le trimestriel du droit de la technologie
Transcription
le trimestriel du droit de la technologie
CoConseil CoConseil McCarthy Tétrault : le trimestriel du droit de la technologie Volume 4, numéro 1 Janvier – Mars 2008 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie Volume 4, numéro 1 Voici le volume 4, numéro 1 du CoConseil McCarthy Tétrault : le trimestriel du droit de la technologie. Dans ce numéro, nous poursuivons notre série sur la transformation de votre entreprise de technologie en société ouverte, en approfondissant cette fois le sujet du premier appel public à l’épargne. Dans un autre article, nous examinons la nouvelle obligation d’information ayant des conséquences pour les sociétés ouvertes et les sociétés fermées qui passent des contrats avec des sociétés ouvertes. Les changements apportés au Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue exigent désormais des émetteurs assujettis qu’ils déposent publiquement certains « contrats importants » conclus « dans le cours normal des activités » dans SEDAR (ces contrats pourraient inclure, entre autres, les contrats d’impartition et contrats portant sur l’utilisation d’un brevet). Plus tôt cette année, les gouvernements fédéral et ontarien ont fait connaître leurs budgets 2008, assortis de quelques bonnes nouvelles pour les entreprises de technologie et leurs investisseurs. Nous faisons ressortir certaines initiatives fiscales pertinentes, dont des modifications aux obligations relatives à la retenue et aux certificats de décharge de l’article 116 de la loi fédérale, le congé fiscal de dix ans accordé aux nouvelles entreprises qui commercialisent de la propriété intellectuelle développée par des universités, collèges ou instituts de recherche canadiens admissibles, et le crédit d’impôt à l’innovation de l’Ontario. La question de la protection de la vie privée a continué de faire les manchettes, la viodéosurveillance étant cette fois examinée minutieusement. Nous examinons les lignes directrices qu’ont publiées les commissaires à la protection de la vie privée du Canada, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta relativement à l’utilisation de la vidéosurveillance par les organisations du secteur privé. Nous présentons également une affaire du Québec dans laquelle une société d’assurances a été enjointe de verser des dommages punitifs pour avoir fait de la vidéosurveillance illicite en violation du droit à la vie privée d’un assuré. Dans un troisième article, nous examinons si un employé a droit à la vie privée sur des données créées à des fins de travail et stockées sur un ordinateur. Le contenu généré par l’utilisateur (CGU) sur Internet est un autre domaine qui a connu une forte expansion ces dernières années. Les entreprises cherchent maintenant à exploiter le CGU à des fins commerciales, mais ce faisant elles s’exposent à des dangers. Dans un article, nous passons en revue certains des risques potentiels reliés à l’intégration du CGU au site Web d’une entreprise et exposons à grands traits les mesures que les entreprises peuvent prendre pour minimiser leur responsabilité. Les secteurs de la technologie et des communications ont connu une vague de fusions et d’acquisitions en 2007. Au début de 2008, deux grandes acquisitions annoncées en 2007 ont franchi d’importants obstacles réglementaires. Nous examinons l’approbation qu’a donnée la Commission européenne à l’acquisition de DoubleClick par Google et, plus près de nous, l’approbation qu’a donnée le CRTC à la vente de BCE. Nous poursuivons notre série sur l’impartition des processus opérationnels (IPO) à l’étranger. Dans ce numéro, nous examinons certains aspects juridiques clés des opérations d’IPO à l’étranger, comme le droit de propriété intellectuelle, le règlement des différends, la protection des renseignements confidentiels et le respect des lois locales. Le présent numéro du trimestriel du droit de la technologie aborde ces questions et bien d’autres. Vous pouvez y naviguer à partir de la table des matières, en cliquant sur les liens conduisant aux différents articles. Tous les articles sont également disponibles sur notre site Web. Vous pouvez aussi effectuer des recherches dans la base de données de nos publications pour trouver un complément d’information sur une foule de sujets. Si vous préférez recevoir une version imprimée du trimestriel du droit de la technologie, ou si vous désirez modifier les renseignements concernant votre abonnement, veuillez communiquer avec moi en cliquant sur le lien ci-dessous. McCarthy Tétrault est reconnu comme un cabinet de premier plan dans bien des domaines du droit, dont celui de la technologie, par les principales publications spécialisées dans le classement de cabinets juridiques et d’avocats. L’édition 2008 du Chambers Global, guide présentant les principaux avocats du monde, confirme la position dominante de McCarthy Tétrault au Canada dans le secteur des technologies de l’information ainsi que dans les domaines des télécommunications et de la radiodiffusion. Le PLC Which Lawyer?, dans son édition 2008, classe McCarthy Tétrault au premier rang des cabinets canadiens pour ce qui est des domaines des technologies de l’information et du commerce électronique. L’édition 2008 du Canadian Legal Lexpert Directory ne sera pas publiée avant cet été, mais l’édition 2007 reconnaît la place de chef de file qu’occupe McCarthy Tétrault dans le domaine du droit de la technologie au Canada. Le CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie prouve que nous tenons à conserver cette position de chef de file. Heather J. Ritchie Rédactrice en chef Avril 2008 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Table des matières Internet/ Service eWorld ........................................................................ 