La Nouvelle politique de la monnaie et du crédit

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La Nouvelle politique de la monnaie et du crédit
La Nouvelle politique de la monnaie et de crédit de la Banque
Centrale de Etats de l’Afrique de l’Ouest
Par : Union Monétaire Ouest Africaine
Publication : Octobre 1989
17 pages
Depuis le 1er juillet 1975, date d'entrée en vigueur de la politique monétaire
issue de la reforme des institutions de l'Union Monétaire Ouest Africaine1
intervenue en 1973, de profondes mutations ont affecte aussi bien
l'environnement international que les économies des pays de l'Union.
L 'environnement mondial est devenu plus incertain, du fait notamment de la
conjonction de perturbations dans le système monétaire international et de la
montée des innovations financières, conduisant à des modifications importantes
dans les méthodes de gestion de la monnaie.
Au plan intérieur, les Etats membres de l'Union, à l'instar d'autres pays en voie
de développement, ont engage des le début des années 1980 des politiques
d'ajustement et de restructuration afin de faire face à la crise économique et
financière.
Dans ce contexte, l'adaptation des instruments de gestion de la monnaie et du
crédit dans l'U .M.O.A. est apparue nécessaire.
Les réflexions menées à cet effet au sein de l'U .M.O.A. auxquelles ont été
associes la communauté bancaire, les opérateurs économiques, le monde
universitaire et certains partenaires de I'extérieur, ont mis en relief trois
exigences majeures :
-
l'indispensable réduction du rôle de la monnaie centrale au profit d'une
mobilisation accrue de l'épargne intérieure ;
-
la mise en harmonie des règles de gestion monétaire avec l'organisation
de l'activité économique et le cadre de l'environnement international ;
-
la recherche de mécanismes flexibles de régulation monétaire associant le
relâchement des contraintes administratives à un renforcement de la
1
L’Union Monétaire Ouest Africaine regroupe sept Etats : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le
Niger, le Sénégal et le Togo.
surveillance bancaire, dans le cadre d'une libéralisation graduelle du
marche du crédit et tenant compte des contraintes spécifiques aux pays
de l'Union, notamment l'appartenance à une zone ouverte ainsi que la
fragilité des structures économiques et financières .
Se fondant sur ces considérations, les instances compétentes de l'Union, le
Conseil d' Administration de la B.C.E.A.O et le Conseil des Ministres de
l'U.M.O.A, ont apporte des aménagements appropries a la politique monétaire
en leurs sessions extraordinaires du 31 juillet 1989 et du 1er août 1989 tenues à
Lomé. Au cours de leurs réunions des 18 et 19 septembre 1989, ces instances
ont adopté les nouvelles directives de politique générale de la monnaie et du
crédit, ainsi que les règles d'intervention de la Banque centrale.
quel est le nouveau dispositif de la politique monétaire et quelles sont les règles
d'intervention de la Banque centrale ?
I.
Les Nouveaux instruments de politique monétaire
La nouvelle politique monétaire s'appuie désormais sur des règles et des
instruments permettant :
-
d'assurer un meilleur contrôle de la liquide globale de I'économie ;
-
de promouvoir la mobilisation de I'épargne ;
de veiller à la qualité des crédits distribués en favorisant le financement
des secteurs porteurs de croissance .
De plus, la réglementation bancaire sera révisée afin de renforcer I'organisation
et la surveillance de I'activité bancaire.
L'objectif est de contribuer au processus d'ajustement et de restructuration des
économies des Etats de I'U .M.O.A. en créant des conditions appropriées pour
assurer le financement sain et durable de la croissance et du développement.
Dans cette perspective, les contrôles quantitatif et qualitatif des crédits, la
politique des taux d'intérêt et une surveillance efficace du système bancaire,
revêtent une importance particulière.
Le Contrôle de la liquidité globale de I'économie
La sauvegarde de la valeur de la monnaie commune est essentielle pour
assurer les conditions d'un financement sain de l'économie. Aussi, importe-t-il
de veiller à la position des réserves de change et à l'équilibre des comptes
extérieurs de l'U.M.O.A. A cet égard, la fixation d’objectifs d’avoirs extérieurs
minlmum nécessaires à une couverture satisfaisante de la monnaie demeure
une exigence fondamentale dans la conduite de la politique monétaire et en
particulier dans le contrôle de la liquidité globale de l'économie.
Les concours de l'lnstitut d'émission au système bancaire seront soumis, quelle
que soit la nature des risques portes par ce dernier, à un plafonnement normatif,
tout comme les concours à l'Etat, le niveau des interventions monétaires de la
Banque centrale devant être constamment compatible avec les objectifs d'avoirs
extérieurs fixes.
Toutefois, la limitation des concours de l'lnstitut d'émission ne peut, à elle seule,
permettre une maîtrise satisfaisante du débit monétaire.
