Fillettes, où êtes-vous - Eki-Lib
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Fillettes, où êtes-vous? Fillettes, où êtes-vous ? Société Geneviève Doray Obsédées par le look et la marque, elles passent des heures à se préparer. Elles connaissent tout de la mode et du maquillage. Elles n’ont pas de seins mais portent de faux soutiens-gorge. Qui ça ? On les appelle les « tweenagers » ou les « adosnaissants ». On parle aussi des kgroy ; je ne sais pas comment ça se prononce, juste que c’est l’acronyme de kids grow older younger, autrement dit « les enfants sont mûrs plus tôt. » À peine sorties de leur pyjama nouveau-né, les fillettes sont déjà tendance. Bye bye le look petite fille modèle, bonjour la femme fatale. Camisoles à bretelles spaghettis, pantalons taille basse qui montrent la bedaine, minijupes, shorts ras les foufounes… Il suffit de faire le tour de n’importe quel magasin pour constater que la mode poupon se distingue de moins en moins de la mode enfant, qui elle-même ressemble de plus en plus à la mode ado… Je me souviens d’avoir cherché des jeans taille 24 mois pour ma puce. Il n’y avait que des modèles à jambe large et taille basse. Découragée, j’avais finalement été dans le département des garçons ! Plusieurs mamans m’ont confirmé que la mode leur cause, elles aussi, de gros maux de tête. Elles veulent bien que leurs petites soient dans le coup mais elles n’ont pas forcément le goût qu’elles aient le nombril à l’air. « Malheureusement, on va au magasin et qu’est-ce qu’il y a ? Que ça : du rose et des paillettes. Comment expliquer à ma fille de 7 ans, que je ne veux pas qu’elle ait l’air sexuelle », s’interroge Sylvie, une jeune maman dans la trentaine. Et l’affaire n’est pas plus simple avec les plus jeunes. Les chandails aux slogans tels que Love ou Sexy ont-ils leur raison d’être pour des enfants ? Personnellement, je trouve qu’un pantalon taille basse, qui laisse dépasser la culotte, avec une camisole qui laisse voir le nombril, c’est totalement absurde et déplacé quand les petites ont 4 ans ! Quand je vois l’allure des jeunes filles prépubères dans la rue, je songe avec horreur que dans peu de temps encore c’est ma puce qui y sera… On peut dire que c’est aux parents d’y voir, de choisir les vêtements… Pas si simple ! Bien souvent, aujourd’hui, ce sont les petites, dès le plus jeune âge, qui décident elles-mêmes de leur garde-robe. Impossible de leur faire mettre des petites robes fleuries. Isabelle, mère d’une petite fille de huit ans, en sait quelque chose. C’est Audrey qui décide ce qu’elle veut porter ; depuis qu’elle a Par: Geneviève Doray Fillettes, où êtes-vous? eu trois ans. Elle veut s’habiller comme sa grande sœur, à l’image de ce qu’elle voit dans les magazines et à la télé. Je crois que les parents peuvent « gagner » jusqu’à 5 ans environ. Par la suite, les fillettes décident et aspirent à ressembler à leurs sœurs plus âgées ou aux chanteuses. Est-ce une illusion ? Les fillettes semblent devenir femmes plus rapidement. Où est-ce qu’à force de les imiter, les petites commenceraient à en devenir plus précocement qu’avant ? Mystère de l’évolution… une étude publiée en 2003 dans la revue Pediatrics confirme qu’effectivement la puberté des filles débute de plus en plus tôt. L’apparition des seins et des poils pubiens commence dès neuf ans chez les fillettes de type caucasien. À huit ans, une fillette sur six présente des signes de puberté, alors que c’était une sur cent dans la génération précédente ! Les scientifiques ne savent pas trop au juste pourquoi. Des facteurs génétiques et environnementaux seraient en cause. Mais attention, précocité ne signifie pas nécessairement maturité ! Entre les grands-mères qui ne ressemblent plus à des grands-mères, les mères et les ados qui se copient mutuellement et les fillettes qui jouent aux ados, personne n’est plus à sa place. « Cette confusion générationnelle est très inquiétante estime Béatrice Copper, auteur de Vos enfants ne sont pas des grandes personnes. En entrevue au journal L’Express, le Dr Philippe Jeammet, chef du service de psychiatrie des ados croit lui aussi que c’est grave. « Plonger les enfants dans un univers adulte de consommation, de paraître risque de casser leur imaginaire et de les perturber durablement. » Par: Geneviève Doray