Une expérience Ecole - Entreprise

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Une expérience Ecole - Entreprise
Une expérience Ecole - Entreprise
à la S.E.S. A. Doucet (Nanterre)
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. Historique
Depuis plusieurs années, nous avons rencontré de grosses difficultés à trouver des lieux de stage pour les élèves de
mécanique générale. Après débat au sein de l'équipe, nous avons retenu le principe de stage hors spécialité, lorsqu'on
ne pouvait pas en trouver dans la spécialité professionnelle de l'élève. Mais il s'agit bien entendu de secteurs proches
et complémentaires, qui utilisent des compétences requises également dans l'atelier.
Ainsi Claude, 17 ans, effectue un stage chez un artisan en métallerie à Fourqueux
(78) A cette occasion, il rencontre un patron d'une P.M.E. voisine. Cette P.M.E. emploie, elle, spécifiquement des
mécaniciens et travaille beaucoup avec l'atelier de métallerie (en sous-traitance).
Ils discutent ensemble de la formation professionnelle de Claude. Le patron lui indique que « des mécaniciens, il en
cherche », etc... Claude nous parle de cette rencontre. Quelques jours plus tard, le professeur de mécanique et celui
d'enseignement général sont reçus dans l'entreprise ISO-INDUSTRIE.
Avant cette visite, il nous semblait déjà intéressant et possible de proposer une démarche contractuelle écoleentreprise comme un moyen de répondre à la demande initiale du patron, au lieu de se transformer en bureau
d'embauche.
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Présentation de l'entreprise ISOINDUSTRIE
Au point de départ cette entreprise est familiale elle repose sur un homme, une idée Ce patron a mis au point un
équipement permettant la projection sous pression d'un produit minéral (pierre-ponce en fibre) sur les murs, les toits
de bâtiments.
Le marché est porteur, à la suite des différents « chocs pétroliers », et compte tenu de politiques d'économie d'énergie.
L'entreprise prend de l'essor. Aujourd'hui, elle compte une quinzaine de personnes. Sur le marché français, elle n'a
qu'un concurrent dans la région de Lyon.
Deuxième étape importante du développement de l'entreprise le marché international. Le dynamisme permet des
exportations à l'intérieur de la C.E.E. et en Afrique du Nord.
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L implantation dans la région de Saint Germain-en-Laye a des avantages, mais aussi des inconvénients : site peu
industrialisé dans une zone urbaine dense ne permettant pas de contact avec des établissements techniques (LT, LP).
Il en découle une recherche de main- d'œuvre professionnelle, une recherche de contacts extérieurs.
L'entreprise est organisée de la façon suivante :
• un atelier de fabrication de pièces (tournage, fraisage, perçage, ajustage),
• un atelier de montage,
• un magasin,
• un service administratif.
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1. Organisation du travail
Chaque professionnel doit être capable : de fabriquer et de monter un équipement complet, d'y apporter des
modifications, d'effectuer les tests de conformité et l'évaluation du produit.
Cette évaluation, qui s'effectue dans le domaine des performances, de l'esthétique et par rapport aux besoins des
clients, est l'affaire de TOUS.
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Evolution des relations Ecole- Entreprise
Il y a eu, à ce jour, quatre rencontres enseignants- direction de l'entreprise.
Le premier axe de discussion a été cette recherche d'un salarié. Nous proposions un stage de 3 semaines en juin avec
embauche potentielle à la clé. Il s'agissait là d'élèves de plus de 17 ans, ayant effectué 4 années d'enseignement
professionnel, ceux qu'on nomme « les sortants ». A la suite de ces contacts deux élèves sont allés en stage. L'un d'eux
sera embauché dès le 1er juillet.
. Mais, dès le début, nous avons tenté de ne pas nous limiter au cadre stage-embauche, afin de permettre réellement à
cette entreprise de participer à la formation de nos élèves.
Petit à petit, oralement, s'est façonné un pacte, un contrat, que nous intitulerons Jumelage. A la rentrée 1987, il est
prévu un document écrit, signé par les deux parties, qui, même s'il n'a qu'une valeur morale, sera le symbole des
contacts SES. Usine et la référence qui rappelle, résume les options choisies.
D'ores et déjà, nous pouvons énoncer les différents points qui seront dans le contrat de jumelage :
a), Le parrainage d'un élève, au minimum
En fait, ils seront sans doute deux, dont un qui aura obligatoirement un assez bon niveau en dessin industriel. Ces
élèves seront en 2e année de F.P. Il s'agira, après visite de l'entreprise par l'élève et présentation des locaux et du
personnel, d'effectuer un stage
g
au moins par an dans cette entreprise (et certainement deux dans la 4e année de CAMP.
L'entreprise s'engage à participer réellement à la formation du jeune, c'est à dire accepte une rotation à tous les postes
de travail susceptibles d'être intéressants (ajustage. tournage, montage, démontage, soudure, dépannage, etc ... ).
