Présenté par Maurice Enguéléguélé, Institut Africain de la

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Présenté par Maurice Enguéléguélé, Institut Africain de la
L’AGENDA 2063 DE L’UNION
AFRICAINE :
COMMENT EST-IL EN PHASE AVEC
LA POSITION COMMUNE DE
L’AFRIQUE SUR L’AGENDA DE
DÉVELOPPEMENT POST 2015?
Présenté par Maurice Enguéléguélé,
Institut Africain de la Gouvernance /
IAG, Dakar (Sénégal)
FORUM ACORD
L’Afrique post 2015 – Réfléchir sur la position
commune de l’Afrique
L'AGENDA 2063: QU’EST-CE QUE C’EST?
¢  L’Agenda
2063 est à la fois l’expression d’une
vision et un plan d'action. C'est un appel à
l'action endogène de tous les segments de la société
africaine pour profiter du momentum actuel (5% de
croissance économique en moyenne depuis 2007,
stratégies macro-économiques saines, progrès en
matière de gouvernance, changements dans
l’architecture internationale du développement avec
l’émergence des BRICS et l’augmentation des flux
d’IDE) afin d’établir une croissance inclusive et
assurer la transformation socio-économique du
continent.
¢  L’Agenda
2063 traduit la volonté de l’Afrique, unie
autour d’un programme de développement commun
qu’elle se donne et parlant d’une seule voix, de se
positionner comme nouvel acteur global (dimension
cognitive de l’Agenda 2063)
¢  Dans
la déclaration solennelle sur les 50 ans de
l'OUA/UA, les Chefs d’Etat et de Gouvernement
de l’Union Africaine, tout en reconnaissant les
succès antérieurs et les défis subsistant, se sont
engagés à parvenir à ces objectifs à travers des
progrès dans huit domaines clés :
- le panafricanisme et la renaissance africaine;
¢ 
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— 
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— 
— 
- la lutte contre le colonialisme et le droit à
l'autodétermination des peuples encore sous
domination coloniale;
¢  - l'intégration régionale;
- le développement économique et social
- la paix et la sécurité;
- la gouvernance démocratique;
- la maîtrise par l'Afrique de son destin;
- et l'affirmation de la place de l'Afrique dans le
monde.
Ils se sont par ailleurs engagés à intégrer ces
idéaux et objectifs dans les plans nationaux de
développement et dans un programme global de
transformation économique et sociale de
l'Afrique sur lequel doivent être alignés tous
les objectifs de développement du continent,
y compris l’agenda de développement
post-2015.
Ce cadre global est l'Agenda 2063, qui est
encore en cours de finalisation (le Zero draft a été
publié en Février 2014),
¢  L’Agenda
2063 est le fruit d’un effort collectif et
d’un vaste processus consultatif entre les
principales institutions (UA, CERs, BAD, CEA,
PNUD, ACBF, …) et parties prenantes du
développement de l’Afrique (y compris les
organisations de la société civile, les jeunes et les
femmes).
¢ 
L’Agenda offre à l’Afrique l’occasion de
déterminer à nouveau son destin. Il s’inspire de
la vision de l’Union Africaine d’une Afrique
intégrée, prospère, en paix avec elle-même,
indépendante, conduite par ses citoyens et
capable d’être une force dynamique sur la
scène internationale.
POURQUOI ADOPTER UN PROGRAMME
SUR 50 ANS ?
¢  L'horizon
de 50 ans est, sans aucun doute, une période
de planification extrêmement longue. Est-ce un choix
réaliste ? Comment peut-on établir un plan approprié
dans le contexte de changements extrêmement rapides
tant au niveau mondial que continental ? Quels sont les
avantages d'une telle planification à long terme ? Telles
sont, entre autres, les questions clés que se posent
plusieurs personnes.
¢  Le
choix de 50 ans doit être appréhendé de manière
symbolique, dans le cadre du cinquantième anniversaire
de la création de l'OUA et compte tenu de la nécessité,
pour le continent, de faire le bilan de ses réalisations et
de définir sa vision ainsi que ses objectifs à long terme.
