L`alcoolisme féminin - Plateforme d`Echanges et d`Information
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Diplôme universitaire en addictologie Session 2012 L'alcoolisme féminin: D'une meilleure connaissance de la maladie alcoolique pour une prise en charge plus efficace SOMMAIRE INTRODUCTION....................................................................................................................1 MOTIVATION ET CONSTAT DE TERRAIN......................................................................3 Mon expérience à L'ile Maurice.................................................................................................4 DONNÉES GÉNÉRALES.......................................................................................................6 PREMIÈRE PARTIE : L'ALCOOLISME. I. L'ALCOOL A) L'historique.....................................................................................................................10 B) Les symboliques de l'alcool à la Réunion......................................................................13 C) Le fonctionnement du système alcool............................................................................15 II. LES PROBLÉMATIQUES DE L'ALCOOLISME FÉMININ A) Les spécificités biologiques............................................................................................16 B) Les spécificités psychologiques et l'abord psychanalytique...........................................17 C) Le syndrome d'alcoolisation fœtal (SAF).......................................................................18 DEUXIÈME PARTIE: REPRÉSENTATIONS SOCIALES ET NOTIONS D'ISOLEMENT ET DE CLANDESTINITÉ I. LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DE L'ALCOOLISME FEMININ A) Le concept de représentations sociales............................................................................19 B) Les représentations sociales de l'alcoolisme féminin......................................................21 C) Les conséquences des représentations sociales au sein de l'environnement familial......23 II. LES NOTIONS D'ISOLEMENT SOCIAL ET DE CLANDESTINITÉ ALCOOLIQUE A) L'isolement social..........................................................................................................24 B) La clandestinité alcoolique............................................................................................25 TROISIÈME PARTIE: ACCOMPAGNEMENT TRIPARTITE DANS LA RÉHABILITATION SOCIALE I. L'ACCOMPAGNEMENT PSYCHO-SOCIAL DE LA FEMME MALADE ALCOOLIQUE A) Le concept d'accompagnement...................................................................................26 B) L'accompagnement thérapeutique..............................................................................27 C) L'accompagnement social de la femme et la relation d'aide.......................................28 II. LA PLACE DE LA FAMILLE DANS LA PRISE EN CHARGE DE LA FEMME MALADE ALCOOLIQUE A) Famille et système alcool.............................................................................................32 B) La codépendance..........................................................................................................33 C) La place de la famille dans l'accompagnement............................................................34 CONCLUSION ET PERSPECTIVES.................................................................................35 ANNEXES Nou ici parceki nou né pli capave litté tout sel Nou pa capave continué sauvé divant réalité Nou pas capave continué reste renfermé lors nou-meme Nou pas capave continué souffer et fer lézotte souffer Tant ki nou pas partaze nou banne souffrances Nou pas pou capave senti nou libre Tant ki nou pas faire confiance dimoune Nou pou reste toujours tou sel C'est avec coup de main nou bane camarade ki nou pou capave changé Ici nou tout capave montrer nou couma nou été Personne na pas trop tipti pou donner ni trop grand pou recevoir Nou bizin montrer nou couma ène dimoune Ek ce ki nou ena ek ce ki nou été C'est coum ca ki nou pou senti nou pé vive ène vrai la vie Philosophie du centre de la Chrysalide, Ile Maurice. INTRODUCTION « Il n'y a pas de société sans drogues, il n'y en a jamais eu. » Nicole MAESTRACCI. Les sociétés, au fil du temps, ont consacré une place particulière à l'alcool. Cette substance est passée du sacré au commun. Sa place dans l'histoire est culturelle et alimente les coutumes de tous les peuples. « La France est un pays où l'histoire de la vigne et du vin éclaire celle d'un peuple tout entier ». Roger DION, L'Histoire de la vigne et du vin en France. Notre pays est accompagné pendant toute son histoire par cette culture du vin qui reste aujourd'hui farouchement défendue. L'alcool est une drogue licite. Son usage n'est pas interdit ; de plus, il est porté par une culture valorisant les consommateurs. Aussi licite qu’elle soit, elle n'en est pas moins dangereuse et l'alcool et le tabac sont les produits les plus mortels. En France, l'alcoolisme est la troisième cause de mortalité après l'obésité et le tabac, devant les maladies infectieuses et les accidents de la route. La consommation d'alcool a toujours fait partie intégrante de la vie sociale. Elle se retrouve lors de bons repas, de festivités et procure un sentiment de bien être et de détente. La notion de plaisir est très présente et renvoie alors à une image positive de l'alcool. Aujourd'hui, cette consommation pose un problème majeur de santé publique, elle entraine marginalisation, exclusion sociale, problèmes familiaux, indifférence. En France, 45000 personnes meurent de l'alcool par an et (280 personnes à la Réunion.)1 La consommation de boissons alcoolisées par les français a diminué entre les années 60 et aujourd'hui. Néanmoins, la France reste parmi les pays les plus consommateurs. En 2010, 21% des hommes et 8% des femmes disent consommer de l'alcool tous les jours. 14% des hommes et 5% des femmes ont une consommation dite à risque. 1 Source ORS Réunion BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 1 La loi du 15 avril 1954 aborde l’aspect du dépistage et du traitement des alcooliques dangereux pour autrui. La loi EVIN du 10 Janvier 1991, relative à la lutte contre l'alcoolisme a pour objectif de permettre à tout un chacun de prendre conscience des conséquences graves que peut engendrer une consommation excessive d'alcool sur la santé. Toute société a sa drogue et en France l'alcool tient une place importante. Boire, c'est accompagner le quotidien qu'on soit heureux ou malheureux. L'être humain boit pour décompresser, oublier, être sociable ou faire la fête et souvent cette consommation est rituelle. L'alcool est une arme politique, économique et sociale favorisant ainsi l’idée que : boire est normal et admis de tous. C’est un moyen de révolte, de créativité ou tout simplement un moyen de s'échapper du « système » par l'imaginaire. Boire de l'alcool reste une pratique habituelle, comprise, acceptée, admise et tolérée de tous. Mais la consommation excessive d'alcool engendre la dépendance et la marginalisation. Ainsi, la personne alcoolique est mal vue, incomprise et souvent non reconnue comme une personne malade. Cette incompréhension a de graves conséquences lorsqu'elle vient des proches du malade. A la Réunion, l'alcool est co-responsable de beaucoup de faits divers (accidents, homicides, violences en tous genres et en particulier violences conjugales.) Selon le tableau de bord des addictions, à la Réunion, en 2007, la mortalité serait supérieure de 77% à la moyenne métropolitaine. L'alcool serait responsable de 7% des décès sur l'île, tous âges confondus. Ainsi, au rang des régions les plus à risque, en terme de mortalité due à l'alcool, la Réunion arrive en deuxième position après la région Nord Pas de Calais. A la Réunion, la culture de l'alcool est liée surtout à la fabrication et à la consommation de rhum. De 1960 à 2000, le vin et la bière ont en grande partie remplacé le rhum surtout chez les jeunes. Cependant, la consommation d'alcools forts reste bien présente sur l'île. En outre, la consommation féminine se révèle, en terme de chiffres, à travers le syndrome d'alcoolisation fœtal, être un phénomène important de santé publique à la Réunion. En 2007, 12 enfants sur 14500 naissaient avec le SAF (Syndrome d'Alcoolisation Fœtale). De plus, les hospitalisations féminines dues à l'alcool sont en hausse (11% entre 1994 et 2004). BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 2 MOTIVATION ET CONSTAT DE TERRAIN J'ai choisi d'étudier le thème de l'alcoolisme car je me suis intéressée à la dépendance depuis longtemps. En effet, lorsque j'étais plus jeune, j'ai toujours entendu parler de l'alcool comme d'un mal pernicieux et j’ai observé que tous ceux qui croisaient les personnes ivres dans la rue, et donc présumées alcooliques, changeaient de trottoir. J'avais donc en tête le côté dépravé et le sentiment de honte que l’ivresse suscitait. J’associais cet état à un côté marginal mais je comprenais néanmoins un mal-être et était sans conteste un appel au secours. Pour moi, l 'alcool me paraissait peut-être plus acceptable que d’autres drogues et je n'avais pas conscience qu'être alcoolique c'était être malade. Dans une réelle posture d'apprenante, j'ai compris que l’essentiel de mon travail contribuera au changement de mes représentations de la vie de tous les jours et à une remise en question perpétuelle. Je me suis interrogée sur mes incompréhensions, sur mes lacunes dans le domaine de l'alcoolisme. Je me suis posée ces questions : « pourquoi avons-nous cette répulsion vis-à-vis des malades alcooliques? Pourquoi avons nous des représentations négatives sur la dépendance en général? » Lors de mon premier poste à l'association RIVE, j'ai pu, être au contact des personnes dépendantes et abstinentes. Je me suis alors décidée à améliorer ma pratique en suivant le DU addictologie. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 3 MON EXPERIENCE A L'ILE MAURICE Là-bas, les plages sont belles, les touristes affluent pour découvrir ce sable blanc, cet océan aux eaux couleur turquoise. Mais ce « paradis », comme ils le définissent, est aussi, de part son histoire, une île où les habitants connaissent une grande précarité. En effet, le gouvernement, selon les ONG (Organisation Non Gouvernementale), axe le développement économique pour une bonne part sur le tourisme et pour ce faire, il masque les conditions de vie des mauriciens. Ceux-ci connaissent les fléaux de la drogue, de la prostitution et du VIH/SIDA. Dans un contexte social divisé où la culture et les croyances sont fortes, ils sont souvent livrés à eux-mêmes. De nombreuses ONG (mauriciennes et internationales) se battent pour faire reconnaître les droits des personnes dépendantes et contaminées par le VIH. Lors de ma formation initiale, un stage hors département de trois mois est à réaliser. J'ai choisi de faire ce stage professionnel à Maurice pour me confronter à mes propres représentations. Je l'ai effectué dans un centre de réhabilitation des femmes toxicomanes : la Chrysalide. Cette ONG accueille les femmes dépendantes à diverses substances (drogues, alcool) ainsi que celles qui ont contracté le VIH/SIDA. A l'île Maurice, il est difficile d'avoir les chiffres réels touchant la dépendance à l'alcool. La plupart des femmes qui sont à la Chrysalide ont vécu avec une polytoxicomanie (drogues, médicaments, alcool). Le centre est ouvert depuis 2004. Avant cette date, il dépendait du centre de solidarité (première ONG à accompagner les personnes dépendantes). Le taux de réussite de réhabilitation des femmes est de 30% ; données relevées lors des quatre dernières années. Le travail du personnel de la Chrysalide est basé sur un accompagnement thérapeutique. La thérapie appliquée vient du projet Homme, ramené d’Italie dans les années 1980, par un prêtre et une sœur de l’église catholique. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 4 Les objectifs de la Chrysalide sont de permettre la reconsidération de la femme toxicomane en tant que personne, de réduire les stigmatisations et de l’aider à retrouver son identité. L’axe principal est l’hygiène corporelle, l'estime de soi, la revalorisation. En effet, les femmes toxicomanes qui sont en difficultés face à leur féminité, leur hygiène de vie et leur sens des responsabilités. Une autre ONG, travaille dans l'accompagnement des femmes dépendantes. Étoile d’Espérance assure la réinsertion des femmes alcooliques à l'île Maurice depuis 1997. Celle-ci ne s’occupe pas des enfants. Le temps de la thérapie y est de trois mois. Les femmes bénéficient en même temps des phases de désintoxication et de réhabilitation. Elles suivent ce programme grâce à un congé payé par leur employeur. Elle peuvent le faire en résidentiel ou en accueil de jour à la maison Moka inaugurée en 2006. Dans le programme de l'Etoile d'Espérance, sont inclus la thérapie familiale, la thérapie de groupe et l'after care (un suivi après la thérapie). Pendant mon stage à la Chrysalide, J'ai constaté de nombreux échecs. Des femmes qui abandonnaient leur programme et que l'on revoyait dans la rue quelques heures plus tard. Cette attitude m’a interpelée. De quoi avaient-elles donc réellement besoin? Comment les aider dans leur réhabilitation? Lors de mes rencontres avec elles, j'ai constaté qu’elles ressentaient un grand sentiment de solitude. Elles se sentaient abandonnées par leurs familles qui ne venaient quasiment jamais les voir. Un jour l’une d’entre elles m'a confié : « lorsque je me droguais, j'étais déboussolée, seule dans la rue, au prise avec mon « galant »2 et j'ai voulu retourner chez ma mère. Mais elle m'a dit qu'elle préférait me voir morte que de m'accueillir sous son toit, alors je suis allée faire la manche en pensant fort à mon prochain shoot. » Mon expérience Mauricienne a été unique et m'a révélé une grande humanité et une grande humilité chez les femmes que j’ai côtoyées. Elles méritent le plus grand respect. A l'île Maurice, la dépendance féminine est tue. Il est difficile d'accompagner ces personnes du fait de la complexité à identifier leur dépendance. En comparant avec la Réunion, je me suis rendue compte qu'il en était de même, la prise en charge des femmes dépendantes reste ardue à cause de ce tabou sociétal. 2 « amant » BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 5 DONNÉES GÉNÉRALES Le problème des drogues licites comme l'alcool, c'est leur accessibilité. Il est important de différencier les trois termes suivants: alcool, alcoolisation et alcoolisme. « L'alcool est obtenu par la fermentation de végétaux riches en sucre, ou par distillation, et intervient dans la composition des boissons alcoolisées: vin, cidre, bière, boissons apéritives, liqueurs. » L'alcoolisation se caractérise par l'action de consommer de l'alcool. L'OMS définit l'alcoolisme comme « l'addiction à l'alcool (éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées ». L'alcoolisme est aussi défini comme « provoquant des troubles mentaux et des troubles du comportement liés à l'absorption d'alcool ». En Avril 2006, le Président de la République, Jacques Chirac, officialisait la médicalisation des addictions. Quelques mois plus tard le ministre de la santé, Xavier Bertrand, annonçait un plan national contre les addictions. Cette avancée a été un grand pas dans la prise en charge des personnes dépendantes. Créée en 1982 et placée sous l’autorité du Premier ministre, la MILDT est chargée d’animer et de coordonner les actions de l'État en matière de lutte contre les drogues et les toxicomanies, en particulier dans les domaines de l’observation, de la recherche, de la prévention, de la prise en charge sanitaire et sociale, et de la lutte contre le trafic. ✗ Notions de vocabulaire L'alcoolisme Le terme alcoolisme est employé pour la première fois en 1849 par un médecin suédois : Magnus HUSS. Après avoir étudié le comportement d’une certaine population hospitalière, il conclue que l’alcoolisme est le résultat « des manifestations pathologiques de l'intoxication alcoolique ». Le sociologue américain Elvin Morton JELLINECK, en 1950, introduira le concept de maladie alcoolique. Cette évolution permettra de déculpabiliser les malades alcooliques et fera naître l'espoir de la possibilité d'un traitement. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 6 La reconnaissance de l'alcoolisme et, de fait, la disparition de la notion d'ivrognerie, instaurée par la morale et la religion, sont donc récentes. Grâce à l'émergence du concept de l'alcoolisme reconnu comme maladie, à la fin du dix-neuvième siècle, l'attitude répressive à l'égard des malades va se modifier progressivement. En 1872, face au développement du « fléau », les scientifiques et les professionnels de santé de l'Académie de Médecine vont se mobiliser et concevoir la création de l’association française contre l'abus des boissons alcooliques connue aujourd'hui sous le nom d' Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA). Le terme alcoologie est employé en France depuis 1905. Néanmoins, Il faudra attendre 1966 pour que le docteur Pierre FOUQUET mette en place la pratique de l'alcoologie. Il considère que non seulement l’alcoolisme est une maladie mais que celui-ci doit aussi faire l’objet d’un travail dans le sens de la prévention et de l'action. Le problème est certes médical mais également social, psychologique, économique, familial. Ainsi, ce père de l'alcoologie française a défini l'alcoolo-dépendant comme étant celui qui a perdu « la liberté de s'abstenir de boire » et donc incapable de maîtriser sa consommation. Qu'est-ce qu’un malade alcoolique? C'est un sujet alcoolo-dépendant qui ne peut contrôler durablement les quantités d'alcool qu'il prend. Il boit pour obtenir les effets psychiques que procure l'alcool: euphorie, oubli, courage d'affronter une situation qu'il redoute...3 Un malade alcoolique ne boit pas forcément de l'alcool tous les jours. Certains n'en consomment pas lors des repas mais seulement lors de cérémonies festives. Le manque, ce besoin irrépressible de boire, s'exprime à des horaires et à des moments variables selon les individus. L'alcoolisation s'impose plus ou moins tardivement dans la journée, ou elle intervient, au contraire, dès le réveil, voire dans la nuit. Le risque alcoolique existe à partir d'une consommation de trente grammes d'alcool par jour pour une femme et de quarante grammes pour un homme. Chaque verre contient environ dix grammes d'alcool (variations de volume en fonction du type d'alcool). On parle de consommation excessive quand ces quantités sont dépassées de façon régulière.4 3 Henri GOMEZ, la personne alcoolique, DUNOT, 1999 4 Henri GOMEZ, la personne alcoolique, DUNOT, 1999 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 7 L'abstinence Ainsi, l'abstinence consiste à ne boire d'alcool sous quelque forme que se soit. C’est, pour la personne, l'appropriation d'une liberté de s'abstenir de boire. Elle est le premier pas vers une réhabilitation sociale de la personne dépendante. La réhabilitation vise une revalorisation de soi, une recomposition de son système familial et social et donc à retrouver sa place dans la société. Cette réinsertion sociale peut se faire à l'aide d'une équipe médico-sociale. Il existe plusieurs systèmes de soins (long ou court séjour, hospitalisation ou ambulatoire). Le système « En matière d'alcoolisation pathologique il n'existe pas de malade indépendant du système de relations dans lequel il vit ou dans lequel il a vécu. L'alcoolisation pathologique a besoin d'un contexte favorable pour s'épanouir et elle va influencer le milieu dans lequel vit l'alcoolique. L'alcool constitue une sorte de solvant qui assure une stabilité et une solidité aux différents systèmes relationnels: milieu familial, milieu professionnel, milieu des loisirs, en même temps qu'il transforme le vécu du sujet. La maladie alcoolique est donc aussi une « maladie de système ».5 ✗ Prévalence et origines de l'alcoolisme féminin A la Réunion, le taux de mortalité des femmes alcoolo-dépendantes est trois fois supérieur à celui de la moyenne nationale. C’est un réel phénomène de santé publique. Cet alcoolisme féminin se dessine au gré des mutations de la société, cette même société le stigmatise, par ailleurs. Il est caché et cyclique, plus particulièrement défini comme des phases d'alcoolisation. Les femmes boivent de manière discontinue avec des périodes d'abstinence et leur durée de consommation est souvent plus courte que celle des hommes. L’alcoolisation de la femme pendant la grossesse peut être aussi responsable du syndrome embryofœtal. (Réunisaf). Dans le contexte réunionnais et dans l'approche de l'alcoolisme féminin, le psychologue du réseau Oté, a évoqué l'inceste et les abus sexuels comme déclencheurs de la dépendance à l'alcoolisme. 