiat s’est singularisé dans les années 90 en pariant sur la conception et la production d’une
voiture spécifique pour les marchés émergents, la Palio / Siena (Volpato, 2000, 2004). Nul
doute que le marché sud américain était largement présent dans cette stratégie, Fiat étant
implanté en Argentine comme au Brésil depuis de longues années.
Longtemps présent en Argentine par la joint-venture SEVEL créé avec Peugeot en 1980, il
crée sa propre filiale en 1995 et la marque Fiat est la première en nombre de véhicules
assemblés dans ce pays. Il ouvre une nouvelle usine à Cordoba en 1996 d’une capacité initiale
de 120,000 véhicules par an (pouvant être porté jusqu’à 160,000, puis 200,000 à terme) pour
y produire Palio et Siena.
Ces deux modèles vont représenter plus de la moitié de la production automobile du
constructeur italien au sein du Mercosur de 1996 à 2004. En 2002, le cap des deux millions de
-6-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Palio/Siena assemblées en Amérique du Sud est franchi avec un volume annuel moyen de
275,000 sur la période. Les capacités de production se révèlent cependant surdimensionnées,
avec un potentiel de 518,000 voitures par an, soit 391,000 au Brésil et 127,000 en Argentine
(source : Volpato, 2000). Elles sont donc utilisées à moins de 60% après le sommet atteint dès
1997 (440,00 Palio/Siena produites) et l'usine d'assemblage de Cordoba sera est fermée en
2001, le site argentin se repliant sur les seuls organes mécaniques (moteurs et transmissions).
Le modèle global de Fiat pour les pays émergents n'a pas atteint son objectif d'un million de
véhicules par an, les ventes étant largement en deçà, même en Amérique du sud, marché pour
lequel le produit avait été conçu. Il n’a pas complètement remplacé la Uno et ses dérivés
compte tenu d'un prix trop élevé.
Graphique 1 - Les modèles Palio/Siena et Uno dans la production de Fiat au Mercosur 19952004
Unité : milliers de véhicules
800
700
600
500
400
300
200
100
0
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Palio/Siena
Uno
Others
Source : ADEFA, ANFAVEA
D’autres constructeurs, à commencer par Renault avec sa filiale roumaine Dacia, ont relancé
cette stratégie. Mais le constructeur français cible un prix bien inférieur à celui de la Palio
(près de la moitié, autour de 5000 euros) pour une berline de taille moyenne. Ce n’est pas
l’Amérique du sud qui est le premier concerné : lancée en Europe de l’Est à partir de la
Roumanie, la Logan est déjà assemblée en Colombie. Renault annonce qu’il produira des
Logan en carrosseries à deux et trois volumes dans son usine de Curitiba à partir de 2007 : le
marché brésilien recevrait la version à deux volumes et cinq portes, plus adaptée aux goûts
des consommateurs locaux, tandis que la version à trois volumes serait exportée vers
l'Argentine et le Mexique notamment. Avec son nouveau projet du nom de code D200
(véhicule conçu pour la Chine, la Turquie et le Brésil) Fiat n'a pas renoncé et d'autres,
initialement sceptiques devant le pari de Renault, préparent la riposte.
2.3 Les adaptations locales de produits
Longtemps protégée dans le cadre d'une politique volontariste d'industrialisation par
substitution aux importations, l'industrie automobile brésilienne a proposé des modèles
spécifiques dérivés des produits domestiques, notamment la Ford Corcel dérivé d'un projet
-7-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
initialement introduit par Renault4 avant qu'il ne se désengage de Willys Overland. Mais le
plus bel exemple de réussite de la conception locale est le cas de la Gol développée5 au Brésil
et produite depuis 1980.
Depuis 25 ans, la Gol est le modèle phare de VW au Brésil : avec ses dérivés Voyage et
Parati, elle représente les trois quarts de la production du groupe allemand dans les pays du
Mercosur sur la période 1995-2004. Les différentes générations des modèles européens de
VW (notamment Golf, Polo, Lupo) sont conçus pour répondre à l'évolution du marché
européen, ce qui les éloigne toujours plus de la demande sud américaine, d'où une production
locale limitée. Bien que le constructeur allemand ait annoncé régulièrement son remplacement
ou son intégration dans la stratégie de plate-forme mondiale engagée par le groupe (Layan,
Lung, 2004), la Gol survivra car, conçue localement, plus en phase avec les attentes du
marché et moins onéreuse par le prolongement de la durée de vie d'une plate-forme ancienne,
elle est réticente à son intégration dans une plate-forme. En 2005, la quatrième génération de
Gol est ainsi mise sur le marché. Fin 2003, VW a lancé un nouveau modèle, la Fox, en partie
conçu pour les pays émergents, qui s'intègre dans les plates-formes mondiales à partir de la
plate-forme de la Polo. Ce modèle représente 15,9% de la production de VW en 2004. Si l'on
y ajoute la Gol, ce sont donc 75,8% de la production de voitures particulières du groupe
allemand dans le Mercosur qui est basée sur des produits définis par rapport aux attentes du
marché sud-américain.