¢  L'objectif
de l'Agenda 2063 est de planifier et
organiser la trajectoire de développement de
l'Afrique sur une base endogène et
appropriée pour les 50 prochaines années,
tirant profit des leçons apprises au cours des 50
dernières années ainsi que de l’expérience des
précédents plans continentaux de développement
(plan d’action de Lagos, Traité d’Abuja, NEPAD,
…), s'appuyant sur les progrès actuels et tirant
parti des opportunités stratégiques qui s’offrent à
l’Afrique.
¢  Cinq
grandes opportunités stratégiques, qui
constituent autant d’axes de la transformation
socio-économique du continent, sont, à cet effet,
identifiées:
¢  Le
Capital humain: Dans les années à venir, le
continent connaîtra une croissance
démographique unique. En 2050, la population
africaine aura doublé, la moitié des Africains
vivront dans les villes et le continent sera la
seule région du monde où la population en âge de
travailler est en croissance. Cette population
africaine en âge de travailler surpassera celle de
la Chine et atteindra 1,1 milliard d’individus en
2040.
¢  Ce
boom démographique représente une occasion
pour l'Afrique de tirer profit du dividende
démographique, caractérisé par la baisse des
taux de mortalité et l'augmentation de
l'espérance de vie.
¢  L'Afrique
a déjà réalisé des avancées dans le
prolongement de l'espérance de vie. Il y a
cinquante ans, cette dernière n’atteignait 50 ans
que dans seulement six pays; aujourd'hui, on ne
compte plus que 11 pays dans lesquels
l’espérance de vie ne dépasse pas 50 ans.
Cependant, l'Afrique souffre toujours du fardeau
que représentent les maladies endémiques et/ou
épidémiologiques. Le VIH/sida a dans certains
cas inversé les tendances positives de l'espérance
de vie dans plusieurs pays.
¢  Pour
que le dividende démographique se réalise,
la création d'emplois doit accompagner la
croissance de la population.
¢  La
création d’emplois décents et à forte
productivité particulièrement chez les jeunes
dépend de compétences en science, technologie et
en innovation. Dans cet esprit, l'éducation doit
être un secteur prioritaire. Plus encore, les efforts
pour améliorer la qualité de l'éducation, le taux
de réussite et l'égalité des sexes, doivent être
poursuivis et renforcés.
¢  La gestion optimale de sa dotation en
ressources naturelles par l’Afrique est le
second moteur de la transformation socioéconomique identifié par l’Agenda 2063. Le
continent est en effet exceptionnellement doté en
ressources minières (or, fer, pétrole, gaz, bauxite,
titane, cuivre, diamants, coltan, tantalite,…) et
naturelles (forêts, terres arables, eau, ressources
halieutiques, …).
¢  Les
travaux d’économétrie les plus récents
montrent que si 72% des Africains vivent dans
un pays où les rentes de ressources extractives
représentent plus de 2% du PIB et si , au cours
des dix dernières années, on estime que 25% de
la croissance économique de l'Afrique a été
imputable à l’augmentation du prix des matières
premières, la forte dotation de l’Afrique en
ressources naturelles n’a pas entraîné son
enrichissement.
¢  Au
contraire, elle a été la source de son
appauvrissement (via notamment les flux
financiers illicites), de phénomènes de mal
gouvernance et de crises ayant souvent dégénéré
en conflits (RDC, …).
¢  Pour
l’agenda 2063, il est clair qu’une gestion
optimale de ses ressources naturelles sera un
jalon décisif dans l’industrialisation de l’Afrique
ainsi que dans sa capacité à financer son propre
développement et de se libérer de l’emprise de
l’aide.
¢  La
paix et la sécurité constituent deux autres
moteurs du développement identifiés. Si les
conflits interétatiques ont quasiment disparu en
Afrique depuis la fin des années 1990, la sécurité
et l’Etat de droit ont connu une détérioration
depuis 2010. Les nouvelles menaces
transnationales et les conflits impliquant des
acteurs non étatiques sont en hausse.