5 Henri GOMEZ, La personne alcoolique, DUNOT, 1999 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 8 Ces problématiques sont, selon lui, des tabous très ancrés dans la société réunionnaise. A ceux-là s’ajoute en partie, celui de l'alcoolisme féminin. Isabelle 60 ans: « A l'âge de 9 ans, j'ai été violée par un prêtre, à l'âge de 20 ans j'ai été violée par un de mes frères et à l'âge de 30 ans j'ai été violée par un homme ». ✗ Sexualité et alcoolisme « Dans l'analyse des relations que noue l'alcoolique avec son entourage, il paraît difficile de faire abstraction de la sexualité. Dans ce domaine, malheur à celui ou à celle qui s'écarte des valeurs œdipiennes et des conventions sociales! A cet égard, l'alcoolique fait l'objet d'un quadruple soupçon. »6 Ce sont l'homosexualité, la dépravation sexuelle, l'impuissance et l'inceste. « Avec l'inceste, la sexualité devient incarnation de la faute. »7 Dans une approche psychologique, dans les liens parents/enfants, l'interdit de l'inceste est posé. L'enfant est exclu des désirs du couple. Il connaîtra vers quatre/six ans le complexe d'œdipe et si les parents posent l'interdit, l'enfant l'intégrera naturellement. Il existe, cependant, dans certaines familles des climats incestueux (exhibitionnisme des parents, pas de rigueur ni de limites imposées, pas de cadre défini, pas de valeurs apportées aux enfants, pas de clarté quant au rapport au corps...) et ceux-ci peuvent induire des risques de dépendance future. A la Réunion, le tabou de l'inceste et celui de l'alcoolisme féminin sont liés. Il est difficile de parler d'inceste à certaines familles car ce sont des cellules très fermées qui ne laissent rien transparaître. Lors de mes rencontres, une seule femme, m'a confié ce qu'elle a vécu dans sa sexualité. A Maurice, plusieurs d’entre elles ont été victimes d'abus sexuel et d'inceste et souvent, par la suite, elles ont connu la prostitution et ont été fortement dépendantes à l'héroïne. 6 Henri GOMEZ, La personne alcoolique, DUNOT, 1999 7 Henri GOMEZ, La personne alcoolique, DUNOT, 1999 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 9 PREMIÈRE PARTIE : L'ALCOOLISME I. L'ALCOOL A) L'historique Les drogues sont présentes tout au long de l’histoire des civilisations. L'alcool apparaît au néolithique avec la découverte de la fermentation ; dans la préhistoire les breuvages à base de ce produit sont de l'ordre du divin. De l'antiquité à aujourd'hui, l'alcool est reconnu pour ses valeurs curatives. Les boissons alcoolisées sont sacralisées et porteuses de vertus symboliques. Mais à la fin du dixhuitième siècle et pendant la première moitié du dix-neuvième, celles-ci sont reconnues comme néfastes. Le recours à l’alcool, comme psychotrope, est très ancien. On le retrouve partout sous les formes les plus variées. Longtemps utilisé lors de rituels, sa consommation est, aujourd'hui, de plus en plus banalisée. Aussi, l'on peut dire, compte tenu des particularismes culturels, sociaux et individuels: « à chacun sa drogue » si l’on considère qu'une simple tasse à café peut modifier notre psychisme, même de façon infime. Dans le monde judéo-chrétien, la drogue traditionnelle, dominante, depuis l'antiquité est l'alcool essentiellement sous forme de vin et de bière. Les boissons distillées ont été inventées plus tard. De plus, il est intéressant d'ajouter la cérémonie de la messe avec le sang du Christ, le vin rouge en étant le symbole. Consommer de l’alcool était presqu’exclusivement une affaire d'homme. Ceci se pratiquait en public (bistrot, bar, pub) et au travail. Aujourd’hui, on boit beaucoup moins au travail mais de plus en plus chez soi en famille ou entre amis. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 10 Comme l'écrit le Professeur Michel LEJOYEUX dans Du plaisir à la dépendance, la menace de l'alcool n'est pas prise au sérieux. Il est difficile de comparer un amateur de bon vin à un « accro à la cocaïne ». L'alcool est banalisé et anodin. De ce fait, la consommation augmente, encouragée même par le monde viticole. Aujourd'hui, selon lui, les dépendances modernes à l'alcool sont des prétextes professionnels et sociaux (alcoolisation d'affaires, alcoolisme mondain). Ces rites et réunions permettent de dédramatiser et de justifier le fait de consommer le produit alcool en invoquant le plaisir, la convivialité. Annie 42 ans: « ma consommation, au début, reflétait la fête et les plaisirs ». Selon l'OMS, l'alcool est la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac en France. Chaque année, environ 45 000 décès lui sont imputables de manière directe ou indirecte à-travers les maladies, en particulier les cancers, les accidents de la route, les suicides, les homicides et les accidents de la vie courante (chutes, incendies...). A la Réunion, l'histoire de l'alcool est surtout associée à celle du rhum. Celui-ci est présent depuis les années 1700, date à laquelle apparaissent, par ailleurs, les premiers alambics. Charles DESBASSYNS créera la première distillerie de l'île en 1815 à Sainte Marie. Le rhum connaîtra un plein essor après l'abolition de l'esclavage. La consommation de cette boisson, jusque-là réservée aux blancs, deviendra pour ces nouveaux affranchis, un des symboles de l’accession à la liberté. La Réunion connait aujourd'hui une diversification dans la consommation de boissons alcoolisées. Celle de la bière et du vin est en hausse, celle des « prémix » dans la population jeune est importante. Ainsi, les modes de consommation ont évolué avec le temps. A la Réunion, l'alcoolisme est un fléau, le nombre de personnes touchées entraîne un coût économique et social majeur. Les conséquences liées à ce phénomène, qu’elles soient directes ou indirectes sont deux fois supérieures à celles observées en métropole. Par ailleurs, la consommation d'alcool pur est constante à la Réunion contrairement à celle de la France métropolitaine. Dans l'approche de l'alcoolisme en général, il est important de préciser les différentes étapes qui conduisent une personne à devenir alcoolique. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 11 Selon, l'Association Nationale de Prévention de l'Alcoolisme et des Addictions (ANPAA), ce sont: le plaisir, l'habitude et la dépendance. Cette maladie peut toucher chaque individu, homme ou femme. Les composants élémentaires de l'addiction sont la substance, l'individu et le contexte. Chaque être humain ne réagit pas de la même manière à chaque drogue licite ou illicite. Néanmoins, l'alcool peut être consommé sans être dangereux pour la santé. En effet, pour un homme, l' O.M.S conseille de ne pas dépasser trois verres de boissons alcoolisées par jour et pour une femme : deux; avec au moins un jour d'abstinence par semaine pour les deux sexes. Ainsi, chaque être humain peut contrôler sa consommation d'alcool pour ne pas tomber dans la problématique de l'alcoolisme. En France, celle-ci est en nette augmentation ainsi que les taux de mortalité et de morbidité. Néanmoins, la population a réellement pris conscience de l’existence des risques. La politique de prévention est menée de front par l'ANPAA qui s'attache à l'amélioration de la prévention de proximité et demande une cohérence entre les objectifs du plan de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Toxicomanies (MILDT) et les budgets qui lui sont consacrés. Le développement de la prévention, qu'elle soit primaire (pour les non consommateurs) ou secondaire (pour les consommateurs sans problèmes déclarés), contribue à réduire les besoins de soins et d'accompagnement social qui mobilisent des moyens humains et financiers lourds. Aujourd'hui, la dépendance n'est plus vue comme un état de faiblesse mais comme une réelle maladie. Les hommes et les femmes dépendants peuvent maintenant espérer être soignés comme des patients et avoir l'espoir de devenir abstinents. Malgré cela, beaucoup de personnes n'assument pas leur maladie, notamment les femmes qui ont constamment peur d'être jugées. Le traitement de la dépendance à l'alcool n'est pas facile. Plusieurs éléments entrent en jeu. La consultation d'alcoologues ou d'addictologues, un traitement médicamenteux, la mise en place d'un suivi psychothérapeutique personnalisé et un accompagnement qui tient compte de l'environnement social et familial sont généralement nécessaires. