Les impôts différés

Transcription

Les impôts différés
Les impôts différés
Intervenant
Patrick MORGENSTERN
Expert-comptable, Chargé d’enseignement fiscal à
l’Université de Bourgogne
Sommaire
Présentation synthétique du mécanisme des
impôts différés
Impôts différés : les raisonnements
Impôts différés : quelques règles importantes
Exemple d’impôts différés pour un groupe non
intégré fiscalement
Calculs annexes
Présentation synthétique
du mécanisme des impôts différés
Pourquoi des impôts différés ?
Ou l’art de gérer les différences entre
le comptable et le fiscal
Objectif : enregistrer sur le même exercice
les opérations comptables et leurs effets fiscaux
Exercice N
Exercice N+1
Conclusion
Effet comptable
Effet fiscal
Impôt différé
Effet fiscal
Effet comptable
Impôt différé
Effet comptable
ET effet fiscal
Néant
Impôts différés :
quand doit-on les constater ?
Pour une opération déjà réalisée :
existe t-il une différence future entre comptabilité et fiscalité ?
Oui
Non
Différence temporaire
Pas de différence
dans le futur
Exemples :
Exemples :
• Taxe Organic
• TVTS
• Plus-value étalée fiscalement
• Régime mère-fille
Différence déductible
dans le futur
=
Impôt différé actif
Exemple :
taxe Organic
Différence imposable
dans le futur
=
Impôt différé passif
Exemple :
plus-value étalée
Pas d’impôt
différé
La notion d’opérations réalisées
En pratique, il s’agit essentiellement d’opérations déjà
matérialisées par une prise en compte comptable
(capitaux propres) ou fiscale
Exemple d’opérations non réalisées :
Plus-values latentes sur immobilisations
non matérialisées en comptabilité
= pas d’impôt différé
Exemple d’opérations réalisées :
Plus-values latentes sur immobilisations matérialisées en
comptabilité par une réévaluation
La notion de différences futures
Une différence future entre l’effet comptable et fiscal
doit exister lors du dénouement de l’opération
Dans ce cas, toutes les différences, sauf exception
prévues par les textes doivent donner lieu à impôts
différés (conception étendue) ; peu importe que
la date de la différence future soit connue ou non
Exemple :
Cas d’un sursis suite à fusion : date de revente du bien
non amortissable souvent non connue
La notion de différences futures
Si la manière dont l’opération se dénoue
est incertaine, alors il faut retenir le dénouement de
l’opération la plus probable et tenir compte du taux
de l’impôt y afférent
Exemple : plus-value en sursis sur des titres de
participation (sociétés non consolidées)
Retenir le taux des plus-values sur titres si la cession est
probable ou le taux d’une distribution si cette dernière est la plus
probable avant la cession
Impôts différés :
les raisonnements
Impôts différés : le raisonnement par la
« méthode du bilan »
Actif comptable et passif comptable :
Valeur comptable au bilan traité
(exemple : valeur figurant au bilan consolidé
pour le traitement des ID relatifs aux comptes consolidés)
Base fiscale d’un actif (d’après IAS 12)
Valeur qui reste à déduire au titre de cet actif
(valable pour les immobilisations et les stocks)
Impôts différés : le raisonnement par la
« méthode du bilan »
Base fiscale d’un passif (d’après IAS 12)
Valeur comptable du passif moins la valeur
qui reste à déduire sur le plan fiscal
Raisonnements à adapter dans certains cas
Exemple : la base fiscale d’un actif circulant autre que
les stocks pourrait se définir à notre avis comme
la valeur comptable de l’actif circulant moins la valeur
qui reste à imposer sur le plan fiscal
Impôts différés : le raisonnement par la