Les années 2000 sont caractérisées par le lancement de nombreux véhicules spécifiques pour
ce marché, dérivés des plates-formes mondiales des constructeurs, notamment de la part des
firmes états-usiennes Ford et GM dont le comportement mimétique est à nouveau affirmé
(Bordenave, Lung, 2003). Au projet Blue Macaw de GM répond le projet Amazon de Ford,
projets qui s'appuient sur des modèles spécifiques et de nouvelles méthodes de production (cf.
infra). Ces modèles sont développés à partir de la plate-forme de la petite voiture mondiale :
•
Pour GM, c'est la Corsa développée par Opel pour le marché européen qui va se
positionner comme outil principal de conquête du marché sud-américain. Une version
trois corps (sedan) ainsi qu'un pick-up en ont été dérivés et sa plate-forme a surtout servi à
concevoir une version dépouillée, la Celta qui était au cœur du projet Blue Macaw et
produite à 128,500 exemplaires en 2004, qui vise à répondre aux caractéristiques du
marché local. Les trois quarts de la production de voitures particulières GM dans le
Mercosur qui sont ainsi basés sur la même plate-forme.
•
Ebranlé par l'échec d'Autolatina constitué de 1986 à 1995 avec VW, incapable de
bénéficier de la croissance du marché des "carros populares" par l'inadaptation d'une
Fiesta trop européenne, Ford va rejoindre le mouvement en proposant des produits dérivés
de la plate-forme de la nouvelle Fiesta : une version trois corps (Fiesta Sedan) et surtout
un mini-SUV, l'EcoSport conçue pour le marché latino américain.
Sur un marché où la rivalité concurrentielle est exacerbée par l'arrivée de nouveaux entrants
qui, pour la plupart, se positionnent, comme les firmes installées, sur le segment des petites
voitures, les constructeurs ont été conduits à proposer des produits plus proches des attentes
des clients locaux, ce qui s'est traduit par le lancement de nouveaux modèles : au cours de la
décennie 90, 22 nouvelles plates-formes ont été proposées sur le marché brésilien contre 7 au
cours de la décennie précédente (Quadros, Queiroz, 2001). Pour adapter ces modèles ou
dériver des produits spécifiques, il a fallu consolider les compétences locales en matière de
conception automobile.
4
5
Il s'agit d'un modèle dérivé de la R12.
La Gol est un véhicule hybride qui reprend des éléments de différents modèles de VW.
-8-
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
3. Le développement des compétences en matière de
conception et de recherche-développement
Le Brésil est le principal pays de la région qui offre des ressources nécessaires pour favoriser
des activités de conception et de recherche. Le développement de telles compétences
(capabilités) suppose une disponibilité de main d'œuvre qualifiée, d'où l'importance de la
formation des ingénieurs et techniciens, ainsi qu'un environnement scientifique et
technologique permettant de trouver sur place des partenaires efficaces. L'adaptation locale
des produits ou l'accès à des ressources spécifiques imposent un niveau minimum d'activités
de R&D pour pénétrer le marché sud américain. L'automobile représente ainsi 31% de la
recherche industrielle au Brésil et le personnel consacré aux activités de conception et de
recherche est passé de 1% de l'emploi automobile à 2,5% en une décennie, de la fin des
années 80 à celle des années 90 (Quadros, Queiroz, 2001, p.38). Au delà de la seule
adaptation ou "tropicalisation" des véhicules (cf. tableau 2), la dernière période a ainsi été
caractérisée par un renforcement des filiales brésiliennes des firmes multinationales en
matière de développement d'organes mécaniques et de véhicules.
Tableau 2 - La classification des niveaux de compétences technologiques en matière de
développement de véhicule selon Quadros et Consoni
Nationalisation
Adaptation locale des composants du véhicule
Tropicalisation
Adaptation des plates-formes et modèles au marché
Projet partiel de développement
Conception d'une variante dérivée à partir d'un modèle ou
d'une plate-forme globales (exemples pick-up ou trois
corps de la GM Corsa)
Projet intégral de développement
Conception d'un véhicule à partir d'une plate-forme
globale (GM Celta, VW Fox)
Source : Quadros, Consoni, 2006
3.1 Adaptation locale et recherche de compétences spécifiques
Même quand ils s'appuient sur des modèles développés pour les marchés des pays
industrialisés, les constructeurs automobiles sont incités à développer localement des centres
techniques et des compétences en matière de R&D pour adapter leurs produits aux conditions
locales. Il s'agit a minima de travailler sur les matériaux et les composants disponibles
localement auprès de leur fournisseurs pour spécifier les process en fonction des
caractéristiques locales. Cette spécification peut conduire à développer des compétences
propres quand l'environnement technologique offre des ressources originales. On voit ainsi
Renault qui développe une exploration systématique de certaines capabilités en matière de
matériaux ou de technologies environnementales, cette démarche ayant conduit la firme à
chercher à identifier systématiquement les ressources dans les institutions scientifiques et
technologiques du pays (Quadros, Consoni, Quintao, 2005).
Un autre domaine sur lequel le marché brésilien est spécifique a trait à la motorisation,
compte tenu des politiques automobiles des pays qui s'efforcent de limiter la consommation
d'énergie. Le recours à des sources locales d'énergie est un premier argument, la forte
disponibilité en carburant végétal ayant conduit à développer dans les années quatre-vingt des
moteurs à alcool. Ceci suppose une adaptation des systèmes de carburation et de l'ensemble
du bloc moteur jusqu'aux boîtes à vitesses, ce que réalise plus facilement des ingénieurs
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Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
locaux qui peuvent travailler en interaction avec les producteurs de carburant comme avec les
institutions de recherche. Plus récemment, une nouvelle génération de motorisation dite
Flexfuel, combinant de façon variable essence et carburant végétal, est devenu la norme et est
proposée sur la plupart des véhicules offerts sur le marché sud-américain. Les moteurs à
alcool (éthanol) ont ainsi représenté près de 90% des véhicules vendus au Brésil sur la
période 1983-88. Lancées en 2003, les motorisations Flexfuel représentaient déjà 21,6% du
marché brésilien en 2004.