1 COMMERCE ÉLECTRONIQUE ............................................................................. 1 Canada : Le contenu généré par l’utilisateur : comment éviter les pièges ..............................1 Canada : La juridiction « virtuelle » à l’ère de la mondialisation : Desjean c. Intermix et l’adaptation du critère du lien réel et substantiel ..............................3 Ontario : Obligations d’alerte en matière de fraude dans la Loi sur les renseignements concernant le consommateur de l’Ontario...................................7 Amérique du Nord : Les droits découlant de la loi dans un monde virtuel sont-ils réels ou illusoires? .......................................................................................8 Europe : Microsoft condamnée à payer une amende record au titre de violations des lois sur la concurrence dans la Communauté européenne .............................................9 International : Google réalise l’acquisition de DoubleClick .............................................. 11 International : Les recommandations de l’ICANN pourraient accroître considérablement les nouveaux noms génériques de domaines de premier niveau ......................................... 12 LICENCES DE LOGICIEL.................................................................................. 13 International : Les licences de logiciels et de contenus libres : du copyright au copyleft — Partie III ........................................................................................................... 13 Financement des entreprises de technologie ..............................................20 FINANCEMENT LIÉ AU SECTEUR DE LA TECHNOLOGIE.............................................. 20 Amérique du Nord : Transformer votre entreprise de technologie en société ouverte — Partie III ........................................................................................................... 20 Canada : Incidence prévue des modifications fiscales canadiennes proposées sur les investisseurs transfrontaliers de capital de risque et d’investissement ............................ 23 Ontario : Budget de l’Ontario 2008 : Des allégements fiscaux limités pour le secteur de la technologie............................................................................. 25 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Sous-traitance de technologie .................................................................27 IMPARTITION ............................................................................................. 27 International : Introduction à l’impartition des processus administratifs à l’étranger — Partie II ............................................................................................................ 27 CONTRATS DES SOCIÉTÉS DE TECHNOLOGIE ........................................................ 31 Canada : Nouvelle obligation de déposer les « contrats importants » conclus dans le cours normal des activités .................................................................. 31 Propriété intellectuelle .........................................................................33 DROIT D’AUTEUR ........................................................................................ 33 Canada : Annulation de la redevance sur les iPod ......................................................... 33 Protection de la vie privée .....................................................................35 CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES ............................................................. 35 Canada : Les commissaires à la protection de la vie privée publient des lignes directrices relatives à la vidéosurveillance.......................................................... 35 Québec : Une société d’assurances tenue de payer des dommages pour surveillance illicite et pour avoir fait fi des décisions de la cour........................................ 36 Canada : À qui appartient quoi? : Existe-t-il, pour les employés, une attente raisonnable à ce que la vie privée soit respectée en ce qui concerne les données stockées sur les ordinateurs?.... 38 Communications ..................................................................................41 CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES ............................................................. 41 Canada : Le CRTC approuve la vente de BCE ............................................................... 