Et elle donnera évidemment une possibilité d'embauche, dans la mesure de ses moyens, à l'issue du parrainage.
b) D'un autre côté, l'école s'engage à faciliter l'intégration de l'élève dans l'entreprise en tant que secteur de
production, avec l'aide des rapports de stage qui indiqueront les difficultés, les incompréhensions, les manques de
pratique de l'intéressé.
En particulier, il est envisagé la reprise - au moment du retour à l'école du stagiaire - de la production de telle ou telle
pièce en atelier, si elle présente un intérêt pédagogique pour l'ensemble de la classe. Ce qui permettra d'établir des
tableaux de comparaison entre les méthodes scolaires et les méthodes de l'entreprise pour la réalisation d'une même
pièce (par exemple : le montage des produits se fait de façon empirique dans l'entreprise, les méthodes telles que les
graphes de montage peuvent être adaptées par celle-ci).
L'entreprise tient beaucoup à cette démarche, car « même si nous ne pouvons pas reprendre toutes les démarches
scolaires pour des raisons de rentabilité, elles peuvent parfois nous faire réfléchir et même modifier notre façon de
faire ».
c) L'entreprise aide l'école à une réflexion sur l'outillage, sur l'équipement des ateliers sur les modernisations et
investissements en matériel à mener, sur les évolutions prévisibles du métier.
Elle pourra aussi, à l'occasion, contribuer plus concrètement à l'équipement de la SES. Déjà, en Juin 1987, elle nous
fit don d'un moteur à explosion pour exposition. Ce qui permettra aux élèves mécaniciens de repérer les différentes
pièces réalisées pour constituer un moteur.
d) Visite prévue de nos ateliers par la direction de l'entreprise.
Ces quatre points constituent les bases sur lesquelles reposera le contrat de jumelage. Le parrainage est, à notre avis,
le pari le plus passionnant à suivre.
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Déroulement concret d'un stage.
(Fabrice Va, 17 ans - juin 87).
Le stage de juin 87, débouchant sur un emploi, devait être le plus complet possible. Il visait deux objectifs :
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Permettre au stagiaire de faire preuve de ses capacités et de les exercer.
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Lui faire effectuer le tour des postes de travail (avec pratique ou observation, Selon les postes) afin
qu'une connaissance des différentes étapes nécessaires à la cons- du produit fini facilite son insertion
dans l'entreprise.
Il est à noter que dans celle-ci le travail est faiblement parcellisé. La direction tient absolument à ce que chaque
ouvrier puisse après quelques années être compétent dans tous les actes de production, de réparation et participer à
l'élaboration de nouvelles machines (les « prototypes »).
Reprenons l'itinéraire de notre stagiaire qui va nous donner une idée de ce qu'un élève parrainé effectuera, non plus,
cette fois-ci, au cours d'un stage, mais de plusieurs.
Postes de travail occupés
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Débit des matières sur scie mécanique, ce qui nécessite : une maîtrise des mesures, une connaissance des
formes marchandes des produits ferreux et non ferreux.
• Traçage à plat
Ce qui rend la maîtrise de la lecture d'un dessin technique simple et la maîtrise du trusquin.
• Perçage
Ce qui implique la connaissance de l'alésage et du taraudage machine ainsi que la maîtrise des vitesses de coupe.
• Travail en série avec calibre
Ce qui comporte la fabrication d'un calibre et le contrôle de pièces pendant l'exécution de la série.
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Ajustage
• Montage, démontage
,,Ce qui exige la lecture d'un plan d'ensemble simple, la connaissance des méthodes de montage la connaissance de
l'outillage.
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Peinture au pistolet
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Soudure à l'arc
A ce sujet, l'entreprise souhaite que les futurs élèves parrainés effectuent un stage l'artisan en métallerie voisin, car les
situations de soudure y sont plus riches et foi motivés.
- Tournage
Réalisation de pièces sous la direction d'ouvriers. Tous les éléments de calcul a de géométrie nécessaires nous sont
fournis afin que le professeur d'atelier et l'instituteur puissent les utiliser.
Dans le bilan de stage, le chef des travaux trouve que les élèves connaissent bien l'utilité de l'outil, mais moins l'outil
en lui-même, son fonctionnement. Ce qui se ressent lors de son entretien, surtout lorsqu'il s'agit de machine.
« Il faut apprendre à vérifier si l'on est dans les meilleures conditions posssible exercer l'opération. »
- Participation à des démonstrations de fonctionnement face à la clientèle.
- Participation à une réunion de tous les salariés visant la réalisation d'un prototype. des améliorations possibles
(techniques, esthétiques).
En cas de difficultés, le chef des travaux élabore avec le stagiaire un support écrit pour le travail à effectuer. Ce
support est à « mettre au panier », dès que le stagiaire peu! s'en passer.
