territoire apprenant - Education et Devenir

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territoire apprenant - Education et Devenir
7èmes Rencontres nationales de l’éducation
Rennes - 6 et 7 avril 2011
Du Projet éducatif territorial au « territoire apprenant »
Pour une éducation tout au long de la vie
En 2008, lors des précédentes rencontres nationales de
l’éducation, l’appel de Rennes avait lancé la dynamique des Assises
Nationales de l’Education. Les 7èmes rencontres, en prolongement
de l’Appel de Bobigny1, se veulent une invitation au débat et une
contribution prospective pour l’élaboration d’une politique globale
et ambitieuse pour l’éducation et la jeunesse.
Aujourd’hui, l’objectif d’offrir toutes les opportunités pour que chaque jeune puisse suivre un
parcours éducatif de bonne qualité vient interroger les territoires en tant qu’espaces de
construction individuelle et collective. Par nature, l’offre éducative y est très hétérogène, il nous
appartient de bien appréhender ce qui les structure afin de faire émerger une nouvelle forme
intégrée de projets éducatifs. Celle d’un territoire apprenant où la solidarité ne s’oppose pas au
dynamisme, économique en particulier, où l’Homme et son environnement représentent un atout
au service d’une autre croissance.
En y intégrant des paramètres de réflexion comme l’éducation et la formation tout au long de la
vie, le projet éducatif territorial, les territoires apprenants, le socle commun de connaissances et
de compétences ainsi que les objectifs de Lisbonne, cette 7ème édition des Rencontres nationales
de l’éducation cherchera à apporter des éclairages concrets aux acteurs éducatifs
En effet, il y a encore loin des intentions à la réalité. Parfois même, derrière l’apparent
consensus, se cachent des divergences de conceptions ou de vraies difficultés à passer aux
actes. Pourtant les politiques, les représentations et les réflexions évoluent à travers de
nombreuses pratiques d’éducation et de formation, tant initiales que « tout au long de la vie ».
C’est tout l’objet des Rencontres nationales de l’éducation de Rennes qui, depuis 1997, se
veulent un lieu de prospective des politiques éducatives par le jeu de croisement entre
réalisations de terrain innovantes, analyses produites par des chercheurs et regards portés par
les acteurs.
Dans le cadre des problématiques transversales de l’éducation et de la formation tout au long de
la vie et de l’implication de toute politique éducative actuelle au sein de l’espace d’éducation et
de formation de l’union européenne, trois axes structureront les prochaines Rencontres :
1
Le texte intégral de l’Appel de Bobigny est accessible sur www.villeseducatrices.fr
7èmes Rencontres nationales de l’éducation.- Rennes – 6 et 7 avril 2011
1/ Le parcours des individus
Comment favoriser, par des politiques publiques ambitieuses, la mise en place de parcours,
adaptés aux besoins et au développement des capacités de chacun ? Comment permettre
l’acquisition de connaissances tout au long de sa vie, dans la diversité et la combinaison des
territoires dans lesquels chaque personne évolue ? Comment définir et mettre en œuvre
efficacement les processus de reconnaissance des connaissances et compétences de tous ? Y a-til une place pour des connaissances et des compétences qui ne fassent pas l’objet de validation ?
Qu’est-ce que la réussite ?
2/ Le territoire
Si l’on considère que la décennie en cours amorce un virage qui balisera de nouveaux repères
concernant la formation (diversification des lieux de transmission des connaissances et des
compétences – en particulier en dehors de l’école -, avènement d’Internet, etc.), il conviendra
d’interroger l’Ecole, qui ne saurait limiter ses ambitions à l’organisation, la structuration des
connaissances, des compétences et l’acquisition d’une capacité critique. D’interroger le territoire
sur sa capacité à assurer une réelle continuité éducative, voire à dépasser ses propres formes de
vulnérabilités lorsqu’il se trouve relégué, dépassement avec l’aide des autres territoires, de l’Etat
et de l’Europe.
Dès lors, comment peuvent s’organiser les forces vives d’un territoire pour démocratiser l’accès à
l’offre de formation, pour permettre le décloisonnement des types de formations, pour assurer la
dimension démocratique de la formation tout au long de la vie et la valorisation de formes
d’intelligence collective au service d’un nouveau type de développement local basé sur la
solidarité et la cohésion sociale ?