Sur un autre registre, la politique de la voiture populaire "carros popular" initiée par le
gouvernement brésilien (Norberto, Uri, 2000) qui offrait un régime fiscal particulièrement
attractif pour les véhicules équipées d'un moteur de moins de 1 litre de cylindrée a eu un
impact décisif. C'est ce marché des petites voitures de moins de 1 litre qui a décollé dans la
décennie quatre-vingt dix, ces ventes représentant jusqu'à près de 75% du total des ventes de
voitures particulières sur le marché brésilien en 2001 (encore plus de la moitié aujourd'hui).
La croissance des ventes sur le marché brésilien au début des années quatre-vingt-dix repose
quasi-exclusivement sur ces véhicules (cf. graphique 2). Ce type de motorisation est très peu
apprécié en Europe, inexistant aux Etats-Unis ce qui a conduit à développer des compétences
spécifiques sur ce type de petit moteur au Brésil.
Graphique 2 – Les ventes de véhicules de moins de 1 litre de cylindrée sur le marché
automobile brésilien (voitures particulières)
Unité : millier de véhicules
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
1990
1992
1994
1996
Others
1998
2000
2002
2004
< 1000 cc
Source: ANFAVEA
En dehors du moteur, les véhicules produits et commercialisés en Amérique du sud doivent
être adaptés, sur certaines parties sensibles, comme les liaisons au sol et les suspensions, aux
spécificités des infrastructures routières et aux usages locaux des véhicules. Fiat Brésil est
ainsi le centre d'excellence mondiale du groupe pour certains composants de motorisation
(notamment les carburants alternatifs), mais aussi pour le module de suspension (Salerno,
Carneiro Dias, 2001). La prise en compte de la spécificité des attentes des consommateurs
conduit alors à développer des compétences en matière de conception de véhicules pour
proposer des modèles dérivés sur une plate-forme globale.
- 10 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
3.2 Le Brésil, un centre d'excellence en matière de conception de
véhicules ?
Une des variantes que les constructeurs déclinent sur leur plate-forme de petites voitures pour
les marchés émergents est la version trois corps (sedan) dérivée à partir d'un modèle initial
bicorps pour le marché européen. Dès les années 70, Renault avait ainsi conçue en Espagne la
Siete à partir de sa Renault 5. GM et Ford ont ainsi développé une version trois corps (sedan)
de la Corsa et Astra pour le premier et de la Fiesta pour le second, sous la responsabilité des
ingénieurs brésiliens. Ceux-ci ont aussi développé les versions break et pick-up de la Corsa
pour GM alors que ceux de Ford ont été associés à la conception d'un modèle de Sport Utility
Vehicle dérivé à partir de la même plate-forme, EcoSport (même si l'essentiel de la
conception a été fait en Europe, puis aux Etats-Unis).
On se rapproche alors de la conception de modèles de voitures conçus a minima pour les pays
d'Amérique latine, au-delà du seul Mercosur et englobant une partie de l'ALENA (NAFTA)
avec le cas du Mexique qui offre un débouché non négligeable pour des produits adaptés (cf.
infra). Utiliser les compétences brésiliennes pour concevoir un produit adapté aux marchés
émergents, au delà du seul continent américain, constitue probablement l'ambition plus ou
moins avoués de certains constructeurs. Fiat Brésil avait ainsi largement contribué au
développement du projet 178, sous leadership italien, d'autant que le Mercosur devait
représenter la moitiés des ventes de ce véhicule. L'importance de cette zone pour le
constructeur européen (la deuxième base productive après l'Italie) et les compétences acquises
par apprentissage du fait d'une implantation dès les années 70 autorisaient cette participation.
Autre exemple cette fois chez GM : la conception du modèle Celta est principalement de la
responsabilité des ingénieurs et techniciens sud-américains, même si la diffusion de ce
modèle en dehors du continent sud américain n'est pas encore acquise (Dias, Salerno, 2003 ;
Consoni, Quadros, 2003)
Enfin, une dernière évolution tient en la conception très largement brésilienne, même si c'est
en interaction étroite avec les équipes européennes des constructeurs, de modèles lancés
simultanément en Amérique du sud et en Europe : la Meriva pour GM et la Fox pour VW. Il
s'agit certes de véhicules de niche dérivés de plates-formes mondiales (respectivement la
Corsa et la Polo), mais le niveau d'exigences et de compétences nécessaires au développement
de produits commercialisés sur le marché européen atteste du nouveau rôle pris par le Brésil
dans la conception mondiale des gammes des constructeurs.
Dans le cas de la Meriva (Quadros, Consoni, 2006), c'est probablement la surcharge des
tâches de conception des centres européens qui ont conduit à reporter sur la filiale brésilienne
la responsabilité majeure dans le développement de ce produit (70% des heures ingénieurs).
Comme le soulignent Sugiyama et Fujimoto (2000), les trajectoires des firmes sont aussi le
résultat des décisions d'opportunités (small event), du contexte (environnement) en interaction
avec les visions stratégiques et les capacités (capabilities) organisationnelles des firmes. Cela
n'en atteste pas moins de la consolidation des compétences locales grâce aux apprentissages
organisationnels en matière de conception de produit. GM, tout comme Fiat, ont poursuivi
cette orientation tout au long de la décennie quatre-vingt-dix intégrant dans leurs stratégies de
plate-forme mondiale la nécessité de dériver un modèle spécifique pour les pays émergents
favorisant la décentralisation de la conception (Consoni, Quadros, 2003 ; Carneiro-Dias,
Salerno, 2004). Le Centre Technique de Fiat au Brésil employait ainsi plus de 1000
perosnnes, dont 400 ingénieurs en 1999 (Carvaho, 2003, p.16).