¢  Par
ailleurs, au lieu de constituer un facteur
d’affermissement de la démocratie, les élections
conduisent sont désormais sources de crises et
tensions qui dégénèrent parfois en conflits. Même
dans les pays qui ont à première vue des pouvoirs
légitimes, les risques de déstabilisation et
conflictualités sont importants en raison de
fragilités institutionnelle et/ou de faiblesse du
leadership. Pour l’Agenda 2063, paix/sécurité et
développement sont deux faces d’une même
monnaie, qui se conditionnent et
s’enrichissent mutuellement. Cela explique
que les Chefs d’Etat et de Gouvernement aient
fixé dans la déclaration sur le Cinquantenaire
2020 comme année du silence des armes en
Afrique et la sécurité humaine comme priorité.
¢  Avant
dernier moteur de changement identifié,
l'intégration régionale est depuis toujours une
aspiration pour l'OUA/UA, des Communautés
économiques régionales (CER) et reflète
la
tendance globale actuelle. L'économie mondiale
s’articule en effet désormais autour de nouveaux
pôles de croissance régionaux.
¢  Une
approche pragmatique et axée sur les
résultats de l'intégration régionale africaine
pourra créer des marchés sous régionaux
connectés où les biens, les capitaux et les
personnes se déplaceraient facilement au delà
des frontières. Dans ces conditions l'Afrique sera
bien placée pour adopter une approche commune
dans les négociations relatives au commerce ainsi
qu’à l’investissement.
¢  En
mettant en œuvre leur robuste agenda
d’intégration régionale, les pays africains
réduiront le risque d'échec résultant d’accords
commerciaux séparés au plan international
(APE, …) et commenceront à substituer le
commerce et l’IDE à l'aide bilatérale et
conditionnelle.
¢  La
réalisation de l'intégration régionale aidera le
continent à corriger la fragmentation de ses
réseaux d'infrastructures, renforcer son
approvisionnement en énergie, développer sa
stratégie d'industrialisation en profitant
pleinement de la compétitivité de ses produits de
base (dans l'agriculture, l'exploitation minière,
etc).
¢  Elle
rendra également possible une gestion
optimale de la dotation en ressources naturelles
du continent. Pour ces raisons, l'Union Africaine
et les Etats membres se sont engagés à
accélérer le programme d'intégration
régionale à travers la création d'un marché
commun à l’horizon 2017.
¢  De
manière transversale à tous ces moteurs, se
trouve le défi de la gouvernance redevable et
de développement. La mise en œuvre de cette
dernière est une précondition essentielle pour la
réalisation de la transformation socio-économique
de l'Afrique et pour le bien-être de ses citoyens.
¢  La
gouvernance de développement assure
l’allocation optimale de ressources limitées,
l'inclusion de tous les secteurs de la société y
compris les femmes et les jeunes, l’équité, la
formulation et la mise en œuvre de politiques
efficaces ainsi que la qualité de la prestation en
matière de programmes, projets et fourniture de
services.
¢  La
redevabilité réfère à la transparence et à
l'intégrité dans le secteur public et la gestion
économique, ainsi qu’au
renforcement de
l'efficacité dans la réponse aux et demandes
besoins des citoyens.
¢ 
La gouvernance de développement et la
redevabilité sont étroitement liées et se
complètent mutuellement dans un cercle
vertueux qui renforce la participation politique,
consolide la dynamique des taux de croissance,
assure la mise en œuvre des politiques
macroéconomiques transformatives et renforce
l'inclusion de toutes les catégories sociales,
notamment les jeunes et les femmes.
¢  Ce
cercle vertueux nécessite par ailleurs pour
être réalisé la construction d’Etats capables
et développementistes.
QUELLES ÉTAPES POUR LA MISE EN ŒUVRE?