3/ La gouvernance
Etat, collectivités locales et société civile participent à la mise en œuvre d’une offre éducative
locale la plus pertinente possible. Mais qui coordonne à l’échelle locale ? A quelles conditions
l’horizontalité des démarches fonctionne-t-elle dans un contexte de (re)verticalisation voir de repli
des Institutions ? Qui est garant d’un certain équilibre et d’une équité entre les territoires ? Les
différentes approches expérimentées d’élaboration démocratique dans le champ éducatif ne
méritent-elles pas d’être maintenant interrogées ? En matière de pilotage ou de régulation, y-a-til place pour des principes comme la subsidiarité ou pour des notions comme celle de « chef de
file » ?
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Le parcours...
D’une part, il convient d’expliciter cette notion de parcours. Sans doute faut-il mettre de la chair derrière ce
concept qui correspond à la nécessité ressentie de faire évoluer le cadre dans lequel se déroulent les
apprentissages individuels et collectifs, formels et informels.
Nous sommes aujourd’hui convaincus que le « modèle éducatif » en vigueur est en décalage par rapport
aux attentes, aux espoirs et aux ambitions des jeunes et des adultes qui ont pris conscience que les vies
linéaires, tout comme d’ailleurs les carrières dans une seule et même entreprise ou un seul secteur
d’activité ou encore un seul territoire n’ont plus cours. Demain, tant par leurs choix et leurs itinéraires de
vie que par l’exercice de plusieurs métiers, ils auront en permanence, certes l’obligation, mais surtout la
possibilité, le droit d’actualiser leurs connaissances et leurs compétences, de se cultiver, de se lancer dans
de nouveaux apprentissages. Cette prise de conscience est-elle compatible avec une conception trop prédéterminante de l’éducation et de la formation initiale, passeport social, citoyen et professionnel pour toute
une vie ?
7èmes Rencontres nationales de l’éducation.- Rennes – 6 et 7 avril 2011
D’autre part, que l’on se place du point de vue de l’individu ou des institutions, des gouvernants, la notion
de parcours (scolaire, classique, approprié, etc.) ne recouvre pas les mêmes désirs. Dès lors, lorsqu’il
devient plus complexe de trouver des objectifs éducatifs convergents et partagés, quels points de tension
pouvons-nous dénouer entre besoins, aspirations de l’individu et orientation de l’Institution ?
Et même si l’éducation et la formation tout au long de la vie paraissent devoir être personnalisées pour
permettre à chacun d’en tirer le bénéfice le plus large, elles paraissent difficilement modélisables. Il est
alors indispensable de réfléchir à une éducation et une formation initiales qui soient conçues comme une
boite à outil de départ et une étape première d’un continuum éducatif qui, en conséquence, intègrera les
connaissances, les compétences, les postures et les outils permettant d’aborder sereinement le déroulé
d’une vie personnelle et professionnelle à venir.
Comment dans cette approche, la notion de parcours pourrait être privilégiée ? Car il s’agit de renforcer la
légitimité des connaissances initialement acquises et validées et de persévérer dans nos ambitions en
matière d’éducation et de formation en définissant ensemble le contenu d’un nécessaire socle de
connaissances et de compétences (que les jeunes doivent maîtriser à la fin du collège). On peut aussi tenir
le même raisonnement pour le lycée et le passage à l’enseignement supérieur : quels savoirs, quelles
connaissances et quelles compétences les jeunes devront-ils avoir acquis pour devenir des citoyens de
plein exercice et des professionnels capables de s’adapter aux nouvelles technologies et aux innovations du
monde de demain ?
Un tel parcours n’est envisageable qu’à la condition que les structures perdent de leur rigidité et les
contenus de leur encyclopédisme. Au plan des acquisitions initiales notamment, le socle est le même pour
tous, mais le parcours ne se fait pas au même rythme. Il doit être fluide, ce qui implique, d’une part, un
accompagnement personnalisé et réactif pour ceux qui en auraient besoin et d’autre part, un véritable
entrainement pour un système transversal de reconnaissance des acquis tout au long de la vie.
Le territoire...
Il va de soi que la concrétisation de cette ambition éducative ne peut être confiée à une seule institution
fusse-t-elle l’Ecole ou la famille. Au sein de projets territoriaux partagés, intégrant les projets des
établissements scolaires, elle relève de la mobilisation de toutes les ressources d’un territoire :
établissements scolaires, collectivités, services de l’Etat, associations, habitants, familles, jeunes,
institutions culturelles et sportives, monde économique, structures de formation continue, enseignement
supérieur. Nul n’est exclu de ce dessein qui doit mobiliser toutes les ressources disponibles et développer
l’ouverture de mondes étanches qui trop souvent s’ignorent, pour coopérer, participer, créer du
partenariat, de la mutualisation, du lien social, de la démocratie.