Paradoxalement ce sont les constructeurs qui avaient dès les années 70-80 développé des
produits spécifiques, Ford (Corcel) et Volkswagen (Brazilia, Gol) qui ont opéré une forte
- 11 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
centralisation de leurs activités de conception en s'engageant leurs stratégies de plates-formes
mondiales, stratégies qui ne prenaient pas en considération cette spécificité des marchés du
sud (Bordenave, 1998 ; Freyssenet, Lung, 2000). On a pu observer une tendance à la
réduction sensible de leurs activités de conception de Ford et VW en Amérique du sud, le
département Ingénierie de VW se contractant de 1800 à 600 salariés (Salerno, Carneiro-Dias,
2002, p.68). Le constructeur allemand a ainsi vainement tenter de rattacher la Gol à sa plateforme mondiale de la Golf (B2). L'échec de la tentative d'intégration régionale au sein
d'Autolatina qui avait conduit à des modèles hybrides mi-Ford, mi-VW peu acceptés pour le
marché avaient peut-être convaincu les responsables d'un défaut de ressources (de Carvalho,
2001, 2002). Cependant, leur manque de réactivité par rapport à la croissance du marché sud
américain a révélé l'inadaptation de leurs stratégies globales reposant sur l'hypothèse d'une
convergence des marchés (Freyssenet, Lung, 2004). Ils ont fait machine arrière et relancer
leurs activités de conception au Brésil comme en atteste le lancement de la Fox, le
renouvellement de la Gol pour VW. Quant à Ford, c'est la filiale brésilienne qui a assuré
l'essentiel de la conception de sa Fiesta Sedan lancé en 2004 et le constructeur américain a
largement consolidé son centre de recherche dans le complexe de Ford Nordeste, près de
Salvador (Bahia) en recrutant 200 collaborateurs l'an dernier, ce qui portait son effectif total à
près de 400 salariés6. Loin du cœur automobile du Brésil (Sao Paulo), Ford expérimente dans
l'Etat de Bahia de nouvelles organisations de la production.
4. Un terrain d’expérimentation
organisations productives
pour
de
nouvelles
Au sein du Mercosur, le Brésil a été le terrain d'expérimentation de nouvelles pratiques de
production modulaire qui se sont développées avec la croissance très rapide du marché sud
américain au cours de la décennie 90 : la production automobile passe d'un million de
véhicules en 1990 à 2,5 millions en 1997.
Graphique 3 – L'évolution de la production automobile du Mercosur 1990-2004
Unité : millier de véhicules
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Brazil
Argentina
Source : OICA
6
Source: Ford Nordeste Industrial Complex.
- 12 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Cette évolution vers la production modulaire au Brésil a été largement étudiée (Lung, Salerno,
Zilbovicius, Carneiro-Dias, 1999 ; Salerno, 2001 ; Salerno, Carneiro-Dias, 2002). Elle répond
à trois séries de facteurs :
• Au niveau global, le poids croissant pris par les équipementiers dans la conception des
composants et la préparation de sous-ensembles / modules en amont des chaînes
d'assemblage.
• Les risques importants liés à l'implantation dans des pays caractérisés par de fortes
fluctuations sur le plan macro-économique, conduisant les constructeurs automobiles à
réduire leurs investissements propres pour partager ces risques avec les équipementiers.
• L'édification de nouvelles usines de production (greenfield), souvent éloignées du centre
historique (région ABC) avec une présence syndicale faible et une main d'œuvre plus
flexible, ce qui autorise l'expérimentation de pratiques organisationnelles flexibles
innovantes.
L'usine de camions et autobus de VW ouverte à Resende en 1996 a été la première
expérimentation avec une forme très achevée : le consortium modulaire (Fleury, Salerno,
1998 ; Ramalho, Santana, 2002). Dans cette nouvelle usine (greenfield), les équipementiers
réunis sur le site sont en charge du travail direct, préparant les différents modules et les
assemblant eux-mêmes sur la chaîne d'assemblage final. Le constructeur n'assume que le
travail indirect de coordination et de contrôle des activités de production. Trois ans plus tard,
Chrysler ouvrait une usine à Campo Largo s'inspirant du cas de VW Resende pour y produire
un pick-up Dakota. Moins intégré (partial consortium), cette usine se caractérisait notamment
par le rôle important assumé par l'équipementier Dana qui préparait en production synchrone
le châssis (rolling chassis) en assemblant quelques 300 composants, ce qui représentait
environ 30% du coût de production du véhicule. Le faible succès rencontré par ce modèle a
conduit DaimlerChrysler à fermer le site deux ans plus tard, montrant l'avantage de ce type
d'implantation qui réduit les coûts irrécouvrables et permet un désengagement rapide en cas
d'échec.
Malgré leur caractère innovant, ces deux expériences ont cependant une portée limitée compte
tenu du fait qu'il s'agit de véhicules industriels, dont l'architecture est plutôt modulaire et que
la production porte sur des volumes relativement réduits : les capacités annuelles étaient de
40,000 véhicules pour VW et 12,000 pour Chrysler. Les voitures particulières ont, quant à
elles, une architecture intégrée et l'échelle de production est nettement plus importante. C'est
donc une nouvelle étape qui est franchie avec l'introduction des méthodes de production
modulaire, sous une forme affaiblie (le condominium industriel) dans les usines d'assemblage
de voitures particulières.
Le condominium industriel correspond au regroupement des principaux fournisseurs à
proximité de l'usine d'assemblage final pour y préparer leurs composants et certains modules.