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 12 Échanger avec d'anciens alcoolo-dépendants par l’intermédiaire de cercles de discussion apporte souvent une aide précieuse, surtout au début du traitement. Les périodes de rechutes font partie du processus global de la thérapie. B) Les symboliques de l'alcool à la Réunion L'alcool possède différentes symboliques pour la population réunionnaise. Il est souvent associé à la convivialité et aux festivités liées aux réjouissances des rites religieux (mariages, communions etc.). Les repas de fêtes peuvent difficilement se concevoir sans alcool. Le fait de boire un verre est considéré comme un rite de socialisation, il prend ainsi un caractère normatif. Lors de ces fêtes ou lors d'une visite de courtoisie, si un homme refuse ce verre, il peut être perçu comme étant marginal et se faire exclure du groupe. En effet, à la Réunion, ce refus peut être mal interprété, voire être considéré comme un manque de caractère et provoquer des railleries. Peu d'excuses sont acceptées, la plus courante, pour ne pas vexer l'hôte, est de prétexter une prise de médicament. Cette abstinence est plus tolérée, plus comprise quand il s’agit d’une femme. En dehors des fêtes, boire de l'alcool lors de veillées mortuaires fait partie des traditions locales. Comme le café, il permet de rester éveillé pour certains, d'oublier le chagrin pour d'autres et pour une minorité, c’est l'occasion de venir boire un coup gratuitement même si on ne connaît pas le défunt. D'autre part, l'alcool entrerait dans la pharmacopée réunionnaise au même titre que les tisanes. Nombre de qualités lui serait attribuées pour guérir les maux du corps et de la tête. Il serait un énergétique, un antidépresseur, un tranquillisant, il maintiendrait en bonne santé, permettrait de lutter contre le froid... Le rhum, lui, serait connu pour ses effets antalgiques et désinfectants. Jusqu'aux années 1970, dans certaines familles, il était salutaire d’offrir de temps en temps, aux enfants un verre d'alcool en guise de fortifiant. Il est intéressant de se remémorer la goute d'alcool posée sur les lèvres du nouveau-né lors de son baptême. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 13 L'usage social de l'alcool reste approximativement maîtrisé, ponctué par des éléments régulateurs tels que l'âge, le sexe, le statut social de la personne, le moment de la consommation et la conduite adoptée après avoir consommé. Ces éléments vont ainsi déterminer si cet usage est dit « normal » ou « déviant ». Ces deux mots rappellent les différences de représentations qui existent entre l’homme et la femme. La femme qui boit en public est dévalorisée, montrée du doigt, l'homme qui le fait devant « la boutique » est perçu comme étant convivial, voire normal. A ce titre, « la boutique » est définie par beaucoup comme étant l'espace masculin de l’alcoolisation, la femme en étant exclue. En effet, il n’y a pas si longtemps, à la fin d'une journée de travail harassant dans les champs ou sur les chantiers, les hommes se retrouvaient dans ce lieu pour discuter et boire leur « p'tit coup de sec ». Aujourd'hui, même si le contexte n'est plus le même, la vision de groupes d'hommes consommant leurs boissons alcoolisées à la « boutique » est ainsi légitimé et accepté. Lorsque l'alcoolisation devient permanente, la personne est stigmatisée. Cette stigmatisation s'accentue quand le sujet a des comportements déviants tels que la violence, le manque de respect. Ceux-ci sont alors perçus comme néfastes par la famille. Les proches mettront en évidence les effets négatifs de l'alcool sur la santé et négligeront, voire oublieront les bienfaits du produit. Cette prise de conscience est hélas minime et non automatique. elle se fait lorsqu'un membre d'une famille est concerné par les problèmes posés par l'alcoolisme. Les femmes, dans la société réunionnaise, sont facilement blâmées et décriées lorsqu'elles sont confrontées à la problématique de l'alcoolisme. L'image de la mère est très forte à la Réunion et elle se doit de tenir son rôle avec dignité. Alors elles se cachent pour boire. Annie 42 ans: « Pour les femmes, c'est la honte, alors que pour les hommes c'est normal. On perd toute dignité ». BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 14 C) Le fonctionnement du système alcool Pour aborder l'alcoolisme il faut étudier le modèle bio-psycho-social encore appelé éco-systémique. L'alcoolisme est un phénomène qui se déroule en trois champs différents: le champ biologique, l'alcool étant une molécule qui va avoir certains effets à court, à moyen et à long terme dans le corps ; un champ psychologique, où l'alcool est un psychotrope, un produit psycho-actif qui modifie la psychologie de l'individu et cette modification a une influence sur les conduites qui induiront dans le champ social des réponses d'adaptation qui vont dans certains cas créer un système stable, un entretien du phénomène. Il est alors nécessaire de noter que chaque être humain a en lui trois personnages: social, psychologique et biologique. Le personnage social c'est le citoyen, la mère de famille, le collègue. Le deuxième, à l'intérieur, c'est le personnage psychologique avec son histoire personnelle, son monde affectif, sa personnalité. Cet individu n'existe qu'à travers son personnage biologique, tous les phénomènes qui passent par son corps. Les trois sont liés mais c'est le personnage social qui sera stigmatisé car il est porteur du verre. II. LES PROBLÉMATIQUES DE L'ALCOOLISME FEMININ Les femmes sont dépendantes de la drogue, de l'alcool, de la cigarette mais aussi de leur téléphone portable, d’un homme, du sport, du travail ou encore du sucre et de la chirurgie esthétique. Elles sont de plus en plus nombreuses à prendre des substances néfastes, même lorsqu’elles sont enceintes, à se « piquer » ou à consommer des alcools forts. Boire un verre en famille, au restaurant est chose admise dans notre société. Mais lorsque la femme devient dépendante, elle se cache du regard de sa famille, car c’est elle qui représente toute la force du foyer. Selon le Docteur William LOWENSTEIN dans Femmes et dépendances, une maladie du siècle, dans le domaine des addictions, « la France est le pays des droits de l'homme et non celui de la femme ». En France, il existe peu de centres de soins spécifiques aux addictions féminines. Ces dernières sont très particulières et souvent mal évaluées parce que cachées par les femmes elles-mêmes. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 15 De plus, il explique que les femmes enceintes dépendantes ne font l’objet d’aucune attention particulière ; elles subiraient des menaces telles que « si vous continuez, on vous retire vos enfants »8 Pour ces femmes dépendantes, à leur souffrance s’ajoute un sentiment de culpabilité provoqué par leur incapacité à se conformer à l’image traditionnellement lisse de la femme que la société leur renvoie. A) Les spécificités biologiques D'un point de vue biologique, les effets de l'alcool varient d'un individu à l'autre selon le poids, l'accoutumance au produit, la vitesse d'élimination du foie ou l'ingestion d'aliments et ce quel que soit le sexe. Néanmoins, chercheurs et cliniciens ont démontré que pour une même quantité d'alcool ingérée, à âge et poids égal, le taux d'alcoolémie se révèle supérieur chez la femme. Cette différence s'explique en partie par le fait que l'alcool se dilue dans l'eau contenue dans le corps et non dans les autres tissus. Le corps de la femme étant plus pauvre en eau mais plus riche en graisse que celui de l'homme, le produit se concentre davantage dans le sang. De plus, les femmes disposent, en quantité inférieure, d'une enzyme responsable de la destruction d’une partie de l'alcool contenu dans l'estomac. C’est pourquoi sa consommation standard se limite à deux verres par jour contre trois chez l'homme.9 Ainsi les effets de l'alcool sur la santé sont plus néfastes chez la femme. Ils entrainent des problèmes spécifiques tels qu’une vulnérabilité somatique plus grande: cirrhoses plus précoces, polynévrite (inflammation des tissus nerveux), syndrome de KORSAKOFF (syndrome se caractérisant par une amnésie, une fabulation compensatrice) et syndrome d'alcoolisation fœtale (S.A.F). L'alcoolisme est plus destructeur chez la femme avec une surmortalité certaine. 8 William LOWENSTEIN, Femmes et dépendances, CALMANN-LEVY, 2007 9 Source OMS BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 16 B) Les spécificités psychologiques et l'abord psychanalytique Du côté psychologique, l'anxiété, la dépression et la solitude se retrouvent chez la majorité des femmes alcooliques. Près de 80% des femmes justifient leur alcoolisme en raison de problèmes psycho-affectifs. A la différence de l'homme, la femme alcoolique est plus sujette à la dépression et 50% d'entre elles font au moins une tentative de suicide. Les troubles anxieux sont également présents dans l'alcoolisme féminin et ils regroupent: les troubles paniques, la phobie sociale et l'anxiété généralisée. Les femmes sont également exposées aux dérèglements alimentaires : l'anorexie, mais aussi la boulimie favorisée par les propriétés désinhibitrices de l'alcool. D'un point de vue psychanalytique, l’absorption d'alcool fort par la femme s'inscrit dans une tentative de guérison. Celle-ci cherche l'oubli et l’apaisement de ses angoisses. Ceci est souvent cyclique car il dépend du niveau d'anxiété de la personne. Selon M.C CELERIER, Corps et fantasmes, l'alcoolisation féminine renvoie à un certain nombre de pulsions. Ces pulsions naissent de carences ou de surplus de liens mère/fille. Ainsi, la femme alcoolique aurait subi, dans les premiers moments de son existence, une emprise maternelle violente qui aurait touché le corps même. De plus, la femme est plus souvent victime d'une relation initiale persécutrice que l'homme. La rubrique « Les soins au féminin » est coordonnée par le docteur Pierre FUGERE. Il exerce à Montréal comme professeur titulaire à l’Université et comme obstétricien-gynécologue au Centre hospitalier de l’Université ainsi qu’à l’Hôpital Saint-Luc. Cette étude démontre que le passé et l’environnement des personnes jouent un rôle fondamental dans l'alcoolisme. Chez la femme, il est à noter, que non seulement elles subissent l'emprise maternelle, mais aussi la présence d'un père alcoolique dont elles se sont occupées tout en étant ignorées voire abusées par ce dernier. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 17 Dans l'approche de l'alcoolisme féminin, une autre spécificité est le rapport alcool/ maternité. Le syndrome d'alcoolisation fœtal est comme réservé à la femme. C) Le syndrome d'alcoolisation fœtal (SAF) Le S.A.F a pour cause la mise en contact précoce du fœtus avec le produit alcool. La toxicité de celui-ci durant la grossesse entraîne sur le fœtus, à des degrés variables, des malformations physiques, cérébrales et des troubles comportementaux générateurs de conduites d’exclusion sociale. En France, 8000 bébés naissent chaque année avec de graves handicaps du fait de la consommation d'alcool de leur mère pendant la grossesse. Ces chiffres concernent les situations d'alcoolisme avéré. 5 % des femmes enceintes ont des conduites d'alcoolisation qui mettent en jeu la santé et le potentiel de développement de leur bébé. 0,3 % des enfants sont repérés à la naissance avec un S.A.F et 0,7 % des enfants ne le sont pas. Ils sont cependant atteints, ce sont les troubles neuro-développementaux qui attirent l'attention des professionnels. La prévention tient une place très importante dans cette problématique. Il est indispensable d’informer les futures mères, en amont de la grossesse, quelque soit leur attitude face au produit alcool. En 2007, un pictogramme placé sur toutes les bouteilles d'alcool a permis à 77% des personnes interrogées lors d’une étude menée par l’INPES (Institut National de Prévention et d’Education Pour la Santé), de comprendre le message : « zéro alcool pendant la grossesse ». BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 18 DEUXIÈME PARTIE: REPRÉSENTATIONS SOCIALES D'ISOLEMENT ET DE CLANDESTINITÉ ET NOTIONS I. LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DE L'ALCOOLISME FEMININ A) Le concept de représentation sociale Amanda 42 ans: « Les représentations, les peurs face à des phénomènes sociaux qui dérangent, ça a la dent dure ». Le concept de représentation sociale est relativement récent même si DURKHEIM avait, le premier en 1898, introduit l'idée de représentation collective et attribué à la psychologie sociale la tâche d'étudier les dites représentations.10 S. MOSCOVICI, en 1961, introduit le concept en psychologie sociale. Il définit la représentation sociale comme « un système de valeurs, de notions et de pratiques relatives à des objets, des aspects ou des dimensions du milieu social, qui permet non seulement la stabilisation du cadre de vie des individus et des groupes, mais qui constitue également un instrument d'orientation de la perception des situations et d'élaboration des réponses ». Denise JODELET a écrit: « la notion de représentation sociale qui, depuis plus de vingt ans, a suscité de nombreux travaux et débats en psychologie sociale, tend à occuper une position centrale dans les sciences humaines. Ce mouvement, amorcé en France sous l'impulsion de S. MOSCOVICI, rencontre un intérêt croissant dans divers pays, en Europe et outre-Atlantique ».11 Les représentations sociales font partie intégrante de la vie en société, de la définition de chaque individu et elles l'aident dans sa vie de tous les jours. 10 Gustave Nicolas FISCHER, Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale, DUNOT, 2003 11 Denise JODELET, Les représentations sociales, PUF 1993 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 19 « Comment construisons-nous le réel? Quelle image avons-nous d'autrui? Comment pensons- nous les situations dans lesquelles nous sommes impliqués de l'extérieur? La psychologie sociale s'est intéressée aux mécanismes cognitifs par lesquels nous pensons et percevons le social. »12 Les représentations sociales sont fondées sur nos croyances et sur nos perceptions d'autrui. Les idées que nous nous faisons d'autrui sont formées à partir d'échanges sociaux. Nous percevons les comportements de nos semblables de manière positive ou négative selon les règles que nous avons apprises. Il est à noter que l'alcoolisme est de manière générale réprouvé. Il est l'objet de préjugés et de stéréotypes. Ces derniers permettent d'approfondir les mécanismes d'élaboration mentale et sociale du réel et de préciser le fonctionnement des opinions et des croyances collectives. Le préjugé peut être défini comme « une attitude comportant une dimension évaluative, souvent négative, à l'égard de types de personnes ou de groupes, en raison de leur appartenance sociale. C'est une disposition acquise dont le but est d'établir une différenciation sociale. »13 Le stéréotype, terme créé par LIPPMANN (1922), « est une manière de penser par clichés, qui désigne les catégories descriptives simplifiées basées sur des croyances et par lesquelles nous qualifions d'autres groupes sociaux. » Il à été introduit en psychologie sociale pour définir les phénomènes de croyances et de représentations. Si, pour LIPPMANN, les stéréotypes sont ces « images dans nos têtes », qui s'intercalent entre la réalité et notre perception, en provoquant une schématisation, ce concept désigne aujourd'hui de manière plus large l'ensemble des catégories dans lesquelles nous plaçons les autres. 12 Gustave Nicolas FISCHER, Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale, DUNOT, 2003 13 Gustave Nicolas FISCHER, Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale, DUNOT, 2003 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 20 B) Les représentations sociales de l'alcoolisme féminin Isabelle, 60 ans: « un jour ma mère m'a dit, « j'aurais préféré que tu aies le SIDA au lieu d'être alcoolique , ça m'a anéantie ! » Au cours de l’histoire, la consommation d'alcool était réservée aux mâles. Au début du vingtième siècle, celle-ci et la cigarette étaient interdits aux femmes de bonne famille. Les citoyennes dites « de troisième ordre », les filles des rues ou des maisons closes, étaient considérées comme perdues ; elles s'arrogeaient donc le droit de boire et de fumer. Certaines intellectuelles, des artistes, des demi-mondaines et d’autres marginales en ont fait autant. Depuis la nuit des temps, la fête, les excès et les dépendances n’étaient réservés qu’à la gent masculine. Avant de se marier un vrai homme se devait de vivre sa vie mais la femme respectable était éduquée dans l’objectif d’arriver au mariage vierge de toute expérience. Dans l’imaginaire collectif, la consommation de drogues est masculine au point que, même après 1968, le consommateur d’héroïne était associé à la figure du jeune homme aux cheveux longs, alors que le premier décès par overdose en 1969 concernait une jeune fille de 19 ans retrouvée morte sur une plage du sud de la France. D'un point de vue sociétal, de 1960 à 1980 le rapport entre femmes et hommes alcooliques est passé d’une femme pour douze hommes à une pour quatre. Cet apport statistique a introduit un possible parallélisme entre une augmentation en valeur absolue du nombre de femmes alcooliques et le phénomène de libération des femmes. Consultant plus facilement, elles se sont fait davantage connaître. Mais l'alcoolisme féminin est encore marqué aujourd'hui par un grand sentiment de honte et de culpabilité. En effet, les femmes se cachent pour boire en raison du regard sévère porté par la société. La femme symbolise la gardienne de la cellule familiale ; la mère, celle qui donne des valeurs, qui enfante, belle et attentionnée. Elle est le symbole de la perfection. Les motivations des femmes ou des hommes qui boivent ont un lien avec les places occupées dans la société. Ces dernières s'édifient au sein de rapports de force, de conflits ou de tensions. Le cas de la femme au foyer est bien spécifique. Celle-ci correspond à l’image de la femme parfaite décrite ci-dessus. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 21 Aussi se cache-t-elle de plus en plus et culpabilise lorsqu’elle perçoit le regard de ses enfants. Ceuxci se sentent coupables à leur tour d'avoir honte de leur mère et de ne pouvoir lui dire qu'elle est alcoolique. Tous ces facteurs contribuent à maintenir l'alcoolisme féminin dans la clandestinité. De plus, les conditions de vie des femmes, inégalitaires en matière de : salaire, interruption des études, grossesses, limitation des horizons professionnels... constituent un terrain favorable au développement de l'alcoolisme. C'est une constante de la description sexuée des faits sociaux: le général est masculin, le particulier ou le différent est féminin. Cette maladie fait peur car il représente un désordre de la « nature féminine », les femmes perdent leur féminité (pudeur et effacement) et deviennent semblables aux hommes dans les lourdeurs de l'ivresse. Comme il a été décrit précédemment, les femmes dépendantes de l'alcool sont beaucoup plus vulnérables que les hommes. A cause du côté tabou de cette problématique due aux représentations sociales de la société réunionnaise, les femmes n’osent pas en parler de peur d'être jugées, elles mettent du temps à envisager des soins et certaines ne le font pas du tout. Cela a pour conséquences une dégradation de leur santé et de celle de leurs enfants. Elles développent des maladies graves plus vite que les autres Le taux du SAF reste, encore aujourd'hui, très important. Sur le plan professionnel, il est déjà difficile d’admettre que l'alcoolisme d'un homme est une maladie ; encore moins lorsqu’il s'agit d'une femme ! Généralement, l'entourage professionnel se rend compte des problèmes que rencontre la femme dépendante. Elle est souvent en retard, s’absente de façon répétée et elle ne fournit pas un travail de qualité. A terme, elle sera victime d’ un licenciement sans qu’aucune adaptation ne lui soit proposée. Cette méconnaissance de la maladie alcoolique tend à renforcer sa clandestinité et à maintenir la personne qui consomme de l’alcool dans une attitude de dévalorisation d’elle-même. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 22 C) Les conséquences des représentations sociales au sein de l'environnement familial Au sein du couple, il est moins évident pour un homme d'accepter la maladie de sa femme et ainsi solliciter de l'aide. Selon Clare WILSON et Shirley OTTO dans La femme moderne et l'alcool, l'alcoolisme de la femme fait naitre un sentiment de honte très violent chez les membres de la famille. Le conjoint fait tout pour conserver le secret pour les enfants mais également pour préserver son statut d'homme qui est menacé par son impuissance à maitriser l'alcoolisme de sa femme. Dans ce contexte, il va favoriser l'isolement de sa femme mais aussi lui interdire de consulter un médecin, de commencer le processus de soins. De plus, il ne sollicitera pas non plus les organismes et ne mentionnera pas la problématique de la dépendance de sa femme comme la cause des problèmes familiaux. « En général, on ne recours à l'aide extérieure que tardivement, lorsque toutes les tentatives de résoudre le problème en famille ont échoué l'une après l'autre: dans la logique d'une culture qui attache une grande valeur à l'autonomie familiale, la plupart des familles utilisent d'abord les ressources intrafamiliales pour tenter de résoudre le problème de l'alcoolisme et elles ne se tournent vers les recours extérieurs que plusieurs années après avoir identifié le caractère excessif de la boisson. »14 Dans ce contexte, les représentations sociales de la maladie alcoolique, au sein de la famille, accentue la prise en charge tardive voire inexistante de la femme dépendante. Le conjoint se détache, camoufle fortement la maladie de sa femme pour sauver une certaine vie sociale et familiale et ne pas subir les préjugés de la société. Ainsi, il faut souvent attendre un événement grave (maladie, problématique liée aux enfants) pour déclencher le processus de soins. Il est donc imposé à la femme et peut échouer. Celle-ci doit décider elle-même d'arrêter de consommer de l'alcool et la famille s'inscrira dans un soutien permanent alors que dans la plupart des cas le conjoint reste réticent à la prise en charge médicale de sa conjointe. 14 Clare WILSON, Shirley OTTO, La femme moderne et l'alcool,, BROCHE 1995 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 23 II. LES NOTIONS D'ISOLEMENT SOCIAL ET DE CLANDESTINITÉ ALCOOLIQUE « Lorsque se manifestent les premiers symptômes d'intempérance, l'alcoolique et son conjoint s'accordent et généralement à nier les dangers de la boisson et l'existence de tout problème. Des excuses du genre elle ne s'est pas rendue compte qu'on lui remplissait son verre dès qu'il était vide ou encore il avait bien besoin de se détendre sont couramment invoquées et acceptées. Le refus et les rationalisations peuvent se poursuivre bien au-delà du stade où il est devenu évident pour les deux conjoints que les états d'ivresse sont de plus en plus fréquents et causent de plus en plus d'embarras au couple comme à la famille et aux amis. »15 A) L'isolement social « Parler d’isolement social, c’est se démarquer tout d’abord d’un a priori qui consiste à penser que « vivre seul(e) » en constitue l’élément premier ou encore que la solitude en est un vecteur manifeste. Or, ni le statut de « personne isolée », ni le vécu de « la solitude » ne constitue un facteur déterminant de l’isolement social car ils ne peuvent être en soi associés à un mal-être ou une souffrance personnelle. A contrario, on peut considérer que l’attitude de repli sur soi et la rupture avec son environnement social sont des facteurs majeurs de l’isolement social. Ainsi, les situations de ce dernier sont, par essence, des situations problématiques et échappent le plus souvent à l’action ordinaire des professionnels par le caractère peu visible de leur réalité. » 16 L'isolement social commence lorsque l'environnement social ne veut plus fréquenter la femme malade alcoolique parce qu'il a honte et veut éviter les scènes déplaisantes. Il est présent chez les deux sexes mais il est prononcé chez la femme car elle se l'impose elle même. Annie 42 ans: « mes enfants sont encore petits, ils ne savent pas ce qui se passe, ils ne savent pas que leur mère boit pour oublier cette vie..... quoique la plus grande commence à me regarder d'un œil douteux. » Les femmes qui boivent chez elles s'inscrivent alors dans un alcoolisme clandestin du fait d'un sentiment de honte éprouvé à l'égard de sa famille et de ses amis. 15 Clare WILSON, Shirley OTTO, La femme moderne et l'alcool,, BROCHE, 1995 16 Étude sur l'isolement social, Nantes 2007 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 24 B) La clandestinité alcoolique La clandestinité se définit comme: « la situation de ceux qui mènent une existence clandestine. Entrer dans la clandestinité. »17 Le caractère essentiel de l'alcoolisme féminin est d'être un alcoolisme caché. Cette clandestinité referme le cercle vicieux de la solitude et de l'abandon. C'est la naissance de la descente dans l'obscurité de la névrose alcoolique qui laisse une sensation d'inachèvement, de morcellement même. La femme malade alcoolique met alors en place une stratégie pour qu'il ne ressorte rien de sa consommation. Elle va s'alcooliser en début de journée, en évitant une intoxication trop forte pour être à jeun au retour des enfants et au retour de son conjoint à la maison. Une compréhension générale de la problématique des représentations sociales de la maladie alcoolique de la femme réside justement dans le fait que cette problématique n'existe pas puisqu'elle est clandestine. Dans ce contexte, il est alors difficile d'identifier, de comprendre et d'analyser cette problématique. Aujourd'hui, nous abordons la question sous un angle bien spécifique (différencier la maladie alcoolique chez un homme et la maladie alcoolique chez la femme). Ludivine 26 ans: « En public je ne bois jamais, lorsque je suis chez moi c'est là que je me descends trois packs de bière ». 17 LAROUSSE 2010 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 25 TROISIÈME PARTIE: ACCOMPAGNEMENT TRIPARTITE DANS LA RÉHABILITATION SOCIALE I. L'ACCOMPAGNEMENT PSYCHO-SOCIAL DE LA FEMME MALADE ALCOOLIQUE A) Le concept d'accompagnement La notion d'accompagnement social a été mise en avant dans les années 1980 par les associations luttant contre les exclusions. Elle fait son apparition dans la loi de 1992 dans la partie concernant le RMI: c’est un moyen pour développer l'insertion sociale des bénéficiaires du RMI. Selon la charte de l'accompagnement social signée en 2003, « celui-ci se lie à d'autres mots-clés à savoir: insertion, contrat; il est mis en œuvre pour permettre l'accès à des droits (logement, santé, emploi...). Ce concept est issu de la mise en œuvre des différentes politiques de lutte contre les exclusions et des dispositifs qui en ont découlé. C'est un outil d'intervention et un moyen ou un levier privilégié pour favoriser l'insertion et l'autonomie des personnes. Il enclenche un processus dynamique ». Selon Brigitte BOUQUET et Christine GARCETTE, l'accompagnement social vise à « aider les personnes en difficulté à résoudre les problèmes générés par des situations d'exclusion, et à établir avec elles une relation d'écoute, de soutien, de conseil et d'entraide dans une relation de solidarité, de réciprocité et d'engagement de part et d'autre ».18 Selon elles, il existe deux types d'accompagnement social: –le généraliste qui repose sur une approche globale de la personne et de ses difficultés; il privilégie l'écoute, le soutien et l'échange. Le travailleur social est alors médiateur entre la personne et son environnement, –le spécifique qui s'inscrit « dans le dispositif public des diverses politiques transversales (RMI, FSL, Politiques de la ville, emploi...) ». Il est conditionné par un financement. Les buts, moyens et finalités sont fixés par des règles définies par les lois. 18 B BOUQUET, C GARCETTE, Assistante sociale aujourd'hui, MALOINE, 2002 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 26 Cet accompagnement sous-entend la notion de contrat.19 Dans l'accompagnement des femmes dépendantes il est intéressant de prendre en compte les modes d'accompagnement connus à savoir l'accompagnement médical et le social. B) L'accompagnement thérapeutique L'accompagnement thérapeutique de la femme alcoolique est également spécifique. Généralement, il est réalisé par le médecin généraliste qui détecte la maladie et amorce le traitement. Encore une fois, le caractère tabou de l’alcoolisme au féminin et le fait que la femme a honte d'en parler rendent difficile un diagnostic précis. L'approche thérapeutique comporte les phases suivantes: La phase exploratoire qui va permettre d'identifier la place du produit dans sa vie. La phase de la motivation au changement qui permet la reconnaissance du problème alcool par la femme et la prise de décision de le régler. Cette phase s’appuie sur la technique de « l’entrevue motivationnelle » de MILLER et ROLLNICK qui enseignent comment utiliser l’ambivalence ou la résistance chez la femme pour l’aider à changer, tout en respectant son rythme. Le manque de motivation de la patiente devient, dans cette perspective, un défi lancé aux habiletés thérapeutiques du médecin, et non un tort dont il faut la blâmer. Si les techniques de confrontation ont eu leur heure de gloire, elles sont aujourd’hui remises en question, notamment en présence de personnes qui consultent un médecin. En effet, il importe avant tout de créer un lien thérapeutique, un climat de confiance avec la patiente. La confrontation risquant au contraire de la faire fuir. De plus, il est important de prendre en compte l'environnement de la femme alcoolique. Ainsi, rencontrer le conjoint ou une personne significative est nécessaire car l'alcoolisme a des répercutions sur l'ensemble de la famille. Cette démarche permet d'apprécier la capacité de soutien du conjoint ou au contraire, son influence s’il est lui-même en état de dépendance. 