En effet, compte tenu des effets de transmission de l'ensemble des
financements , bancaires sur la situation des paiements extérieurs et sur
l'évolution des prix intérieurs, un contrôle rigoureux du crédit intérieur et de ses
composantes apparaît indispensable. Pour ce faire, la Banque centrale
continuera de recourir durant une période transitoire, à l'encadrement du
crédit. Ce système sera réaménagé en vue d'en atténuer les éventuels effets
pervers mais couvrira désormais les crédits de campagne qui financent la
commercialisation des produits agricoles locaux ainsi que les crédits bancaires
à l'Etat principalement en faveur du Trésor public.
Ultérieurement, le système des réserves obligatoires, mécanisme de portée
structurelle et moyen d'action indirecte de régulation monétaire, devra se
substituer à l'encadrement du crédit.
Le contrôle qualitatif du crédit
La qualité de la distribution du crédit par les banques et les établissements
financiers fera l'objet d'une attention particulière. A cet effet, les banques auront
a exercer pleinement leurs responsabilités en ce qui concerne la surveillance de
la qualité de leurs emplois dans le respect des règles d'orthodoxie financière.
Le régime des autorisations préalables auquel sont soumis les crédits bancaires
à partir d'un certain seuil restera en vigueur pendant une période transitoire.
Toutefois, pendant cette période au terme de laquelle ce régime sera remplacé
par un système d'accord de classement plus souple, la Banque centrale
examinera les demandes d'autorisation préalable sur la base des seuls critères
financiers.
Par ailleurs, la politique dirigiste d'orientation sectorielle des crédits bancaires
est abandonnée .
Il reste cependant que, afin de favoriser dans chaque Etat le financement de
secteurs juges prioritaires, des incitations devront être recherchées par
notamment des dispositions fiscales et financières ainsi que la mise en place
des structures d'appui comme les fonds de bonification, les fonds de garantie,
les mécanismes d'assurance et d'assistance, etc.
La politique des taux d'intérêt et la promotion de l'épargne
Le rôle des taux d'intérêt dans des économies ouvertes sur l'extérieur, et
caractérisées par l'importance des besoins de financement, est capital pour
renforcer la stabilité monétaire et améliorer la structure de l'épargne .
En effet, outre l'impérieuse nécessité de mobiliser l'épargne, essentielle pour
assurer le financement sain de ces économies, la politique des taux d'intérêt
doit contribuer au processus d'ajustement et de restructuration notamment en
créant les conditions susceptibles de favoriser la collecte de toutes les
ressources financières et leur utilisation optimale à l'intérieur de l'Union.
Le nouveau dispositif des taux d'intérêt repose ainsi, sur une politique
dynamique et flexible.
Les taux de la Banque centrale fixes en fonction des objectifs poursuivis dans
l'Union et des contraintes de l'environnement extérieur s'articulent comme suit
depuis le 2 octobre 1989 :
-
Taux du marche monétaire ;
-
Taux d'escompte, supérieur aux taux du marché monétaire pour les
concours monétaires de l'lnstitut d'émission ;
-
Taux spécial indexé sur le taux des avances du marché monétaire au jour
le jour pour les concours aux Etats prévus par les statuts de I'lnstitut
d'émission.
Le taux d'escompte préférentiel institue en 1975 est donc supprime. Ce taux
avait en effet introduit des distorsions dans I'allocation optimale des ressources
disponibles et inciter les banques à recourir de façon soutenue à la monnaie
centrale.
Les nouvelles conditions de banque reposeront sur une grille simplifiée.
-
Pour les conditions débitrices, seul a été fixé un taux plafond qui concerne
toutes les catégories de crédit.
-
S'agissant des conditions créditrices, elles seront fonction notamment de
la durée des dépôts, l'objectif étant de favoriser les placements les plus
longs et de consolider I'épargne.
En outre, afin de renforcer le dispositif des taux d'intérêt, d'accroître les flux
financiers vers la zone d'émission de la B.C.E.A:O et d'accélérer le rapatriement
des recettes d'exportation, les conditions des transferts émis par les banques
ont fait l'objet d'un aménagement substantiel ; en particulier ont été supprimées
les commissions de transferts à l'entrée et à la sortie payées par les banques à
la Banque centrale.
Par ailleurs, complément indispensable de la politique des taux d'intérêt, le
marché monétaire, qui devra plus que par le passe contribuer à I'utilisation des
ressources des Etats membres à I'intérieur de I'U.M.O.A., sera redynamisé.
Ainsi, sera organisé le recyclage intégral des ressources avant toute
intervention de la monnaie centrale. De plus, les établissements financiers
actuellement admis au réescompte seront emprunteurs sur le marche
monétaire. II faut noter également que dans la perspective d'une évolution vers
un véritable marché monétaire, les prêts interbancaires seront librement mis
en place sous réserve d'en informer la Banque centrale a posteriori.
