5 Les Echosx

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5 Les Echosx
Total prend pied dans le stockage d’électricité - Chez
EDF et Engie, une approche différente (lesechos.fr)
Le groupe pétrolier veut se développer dans les énergies renouvelables.
Il a lancé une OPA amicale à 950 millions d'euros sur le fabricant de batteries.
De la parole aux actes. Après avoir affirmé, en avril, son ambition de se développer
dans les métiers de l'électricité, Total a annoncé, lundi, un projet d'OPA amicale à
950 millions d'euros sur SAFT, le fabricant français de batteries de haute
technologie. L'acquisition de SAFT « nous permettra d'intégrer dans notre portefeuille
d'activités des solutions de stockage d'électricité, compléments indispensables à
l'essor des énergies renouvelables », a salué dans un communiqué lePDG de Total,
Patrick Pouyanné. Le conseil de surveillance de SAFT, qui a réalisé l'an dernier
un chiffre d'affaires de 760 millions d'euros, a approuvé l'opération à l'unanimité. La
proposition de Total offre une prime de 38 % par rapport aucours de clôture de
vendredi - le cours du titre a été suspendu lundi.
Dans un marché pétrolier morose, le projet « One Total » présenté le mois dernier a
affiché l'ambition de porter les énergies renouvelables à 20 % de l'activité du groupe
à l'horizon 2035, alors que celui-ci est aujourd'hui, en matière d'électricité,
essentiellement producteur de panneaux photovoltaïques via sa filiale SunPower,
acquise en 2011.« Le XXIe siècle sera électrique : nous devons comprendre les
marchés électriques en nous positionnant sur certains élements de la chaîne de
valeur », justifie Patrick Pouyanné (« Les Echos » du 20 avril). Alors que le prix des
technologies solaires baisse rapidement, l'un des grands enjeux des électriciens est
de stocker cette production, par nature intermittente, pour espérer la substituer aux
énergies fossiles. Jusqu'à présent, Total n'avait pris que quelques participations dans
des start-up de stockage ou de gestion de la demande (Aquion Energy, Sunverge,
Stem), via son fonds Total Energy Ventures.
SAFT ne réalise toutefois qu'une très faible part de son chiffre d'affaires - environ
5 % - dans les batteries de stockage pour les énergies renouvelables. C'est donc un
portefeuille d'activités beaucoup plus large que doit racheter le pétrolier : SAFT est
aujourd'hui éclaté entre une dizaine de secteurs, de l'automobile à l'espace en
passant par le rail, à chaque fois sur des marchés de niche à haute valeur
ajoutée. « Total veut acheter SAFT sur la base de ce qu'il est aujourd'hui. Il apprécie
tous nos segments de marché, car il considère que le stockage est une forme
d'énergie », indique aux « Echos » Ghislain Lescuyer, président du directoire de
SAFT. « SAFT a une stratégie, nous allons veiller à préserver leur marque et leurs
intuitions. Mais ils ont aussi vocation à parler à SunPower et à se développer dans
les énergies renouvelables », complète un porte-parole de Total.
Total acquiert SAFT (4.000 salariés) à un moment chahuté de son histoire. Après
avoir affiché des ambitions de croissance très élevées, Ghislain Lescuyer, un ancien
d'Alstom qui a repris les rênes l'an dernier après le décès de son prédécesseur, a
bâti un plan stratégique - Power 2020 - focalisé sur la rentabilité (« Les Echos » du
17 novembre).« Notre chiffre d'affaires a légèrement baissé au premier trimestre,
mais cela s'explique par la chute du marché pétrolier. Notre plan de transformation
avance bien », estime-t-il.
L'opération, pour laquelle Total a été conseillé par Messier Maris et Cleary Gottlieb,
tandis que SAFT était épaulé par Goldman Sachs et Bredin Prat, devrait a priori
aboutir d'ici à fin juillet, avec un retrait de SAFT de la cote si les investisseurs
apportent bien leurs titres. La future filiale de Total devrait alors être rattachée à sa
nouvelle direction « gas, renewables and power », qui doit voir le jour en septembre.
À noter
Total a par ailleurs indiqué au « Figaro » la mise en vente de sa filiale allemande
Atotech (chimie de métallisation).
Chez EDF et Engie, une approche différente
Les batteries, une solution parmi d'autres.
Nul doute que l'annonce du rachat du fabricant de batteries SAFT par Total, lundi,
aura été commentée dans les états-majors des énergéticiens. D'abord parce que
cette acquisition confirme les ambitions de Total dans l'électricité. Ensuite parce que
le stockage, qui doit servir à optimiser la production croissante d'énergies
renouvelables, est leur nouvelle frontière. Mais ni EDF ni Engie n'ont fait, à ce stade,
le choix d'une acquisition de la taille de SAFT.
Au travers de son fonds d'investissement Electronova, EDF est devenu le premier
actionnaire de Forsee Power, une start-up qui conçoit des systèmes de batterie.
