Position de la COFACE sur le décrochage scolaire et le rôle des

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Position de la COFACE sur le décrochage scolaire et le rôle des
Position de la COFACE sur le décrochage scolaire
et le rôle des parents
Ce texte a été adopté par le Conseil d’Administration de la COFACE du 25 mars 2010
L’étude réalisée en 2005 par la DG EAC donne une définition succincte du «décrochage
scolaire»1:
«Le décrochage scolaire peut être défini comme l’arrêt des études par un jeune n’ayant
pas atteint l’âge légal de l’obligation scolaire et/ou n’ayant pas obtenu un diplôme ou des
qualifications suffisantes».
Selon les derniers chiffres disponibles, le taux moyen de décrochage scolaire au sein de l’UE
est de 14,8 % (chiffres 2007)2, c’est-à-dire que 14,8 % des étudiants de l’UE quittent l’école
de façon prématurée ou à un moment où ils sont encore sans diplôme ou qualifications
suffisantes. Étant donné que l’objectif fixé par le Conseil pour 2010 est de 10 %, il y a des
raisons de s’inquiéter. Le contexte familial joue un rôle crucial dans la réussite scolaire. Or
très peu de textes européens soulignent le rôle des parents. Avant de le faire, il est
important de donner un bref aperçu d’autres politiques soutenues par la COFACE visant à
prévenir le décrochage scolaire, dont certaines sont présentes dans les documents de
politique de la Commission.
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1
Porter l’âge de l’obligation scolaire à 18 ans dans l’UE, et inclure dans l’obligation
scolaire au moins une partie de l’enseignement « pré-primaire », sauf exemptions dans
certaines circonstances particulières
Des éléments à caractère éducatif adaptés à l'âge contribuant à soutenir le
développement cognitif des enfants doivent être intégrés dans les structures d'accueil à
la petite enfance
Veiller à ce que les horaires soient appropriés et ne surchargent pas les étudiants
Eviter la relégation d’étudiants dans des écoles spécifiques et encourager la mobilité
des étudiants entre les différentes filières de l’enseignement (général, professionnel,
etc.)
Développer une approche globale de l’éducation en mettant sur un pied d’égalité
l’importance de l’éducation formelle, de l’éducation non-formelle et informelle
Veiller à ce que les écoles disposent de locaux et de personnel en suffisance afin que la
taille des classes et le nombre d’étudiants soient adéquats
http://ec.europa.eu/education/pdf/doc284_en.pdf, p. 11-12.
http://eacea.ec.europa.eu/llp/projects/events/february_2009/documents/2.1%20Comenius%20Political%20p
riorities%20A%20Pokorny.pdf, p. 3.
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Veiller à ce que les conseils de classe aient lieu plus souvent et qu’ils soient
formellement reconnus comme faisant partie du travail des professeurs
Veiller à ce que les écoles organisent des cours de rattrapage, et inciter les directions à
désigner deux titulaires par classe
Placer des agents de prévention et de sécurité le long des principaux itinéraires d’accès
aux écoles
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Insister sur l’aspect des Droits
L’éducation est un droit fondamental, comme cela a été souligné dans de
nombreuses constitutions nationales, dans la Déclaration des Droits de l’Enfant des
Nations Unies et dans la Charte des Droits Fondamentaux de l’UE. Par conséquent,
l’éducation primaire et secondaire doit être gratuite pour tous. Toute personne doit
également avoir le droit d’interrompre le cours de son éducation et de reprendre
son éducation plus tard au cours de sa vie, quelle que soie la filière suivie.
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Refinancer les systèmes d’éducation nationale
Sans surprise, la qualité de l’enseignement dépend fortement de son niveau de
financement. Exprimé en pourcentage du PIB, l’investissement de l’Europe dans
l’enseignement est assez bas par rapport à d’autres pays de l’OCDE. Il faut s’attaquer
à ce problème.
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Prendre des mesures pour aider les familles les plus vulnérables
Plusieurs études ont montré que la plupart des jeunes qui quittent prématurément
l’école sont issus de familles de statut socioéconomique inférieur. Parmi les mesures
susceptibles d’aider les familles vulnérables, on peut notamment citer : les projets
d’inclusion active, la redistribution des richesses, le renforcement de la protection
sociale, les programmes gratuits de formation tout au long de la vie, l’accessibilité
des services sociaux, l’aide aux parents pour développer une « culture scolaire » à la
maison, etc.