La localisation, notamment à travers un parc de fournisseurs dans la contiguïté de l'usine du
constructeur facilite la coordination et l'alimentation en synchrone des chaînes d'assemblage
(Frigant, Lung, 2002), mais la distinction reste marquée entre le constructeur et ses
fournisseurs, notamment dans la gestion de l'emploi. Les nouvelles usines édifiées par les
constructeurs européens dans la décennie 90 se sont toutes structurées sur cette base. Si les
Allemands (VW-Audi, DC Mercedes Class A) avaient déjà introduites ces innovations
organisationnelles en Europe (Larsson, 2002), les Français ont expérimenté au Brésil leurs
premiers parcs de fournisseurs, qu'il s'agisse de Renault ou de PSA Peugeot Citroën. C'est à
partir de leur expérience brésilienne qu'ils ont conçu la mise en œuvre des parcs de
fournisseurs en France.
- 13 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Ce sont finalement les constructeurs états-uniens qui vont franchir un pas supplémentaire en
édifiant de nouvelles usines dont les modes d'organisation qui sont à mi-chemin entre le
condominium industriel et le consortium modulaire. En effet, les équipementiers sont
directement implantés dans l'usine même d'assemblage : il n'y a pas de séparation
géographique entre les firmes, la préparation des composants ou des modules, la prise en
charge de la maintenance ou de la logistique étant assurées dans le même bâtiment, mais les
constructeurs y produisent plusieurs composants et sous-ensembles, ainsi que l'assemblage
final. Il est cependant difficile de distinguer au sein du site les salariés du constructeur et ceux
des équipementiers, les salariés étant régis par la même convention collective. L'intégration
des équipementiers est assurée dès la conception du produit puisque ces expériences ont été
introduites dans le cadre de projets ambitieux associant des produits spécifiques pour le
marché sud-américain et une production modulaire : Blue Macaw pour GM et Amazon pour
Ford. Ces sites ont été localisés dans des régions sans tradition automobile, éloignés du centre
historique au Brésil (la région ABC) vers le sud (Gravatai, Rio Grande do Sul) pour GM et
vers le nord (Camaçari, Etat de Bahia) pour Ford (Lung, 2005), mais aussi éloignés de leur
base domestique, les Etats-Unis. Le projet Blue Macaw permet ainsi à General Motors
d'expérimenter ces principes de production modulaire malgré l'échec du projet Yellowstone
qui visait à introduire ces méthodes de production au Etats-Unis et qui s'est heurté à
l'opposition radicale du syndicat des travailleurs (UAW) devant l'externalisation des activités
de préparation de modules.
Les difficultés économiques du Mercosur à la fin des années 90 ont probablement justifié
l'introduction de tels principes organisationnels dans la mesure où les coûts résultant de la
réduction du volume du ventes ont été en partie reportés sur les équipementiers alors qu'ils
sont supportés par les constructeurs dans les formes de production plus intégrées. L'ampleur
de ce recul a cependant conduit les firmes automobiles à se tourner vers la deuxième modalité
majeure pour gérer l'incertitude de marché (Lung, 2000) : l'exportation par un découplage, au
moins partiel, de la production et des ventes.
5. Les aléas de l’intégration régionale
La création du Mercosur avait pour ambition de favoriser l'intégration régionale des
économies du cône sud-américain et l'industrie automobile a été une des industries
particulièrement concernées par ce projet (Laplane, Sarti, 2004). Avant même qu'elle ne soit
institutionnalisée, Ford et VW ont tenté de développer un tel schéma en s'associant dans une
filiale commune Autolatina constitué en 1986 et en organisant une division régionale du
travail entre leurs filiales argentines et brésiliennes (Bordenave, 1998 ; Fleury, Salerno, 1998).
L'échec de cette fusion, dissoute en 1995 au moment même où le Mercosur se mettait en
place, est révélateur des difficultés d'une telle intégration régionale.
5.1 La division régionale du travail organisée par les firmes
multinationales de l'automobile
Si le Paraguay n'a jamais eu d'activités de production automobile bien que son intégration
dans le régime automobile du Mercosur en 2001 prévoyait des quotas d'exportation jusqu'en
2006 vers ses voisins, l'Uruguay a regroupé pendant plusieurs années des usines de montage
de véhicules compte tenu du régime de protection, activité souvent réalisée par des industriels
locaux travaillant sous licence à partir de collections CKD importées du Brésil ou
d'Argentine. Initialement destinées au marché national, ces productions ont été réorientées
vers l'exportation de certains véhicules niches (comme la Peugeot 306 break) vers les pays du
Mercosur sans que cela ne permette un développement de l'industrie automobile locale, les
- 14 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
volumes portant en moyenne sur moins de 9,000 véhicules par an et ce, pour des marques et
des modèles différents. Après avoir culminé à 15,500 véhicules en 2000 (réexportés pour la
quasi-totalité d'entre eux), ces activités ont quasiment disparus avec les difficultés
économiques de l'Uruguay (les ventes automobiles reculent de 75% entre 1999 et 2002).
Pour les constructeurs automobiles, la division régionale du travail au sein du Mercosur
s'organise entre l'Argentine et le Brésil. Elle repose d'abord sur un principe de spécialisation
entre les usines des deux pays. Hormis Honda et Nissan, tous les autres constructeurs ont en
effet des activités de production dans ces deux pays (cf. tableau 3).
