L`analyse de Partita et Valse d`Amal Guermazi

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L`analyse de Partita et Valse d`Amal Guermazi
Université Paris-Sorbonne (Paris IV)
UFR Musique et Musicologie
Cours Musiques et environnements technologiques : analyse/création 2,
Evelyne GAYOU/Ina-GRM
Analyse de la partie « Partita » et « Valse » de l’œuvre
«symphonie pour un homme seul » (1950)
De Pierre Shaeffer (en collaboration avec Pierre Henry)
Etudiante : Amal Guermazi
MASTER 2
Décembre 2012
1- Introduction :
Cette étude se propose d’analyser la partie « Partita » et « Valse »
de l’œuvre
«symphonie pour un homme seul » du compositeur français, considéré comme le père de la
musique concrète et expérimentale Pierre Shaeffer, né le 14 Août 1910.
La «symphonie pour un homme seul » a été composée en 1950, en collaboration avec
Pierre Henry, faisant partie du style de musique concrète. Elle a été enregistrée au Studio
d'essai de RTF la Radiodiffusion française, sur des disques vinyl.
La version d’origine est monophonique, elle comportait 22 mouvements et durait environ 80
minutes. Ultérieurement, cette version a été réduite en 1951 par Pierre Henry et c’est la
version qu’on connaît aujourd’hui.
Elle se présente sous une suite de courts mouvements cernés entre une à trois minutes,
chacun développant une forme clairement dessinée. L’œuvre intégrale dure, 21 minutes 22 s.
Entièrement, elle comporte 12 Mouvements organisées dans l’ordre suivant :
Prosopopée 1 (2'53''), Partita (1'10''), Valse (0'54''), Erotica (1'17''), Scherzo (2'39''), Collectif
(0'55''),
Prosopopée 2 (0'58''), Eroïca (1'51''), Apostrophe (2'20''), Intermezzo (1'53''),
Cadence (1'05''), Strette (2'58'').
Pour une analyse attentive au produit final, mais aussi aux racines de sa formation,
nous avons envisagé la production autant que la réception, pour une analyse qui ne soit ni
partiale, ni unilatérale. Il convient ainsi d’imaginer un modèle qui combine une esthétique de
la production et de la réception, qui étudie leur interaction dialectique. En effet, une telle
stratégie nous évite de retomber dans le débat de l’intentionnalité de l’artiste-producteur, et de
la subjectivité de l’analyste-récepteur.
Pour ce faire, on s’appuiera dans notre analyse sur des commentaires de Pierre
Schaeffer en ce qui concerne la conception de son œuvre, également, nous optons à se référer,
dans cette étude, aux caractéristiques physiques du sonore, relevées par l’écoute, et
principalement par les représentations temporelles en forme d’onde et fréquentielles en
spectrogramme.
L’étude sera étalée sur deux parties: la première partie traite le mouvement « Partita »
et la deuxième partie traite le mouvement « Valse ». Chacune de ces parties comporte trois
sous parties : La première offre une présentation générale du matériau sonore, la deuxième
explique la segmentation et les catégories « sonores » qui ont été identifiées, et à partir
desquelles nous avons établi notre analyse. Elle présente également des explications au sujet
des notations et des « symboles » graphiques utilisées et leur rapport avec les
«caractéristiques sonores » (ou spectromorphologiques), la forme graphique, et la couleur, etc.
Puis, le troisième traitera d’un point de vue analytique l’extrait.
Cette étude est aussi complétée, en annexe, par un support d’écoute de « Partita » et de
« Valse » avec l’Acousmographe1.
2- De « Partita » :
2-1 Présentation générale du matériau sonore :
Avant toute analyse, procédons au relevé des indications dévoilées par le titre de cette
partie : « Partita ». Idiomatiquement, le mot « partita » en langue italienne signifie jeu.
Musicalement, il s’agit d’une forme musicale d’œuvre instrumentale, comportant plusieurs
sections. La partita est généralement destinée à un petit nombre d’exécutants (en général un
ou deux) et à leurs instruments respectifs.
Elle en a la richesse du langage et la force expressive. On établit donc que c’est une forme
concertante pour instrument seul, étant le plus souvent conçue pour clavier, notamment, le
piano.