Spécialiste des zones insulaires, EDF vient aussi d'inaugurer à La Réunion un
stockage à hydrogène couplé à une centrale solaire. Mais en matière de batteries, il
privilégie encore sa R&D interne, estime que la rentabilité est encore loin, et doute du
potentiel à long terme de la technologie lithium-ion. De son côté, Engie a inauguré
l'an dernier une batterie lithium-ion en Corse et développe en ce moment une offre
de grandes batteries pour les industriels. Pour les particuliers, Engie est aussi en
discussion avec des fournisseurs de batteries pour préparer des offres.
Pour les deux énergéticiens français, les batteries sont en outre l'une des solutions
pour stocker l'énergie, mais pas la seule, et ils ne semblent pas chercher à s'intégrer
verticalement. « Il faut rester flexible parce que les technologies évoluent très vite et
parce qu'à chaque usage peut correspondre une technologie différente. Mais en
même temps, on a besoin de faire des paris technologiques pour accélérer l'entrée
dans le marché », juge Antonio Bellver, directeur du programme Stockage d'Engie.
Le groupe dirigé par Isabelle Kocher, via son fonds Engie New Ventures, a investi
l'an dernier dans KiWi Power, une start-up spécialisée dans les solutions de
flexibilité, autrement dit l'effacement de consommation. Et Engie expérimente, via
son projet de démonstrateur Jupiter, le « power to gas », qui permettrait de
transformer l'électricité solaire ou éolienne en gaz (« Les Echos » du 18 décembre).
EDF, qui a récompensé l'an dernier un projet de volant d'inertie (Voss), défend quant
à lui l'importance du « pompage-stockage » (l'eau utilisée par une centrale
hydroélectrique est remontée et à nouveau turbinée lors des pics de consommation)
- mais les nouveaux sites sont rares. Et EDF vante la complémentarité du nucléaire
et des renouvelables, estimant que les centrales peuvent moduler rapidement leur
production et ainsi compenser en partie l'intermittence de l'éolien et du solaire.
La batterie, nouveau rendez-vous des industriels
Qu'ils viennent de l'automobile, de l'électronique ou de l'industrie, de nombreux
groupes lorgnent le stockage d'énergie.
Pour un peu, on parlerait d'accumulation. Depuis quelques années, les acteurs
historiques de la batterie électrique, comme SAFT ou Varta, se frottent à de
nombreux (et nouveaux) concurrents venus d'horizons variés lorgnant tous le
stockage d'électricité pour entreprises ou particuliers - Total n'étant que le dernier
d'une longue série. Il faut dire que ce marché qui pesait à peine 200 millions de
dollars il y a encore trois ans, à croire les chiffres d'IHS, pourrait friser les 19 milliards
de dollars en 2017. Voire bientôt beaucoup plus, si les prévisions de capacité d'un
autre institut se vérifient : selon Navigant Research, on déploiera dans le monde
18 fois plus de batteries en 2025 que cette année (9,1 GW contre 500 MW)…
Les spécialistes asiatiques de l'électronique
L'autonomie des appareils électroniques, c'est le nerf de la guerre des géants de la
tech - rappelez-vous les piles rechargeables des baladeurs CD ou des GameBoy.
Logiquement, les acteurs de l'électronique grand public se sont intéressés au
domaine il y a plus de trente ans, d'abord pour développer le potentiel nomade de
leurs engins, avant de défricher d'autres terrains. Résultat, les groupes japonais
(Sony, Panasonic, NEC) ou coréens (LG, Samsung) se taillent la part du lion dans
les ventes de batteries, quelles que soient leur taille, leur utilisation ou leur capacité.
Les conglomérats attrape-tout de l'industrie
Siemens, General Electric, Lock-heed Martin ou les groupes plus spécialisés dans
l'énergie comme Schneider ou ABB… Les grands noms de l'industrie semblent
s'accorder sur l'intérêt du stockage d'électricité et sur la nécessité de s'y développer.
Chez Siemens, ABB ou Schneider, il s'agit de s'adapter aux évolutions du marché
énergétique (lire ci-contre) et de répondre à la demande de leurs clients, dans
l'automobile ou ailleurs. Chez Lock-heed Martin ou General Electric, c'est plutôt une
manière de monétiser à l'extérieur les recherches et les technologies maison.
Les constructeurs automobiles
A la fin des années 2000, le français Renault avait envisagé de construire une usine
de batteries sur le site de Flins (Yvelines). Avant de se raviser. D'autres ont décidé
de creuser le sillon, à commencer par Tesla. Le constructeur californien est en train
de construire avec Panasonic une énorme usine de batteries dans le Nevada
(5 milliards de dollars d'investissement) pour alimenter ses véhicules, mais aussi
usiner à grande échelle les batteries domestiques d'Elon Musk. Dans ce même
créneau de la batterie pour garage, Accumotive, une filiale de Daimler, est également
présente, avec un produit serti de l'étoile Mercedes. A vrai dire, si les constructeurs
auto se mettent à la batterie, c'est que cette dernière ressemble fort au moteur de
demain et y concentre une bonne part de la valeur du véhicule. Ainsi, ce n'est pas un
hasard si BYD, un fabricant chinois de batteries, s'est mis en tête de concevoir ses
propres véhicules électriques… Tout comme Bolloré avec sa Bluecar bretonne.

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