¢  En
termes opérationnels, la mise en œuvre de
l'Agenda 2063 se décline en plans à court terme
(10 ans), à moyen terme (10-25 ans) et à long
terme (25-50 ans).
¢  Pour les leaders Africains, la CAP est donc bien
une étape et un outil de la mise en œuvre de
l’Agenda 2063. La Présidente du Libéria l’a
encore confirmé récemment à Abuja, lors de la
conférence conjointe des Ministres de l’économie
et de la planification de l’UA et de la CEA. Le
schéma ci-dessous illustre cet état de fait.
LE CADRE DE MISE EN OEUVRE
¢  L’Agenda
2063 prévoit un cadre de mise en œuvre
qui est guidé par un certains nombre de principes:
—  - La continuité (éviter les duplications, créer des
effets d’entraînement, adapter les cadres de
développement existants);
—  - L’appui et le renforcement des plans
nationaux de développement;
—  - L’inclusivité;
—  - Le respect de la diversité;
—  - Le renforcement de l’intégration régionale;
—  - L’approche centrée sur les résultats
LE SUIVI, L’EVALUATION ET LE REPORTING
¢  L’Agenda
2063 requiert un dispositif robuste de
suivi, évaluation et de reporting afin de s’assurer
de son effectivité (objectifs limités, concrets,
précis et mesurables; cibles; priorités;
indicateurs)
¢  Ce
dispositif est pensé comme devant être
complémentaire de ceux des Etats Africains en
matière de planification stratégique à long et à
moyen terme, ainsi que de ceux des
Communautés Economiques Régionales.
Quelques grands principes sont proposés pour
structurer ce dispositif:
— 
— 
— 
— 
- La priorité à l’approche basée sur les
résultats, avec une responsabilité assignée à
toutes les parties prenantes aux différentes
échelles de gouvernance (continental, régional,
national, local);
- L’inclusivité (avec un accent particulier sur
l’implication des jeunes, des femmes, des
populations vulnérables sur l’évaluation de la
mise en œuvre de l’Agenda 2063); ;
- Le rôle central des systèmes d’évaluation
participative nationaux;
- La maîtrise par l’Afrique et les pays Africains
de la production de leurs statistiques
LE FINANCEMENT DE L’AGENDA
2063
¢  La
capacité des Etats Africains à financer l’Agenda 2063
et leur engagement à le faire est une des préconditions
majeures à son effectivité.
¢  Un
examen rapide des programmes de développement
Africain des 50 dernières années montre qu’ils ont tous
été tributaires de leur déficit de financement ou de la
fausse prémisse qu’ils pouvaient l’être à travers l’aide au
développement.
¢  De
ce double point de vue, l’Agenda 2063 propose un
changement de paradigme en prévoyant le
financement de l’Afrique par les ressources de
l’Afrique.
¢  La
mobilisation des ressources intérieures des
Etats Africains doit être priorisée;
¢  Les financements extérieurs et l’aide au
développement doivent compléter (et non
précéder) ces ressources intérieures;
¢  Des sources novatrices de financement du
développement de l’Afrique doivent être
identifiées (exemple: la contribution de la
diaspora);
¢  La lutte contre les flux financiers illicites en
provenance d’Afrique doit permettre de mobiliser
des ressources additionnelles;
¢  Les institutions financières Africaines et le
secteur privé organisé Africain doivent jouer un
rôle clef dans ce processus.
EN CONCLUSION: QUELQUES ELEMENTS
ILLUSTRANT L’ALIGNEMENT DE LA POSITION
COMMUNE DE L’AFRIQUE SUR L’APRES 2015
SUR L’AGENDA 2063
¢  La
vision commune à l’origine des deux Agendas;
¢  Le
contexte d’élaboration;
¢  La
démarche d’élaboration et la centralité de
l’appropriation;
¢  La
priorité accordée à la mise en œuvre et aux
résultats concrets pour le bien être des populations.
Merci
Institut Africain de la Gouvernance
Dakar, Sénégal