19 B BOUQUET, C GARCETTE, Assistante sociale aujourd'hui, MALOINE, 2002 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 27 Le médecin devra appréhender le phénomène de la codépendance. En complément, le problème de la garde des enfants dans cette problématique devra être considéré dans toutes les approches thérapeutiques. Enfin, le traitement peut se faire en externe (la patiente se soigne à domicile) ou en interne (structures spécialisées) lorsque les cas sont graves et complexes (alcool et grossesse) et lorsque la dépendance est mixte (alcool et tranquillisant). Lors de mes phases d'observation et de mes recherches, j’ai constaté que la résolution de la problématique de l'alcoolisme féminin nécessite un accompagnement social. Celui-ci fait partie de la prise en charge globale de la personne. C) L'accompagnement social de la femme dépendante et la relation d'aide L'accompagnement social de la femme alcoolique doit être tout aussi important. Yves COULOMBIER, travailleur social en alcoologie, en propose un en cinq étapes. Première démarche : établir un diagnostic en reconnaissant la situation d’alcoolisme qu’il ne faut pas confondre avec l’alcoolisation. Vient ensuite le « dire ». Le travailleur social ne doit pas envisager dans cette phase le non dit au prétexte de la non violation de la vie privée de la personne ; mais au contraire le dire, en parler, protéger l’entourage, aider la personne alcoolique, expliquer la situation délicate dans laquelle elle se trouve. Une des nécessités pour éloigner l’alcoolisme est de permettre d’en raconter l’histoire, qu’il s’agisse d’une femme ou d’un homme. Puis, vient l’étape des déclencheurs du changement. Le seul ressenti qui puisse être moteur est celui de la personne concernée et pas celui de l’intervenant. Un alcoolique n’a envie de modifier sa consommation que lorsque son alcoolisation présente à ses yeux plus d’inconvénients que d’avantages et qu'il a une meilleure compréhension de la fonction du produit dans sa vie. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 28 Cette étape renvoie à la loi du 2 Janvier 2002 qui rend la personne acteur du changement de sa propre situation. Quatrième étape, celle de l’orientation du travailleur social vers le service idoine (ambulatoire, hospitalière ou de postcure). Enfin intervient l’abstinence, marquée au début par une intense phase d’hyperactivité qui permet à la personne de remplir le vide laissé par le renoncement au produit. Des rechutes sont non seulement possibles mais font partie du processus thérapeutique. Il faut s’y préparer et ne pas les vivre comme un échec professionnel. Finalement , ce qui apparaît le plus favorable au changement, c’est ce qui permet à la personne de se prendre en charge, l’essentiel étant de transformer l’obligation en adhésion. Le travailleur social peut faciliter l’émergence de solidarités entre malades alcooliques. Il existe plusieurs mouvements en France dont un qui s’adresse uniquement aux femmes : « SOS ALCOOL FEMMES » lequel a pour objet de rendre l’accès plus facile à celles qui sont hésitantes à l’idée de parler de leur alcoolisme. D’autres femmes ont été et sont soutenues par des groupes mixtes. Comme cette mixité ne les gêne pas, certaines prennent même des responsabilités dans ces unités.20 Ainsi, les accompagnements thérapeutique et social sont indissociables. C'est l'approche globale. Des similitudes sont à noter et celles-ci scellent le travail tripartite: médical, thérapeutique (psychologique) et social. Comme le remarque Yves COULOMBIER, « le travailleur social doit affirmer et revendiquer sa place dans l'accompagnement des personnes dépendantes ». Le professionnel doit identifier les difficultés de la prise en charge (rechutes, échecs, incrédulité du patient qui a besoin d'être aidé) afin d'être tolérant. Le malade peut être très doué pour faire douter l’intervenant car il est dans le déni, il n'a pas conscience d'être malade. 20 SOS femmes crée par Laure CHARPENTIER BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 29 Le travailleur social devra se garder d’être ni dans le reproche, ni dans une émotion parfois trop fusionnelle. Il se positionnera comme partenaire et non comme inquisiteur et accordera du sens à l'alcoolisation. Il doit reconnaître qu'il est utile dans la prise en charge. En complément, il centrera son action sur la souffrance et non sur le symptôme. Cette action permet alors de parler avec le patient mais pas du patient. Le malade alcoolique a besoin d'une écoute active sans avoir besoin en premier lieu de réponses. « Il ne faudrait pas reproduire dans l’accompagnement, ce qui pourrait bien être à l’origine de l’alcoolisation : la discordance entre ce qui est attendu et ce qui est trouvé. D’où l’importance de l’aborder à partir de ce que l’on constate, en renonçant à tout jugement, pour faire place au questionnement. Démarche élémentaire dans le travail social, mais peut-être encore plus délicat face à cette population que face à toute autre ! »21 L'alcoolisme est une maladie à retentissement social qui nécessite toute l'attention du travailleur et des organismes sociaux. L'entretien est le meilleur outil dont dispose le travailleur social pour entrer en relation avec la personne malade. Il doit mettre en place, une relation d'aide pour lui permettre de rendre possible l'abstinence et la réintégration sociale. Cette relation d'aide, dans l'accompagnement des femmes dépendantes, fait écho aux termes suivants: l'écoute, la rencontre, la relation empathique, la confiance. Écouter vient du latin « auscultare » qui signifie s'appliquer à entendre22. Dans le langage social, on parle d'écoute active. L'écoute favorise ainsi la première rencontre avec la personne. 21 Jacques TREMINTIN, Quelle intervention auprès de la personne alcoolique. Publication n°591 du 4 Octobre 2001 lien social. 22 LAROUSSE 2010 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 30 La rencontre est définie par Cristina De ROBERTIS comme « le point de départ de l'action du travailleur social avec le client. Il peut s'agir d'une demande directe formulée par le client, il peut s'agir d'une demande du service employeur, d'une demande directe formulée par un autre service (signalement), il peut s'agir d'un mandat légal (PMI, protection de l'enfance, justice...), ou encore il peut s'agir d'un problème social perçu par le travailleur social lui-même ou par une équipe de travailleurs sociaux. Ce point de départ conditionnera inévitablement la suite de la démarche professionnelle ».23 Au cours du vingtième siècle, le concept d'empathie se répand dans les sciences humaines. Cette notion a fait l'objet de nombreuses réflexions de la part de psychiatres et de psychanalystes avec les théories de Heinz KOHUT et de celle de théoriciens et de praticiens de la relation dont Carl RODGERS. Selon ce dernier, « L'empathie consiste à saisir avec autant d'exactitude que possible, les références internes et les composantes émotionnelles d'une autre personne et à les comprendre comme si l'on était cette autre personne ».24 L'empathie permet au professionnel de comprendre ce que ressent l'autre mais sans s'impliquer émotionnellement. Il faut prendre de la distance tout en étant à l'écoute, il ne faut ni trop s'ouvrir ni trop se fermer aux problèmes des personnes. Ici, l'empathie renvoie à ses propres représentations de l'alcoolisme. Il est essentiel de travailler sur ses propres limites lors de l'accompagnement des personnes dépendantes. Enfin, la confiance, dans la relation avec la femme dépendante est primordiale. Celle-ci lui permettra de parler de son histoire sans tabous et sans peur d'être jugée. Ainsi, le travailleur social pourra établir une relation avec la personne malade afin de participer à sa responsabilisation face à sa maladie et d’amorcer avec elle le processus de changement qui lui permettra de prendre conscience de sa dépendance et de tendre vers une réhabilitation sociale. 23 C De ROBERTIS, Méthodologie de l'intervention en travail social, BAYARD, 2007 24Définition du dictionnaire de psychologie DORON-PAROT, PUF. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 31 II. LA PLACE DE LA FAMILLE DANS LA PRISE EN CHARGE DE LA FEMME MALADE ALCOOLIQUE « La famille est un groupe social caractérisé par la cohabitation et la coopération d'adultes de deux sexes dont deux au moins entretiennent des relations sexuelles socialement approuvées et qui élèvent ensemble des enfants nés de cette union ou adoptés. » G.I.MURDOCK 1972. « On peut définir la famille comme articulation de liens d'union de parenté et de germanité. Cette définition de la famille en tant que fonction permet de ne pas préétablir le contenu d'une famille : aujourd'hui une famille ne prend pas nécessairement son origine dans le mariage ( union libre) elle peut réunir des gens de même sexe ou des recompositions de famille. » Claude LEVI-STRAUSS 1979. A) Famille et système alcool Famille, du latin familia, « est un ensemble formé par le père, la mère (ou par l'un des deux) et les enfants. » Sociologiquement, on parle de famille nucléaire ou conjugale qui se définit comme « un groupe domestique réunissant au même foyer, uniquement le père, la mère et les enfants non mariés. »25 Plusieurs schémas relationnels se mettent en place lorsque c'est la femme qui s'alcoolise dans le foyer. En relation avec la théorie d'Henri GOMEZ, sur la schématisation des relations de couple, il se peut que le couple consomme à deux et se maintienne conjointement dans l'alcoolisme. Ensuite, le mari peut s'inscrire dans une démarche d’incompréhension de la situation ou bien il peut se placer en dominant (toute puissance, liberté d'action) ou en victime : il peut se montrer agressif et exiger de la part de sa conjointe un traitement et une abstinence efficaces.. Cette relation que vit le couple se transforme en vie à trois avec le facteur alcool. Souvent, celle-ci se solde par une séparation qui parfois peut s'avérer être bénéfique pour la femme dépendante. 