Tableau 3 – Les modèles assemblés en Argentine et au Brésil en 2004
Argentina
Segment*
Small
Passenger
Car
Medium
Passenger
Car
DC
Brazil
Light
commercial
vehicles
Sprinter
Fiat
Focus
Corsa**
Medium
Passenger Car
Marea, Stilo
Doblo, Ducato,
Fiorino, Strada
EcoSport,
Courrier, F250
Ranger
Fiesta, Ka
Gd Vitara
Celta, Corsa
Astra, Vectra,
Meriva, Zafira
Fit
Civic
Honda
Light
commercial
vehicles
Classe A
Palio, Siena, Uno
Ford
GM
Small Passenger
Car
Nissan
Blazer,
Montana, S10,
Corsa pick-up
Frontier, Xtera
PSA
206
307
Partner/Berlingo
C3, 206
Picasso
Jumper, Boxer
Renault
Clio
Mégane
Kangoo
Clio
Scenic
Master
Toyota
VW
Hilux
Polo Classic
Caddy
Corolla
Gol/Parati, Fox,
Polo
Golf, Santana,
Audi A3
Combi
* Les segments correspondent aux voitures d'entrées de gamme, voitures de gamme moyenne et véhicules
industriels légers
**Les modèles soulignés sont assemblés dans les deux pays.
Source : ADEFA, ANFAVEA
On constate ainsi qu'à l'exception de quatre petites voitures 7, les modèles produits dans les
deux pays sont pour la plupart très différents. L'Argentine est caractérisée par une forte
orientation vers les véhicules industriels légers, exemplaires chez DC et Toyota qui
produisent ce type de véhicule uniquement en Argentine alors que leurs berlines sont
assemblées au Brésil. Les difficultés économiques rencontrées par l'Argentine ont accéléré
cette spécialisation, Fiat renonçant à l'assemblage de véhicules pour ne maintenir que la
production d'organes mécaniques ou VW abandonnant la production de sa Gol pour ne laisser
que la Polo Classic.
7
Il y a une spécialisation sur les variantes de ce type de véhicules, comme pour GM où la version pick-up de la
Corsa est produite au Brésil alors que le break est assemblé en Argentine.
- 15 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Si l'on se focalise sur le segment des voitures particulières de gamme moyenne, on constate
une orientation vers les berlines en Argentine (Ford Focus, Peugeot 307 et Renault Mégane)
alors que les monospaces sont produits au Brésil (Citroën Picasso, Renault Scenic). Quant à
GM et VW, ils ont préféré concentrer au Brésil toute la production pour ce segment du
marché.
Cette spécialisation des usines d'assemblage se double d'une spécialisation des usines de
mécaniques. Principalement localisées au Brésil, leurs productions alimentent les chaînes
d'assemblage des deux pays. Deux constructeurs automobiles ont cependant une unité
d'organes mécaniques en Argentine, à Cordoba : Fiat avec la CORMEC, dont les capacités
sont de 270 000 moteurs et 230 000 boîtes à vitesses et qui exporte sa production vers le
Brésil ; VW dont l'usine Transax (avec une capacité de 300 000 de transmissions par an)
exporte l'essentiel de sa production vers son voisin. Ces usines ont récemment bénéficié
d'investissements supplémentaires. Aux flux de moteurs et transmissions s'ajoutent des
échanges croisés de différents composants mécaniques ou de carrosserie entre les usines des
deux pays.
Ces spécialisations favorisent le développement du commerce intra-branche entre les pays
même si l'évolution récente suggère un affaiblissement de l'orientation privilégiée entre les
pays du Mercosur.
5.2 Les échanges automobiles au sein du Mercosur
Le Mercosur est caractérisé par une forte asymétrie entre ses membres : le Brésil représentait
à lui seul plus de 90% de la production automobile en 2004, le solde étant réalisé par
l'Argentine affaiblie par la crise, alors que l'Uruguay a abandonné son activité de montage et
que le Paraguay n'a jamais fait illusion de pouvoir entrer dans le jeu. Certes les deux tiers des
véhicules importés au Brésil proviennent de son voisin, mais ceci ne correspond à une part de
marché d'à peine 2,7% en 2004 et constitue moins de 30% des débouchés extérieurs de
l'industrie automobile argentine. En sens inverse, les exportations brésiliennes représentaient
plus de 35% des ventes automobiles en Argentine, celle-ci n'absorbant qu'à peine 22% des
exportations brésiliennes en 20048.
Ces quelques données suffisent à comprendre les réticences de l'Argentine pour passer à la
politique automobile commune du Mercosur prévue en 2006. Elles traduisent un
affaiblissement récent de la tentative de structuration d'un système automobile intégré entre
les pays de cette zone. L'analyse de l'évolution des échanges automobiles entre le Brésil et
l'Argentine au cours des quinze dernières années fait clairement apparaître une inflexion à
partir de 1998 : alors que les années 90 sont marquées par l'intensification des échanges entre
les deux pays, révélant une interdépendance croissante de leurs industries automobiles, cette
tendance va connaître une brutale inversion à la suite des crises monétaires brésilienne (199899) et argentine (2001-03), ce qui conduit à une réorientation des échanges vers l'ensemble de
l'Amérique latine et notamment le Mexique.
Si l'on considère le cas du Brésil (Tableau 4), le Mercosur ne représentait que 21,2% de ses
exportations automobiles en 2003, largement devancé par le Mexique (35,5% des débouchés
extérieurs) et talonné par la Chine (11,2%)9. La fragilité des économies du cône sud américain
et la volatilité de leurs marchés semblent avoir convaincu les constructeurs à décentrer une
8
En nombre de véhicules. Sources : ANFAVEA et ADEFA
Deux remarques tempèrent ce constat : d'une part, le redressement de l'économie argentine en 2004 a
certainement rééquilibré ces flux ; d'autre part, en raisonnant en valeurs, l'intégration des échanges de
composants plus intense au sein du Mercosur relativise l'écart par rapport au Mexique.