Effectivement, dès la première écoute de cet extrait, l’usage d’une unique source sonore
tout le long de cet extrait semble légitime. En effet, on remarque particulièrement l’utilisation
exclusive du piano, ce qui justifie l’appellation « Partita » mais, ce qui a retenu mon attention,
c’est qu’on entend des variations sur les timbres du piano. On constate qu’on oscille au sein
d’un seul instrument entre cordes pincées et cordes frappées.
En effet, dans le but de trouver des timbres différents, les deux compositeurs ont eu
recours à des variations sur le timbre. Paradoxalement, la nature de leur matériau, l’utilisation
qui en est faite, les structures perçues, tout semble les distinguer davantage. En effet, s’ils ont été
réunis, malgré leur divergence, dans une même partie, c’est parce qu’il pourrait exister un lien
esthétique entre eux.
2-2 Segmentation et catégorisation :
Pour cette analyse esthétique, en plusieurs étapes, on a eu recours premièrement à une
approche descriptive. Il s’agit de greffer des points de repère, et puisqu’on est dans une sorte
de linéarité dans l’extrait :
1
L’Acousmographe est un logiciel développé à l’Ina-GRM sur plate-forme Macintosh et PC. Il permet, à partir
d’un fichier son, d’obtenir une représentation physique sous forme de sonagramme et d’annoter l’oeuvre à l’aide
d’éléments textuels ou graphiques.
on a essayé de cerner les événements, à l’aide d’une représentation graphique sur
acousmographe. On a tenté de repérer les matériaux afin de trouver une observation
pointilleuse.
Au sujet des critères de la représentation, et dans le but de catégoriser les événements,
on aura recours évidement à des formes et des couleurs. Nous avons détaillé les familles de
sons dans les tableaux suivants par parties, tout en essayant de respecter, dans le choix des
graphiques, la spectromorphologie des sons.
Pour ce faire, on admet conventionnellement qu’on attribuera des tons chauds aux sons issus des
cordes frappées, ainsi que des tons froids pour les sons dérivés avec un effet des cordes
pincées.
N.B : puisque l’œuvre est monophonique, on a choisi de la traiter par Acousmographe, sur un
seul cadre.
Ce type d’analyse nous offre une première approche synthétique de l’extrait. Par
ailleurs, on évite une éventuelle dispersion du regard. Elle nous a servi pour un marquage
d’éventuelle narration, ou figures de base avec une présentation compacte et dense des
informations. Cette manière apporte la lumière sur les idées accumulées d’une façon
exhaustive. Elle donne un luxe de détails sur l’articulation entre les parties, les transitions,
l’organisation… Il s’agit en quelque sorte d’une analyse formelle.
2-3 Analyse détaillée :
A l’issue de cet extrait, on remarque une prééminence d’un système plus ou moins tonal,
du fait qu’on a commencé et terminé en ré mineur, et en suivant le développement, qui lui,
est, grosso modo, dans la même tonalité. On est face à une préservation des régularités de la
musique classique. Mais, en même temps, dans certains passages, on sent aussi une recherche
dans la musique sérielle ou généralement, dans la musique du XXème siècle.
L’aspect concertant est très présent dans cet extrait. Ça se manifeste au niveau des phrases
rapides qui à leur tour reflètent un caractère de virtuosité ou au moins des particularités de
possession de grand talent, une grande habileté dans le domaine artistique.
Par ailleurs, on aperçoit une recherche de timbres différents, en jouant sur un seul
instrument, néanmoins, on découvre deux types de cordes : celles frappées et celles pincées.
Il nous semble ainsi pertinent de passer, même brièvement par une analyse fonctionnelle
selon la loi de cohérence thématique :
il s’agit souvent d’une succession de caractères différents mais de même tonalité et le plus
souvent de structure identique. Cette variation a eu lieu à travers l’ornementation, parfois
l’imitation (l’emploi massif des sillons fermés), la transformation (filtrage et agencements des
sons par le mixage), et les ressemblances indirectes (variations de vitesse et diffusion à
l'envers).
L’évolution thématique de cet extrait a conduit à la résolution thématique par une
trajectoire thématique, on distingue une influence réciproque entre le thème et ses dérivés.