25 Le petit Larousse 2010 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 32 Les enfants qui évoluent dans un milieu familial où la mère est malade alcoolique connaissent le plus souvent le sentiment de honte, s’enferment dans le secret et dans l'isolement social. B FAORO-KREIT et D HERS mettent en exergue cette théorie. L’enfant a peur que ses amis apprennent qu’un de ses parents est malade alcoolique, et, par conséquent, d'être rejeté et de subir les critiques, les jugements négatifs ou la pitié. Il est prêt à tout assumer, à minimiser, à excuser, à réparer ou à nier pour que cela ne se sache pas. Ce silence peut aussi lui être imposé par le parent non alcoolique. Cela aura pour conséquence de renforcer l’isolement social de l’enfant. Dans ce contexte, il sera enfermé dans un mutisme, incapable de partager ni d'exprimer les sentiments qu'il ressent. B) La codépendance L'alcoolisme, dans le système familial, nuit gravement à l'équilibre de la famille et à la santé mentale du conjoint et des enfants. Les méfaits de la maladie de la personne dépendante rejaillissent sur tous ses proches. Dans L'Assommoir, Émile ZOLA fait référence à la notion de coalcoolisme qui démontre que les personnes fréquentant assidument un ou une alcoolique sont difficilement capables de gérer leur vie par la suite. Aujourd'hui, la définition de la codépendance est quelque peu étendue. Dans un essai de l'ouvrage Co-Dependency, An Emerging Issue, Robert SUBBY la définit comme « un état affectif, psychologique et comportemental apparaissant à la suite du contact et de la pratique prolongés d'une série de règles répressives. Règles qui empêchent le sujet d'exprimer ouvertement ses sentiments et d'aborder de manière directe les problèmes personnels et interpersonnels. » Pascal, mari de Gilberte: « la codépendance, pour moi, c'est faire face tous les jours à ma femme qui ne m'entend pas lui dire je t'aime et je t'aimerai toujours ». La famille de la personne malade alcoolique, est intimement liée à la problématique de la dépendance et vit au quotidien les difficultés qui y sont liées. Chaque système familial est unique. Les membres qui en font partie gèrent, chacun à sa façon, les problèmes posés. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 33 La femme, dépendante de l'alcool, va le plus souvent se sentir coupable de boire, éprouvant par làmême de plus en plus de honte. Dans ce cercle infernal, elle n’a plus d'estime de soi et augmente sa consommation. Enfermée dans ce système, il va être de plus en plus difficile à son entourage de solliciter de l'aide. Cela peut la conduire à une rupture avec son environnement social et familial et la mener quelque fois à demander elle-même de l'aide. C) La place de la famille dans l'accompagnement La famille tient un rôle important dans la réhabilitation des femmes malades alcooliques. Elle joue un rôle positif dans le système de réhabilitation et permet à la malade d'être soutenue et accompagnée par ses proches et ainsi de ne pas se sentir seule et abandonnée. Les couples peuvent se reconstruire et les liens amoureux et affectifs peuvent renaître. Dans une psychothérapie de la famille, la prise en charge peut permettre à chaque membre de la famille de se reconstruire, d'accepter la maladie de la femme, de la mère. Leur implication permet de renouer le dialogue, de comprendre la maladie alcoolique. La famille participe à lutter contre les représentations sociales, la solitude et la honte que connaissent les femmes malades alcooliques. De plus, le soutien du conjoint dans le processus de réhabilitation permet d'éviter le placement éventuel des enfants, une grande culpabilisation de la mère et de favoriser également un contexte de soins plus ou moins imposé. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 34 CONCLUSION ET PERSPECTIVES Après avoir mené ma recherche théorique et pratique sur la maladie alcoolique et des spécificités liées à la femme, il est intéressant de constater que la maladie alcoolique chez la femme est une problématique dont on parle récemment. Les silences sont encore très présents dans nos société dites modernes. La prévalence de l'alcoolisme féminin, se traduit, statistiquement essentiellement au travers du S.A.F. La place des représentations sociales est importante dans la problématique de l'alcoolisme féminin et est lourde de conséquences dans la prise en charge des femmes dépendantes. Elles freinent les soins des femmes et amènent des constats erronés de la maladie au sein de l'environnement familial et social. Dans une meilleure connaissance de la problématique de l'alcoolisme féminin, il est primordial de comprendre l'histoire de la femme, de l'accompagner dans un climat de confiance afin de lui permettre de combattre la peur du jugement, la honte que suscite sa maladie. De plus, dans l'accompagnement de la femme malade alcoolique, il est alors important de prendre en compte le besoin d'un travail pluridisciplinaire entre le médical, le social et la famille qui joue un rôle important. Avec un certain recul aujourd'hui, je peux dire que cet accompagnement tripartite a manqué à l'île Maurice. L'accompagnement est basé essentiellement sur le social: la réhabilitation sociale, un travail qui vise une réinsertion. A Maurice, il n'y a pas de psychologues ni psychiatres qui participent à la prise en charge globale des femmes dépendantes. Ainsi, il serait intéressant de proposer aux familles qui sont confrontées aux problématiques de la dépendance d'un proche, des réunions d'informations, des séances de prévention afin qu’elles comprennent mieux l'importance de leur investissement dans la prise en charge de ce proche, l'intérêt, le déroulement de la thérapie en tenant compte de la rechute éventuelle et du combat éternel à mener contre le produit qui est à l'origine de la dépendance. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 35 Comme il a été démontré, il est difficile pour le conjoint d'accepter la dépendance de sa femme et de demander de l'aide en toute sérénité. Il faudrait alors lui offrir la possibilité de pouvoir s'exprimer, travailler également ses propres peurs, ses propres préjugés afin de participer pleinement à la réhabilitation de sa femme. De plus, il serait sans doute efficace de travailler avec la famille (conjoint et enfants) afin de solliciter leur participation active au traitement de la femme, de la mère. Cela permettrait à moyen et long terme de recréer les liens familiaux, la communication et la compréhension des évènements qui se sont produits dans la famille lors de la dépendance de la femme. Celle-ci se sentirait également plus soutenue, plus entourée, plus comprise et aurait moins le sentiment d’être jugée par ses proches. Pour permettre la mutation des représentations sociales, pour favoriser un changement de pensée de la société, il est intéressant d'accorder de l'importance au système de prévention et d'information. C’est pour cela que l'Association Nationale de Prévention de l'Alcoolisme et de l'Addictologie (ANPAA) lance un appel aux politiques pour une meilleure prise en compte de ce système. L'ANPAA s'attache à l'amélioration de la prévention de proximité et demande une cohérence entre les objectifs du plan de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Toxicomanies (MILDT) et les budgets qui lui sont consacrés. L'ANPAA demande la mise en place d'un plan quinquennal de la prévention du risque alcool avec une mise à niveau progressive des moyens, de privilégier la sensibilisation des enfants scolarisés et des jeunes adultes et de renforcer les actions menées auprès des segments de populations ayant des risques particuliers du fait de leurs conditions de vie ou de circonstances difficiles. Le développement de la prévention, qu'elle soit primaire (pour les non consommateurs) ou secondaire (pour les consommateurs sans problèmes déclarés), contribue à réduire les besoins de soins et d'accompagnement social qui mobilisent des moyens humains et financiers lourds. La communication, la recherche et l'information sont des outils du changement de représentations d'une société surtout quand celles-ci ne sont pas justes. Enfin, ce qui me semble important dans l'accompagnement social des femmes dépendantes et de pouvoir participer à une réduction des risques, comment les limiter et quelle est la conduite à tenir? La relation d'aide permet de ne pas s'inscrire dans une volonté de guérison mais dans une volonté de réduire les risques. BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 36 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 37 BEVERAGGI Adèle DU ADDICTOLOGIE 2012 SUFT 38 BIBLIOGRAPHIE LES OUVRAGES ✗ Brigitte BOUQUET et Christine GARCETTE, Assistante sociale aujourd'hui, Éditions MALOINE, 2002 ✗ Gustave-Nicolas FISCHER, Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale, Éditions DUNOT 2003 ✗ Henri GOMEZ, La personne alcoolique, Éditions DUNOT 2006 ✗ Denise JODELET, Les représentations sociales, Éditions PUF, 1993 ✗ Professeur Michel LEJOYEUX, Du plaisir à la dépendance, nouvelles addictions, nouvelles thérapies, Éditions DE LA MARTINIÈRE 2007. ✗ Dr William LOWENSTEIN, Dominique ROUCH: Femmes et dépendances, une maladie du siècle. 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