« méthode du bilan »
Actif
Si valeur comptable supérieure
à la valeur fiscale : ID passif
Si valeur comptable inférieure
à la valeur fiscale : ID actif
Passif
Si valeur comptable supérieure
à la valeur fiscale : ID actif
Si valeur comptable inférieure
à la valeur fiscale : ID passif
Vérification par le raisonnement
en terme de dénouement
Impôts différés : le raisonnement par la
« méthode du dénouement »
Raisonnement à partir du dénouement envisagé de
l’opération :
Comparaison entre l’effet du dénouement comptable et
l’effet du dénouement fiscal
Si impôt supérieur à celui qui résulterait du seul
dénouement comptable : différence temporaire imposable
et donc ID passif
Si impôt inférieur à celui qui résulterait du seul
dénouement comptable : différence temporaire déductible
et donc ID actif
A comparer et à recouper avec le raisonnement en
terme d’actifs et de passifs
Impôt différé actif relatif
à la contribution sociale « Organic »
N
Taxe « Organic »
N+1
- 210
Total
N à N+1
- 210
IS à taux courant
+ 70
+ 70
Contribution 3 %
+2
+2
- 210
+ 72
- 138
+ 72
- 72
0
Résultat comptable
AVANT impôt différé
Impôt différé
Résultat comptable
après impôt différé
- 138
0
- 138
Impôt différé passif relatif
à une plus-value étalée fiscalement
N
Plus-value suite à sinistre
N+1
N+2
600
Total
Nà
N+2
600
IS à taux courant
- 100
- 200
Contribution 3 %
-3
-6
Résultat comptable
SANS impôt différé
Impôt différé
Résultat comptable
avec impôt différé
600
- 103
- 103
394
- 206
+ 103
+ 103
0
394
0
0
394
Impôts différés :
quelques exemples
Opérations nées et devant entraîner, dans le futur,
un résultat fiscal moindre que le résultat comptable
attendu (impôt différé actif) :
Provisions pour retraites
Provisions pour pertes à terminaison
non déductibles
Profit latent sur OPCVM imposé immédiatement
Quote-part de bénéfice issu de sociétés
non soumises à l’IS
Plus-value interne au groupe neutralisée
en consolidation
Impôts différés :
quelques exemples
Opérations nées et devant entraîner, dans le futur,
un résultat fiscal supérieur au résultat comptable
attendu (impôt différé passif) :
Réévaluation d’actifs non imposée immédiatement
Sursis d’impôt
Amortissement accéléré sur le plan fiscal
Charges à étaler
Amortissements dérogatoires
Impôts différés :
quelques règles importantes
Impôts différés :
présentation dans l’annexe
Ventilation des impôts différés et exigibles
"Preuve" de l’impôt (rapprochement entre l’IS théorique et
l’IS comptabilisé dans le compte de résultat)
Montant des actifs d’impôts non conservés
avec date limite d’échéance
Si actualisation, effet de cette dernière
Ventilation des ID par grandes catégories (différences
temporaires, activation des déficits…)
Justification de la comptabilisation des actifs d’impôts
différés si l’entreprise a connu une perte fiscale récente
Impôts différés :
obligatoires ou non ?
Comptes sociaux : facultatif
(mais annexe si significatif) sauf quelques cas visés par la doctrine ;
sans effet fiscal si comptabilisés (lettre DLF au CNC de 2000) et lors
des fusions en valeurs réelles à partir de 2005
Comptes consolidés : obligatoire
(règlement 99-02)
Concernent toutes les différences issues
du bilan
Notion exhaustive comprenant aussi la fiscalité latente des
opérations constatées
Quelques différences temporaires n’entraînent pas, par exception,
d’impôts différés ; il en est ainsi notamment sur celles afférentes
aux titres de sociétés consolidées
Concernent l’IS et les impôts liés
(contributions, précompte…)
La comptabilisation des impôts différés
A quel taux ?