3- De « Valse » :
3-1 Présentation générale du matériau sonore :
Avant toute analyse, procédons au relevé des indications dévoilées par le titre de cette
partie : « Valse ». Le mot « Valse » provient du verbe allemand “ Walzen“ qui signifie se
rouler. En musique, il s’agit d’une danse de salon standardisée sur rythme ternaire (3/4). C'est
une danse de couple dans laquelle les partenaires se tiennent enlacés et tournent sur euxmêmes en glissant. Elle s'exécute de plusieurs manières. On distingue la valse lente, la plus
ancienne, et la valse viennoise, rapide. La caractéristique de la valse est le marquage des trois
temps, avec un accent sur le premier avec un nombre. Ainsi, elle se construit par période de
huit ou seize mesures. A partir du XIXème siècle, la valse a connu également un très grand
succès en France.
Effectivement, on perçoit, dans cet extrait, une discussion entre deux personnes, précisément,
on entend la voix d’une même femme contre une voix d’un même homme. Ces deux voix
alternent. Ces deux personnes sont immergées dans un cadre « festif » dans lequel on entend des
voix incompréhensibles des gens avec une musique qui ne s’arrête pas, du début à la fin. Cette
ambiance générale évoque fortement l’ambiance d’une soirée dansante, au cours de laquelle, ce
couple discute en dansant.
3-­‐2 Segmentation et catégorisation N.B : Pour cette partie, on adoptera la même méthode d’analyse que pour son homologue, la
partie « Partita ».
Dans le but de catégoriser les événements, on aura recours évidement à des figures et
des couleurs. Nous avons détaillé les familles de sons dans les tableaux suivants par parties,
tout en essayant de respecter dans le choix des graphiques, la spectromorphologie des sons.
Pour ce faire, on admet conventionnellement qu’on attribuera la couleur rose pour la voix
de la femme, la couleur bleu pour la voix de l’homme, la couleur vert pistache pour les
instruments à cordes et l’orangé pour les instruments à vents.
3-­‐3 Analyse détaillée : On remarque une tendance au phrasé par la succession de différents sons, dans cet extrait.
Pour ce faire, on a privilégié plutôt une notation qui respecte l’aspect narratif des phrases, par
la recherche d’une sorte de linéarité dans la représentation.
Les bruits et plus précisément les bruits du corps ont été le principal matériau dans cet extrait,
pas seulement en douze notes de la voix solfiée (crie, siffle, marche, frapper du poing, rire,
gémit, cœur bat, souffle, prononcer des mots, lancer des appels…)
La matière première se résume essentiellement dans les sons de quelques instruments de
musique, des éléments vocaux (voix parlées, rire, sifflement…). Les voix sont souvent
accélérées, ralenties et surtout passées à l’envers dans le but de percevoir l’intonation, en
évitant le sens des mots.
4- Conclusion :
On constate une forte contribution de la musique classique dans la conception des deux
extraits traités, aussi bien dans les noms que dans la forme générale.
La possibilité d’utiliser des reproductions d’images en couleur et de sons en lien avec
un texte nous a donné un support important pour la présentation de nos analyses pour cette
pièce.
Sur le plan musical, le matériau utilisés sont d’une grande diversité. Tout semble les éloigner.
Pourtant, si Pierre Shaeffer les a réunis, c’est qu’il part en recherche d’éventuels liens
esthétiques.
N.B : Le support élaboré par Acousmographe est indispensable à cette étude.
5- Bibliographie :
Sources auditives:
Schaeffer, Henry, Pierre, Pierre « Symphonie pour un homme seul», France, ORTF, 1951.
Ouvrages et articles:
Couprie, Pierre, « Analyse comparée des Trois rêves d’oiseau de rançois Bayle », Déméter,
2003.
Hodeir, André, les forms de la musique, Paris, PUF, 1951. (coll. « que sais-je ?)
LACAS, Pierre-Paul « VALSE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 15
décembre 2012. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/valse/
Roy, Stephane, L’analyse des musiques électroacoustiques , Modèles et propositions,
L’Harmattan, 2004.
Zattra, Laura, « Analysis And Analyses Of Electroacoustic Music », Sound and Music
Computing 2005, XV CIM - Nov. 24-26 2005, Salerno, Italy.

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