Ces dispositions devraient notamment favoriser le maintien ainsi que I'utilisation
optimale des ressources financières à l'intérieur de l'Union et éviter les
placements à l'extérieur des excédents de trésorerie bancaire. A cet égard, les
dispositions antérieures relatives à la surveillance des avoirs des banques à
I'étranger ont été maintenues.
Enfin, la promotion et la mobilisation de I'épargne nécessiteront, outre une
politique des revenus appropriée, une adaptation des institutions bancaires afin
de favoriser I'émergence d'un véritable marché financier .
La surveillance bancaire
Des orientations particulières ont été définies par les organes compétents de
I'U.M.O.A. qui mettent un accent particulier sur la nécessité d'une surveillance
rigoureuse des banques et établissements financiers. Ainsi, le renforcement de
I'organisation et du contrôle de l'activité bancaire dans l'U.M.O.A. conduira à
une modification fondamentale des dispositions actuelles avec notamment la
création d'une Commission Bancaire à l'échelle de I'U.M.O.A.
II
Réaménagement des règles d’intervention de la banque Centrale
Les interventions de la Banque centrale en faveur des Trésors nationaux
comme des banques et établissements financiers revêtiront le caractère de
ressources d'appoint destinées à la couverture de besoins conjoncturels et
temporaires de trésorerie. A cet égard, des règles ont été édictées en vue de
préserver la flexibilité des concours de l'lnstitut d'émission et d'assurer à ces
derniers des contreparties saines par l'exigence d'une solvabilité notoire, aussi
bien des institutions de crédit recourant aux concours de la Banque centrale que
des bénéficiaires des crédits bancaires.
Le réaménagement apporte à ces règles vise un double objectif :
renforcer la qualité du portefeuille de l'lnstitut d'émission afin d'améliorer la
couverture de l'émission monétaire,
contenir le volume des concours de la Banque centrale en particulier les
financements monétaires du Trésor et de la commercialisation agricole.
La procédure de refinancement
Les nouvelles dispositions découlent du principe selon lequel les concours de la
Banque centrale devraient être considérés comme des concours d'appoint pour
la couverture des seuls besoins sains de trésorerie des établissements de
crédit.
Ainsi, dans la limite du maximum d'intervention de la Banque centrale en faveur
des établissements de crédit fixe par son Conseil d'Administration, les
refinancements adossés sur des effets déposés en garantie sont effectués à un
guichet unique. Sur le marché monétaire, les besoins de trésorerie des banques
et établissements financiers1 sont d'abord couverts par l'utilisation des
ressources disponibles sous forme d'avances assorties du taux du marche
monétaire. Le recours aux concours monétaires de la Banque centrale à son
taux d'escompte permet de faire l'appoint.
Les règles d'admissibilité des crédits au refinancement de la Banque
centrale
Les supports aux opérations de refinancement doivent être constitués d'effets
ou valeurs garantis par deux signatures notoirement solvables, celle de
l'établissement sollicitant le concours de l'lnstitut d'émission et celle du
bénéficiaire du crédit bancaire.
La solvabilité de l'établissement de crédit sollicitant le concours de la
Banque centrale constitue une préoccupation essentielle du fait de son
importance pour la qualité des contreparties de l'émission monétaire et la valeur
de la monnaie.
1
Il s’agit des établissements financiers actuellement admis au refinancement de la B.C.E.A.O c’est-à-dire les
établissements de financement de vente à crédit et les établissements de crédit-bail.
Aussi, tout établissement de crédit, pour être admissible au refinancement, doitil respecter les ratios prudentiels réglementaires relatifs à la solvabilité,
notamment ceux concernant le capital minimum, les fonds propres par rapport
aux risques, la division des risques et le coefficient de trésorerie .
Si la signature de l'établissement cédant constitue la première garantie du
refinancement, il n'en demeure pas moins que la solvabilité de l’entreprise
bénéficiaire de crédit ainsi que le bon dénouement des financements
constituent les compléments indispensables à la sécurité des engagements.
A cet égard, la qualité des signatures des bénéficiaires de crédit fera l'objet d'un
examen attentif et d'une surveillance permanente sur le plan de la solvabilité et
de la qualité du crédit. Au plan pratique, pour l'admissibilité des signatures dans
son portefeuille, la Banque centrale procède, sur la base de leur situation
financière, au classement de ces signatures.
En ce qui concerne la durée des crédits mobilisables, il convient de noter que
comme par le passe, les crédits à court terme d'une durée de 2 ans au plus et
ceux à moyen terme de 2 à 10 ans, demeurent mobilisables.