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S’attaquer à la dimension du genre
Alors que la propension des garçons à quitter l’école prématurément est supérieure
d’environ 1.9 aux filles, les conséquences néfastes du décrochage comme le risque
de ne pas trouver d’emploi touchent plus les filles. Des études plus approfondies sur
ce sujet doivent être menées afin de mettre en place des politiques adéquates.
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Développer une vision holistique de l’enfant et du jeune dans les établissements
d’enseignement
Tous les enfants ne réagissent pas de la même manière à une même pédagogie. Les
équipes d’enseignants doivent davantage s’efforcer de différencier leurs approches
pédagogiques en prenant en compte les besoins spécifiques des enfants.
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Intégrer des acteurs externes dans les écoles
Divers intervenants tels que les clubs de sport et de loisirs, les acteurs sociaux, les
services de médiation, la police, etc. doivent être mieux intégrés dans les écoles, ce
qui permettrait aux titulaires d’en savoir davantage sur les activités de leurs
étudiants ainsi que sur la contribution de chaque intervenant à l’encadrement des
jeunes menacés par le décrochage scolaire.
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Lutter contre les inégalités géographiques
Les écoles devraient être uniformément accessibles sur tout le territoire d’un pays,
sans préjudice pour la qualité de l’enseignement, le choix des activités proposées, la
disponibilité des professeurs et des services de soutien, la diversité des filières
d’enseignement et des orientations, etc.
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Mieux équiper les écoles afin qu’elles puissent proposer un large éventail d’activités
extrascolaires
Des investissements substantiels sont nécessaires afin d’améliorer les infrastructures
scolaires, notamment au niveau technique. De plus, pour renforcer la motivation des
étudiants et leur envie de fréquenter l’école, les établissements scolaires devraient
leur proposer du sport, de la danse, d’autres activités parascolaires (dessin, musique,
écriture, etc.), mettre à leur disposition des centres multimédias, des bibliothèques
et des terrains de jeux, organiser des fêtes le vendredi après-midi pour les
adolescents, etc.
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Revaloriser les métiers de l’enseignement
Dans certains pays, les professeurs, dont les instituteurs pré-scolaires, sont souvent
mal payés et insuffisamment formés, tandis que les écoles et les écoles maternelles
manquent de personnel. Tant que ces problèmes ne seront pas gérés de manière
satisfaisante, il sera impossible de lutter efficacement contre le décrochage scolaire.
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Chaque école devrait disposer d’un « médiateur » officiel
Les médiateurs sont des acteurs clés dans de nombreuses situations, en particulier en
cas de conflit entre divers partenaires du cadre scolaire : professeurs, élèves, parents,
etc. Si certaines écoles disposent déjà de médiateurs, beaucoup d’entre eux n’ont ni
statut formel, ni fonction officiellement reconnue.
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Favoriser l’inclusion sociale des étudiants
Les amis peuvent jouer un rôle important dans l’envie d’un jeune de fréquenter
l’école. Veiller à la bonne inclusion sociale de tous les étudiants constitue donc un
des moyens de lutter contre le décrochage scolaire.
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Lutter contre l’absentéisme scolaire dès le début pour que l’habitude ne s’instaure pas
définitivement
Il est nécessaire de lutter, en associant les parents, le plus rapidement possible
contre ces pratiques « absentéistes » (par un suivi, par des sanctions)3. Ce problème
semble concerner tous les milieux sociaux.
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Mieux orienter les élèves
Orienter les élèves vers une filière qui les motive réellement et qui correspond à leurs
compétences permet de lutter contre le décrochage.
Il est nécessaire que les jeunes aient une vraie éducation à l’orientation. Se connaître
soi-même, réfléchir à ses « rêves », s’impliquer dans la recherche de formations,
connaître les métiers et rencontrer des professionnels, donner le goût de l’effort
prolongé comme tout travail dans l’avenir le requerra… sont autant d’éléments
3
Au Danemark, après la première heure de cours, les familles des élèves absentéistes sont contactées
directement par l’école et notifiées de l’absence de leur enfant. Après la mise en place de cette pratique, le
nombre d’élèves absentéistes a chuté significativement.
3
nécessaires à un bon choix d’orientation. Un temps spécifique régulier devrait y être
consacré tout au long de la scolarité et un tutorat devrait être apporté à chaque
élève par des professeurs ou des éducateurs.