Principe du report variable = ajustement
à chaque exercice avec le taux en vigueur
(= voté) à la clôture
(contrepartie toujours par résultat pour CRC 99-02)
Hypothèse : si la contribution de 3 % passe à 0 %
à compter des exercices clos en N+1
(vote intervenu à fin N+1)
N
Plus-value en sursis constatée en N
N+1
3000
0
1030
1030
-30
1030
1000
« Impôts différés – passif » à l’ouverture
Constatation de l’impôt différé de l’exercice
« Impôts différés – passif » à la clôture
Actualisation ?
Actualisation pour les comptes consolidés
si l’effet est significatif et l’échéancier fiable
(CRC 99-02)
Hypothèse : terrain avec un sursis de 1000
dont la cession ultérieure est déjà programmée ; l’actualisation
de l’impôt théorique de 309 donne
par hypothèse 103 à fin N et augmente de 21 par an
N
Plus-value en sursis constatée en N
N+1
1000
103
« Impôts différés – passif » à l’ouverture
Constatation de l’impôt différé de l’exercice
103
21
« Impôts différés – passif » à la clôture
103
124
Exemple d’impôts différés pour
un groupe non intégré fiscalement
Exemple sans intégration fiscale /
Exercice N
M
Résultat fiscal M = +1500
Impôt courant = 515
100 %
F1
Résultat fiscal F1 = - 2100
Impôts différés de F1
La déclaration fiscale
État 2058-A
Impôts différés
Montant
Résultat comptable
Organic
Plus-value à étaler
fiscalement
-1710
210
Résultat fiscal
-2100
-600
Actif
Passif
72
206
Impôts différés / Les sursis
et reports de plus ou moins-value
Supports conseillés pour le recensement :
l’état spécial (CGI, art. 54 septies I)
et le registre (CGI, art. 54 septies II lequel recense tous
les sursis en cours)
Attention toutefois aux opérations de l’exercice figurant
également sur la déclaration 2058-A
A constater l’ID, uniquement si la valeur comptable des
actifs a été modifiée dans les comptes traités / mais peu
importe que la cession des biens soit envisagée ou non
Impôts différés / Les sursis
et reports de plus ou moins-value
Taux à étudier pour les sursis relatifs aux titres de
sociétés non consolidées (en fonction du dénouement le
plus probable / par exemple distribution, exonération
définitive, plus-value…)
Contrepartie comptable de l’ID variable suivant que
l’opération a généré un résultat ou non (exemples :
échange 38-7 bis en résultat, sursis 210 A en prime de
fusion lors de sa constitution….)
Impôts différés de F1
Les sursis d’imposition
Impôts différés
Montant
Sursis
Actif
Passif
1500
294
360
124
(CGI, art 38-7 bis)
sur titres
non consolidés
Sursis
(CGI, art 210 A)
sur terrain
418
Impôts différés : déclarations
de suivi 2058-B, 2059-C :
les pertes reportables
ID actif pour le montant des pertes de fin d’exercice :
il faut tenir compte des différents taux et règles
d’utilisation des pertes
Part du principe que la valeur comptable
des pertes fiscales reportables est de zéro
et la base fiscale égale au montant qu’il reste
à déduire sur le plan fiscal
Fonctionne pour les déficits et en principe pour les
moins-values à long terme
Impôts différés de F1
Les pertes fiscales reportables
État 2058-B
Impôts différés
Montant
Actif
Déficits reportables
2100
721
Passif
La conservation des impôts
différés actifs
La conservation des impôts différés actifs résulte de
deux étapes :
Première étape qui ne nécessite pas de bénéfice fiscal
futur : la conservation des actifs d’ID peut se faire à
concurrence des passifs d’ID déjà présents et dont
le dénouement pourra se compenser avec les ID actifs
Seconde étape qui nécessite un bénéfice fiscal futur
probable : il s’agit du bénéfice qui sera effectivement
imposé
La conservation des impôts
différés actifs
Remarques :
Présomption d’absence de bénéfice futur