Il s’agit de participer à la construction du « territoire apprenant » : un territoire aux frontières définies
conjointement et ouvertes sur un espace plus global, à la fois géographique et virtuel ; un territoire au
cœur duquel la production de richesses, partagées, s’appuierait sur la formation, l’activité économique, la
production de lien social, de culture. Comment, dès lors, ce territoire peut-il inscrire son développement en
alliant un nécessaire dynamisme et un besoin de solidarité; un territoire issu et porteur d’innovations
collectives et de créativité ?
La mise en œuvre de ce nouvel outil d’organisation collective amène nécessairement les acteurs locaux à
sortir de leur domaine d’intervention classique. Par exemple : comment les politiques urbanistiques ou
encore le développement social local fournissent-ils des savoirs et des clés aux habitants ? Comment
définir ensemble les finalités d’un territoire apprenant ? Comment qualifier ce territoire, avec quels
critères ? En quelque sorte, comment toutes les politiques publiques contribuent-elles à une valeur ajoutée
éducative ?
Ne perdons pas de vue qu’appréhender la notion de parcours à l’échelle d’un territoire implique de prendre
en compte ses caractéristiques. La dimension matérielle (offre éducative, organisation des services,…),
sociale (les réseaux) et idéelle (représentation des valeurs associées) d’une part ; la question de
l’enclavement donc de la mobilité et de son imbrication dans d’autres espaces d’autre part ; et enfin leur
caractère inégalitaire (quelle politique compensatoire ?) doivent être débattus.
En fonction de ces considérations, comment bâtir et incarner le territoire apprenant ? Comment penser
l’articulation de ces territoires entre eux et avec d’autres espaces d’apprentissage, d’autres territoires
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proches ou lointains – l’Europe forme-t-elle un territoire apprenant ? -, sans ignorer les espaces virtuels qui
se développent ?
Bref, comment le projet éducatif territorial assure le passage d’un territoire que l’on subit à un territoire
que l’on choisit ?
La gouvernance...
Si « le parcours » et le « territoire apprenant » deviennent l’architecture et les modes opératoires d’une
nouvelle politique publique d’éducation et de formation tout au long de la vie, il est indispensable de
débattre de la « gouvernance » de cette nouvelle construction. Celle-ci contribue aussi à redonner un sens
nouveau à la décentralisation et à la déconcentration, notamment par la place qu’elles ménagent aux
savoirs dans leur diversité, aux acteurs et aux apprenants.
Pour favoriser l’émergence des « territoires apprenants », il est donc indispensable de savoir où l’on veut
aller et d’être en capacité de traduire le « réel projeté ». Cette notion précède la démarche de diagnostics
partagés, de projets co-construits, d’évaluations débattues et de régulations communes. Si la question des
partenariats éducatifs n’est plus à poser, celle de l’organisation de ces derniers reste ouverte. Plus
particulièrement, la reconnaissance de la légitimité du rôle et de la place de chacun apparaît centrale pour
l’efficacité de ces actions.
Cette question de la légitimité se pose aussi au niveau politique, celui de la gouvernance des territoires
apprenants : Etat, Collectivités, habitants et société civile ? Et quelle(s) forme(s) d’organisation(s) peut-elle
prendre ?
Qui fixe le cadre politique, les objectifs à atteindre ? Qui régule les relations au sein ces territoires et entre
eux, afin de garantir une offre éducative de qualité ? Qui évalue la mise en œuvre de la gouvernance et les
effets de ce cadre politique ? Peut-on mettre en œuvre le principe de subsidiarité ou mettre en place la
notion de « chef de file » ?
Une telle volonté politique de construire un droit nouveau effectif à l’éducation et la formation tout au long
de la vie, porte en elle des enjeux démocratiques qui obligent aussi à la concevoir et la mettre en œuvre
par toutes les dimensions combinées de la démocratie : délibérative, participative et délégataire.
C’est ainsi une belle occasion de redonner confiance dans une démocratie au service de la construction et
de l’émancipation de personnes autonomes et solidaires et d’un progrès humain partagé : utopie réaliste ?
Paris, décembre 2010.
Plus d’informations sur http://www.laligue.org/7emes-rencontres-de-rennes
Contact : [email protected]
Un événement organisé avec le soutien de :
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