De plus, pour encourager le financement des investissements, les nouvelles
dispositions prévoient que les crédits à long terme n'ayant plus que 15 ans à
courir pourront être mobilises auprès de l'lnstitut d'émission.
Par ailleurs, par souci de simplification et aussi en raison de la procédure de
refinancement par les avances garanties, les quotités différenciées de
mobilisation des crédits à moyen et long terme sont supprimées. La part
mobilisable de tous les crédits, quel que soit leur terme, est portée à 90 % du
montant de l'encours réel.
Enfin, la quotité maximale de refinancement en faveur de chaque
établissement de crédit reste fixée à 35 % des emplois. Désormais seront pris
en considération pour le calcul de ce ratio, l'ensemble des créances de la
Banque centrale sur l'établissement concerne, y compris les crédits de
campagne, les concours au titre du marche monétaire local et des crédits
avalisés par l'Etat.
Les conditions de financement de la campagne de commercialisation des
produits agricoles locaux
Les crédits destinés à la commercialisation des produits agricoles locaux sont
désormais soumis aux mêmes conditions de financement que les crédits
ordinaires : conditions de taux, quotité mobilisable, quotité maximale de
refinancement, plafonnement, etc.
Le financement de la commercialisation des produits agricoles locaux est
assure dans le cadre d'un schéma de financement global élaboré par le Comité
National du Crédit et approuvé par le Conseil d' Administration de la B.C.E.A.O.
Cette approche met l'accent sur la nécessité d'affecter les crédits de campagne
exclusivement à la couverture des besoins sains de la commercialisation et
d'assurer un dénouement normal des crédits de l'espèce.
En outre, pour le contrôle des crédits de campagne, une attention particulière
sera accordée à la vérification des contreparties réelles en fonction des
différentes phases de la commercialisation à savoir : les achats primaires, le
stockage et les exportations.
Le financement monétaire des Trésors nationaux
Le financement monétaire des Trésors nationaux exerce des pressions sur la
monnaie et le crédit, pouvant ainsi conduire à des effets indésirables sur la
situation des paiements extérieurs et à une réduction des possibilités d'accès
des banques aux refinancements de l'lnstitut d'émission.
Il a paru donc important d'assurer une maîtrise des concours monétaires aux
Trésors nationaux. Pour ce faire, trois principales dispositions ont été retenues :
-
l'indexation des taux applicables à ces financements sur les conditions du
marche monétaire, l'objectif étant d'inciter les Etats a recourir de plus en
plus à la mobilisation de ressources financières, de préférence aux
facilites monétaires ;
-
la limitation de l'utilisation des concours monétaires aux Trésors, en
fonction des autres sources disponibles de financement des opérations de
l'Etat, tout en contenant cette utilisation dans le plafond statutaire
détermine sur la base des dernières recettes fiscales nationales
constatées ;
-
le renforcement de la coordination des politiques budgétaires et
monétaire, grâce à l'instauration d'une concertation permanente et étroite
entre les gestionnaires de ces politiques et d'une façon plus générale à la
coordination graduelle de l'ensemble des politiques économiques des
Etats membres de l'Union.
C'est en prenant conscience qu'une politique monétaire, pour garder toute son
efficacité, doit constamment s'adapter aux exigences et contraintes nées des
mutations de l'environnement intérieur et extérieur, que les Autorités monétaires
de l'Union ont apporte les aménagements dont l'essentiel a été ci-dessus
développé.
Ces réaménagements traduisent une nouvelle approche du rôle de la monnaie
dans la réalisation des objectifs de la politique économique et de
développement des Etats membres.
Moins que par une participation directe et active au financement du
développement des Etats, c'est beaucoup plus par des moyens souples et
indirects que la politique monétaire pourra contribuer efficacement au
financement sain et harmonieux des économies, tout en préservant la valeur de
la monnaie.
Tel est le défi que les nouvelles règles d'intervention de la Banque centrale et
les nouveaux instruments de la politique monétaire de l'Union doivent relever,
Ces règles et instruments sont entres en vigueur depuis le 2 octobre 1989.
Toutefois, avec tout le réalisme nécessaire, les Autorités compétentes de
l'U.M.O.A. ont juge opportun de prévoir une période transitoire pour le respect
de certaines dispositions. Cette période devra être mise à profit par les banques
et les agents économiques pour s'adapter au nouvel environnement
institutionnel par la mise en oeuvre de mesures appropriées de restructuration
et de réhabilitation.
Descripteurs :
Intégration Régionale,
Monétaires, Systèmes
Circulation Monétaire.
Contact :
Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO)
Politique Monétaire, Réserves
Monétaires, Marché Monétaire,
Avenue Abdoulaye Fadiga X Albert Sarrault
BP : 3159 Dakar RP
Fax : 823-57-57
Dakar-Sénégal

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