si les deux derniers exercices sont déficitaires
(sauf preuves convaincantes)
Attention aux différents taux car chaque catégorie de
pertes ne peut être conservée qu’en fonction de ses
propres règles d’imputations (exemple : un actif d’ID
sur moins value à long terme ne peut s’imputer sur des
passifs d’ID à taux courant)
Impact de la loi de finances relatif au caractère
imprescriptible des déficits
(réforme de l’article 209-I du CGI)
La centralisation et l’évaluation
des impôts différés de F1
Impôts différés
Actif
Passif
ANALYSE
1
72
2
3
418
Solde
ACTIF
721
793
4
206
624
-169
624
Solde final = 0
=
169
NON CONSERVE
PAR
HYPOTHESE
Impôts différés de M
La déclaration fiscale
État 2058-A
Résultat comptable
(avant IS)
Régime mère fille
Charges à étaler
Résultat fiscal
Impôts différés
Montant
Actif
Passif
3255
-555
-1200
1500
412
Impôts différés : quelques exemples dans
les comptes consolidés
Opérations nées et devant entraîner
dans le futur un résultat fiscal moindre
que le résultat comptable attendu
(impôt différé actif) :
Plus-value interne au groupe neutralisée
en consolidation
Opérations nées et devant entraîner dans
le futur un résultat fiscal supérieur au résultat
comptable attendu (impôt différé passif) :
Réévaluation d’actifs en consolidation
non imposée immédiatement
Écritures ayant pour effet d’amoindrir
les amortissements constatés dans
les comptes sociaux pour la présentation
des comptes consolidés
L’élimination des titres
des sociétés consolidées
Pas d’ID par exception spécifique prévue
par le CRC 99-02 sous réserve des effets
des distributions décidées ou probables
Motif de cette exception : ne pas anticiper l’effet
fiscal de la cession éventuelle des titres (effet double
emploi avec les résultats des sociétés déjà pris en
compte)
L’élimination des titres
des sociétés consolidées
Exemple :
F est créée avec un capital de 1000.
Elle est consolidée en N et dégage un bénéfice avant IS
de 600. L’annulation des titres et leur remplacement
par la valeur des actifs et passifs de F laisse ressortir
pour ces titres une valeur comptable de 1600 et une
base fiscale de 1000 c’est à dire une différence
temporaire de 600 devant générer un impôt différé
passif sur la base de 600. Or un IS courant sur les 600
est déjà constaté dans les comptes sociaux.
La constatation d’un ID dès N augmenterait la charge
fiscale de l’exercice. Seul le coût fiscal de la distribution
des 600 serait à constater si elle était prévue.
Impôts différés de M
Les écritures de consolidation
Effets sur
capitaux propres
- 4000
Élimination des titres F1
Plus-value intragroupe
(a)
-900
Dividendes intra groupe
(b)
0
Impôts différés
Actif
Passif
(c)
(c)
309
(a) Cession terrain de F1 à M
(b) M a reçu 600 de dividendes de F1 avec avoirs fiscaux
(c) Pas d’impôt différé car exception sauf l’impôt
de distribution non récupérable
La centralisation et l’évaluation
des impôts différés de M
Impôts différés
Actif
412
5
6
Passif
309
=
Solde
PASSIF
103
CONSERVE
Effet total des impôts différés sur
la consolidation sans intégration fiscale
Impôts différés
Actif
F1
M
0
Passif
0
103
Solde
PASSIF
=
GLOBAL
103
En pratique, il convient de faire
la « preuve de l’impôt »
Calculs annexes
Résultat consolidé hors impôt
Résultat comptable M (a)
3255
Résultat comptable F1 (a)
-1710
Plus-value IG
-900
Dividendes IG
-600
Résultat consolidé (a)
45
Impôt théorique
16
(a) Hors IS
Preuve de l’impôt
SANS intégration fiscale
Impôt théorique
16
Impôt courant de M
515
Impôt différé final passif
103
Total
618
Quote-part frais/charges
Sursis
ID actif F1 non conservé
Différence à expliquer
602
Impôt
45
Soit IS
15
1860
Soit IS
418
Soit IS
169
602
Les impôts différés