9
- 16 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
orientation trop marquée sur le Mercosur pour viser des marchés plus diversifiés, mais en
ciblant les pays émergents : ceux de l'Amérique latine, mais aussi l'Afrique du Sud et la
Chine.
Tableau 4 – Les exportations automobiles du Brésil en 2004
Unités : nombre de véhicules
Areas
Export
South America
179 604
Mercosur
113 850
Central America
10 893
Mexico
190 455
Total Latin America
380 952
Others areas
155 028
South Africa
29 469
China
60 131
Total
535 980
Source : ANFAVEA
Share
33,5%
21,2%
2,0%
35,5%
71,1%
28,9%
5,5%
11,2%
100,0%
Faute de données exhaustives et homogènes pour l'ensemble des pays, l'analyse de cette
évolution repose sur les échanges automobiles entre les trois principaux pays latinoaméricains : l'Argentine et le Brésil pour le Mercosur et le Mexique à titre de témoin. Le
tableau 5 retrace l'évolution des flux commerciaux à partir de trois dates : 1990, 1998 et 2003.
Elle utilise une base de données homogènes10.
On constate très clairement une explosion des échanges automobiles entre l'Argentine et le
Brésil avec la formation du Mercosur : ils sont multipliés par 41 de 1990 à 1998, progressant
de 110 milliards de US $ à plus de 4,5 milliards. La part de l'Argentine dans les exportations
brésiliennes passe de 4,2% en 1990 à 42,4% en 1998 où leur valeur culmine à près de 2
milliards de US $. Réciproquement le Brésil absorbe cette même année près de 90% des
exportations automobiles de son voisin (pour 2,6 milliards de US $) contre 27,1% au début de
la décennie. On retrouve aussi une forte progression des échanges dans les importations des
deux pays, mais elle est moins forte en termes relatifs (les échanges intra-Mercosur
représentent environ 40% des importations dans les deux pays en 1998) car les importations
automobiles en provenance d'Europe, notamment en termes de composants, restent encore
équivalentes aux échanges intra-Mercosur.
10
Il s'agit de la base CHELEM-CIN du CEPII pour la période 1990-2003 (source: http://www.cepii.fr/). Le
secteur, qualifié de "filière" ("chain"), considéré par cette base est en fait plus large que l'industrie automobile
puisqu'il intègre aussi les échanges commerciaux pour d'autres activités : les cycles, motocycles et le matériel
ferroviaire roulant. L'industrie automobile n'en constitue pas moins le cœur et on peut considérer que c'est elle
qui guide l'évolution des flux commerciaux. La filière est décomposé en trois sous-ensembles (product
categories) : Eléments de véhicules automobiles (châssis, carrosseries, pièces détachées) / Vehicle components ;
Voitures particulières, motocycles et cycles / Cars and cycles (including motorcycles) ; Véhicules utilitaires et
autres matériels de transport terrestre véhicules commerciaux / Commercial vehicles and transport equipment
(including public transport vehicles and railway equipment).
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Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
Tableau 5 – Evolution des échanges automobiles entre l'Argentine et le Brésil de 1990 à 2003
Vehicle Exports to
Brazil
Mexico
From
Argentina
Value
Share
Value
Share
1990
45,9
27,1%
4,0
2,3%
1998
2611,1
88,6%
21,4
0,7%
2003
598,7
41,9%
348,5
24,4%
Argentina
Mexico
From
Brazil
Value
Share
Value
Share
1990
63,6
4,2%
30,7
2,0%
1998
1955,4
42,4%
201,1
4,4%
2003
874,7
16,1%
1448,9
26,7%
Source : CHELEM-CIN
Les crises sud américaines vont provoquer une contraction brutale des flux automobiles dans
la région : en cinq ans, les échanges entre l'Argentine et le Brésil sont réduits de plus des deux
tiers en valeur, se réduisant à moins de 1,5 milliards US $ en 2003. Du coup, les firmes
automobiles sont amenées à se redéployer vers de nouveaux marchés et c'est en grande partie
le Mexique qui va prendre le relais du Mercosur. Alors que les exportations vers ce pays sont
très marginales à la fin des années 90, elles vont connaître une forte croissance tant pour le
Brésil qui voit ses débouchés s'effondrer en Argentine : en 2003, le Mexique absorbe 26,7%
des exportations automobiles pour un montant de 1,5 milliards de US $ dépassant l'Argentine
(875 millions de US $). Cette évolution concerne aussi l'Argentine, les débouchés extérieurs
offerts par le Mexique étant presque aussi importants que ses ventes chez son voisin. Si on
s'intéresse aux seules exportations de voitures particulières, le Mexique est le premier marché
tant pour l'Argentine que pour le Brésil.
Pourtant, ces échanges automobiles ne sont pas réciproques car les exportations automobiles
en provenance du Mexique restent très limitées (moins de 2% des importations des pays du
Mercosur). La période actuelle est donc marquée par une très forte incertitude et l'on peut
s'interroger sur le caractère durable du redéploiement des échanges automobiles provoqué par
les crises économiques : s'agit-il d'une évolution provisoire, comme on en trouve de
nombreux exemples en regardant l'évolution des échanges automobiles en Amérique du sud
sur longue période ? Le maintien des outils de production des constructeurs automobiles en
Argentine laisse à penser qu'un recentrage est possible. Mais la crise a pu aussi révéler des
opportunités en conduisant les constructeurs à trouver de nouveaux débouchés : le
prolongement de l'orientation vers le marché mexicain ouvrirait la voie à une connexion entre
l'Alena et le Mercosur confortant la perspective de la grande Amérique. A moins que ne
s'esquisse un autre scénario correspondant à un commerce automobile entre pays du Sud
associant l'Amérique du sud, le Mexique, l'Afrique du Sud ou encore la Chine. Dans une telle
situation d'incertitudes, nul doute que les politiques automobiles des pays du Mercosur
pourront infléchir ces évolutions.
