l`agriculture des pyrénées orientales

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l`agriculture des pyrénées orientales
PARTIE 1
L'AGRICULTURE
DES PYRÉNÉES ORIENTALES
1. L'agriculture des Pyrénées Orientales
Les Pyrénées Orientales sont un département de 414.000 ha où les altitudes s'échelonnent de 0 au bord de la
Méditerranée à 2.900 mètres au sommet du pic Carlit. Le département est donc caractérisé par une forte diversité de
conditions climatiques et pédologiques, qui sont à l'origine d'une grande diversité de terroirs et de productions
agricoles.
L'espace départemental est occupé pour 1/3 par la forêt, 1/3 par des terres agricoles et 1/3 par des terres incultes
naturellement (landes, garrigues, étangs) ou artificialisées. 4 filières agricoles se répartissent aujourd’hui la surface
agricole utile.
UNE PRODUCTION AGRICOLE DIVERSIFIÉE
Relief et réseau hydrographique du département (IGN BD Alti – DDE66 – SUH) ; en rouge, la tache urbaine en 2006
La viticulture met en valeur des terrains secs des terrasses du Roussillon et de la vallée de l'Agly, ainsi que les
premiers contreforts des Aspres et du Fenouillèdes. En 2007 1, après plusieurs années de crise, la filière regroupe
1.400 exploitations, qui exploitent 30.000 ha de vignes et produisent 1 million d'hectolitres de vins, dont la moitié
en AOC. Toutefois, les primes à l'arrachage définitif menacent, dans un contexte commercial difficile, les terroirs
viticoles. De nombreuses initiatives sont donc engagées pour limiter l'impact de ces mesures sur l'économie et les
paysages locaux.
La filière arboricole exploite les terrains plats et irrigués du Conflent et du Ribéral. 500 exploitations produisent des
pêches (1er département français) et des abricots jusqu'à Prades (350 m). Au-delà, les vergers regroupent des
pommiers et des poiriers, plus résistants aux risques de gel. Globalement, 9.000 ha sont mis en valeur par ces
cultures pérennes malgré des aléas commerciaux liés aux variations climatiques.
Le maraîchage met en valeur les terres limoneuses apportées par les crues répétées des fleuves côtiers dans la
plaine littorale. 600 exploitations cultivent 3.500 ha de productions en plein champ ou sous abris. Le climat doux
du département autorise plusieurs récoltes par an, notamment en salades : les Pyrénées Orientales sont le 1er
département producteur français de scaroles.
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AGRESTE Languedoc-Roussillon – Mémento 2007
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Principales filières agricoles par canton (Agreste – DDAF66 METER)
300 éleveurs mettent en valeur les terrains les plus accidentés. Les ovins et caprins entretiennent les espaces sous
influence méditerranéenne et participent, par ce débroussaillement naturel, à la protection des villages contre les
incendies de forêt. Plus haut, les bovins passent 6 mois en estive puis le reste de l'année en stabulation. Ils se
nourrissent alors du fourrage fauché sur les terrains plats et irrigués de Cerdagne et du Capcir.
DES EXPLOITATIONS EN RESTRUCTURATION
Depuis 15 ans, toutes les filières agricoles ont suivi une même tendance : baisse du nombre d’exploitations mais
augmentation de leur technicité et de leur productivité. Les exploitations les plus fragiles ont cessé leur activité,
notamment les petites structures et les maraîchers en plein champ. Leur sensibilité aux aléas du climat et à une
concurrence accrue a eu raison de 20% des exploitations (36% sur la région). Dans ce contexte, les aides à
l'arrachage définitif des vignes sont largement sollicitées, et en quelques années, ce sont plus de 3.000 ha, soit 10%
du vignoble du département qui ont été arrachés.
Le salariat permanent a baissé de 40% sur la même période, pour représenter 1.800 salariés actuellement. Les
saisonniers représentent 2.900 unités de travail annuel (UTA), tandis que les « membres de la famille » concernent
13 000 personnes, pour 2 000 UTA. A elle seule, la viticulture représente 35% des salariés et 70% des saisonniers.
Sur le plan social, plusieurs centaines de dossiers de faillite sont actuellement à l’instruction par les tribunaux,
tandis que 480 personnes bénéficient du RMI dans le milieu agricole.
A l’inverse, d’autres exploitations se sont modernisées et ont accru leur productivité. En élevage, la qualité
génétique du cheptel s’est accrue par un meilleur contrôle de la reproduction et un nouvel abattoir transfrontalier
est en projet en Cerdagne. Les filières végétales ont introduit de nouvelles variétés mises au point par les stations
expérimentales du département et de la région. En maraîchage, les investissements se sont concentrés sur les serres,
mieux chauffées et mieux irriguées. Enfin, la viticulture a largement modernisé ses installations de vinification,
coopératives ou particulières, et a entamé une démarche marketing volontaire.
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1. L'agriculture des Pyrénées Orientales
100 000
90 000
80 000
70 000
SAU
herbe
vergers
vignes
arables
60 000
50 000
40 000
30 000
Finalement, la surface agricole utile du
département a baissé de 5% entre 1988 et
2006. Mais les conditions climatiques
aléatoires
et
les
niveaux
de
commercialisation précaires sont toujours
préoccupants : les aides conjoncturelles
(retraits des invendus, calamités et aides à
caractère social) représentent 18% du
revenu net des exploitations.
