Responsabilité éditoriale : les infractions de presse
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Responsabilité éditoriale : les infractions de presse
Le mot du juriste Responsabilité éditoriale : les infractions de presse Le titulaire d’un site Internet est, au sens de la loi, un éditeur de service de communication publique en ligne. Il est assujetti, à ce titre, à la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, adaptée en 2004, aux services de communication en ligne par une loi dite "pour la confiance dans l’économie numérique". Ces lois instituent tant la liberté de la presse que celle de la communication publique en ligne comme des "libertés fondamentales". Cette règlementation cherche à concilier deux principes de valeur constitutionnelle la liberté de la presse et le droit à réparation. Un encadrement de l’usage de cette liberté d’expression est inscrit dans la loi dans le but de garantir les libertés individuelles, la protection de la réputation et des droits d'autrui, tel que : la mise en place d’une obligation de transparence des services en lignes permettant au public d’identifier l’identité des personnes responsables de la publication ; la mise en œuvre d’un droit de réponse ; l’institution d’un régime de responsabilité en cascade garantissant l’identification à coup sûr d’un responsable ; la définition précise d’une liste limitative d’infraction de presse. L’obligation de transparence La loi de 2004 reprend pour l’Internet les obligations traditionnelles de transparence de la presse écrite ou audiovisuelle. Les éditeurs professionnels de services en ligne sont tenus de mettre à la disposition du public : s'il s'agit de personnes physiques : leurs nom, prénom et domicile ; s'il s'agit de personnes morales : leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social ; le nom du directeur de la publication ; un responsable du droit de réponse ; le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse de l'hébergeur. Les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication en ligne peuvent ne tenir à la disposition du public, pour préserver leur anonymat, que le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse de l'hébergeur. Le droit de réponse Toute personne physique ou morale dispose d'un droit de réponse dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation auraient été diffusées dans le cadre d'une activité de communication au public en ligne. Le demandeur au droit de réponse doit présenter sa demande dans les 8 jours suivant la diffusion du message. La réponse doit être "diffusée de manière à ce que lui soit assurée une audience équivalente à celle du message". La diffusion de la réponse doit intervenir dans un délai maximum de 30 jours à compter de la date du message contesté. La responsabilité en cascade En tant que services de création et production de contenus mis à disposition du public, les opérateurs de services offerts sur Internet sont soumis au régime de la responsabilité éditoriale dite "en cascade". Lorsque l’une de ces infractions est commise sur ou par les réseaux, sont considérés comme responsables, de manière hiérarchique et successive : le directeur de publication désigné au sein du fournisseur de service ; à défaut l’auteur du message incriminé (un particulier éditant son site Web personnel, ou même un individu identifié participant à un groupe de discussion) ; ou à défaut l’entité chargée de produire la médiatisation informatique du message. Chaque éditeur de site Web doit avoir un directeur de la publication. Il est présumé que c'est le propriétaire du site s'il s'agit d'une personne physique et le représentant social de la École supérieure de l'éducation nationale Page 1 sur 3 www.esen.education.fr Le mot du juriste société, de l'association ou de l'établissement public, s'il s'agit d'une personne morale. Mais il sera toujours possible qu’un tiers puisse être nommé expressément. Ce régime de responsabilité est limité aux seuls cas où "le message incriminé a fait l’objet d’une fixation préalable à sa communication au public". Il doit s'agir d'un document enregistré et non diffusé "en direct". Cette disposition a été imaginée pour dispenser de responsabilité les personnes qui réalisent des émissions radio ou de télévision en direct et qui ne sont pas en mesure de contrôler d’avance ce qui s’y déroule. À défaut de cette fixation préalable, seul l’auteur de l’infraction sera responsable, en vertu du droit commun. Dans le cadre des forums non modérés "a priori", des messageries conviviales, des listes de diffusion, si les messages accessibles au public constituent des infractions de presse, les personnes incriminées sont les auteurs du message et non le directeur de la publication, puisqu’il qu’il n’y a pas de "fixation préalable". Mais le fournisseur du service peut être complice si l’élément intentionnel est établi (en attirant par exemple l’attention du public sur des occasions de débauche ou en favorisant des échanges diffamatoires ou injurieux). La conséquence de ce régime qui incrimine le directeur de la publication réside dans l’obligation pour les sites internet de désigner et d’identifier vis-à-vis du public, les personnes susceptibles d’être mises en cause au titre de cette responsabilité éditoriale. Enfin, cette responsabilité ne peut pas inquiéter le simple prestataire de service technique (opérateur Télécom, hébergeur ou fournisseur d’accès au réseau n’accomplissant aucune fonction éditoriale. Les infractions de presse La sanction des infractions dites "de presse", visant à la protection de l'ordre public, sont toutes précisément recensées dans le code pénal. Elles peuvent être classifiées en trois grandes catégories : Les infractions indépendantes des résultats : la provocation à divers crimes et délits suivis ou non d'effets et plus précisément la provocation aux atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité des personnes, aux intérêts fondamentaux de la nation, aux actes de terrorismes, l'incitation au vol, l'apologie des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité ainsi que la négation de l'existence de ces crimes ; la provocation à la discrimination à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ; Les délits d’opinion : l’atteinte à l’autorité d’un chef d’État même étranger ; la diffusion de fausses nouvelles, la divulgation d’un dossier d'instruction et l’atteinte à l’indépendance et la dignité de la justice, l'outrage envers une personne chargée d'une fonction publique… ; Les délits concernant la protection des personnes : la publication d'informations concernant l'identité des mineurs ayant quitté leurs parents ou le suicide de mineurs ; la diffamation ou l'injure envers une personne ou un groupe déterminé, l’atteinte à la vie privée, à la représentation des personnes, la mise en péril des mineurs par diffusion de messages à caractère pornographique ou violent… l’atteinte à la mémoire des morts et la dénonciation calomnieuse, les informations relatives aux victimes de viols ou d'attentats à la pudeur. La répression de ces diverses incriminations varie de manière générale entre une peine d’un an à trois ans d’emprisonnement. Deux infractions de presse sur Internet méritent de retenir notre attention, en raison de la fréquence de leurs commissions : La diffamation La diffamation est toute imputation ou allégation d’un fait portant atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un groupe d’individus. La diffamation est punie de 12 000 euros d'amende. Le moyen de défense consistant à rapporter la preuve de la vérité du fait communiqué. École supérieure de l'éducation nationale Page 2 sur 3 www.esen.education.fr Le mot du juriste L'injure Il s’agit des termes de mépris, invective, ou expression outrageante ne renfermant l’imputation d’aucun fait. L'injure commise envers les personnes est punie 12 000 euros d'amende. Si l'injure a été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur nonappartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, le maximum de la peine d'emprisonnement sera de six mois et celui de l'amende de 22 500 euros. L’existence d’une provocation préalable peut constituer un fait justificatif. École supérieure de l'éducation nationale Page 3 sur 3 www.esen.education.fr