Conclusion
Le Mercosur n'a pas été une source importante de profit pour les constructeurs au cours de la
dernière période. Dans de nombreux cas, leurs activités de production en Amérique du sud
sont à l'origine de déficits chroniques, ces pertes étant parfois en partie compensées grâce aux
profits liés au financement à crédit des ventes de véhicule (la finance captive), comme dans le
- 18 -
Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
cas de Ford (Laplane, Sarti, 2002). Le comportement mimétique des firmes multinationales de
l'automobile dans l'implantation de nouvelles usines au Brésil a conduit à l'apparition de
surcapacités de production, aggravées par la conjoncture défavorable liées aux crises
financières et monétaires des économies sud-américaines. Dans ce contexte, on comprend les
hésitations des firmes automobiles en matière de politique produit ou quant à la définition de
l'étendue géographique des marchés automobiles. Leur présence dans le Mercosur est un
investissement de long terme qui s'appuie sur le développement de compétences locales en
matière de conception automobile et sur l'expérimentation de nouvelles pratiques productives.
L'absence de contraintes dans leur présence, comme elles en subissent en Inde ou en Chine et
qui les a conduit à s'associer à des partenaires locaux11 et la forte rivalité concurrentielle
favorise la recherche de nouvelles solutions. L'Amérique est ainsi devenu un espace majeur en
matière d'innovations de produit comme de process pour l'industrie automobile mondiale
(Boyer, 1998 ; Layan, 2006).
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11
L'Inde s'est engagé récemment dans une libéralisation plus extensive.
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Mercosur’s place in carmakers’ internationalisation strategies
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Cahiers du GRES
Le Groupement de Recherche Economique et Sociales (GRES) réunit deux centres
de recherche :
- IFReDE (Institut Fédératif de Recherches sur les Dynamiques Economiques),
Université Montesquieu-Bordeaux IV
- LEREPS (Laboratoire d'Etudes et de Recherche sur l'Economie, les
Politiques et les Systèmes Sociaux), Université des Sciences Sociales
Toulouse 1
www.gres-so.org
Université Toulouse 1
LEREPS – GRES
Manufacture des Tabacs
21, Allée de Brienne
F - 31 000 Toulouse
France
Tel. : +33-5-61-12-87-07
Fax. : +33-5-61-12-87-08
Université Montesquieu-Bordeaux IV
IFReDE – GRES
Avenue Léon Duguit
F - 33 608 Pessac Cedex
France
Tel. : +33-5-56-84-25-75
Fax. : +33-5-56-84-86-47
Cahiers du GRES (derniers numéros)
2005-13 : DARAUT Sandrine, L’apprentissage interactionnel : entre performances individuelles et
performances collectives d’expérimentation
2005-14 : GAUSSIER Nathalie, P. LAROQUE, N. CUPERLIER, M. QUOY, P. GAUSSIER, Cognitive maps in
spatial economics: a multidisciplinary approach
2005-15 : BONIN Hubert, Esquisse d’une histoire de l’esprit d’entreprise en France
2005-16 : SAINT-JEAN Maïder, Polluting emissions standards and clean technology trajectories under
competitive selection and supply chain pressure
2005-17 : LUNG Yannick, The link between the diversity of productive models and the variety of capitalisms. A
review of the literature and contextualisation using the car industry as a case study
2005-18 : BERROU Jean-Philippe, CARRINCAZEAUX Christophe, La diversité des capitalismes et les pays
d'Europe centrale et orientale, une analyse statistique
2005-19 : COLLETIS Gabriel, DIEUAIDE Patrick, Vers une ré-institutionalisation du rapport salarial centrée
sur la question des compétences. Un nouveau chantier pour l'approche en termes de régulation
2005-20 : JEANNIN Philippe, Politique de la recherche. Le cas des sciences humaines et sociales
2005-21 : LACOUR Claude, VIROL Stéphane, Politique régionale européenne : nouveaux fondements,
nouvelles frontières ?
2005-22 : TALBOT Damien, Une compréhension institutionnaliste de la proximité organisationnelle: le cas
d’EADS
2005-23 : DANG NGUYEN Godefroy, VICENTE Jérôme, Quelques considérations sur l’aménagement
numérique des territoires : le rôle des collectivités locales dans le déploiement des infrastructures de
l’économie numérique
2005-24 : BLANCHETON Bertrand, Montesquieu économiste
2005-25 : GALLIANO Danielle, ROUX Pascale, The evolution of the spatial digital divide: From internet
adoption to internet use by french industrial firms
2006-01 : LAYAN Jean-Bernard, L’innovation péricentrale dans l’industrie automobile : une gestion
territoriale du risque de résistance au changement
2006-02 : VICENTE Jérome, DALLA PRIA Yan, SUIRE Raphaël, The ambivalent role of mimetic behaviors
in proximity dynamics: Evidences on the French “Silicon Sentier”
2006-03 : LUNG Yannick, Le Mercosur dans les trajectoires d'internationalisation des fimes automobiles
La coordination scientifique des Cahiers du GRES est assurée par Alexandre MINDA (LEREPS) et Vincent
FRIGANT (IFReDE). La mise en page est assurée par Dominique REBOLLO.

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