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Développer une meilleure évaluation et reconnaissance des compétences
Actuellement, les étudiants ne reçoivent un certificat qu’à la fin de leur
enseignement primaire et secondaire, les laissant sans aucun diplôme s’ils partent
plus tôt. Un Certificat des Compétences doit être mis en œuvre afin de fournir un
document officiel aux étudiants en décrochage qui puisse attester des compétences
acquises jusqu’à leur départ. Cela leur permettrait de faire valoir ces compétences
sur le marché du travail ainsi que de reprendre leur éducation plus facilement s’ils le
décident.
MILIEU FAMILIAL ET ROLE DES PARENTS
De nombreuses études ont été réalisées à propos du rôle des parents dans la réussite
scolaire de leurs enfants. Une journée d’étude organisée par la COFACE en 1990 a débouché
sur plusieurs études et résultats qui n’ont rien perdu de leur pertinence, même s’ils n’ont
guère été suivis de réalisations concrètes. Dans le document publié à l’époque par la
COFACE, deux chercheurs, M. J.-P. Pourtois et Mme H. Desmet faisaient observer que:
«Décrocher un diplôme ne représente pas la même difficulté pour tout le
monde. L’une des fonctions de l’école est de traduire en résultats scolaires
ce que la famille a insufflé à l’enfant depuis son tout jeune âge. La capacité
de bien suivre à l’école semblerait être le reflet du degré d’activité éducative
et culturelle au sein du groupe familial.»
« Selon une étude menée au C.E.R.I.S. (Centre de Recherche et d'Innovation
en Sociopédagogie familiale et scolaire), (en Belgique) une part de plus de
84 % […] de la variance relative à la capacité d’enfants de 7 ans de bien
suivre à l’école peut s’expliquer directement ou indirectement (c.-à-d. en
termes de qualité du développement de l’enfant) par le genre de vie qu’il
mène. […] Ces résultats montrent à quel point la famille est importante pour
la future réussite scolaire de l’enfant».4
RECOMMANDATIONS DE LA COFACE CONCERNANT LE RÔLE DES PARENTS
Le décrochage scolaire étant l’aboutissement d’un processus durant lequel l’enfant ou
l’adolescent perd sa motivation, développe une phobie, une dépression, entre en opposition
forte, vit un décalage important entre sa vie scolaire et sa vie de famille, les
recommandations qui suivent visent surtout à développer une politique de prévention vis-àvis de ce décrochage.
1. Promouvoir un comportement parental sain et une vie familiale saine: pour une
expérience positive de la parentalité
La COFACE demande à l’UE et aux États membres de soutenir ou de créer des
services qui aident les parents en leur donnant des conseils d’éducation, y compris en
4
COFACE, "Families and Success at School", Record of the European Study Day, 15/11/1990, p. 9-10.
4
matière d’assiduité et de décrochage scolaire, et en leur fournissant également des
informations à propos de tels services (adresses, contacts, dépliants et brochures
avec des informations pratiques, etc.). Ces services devraient être abordables et
accessibles, et satisfaire à certaines normes de qualité.
Au-delà des conseils, des pratiques comme les « groupes de paroles de parents », par
exemple, pendant lesquels les parents échangent entre eux et sont considérés
comme aptes à trouver ensemble des solutions à leurs propres difficultés parentales
(autorité, conflits avec les enfants…) sont à privilégier, plutôt que des conseils
descendants souvent culpabilisants pour les parents et peu appliqués en réalité.
2. Promouvoir l’aide sociale, les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie et
la réinsertion sur le marché du travail pour les parents vulnérables, peu scolarisés
et/ou sans emploi
Des études ont montré que les jeunes qui quittent prématurément l’école sont en
prédominance issus de familles où au moins l’un des parents est chômeur et/ou
faiblement scolarisé (dans ce dernier cas, il s’agit souvent de la mère) ou d’autres
groupes vulnérables comme les Roms, les familles avec un enfant handicapé, les
familles nombreuses,…. Compte tenu de ces éléments, la COFACE soutient la mise en
œuvre effective de politiques sociales visant à lutter contre l’exclusion sociale par la
formation tout au long de la vie, l’aide sociale et la réinsertion sur le marché du
travail.