20 000
Pour limiter l'impact de ces aléas sur leur
revenu, les agriculteurs diversifient leurs
activités. En transformant eux-même leurs
1 988
2 000
2 006
produits, ils en augmentent la valeur
Évolution de la SAU depuis 1988 (Agreste - DDAF66 METER)
ajoutée puis les vendent sur place ou sur
les marchés. Les principales filières
concernées sont la viticulture, où les caves de vinification particulières avec caveau de dégustation se multiplient, et
l'élevage, où se développe la vente de produits fermiers. Enfin, l'accueil de touristes à la ferme est une autre forme
de diversification dont les revenus peuvent s'avérer nécessaires à l'équilibre financier de l'exploitation agricole.
10 000
UN IMPACT FAVORABLE SUR L’ENVIRONNEMENT
L’élevage, principale activité par la surface des terres mises en valeur, assure un rôle important dans la prévention
des incendies de forêts et dans l’ouverture et la qualité des paysages. Les éleveurs sont donc des partenaires
naturels des politiques de DFCI et d'entretien des milieux naturels. Mais, pour se maintenir, l’élevage nécessite une
ressource fourragère suffisante pour couvrir les besoins des troupeaux durant la stabulation hivernale. La
production de cette ressource est conditionnée, entre autres, par les possibilités d’irrigation.
Les terrains marqués par l’arrachage des vignes, vergers et cultures légumières de plein champ sont principalement
transformés en friches, d’où des risques d’incendie pendant la période estivale et une évolution significative des
paysages. Leur entretien, au minimum par la fauche, devient alors une nécessité pour limiter ces risques.
Pour préserver la qualité des eaux et des milieux aquatiques, les techniques agronomiques ont évolué vers une
réduction des intrants. Sur les conseils des techniciens, les apports azotés ont sensiblement baissé : de 92 kg/ha en
1999 à 38 kg/ha en 2003. Cette évolution s’accompagne d’une rationalisation du prélèvement de l’eau, par la
modernisation progressive des réseaux d’irrigation.
L'utilisation des produits phytosanitaires connaît également une évolution favorable. Ainsi, la filière fruits et
légumes a généralisé les pratiques agronomiques raisonnées, désormais définies dans des cahiers des charges précis
par les organisations de producteurs. Dans le même temps, 6% de la SAU – soit 6.300 ha – font déjà l'objet d'une
certification au titre de l'Agriculture Biologique.
ZONES AGRICOLES ET URBANISATION
Situées à proximité des villes et villages, les terres agricoles sont soumises à 2 pressions d'intensité variable selon
les secteurs. D'une part, la réduction des surfaces utilisées modifie les paysages en créant des friches apparemment
abandonnées. De l'autre, la croissance démographique du département (+ 5.000 habitants nouveaux par an) pousse
à l'extension des zones urbaines et au développement de nouvelles infrastructures. Il s'ensuit des situations
hétérogènes.
D Dans la plaine du Roussillon, l'arrachage des vignes se conjugue à la forte croissance urbaine pour aboutir à
une consommation rapide des terres agricoles. Pour les agriculteurs qui partent en retraite, les terres peuvent
alors apparaître comme un capital plutôt que comme un outil de travail à préserver.
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D En Cerdagne, le développement de l'immobilier de loisirs crée une pression foncière qui bloque le marché
foncier. Les éleveurs ont donc du mal à disposer du foncier, pourtant nécessaire à leur activité, à des prix
abordables.
D La vallée de l'Agly, le Fenouillèdes et les Aspres sont largement touchées par la déprise agricole, sans pour
autant qu'une autre activité économique ne se substitue à la viticulture. La population de ces villages part
donc travailler dans la plaine, en faisant l'aller-retour tous les jours, ou en quittant définitivement ces
communes.
Dans ce contexte de forte pression foncière, les terres agricoles restent le support d'une activité économique, où les
exploitations vivent et se développent. Leur modernisation induit des besoins de constructions, qu'il s'agisse
d'abriter des matériels encombrants ou des lieux de transformation et de vente des produits. En particulier, les
contraintes de voisinage poussent les agriculteurs à reconstruire, à l'extérieur des villages, leurs garages et hangars.
Certaines pratiques agricoles représentent des contraintes fortes, au point que l'agriculteur soit obligé de rester sur
place en permanence, et de loger sur le site de son exploitation.
Enfin, les zones agricoles et naturelles peuvent être le siège d'un patrimoine bâti à conserver. Pour ce faire, des
dérogations peuvent être accordées pour la restaurations des mas, granges, ... Mais ces projets induisent une
dispersion de la population, qui peut poser des problèmes quant à l'accès aux réseaux et aux services publics ou à
leur protection face aux risques naturels.
Les lois récentes ayant réformé le code de l'urbanisme, appuyées par la jurisprudence, ont conduit à renforcer les
contraintes de constructibilité des zones agricoles. Il s'agit en effet de préserver les terres agricoles contre la
pression engendrée par l'étalement urbain, très consommateur d'espace. Toutefois, cette zone reste un espace où se
pratique une activité économique, fondée sur la mise en valeur des terres, et pour laquelle certains bâtiments restent
indispensables. Ainsi, les documents d'urbanisme communaux doivent élaborer un projet de d'aménagement et de
développement durable (PADD) permettant de concilier la préservation des terres, les besoins légitimes de leurs
exploitants, tout en évitant les dérives spéculatives. Le présent document vise donc à clarifier les possibilités de
concilier ces enjeux tant en terme de planification territoriale, que de gestion quotidienne des autorisations de
construire.
Vignoble des Aspres (© DDAF66 - MM)
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