Les stages futurs tourneront autour de ces différents éléments et comporteront cri plus des travaux de dessin
industriel.
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Perspectives de la SES.
Toute l'équipe de la SES. a suivi avec attention le déroulement de ces contacts ainsi que les premiers stages.
L'an prochain, nous allons proposer des contrats de jumelage à d'autres entreprises, parmi celles avec lesquelles nous
sommes en contact (une trentaine). Il s'agit de la F.I.A.P.A.D.* et du R.I.J.**, organismes d'accueil de groupes de
jeunes, de classes, transplantées en séjour dans la région parisienne (postes en lingerie, cuisine, entretien des locaux,
accueil ... ) ; des ateliers de réparation, des Sablières de la Seine (entretien, réparation des pousseurs, barges, péniches
utilisés) ; de la clinique des Pages au Vésinet (cuisine, économat, entretien du linge et des locaux) ; d'une
teinturerie à Nanterre (retouche, presse, accueil, rangement, repassage, manipulation des machines à laver).
A noter que :
1) Nous ne savons pas, bien entendu, si tous ces projets aboutiront. Cela nous semble une vole intéressante à explorer,
parallèlement aux redéfinitions et reconversions nécessaires de certains ateliers et à une étude que nous allons
achever en septembre sur le tissu local et régional de l'emploi.
2) Ces perspectives sont facilitées par le grand nombre de stages effectués depuis plusieurs années par nos élèves et
par la réussite massive de ceux-ci.
3) Le parrainage est un élément, parmi d'autres, susceptible de favoriser un a jumelage école-entreprise. Il n'en
constitue même pas un élément indispensable.
Comme le remarque, au sujet des L.P., M. Serge Bolloch (n° 126, Dossier du Monde)
F.I.A.P.A.D. (Foyer international d'accueil de Paris La Défense). ** R.I.J. (Relais international de la Jeunesse).
Il n'existe pas de convention type et beaucoup de chefs d'établi efforcés de construire des relations innovantes à base
d'actions concrètes. » Cette latitude peut permettre, en effet, aux SES. voulant suivre cette voie inaugurée par certains
P. de dégager plus aisément dans chaque cas les perspectives les meilleures de rencontre école-entreprise celles
qui reposent sur un échange où il n'y a ni gagnant ni perdant, mais -réciprocité des services rendus.
Le contrat est alors le garant moral et le support de cet échange.
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Sont envisageables aussi des relations et collaborations qui ne figureront pas
dans notre contrat avec ISOINDUSTRIE, mais qui pourront apparaître avec d'autres
Entreprises
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Une visite de l'entreprise par les classes ou les ateliers.
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La participation d'un membre de l'encadrement de l'entreprise à une ou plusieurs réunions
de concertation ou à un Conseil d'Administration.
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Des facilités de travail temporaire, pendant les vacances, pour des élèves volontaires.
Nous allons réaliser à la rentrée une sorte de Press-book » qui devrait faciliter
les premiers contacts de membres de notre équipe en vue d'aboutir à des pactes de jumelage Ce livret tentera en
particulier de faire le recensement de tout ce qui peut éventuel- être fait entre une entreprise et le collège.
M. Adam
Maître Auxiliaire de Mécanique générale,
J. -P. Ganivet,
Instituteur Spécialisé.
Dans le Bulletin Officiel No 9 du 28 février 85, Je -P. CHEVÈNEMENT et R. CARRAZ, signaient « en priorité »
l'avant-propos d'un texte intitulé « Education nationale - Entreprises, mieux apprendre pour mieux entreprendre »
qui constitue le lancement des actions de jumelage dont l'intérêt et l'importance ont constamment été rappelés dans
de nombreuses instructions.
Dans l'expérience relatée par le S.E. S. A. Doucet de Nanterre, le mot jumelage intervient, ainsi que la perspective
de « contrats de jumelage » pour lesquels on sait qu'il n'existe pas de document type. En S.E. S. et en EREA plus
qu'ailleurs sans doute, l'école et l'entreprise doivent se vivre « comme des cités naguère étrangères, qui, sans
renoncer à leur identité mais en surmontant leurs différences, comprennent que, pour construire un univers plus
humain, pour assurer leurs propres débouchés, elles doivent être solidaires ».
Nous apprenons que cette expérience de jumelage évolue très favorablement en
87-88 en dépit de difficultés liées à la spécialité professionnelle enseignée (mécanique
générale) et à la faible efficience de certains adolescents dans le domaine de l'enseigne
ment général. Dans la procédure mise en oeuvre par cette SES, le jumelage apparaît
dans un premier temps comme un objectif qui, atteint, devient un moyen pour impulser
des activités plus riches pour les adolescents (stages, chantiers, séjours de découverte).
On est loin du formalisme que certains reprochent à juste titre au « jumelage pour le
jumelage ».
M D. a. R.

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