3. Mieux concilier la vie professionnelle et la vie privée des parents exerçant une
profession
La condition préalable d’une bonne parentalité comprenant le suivi du parcours
scolaire de l’enfant est la présence physique des parents et leur participation
effective à la vie de l’enfant. La conciliation entre la vie professionnelle et la vie de
famille revêt une importance cruciale à cet égard. Pour des recommandations
détaillées en la matière, veuillez consulter la position de la COFACE disponible à
l’adresse:
http://coface-eu.org/en/upload/WG%20SOCIAL/WG1-2008-PositionCOFACE-conciliation-FR.pdf
4. Renforcer et faciliter le dialogue entre les parents, les écoles et d’autres services
(services sociaux, etc.)
La COFACE demande aux autorités nationales de définir les critères de référence de la
communication et de l’interaction entre les autorités scolaires (p. ex. professeurs,
personnel à orientation sociale) et les parents d’élèves (ou d’autres adultes en ayant
la charge). L’exigence de base d’une telle communication et interaction devrait être
la prise en compte du droit des parents de connaître toutes les décisions concernant
l’avenir de leur enfant et d’y participer. Les écoles doivent mettre en place des
systèmes qui permettent aux parents et aux enfants (étudiants) à participer aux
prises de décisions au sein de l’école, à travers par exemple des conseils de parents
ou d’élèves.
5. Accorder une attention particulière aux familles plus vulnérables comme les
familles comptant un enfant handicapé ou les familles de migrants
Les parents d’enfants handicapés doivent être pleinement associés à la scolarisation
de ces derniers. Pour une scolarisation inclusive réussie, les parents doivent recevoir
5
conseils et informations sur le droit à la scolarisation de leurs enfants. L’élève et ses
parents doivent être parties prenantes de l’élaboration, la mise en œuvre et
l’évaluation du projet individuel de scolarisation. Les parents doivent être reconnus
comme partenaires compétents avec qui les enseignants peuvent procéder à un
partage de savoir pour assurer une meilleure aide éducative. Pour favoriser cette
implication des parents, ceux-ci doivent bénéficier de bonnes conditions d’accueil,
d’une analyse de leurs attentes et d’un accompagnement.
Les associations de familles de personnes handicapées jouent un rôle très important
de sensibilisation, d’information et de conseil en matière d’inclusion scolaire : elles
doivent être associées à l’élaboration des nouvelles législations, politiques et
pratiques, et bénéficier d’un soutien financier.
Pour les recommandations spécifiques relatives aux familles issues de milieu
immigré, veuillez consulter la prise de position de la COFACE « Renforcer le soutien
aux parents migrants en relation avec l'éducation scolaire de leurs enfants ». La
position insiste sur l’importance de développer les capacités des parents migrants en
matière de scolarisation de leurs enfants, de même que l’importance du dialogue
entre parents, professeurs et écoles. La question de la langue d’origine est abordée,
ainsi que plusieurs autres recommandations.
Cfr: http://coface-eu.org/en/upload/WG%20EDUCATION/WG4-2008-PositionCOFACEeducationmigrants-FR.pdf
6. Soutenir activement les organisations familiales et leurs politiques de prévention du
décrochage scolaire
Comme expliqué plus haut, les parents et le contexte familial jouent un rôle essentiel
dans le décrochage scolaire, et les organisations familiales sont des acteurs clés à cet
égard. De nombreuses initiatives ont déjà été prises dans ce domaine par des
organisations familiales.
7. Aspects liés aux politiques de l’UE
De nombreux programmes européens contribuent à la lutte contre le décrochage
scolaire, comme, par exemple, la création d’un réseau européen d’écoles de la
«deuxième chance» (E2C-Europe). La COFACE souhaite que tous les programmes
d’enseignement se dotent d’une politique intégrée de lutte contre le décrochage
scolaire adéquatement financée par des fonds européens. Des projets centrés sur
l’information des parents, l’éducation des adultes, la parentalité et le dialogue
famille-école devraient être développés par l’UE, en coopération avec les
organisations familiales, contribuant ainsi à apporter la dimension familiale
essentielle en ces matières. De plus, la méthode ouverte de coordination dans
l’éducation et la formation doit être renforcée.
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COMMISSION EUROPEENNE
DG Emploi, Affaires sociales
et Egalité des chances
La COFACE bénéficie du soutien du programme communautaire
pour l’emploi et la solidarité sociale – PROGRESS (2007-2013).
http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=327&langId=fr
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