41 Canada : Six questions : sexe, fiscalité et projet de loi C-10 ............................................ 48 Canada : Les produits culturels canadiens et le phénomène de la « longue traîne » : les nouveaux facteurs économiques de la production et de la distribution au Canada — Partie III ........................................................................................................... 52 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Technologie propre ..............................................................................62 CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES ............................................................. 62 Colombie-Britannique : Taxe sur les émissions carboniques de la Colombie-Britannique ........... 62 International : Eco-Patent Commons — Partage de brevets pour un environnement plus propre et plus vert......................................................................................... 64 Biotechnologies/ Sciences de la vie ..........................................................65 CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES ............................................................. 65 Canada : Modifications au Règlement sur les médicaments brevetés : modifications relatives aux exigences de rapport et aux délais ......................................... 65 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Internet/ Service eWorld COMMERCE ÉLECTRONIQUE Perte de l’image de marque Canada : Le contenu généré par l’utilisateur : comment éviter les pièges Lorsqu’une entreprise permet à des clients et à des visiteurs de son site Web d’élaborer du contenu et de contribuer à un site, elle risque de perdre la maîtrise de son image de marque. Même si de nombreux clients peuvent véritablement aimer une entreprise ou un produit en particulier au cœur d’un site Web, d’autres pourraient profiter de l’occasion pour dénigrer l’entreprise ou le produit. L’entreprise qui a l’intention d’inclure du CGU dans son site Web devrait envisager la possibilité d’inclure des services de modération aussi bien automatisés que manuels pour faire le tri du matériel téléversé. De plus, l’entreprise devrait déployer d’importants efforts pour exprimer clairement les conditions d’utilisation du site, en définissant de façon claire et nette ce qui est acceptable comme contenu et comme conduite et ce qui est interdit. Grâce à la disponibilité et à la popularité des fonctions du Web 2.0, les entreprises encouragent de plus en plus les visiteurs de leur site Web à participer à l’expérience globale du Web en téléchargeant vers l’amont du contenu généré par l’utilisateur (CGU). Le CGU existe sous diverses formes, telles que des photographies, vidéos, baladodiffusions, articles et blogues. Par le truchement du CGU, les utilisateurs peuvent introduire des données et exprimer leur créativité de façon passionnante. L’intégration du CGU aux sites Web d’entreprises peut présenter bien des avantages pour les sites hôtes (par exemple en rehaussant le trafic des sites Web, en attirant de nouveaux clients, en sensibilisant les visiteurs à des marques et en augmentant la fidélité de la clientèle). Cependant, les entreprises qui cherchent à utiliser le CGU devraient connaître les risques potentiels liés à de telles activités et prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter leur exposition à ces risques, qui comprennent notamment la perte de l’image de marque, des réclamations pour publicité mensongère et des obligations relatives à la violation de la propriété intellectuelle, à la diffamation et à l’atteinte à la vie privée. Réclamations pour publicité mensongère De par sa nature même, le CGU pourrait brouiller la distinction entre le contenu commercial (c.-à-d. les annonces) et le contenu non commercial (c.-à-d. le divertissement et les observations). On peut citer comme exemple récent un concours qu’a lancé Quiznos, la chaîne offrant des sandwichs grillés. Elle invitait le public à soumettre des vidéos maison décrivant les sandwichs Quiznos comme supérieurs à ceux de Subway. Subway, qui est le principal concurrent de Quiznos, a Page 1 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 depuis engagé une poursuite contre Quiznos devant la Cour de district fédérale du Connecticut, alléguant que les vidéos maison contenaient des déclarations fausses et trompeuses et dépeignaient la marque Subway de façon désobligeante. • énoncent des principes directeurs concernant l’utilisation des marques de commerce, des noms et des portraits d’autres personnes et d’œuvres protégées par des droits d’auteur appartenant à des tiers; Bien que les différends concernant des annonces ne soient pas nouveaux, le concours de vidéos soulève une question nouvelle du point de vue du droit : puisqu’elle parrainait le concours, Quiznos devrait-elle être responsable d’un contenu qu’elle n’a pas créé? Étant donné que toute décision rendue dans cette affaire pourrait avoir d’importantes conséquences pour l’utilisation de CGU sur des sites Web d’entreprises, cette affaire est à surveiller de près. • interdisent aux utilisateurs d’afficher du matériel qui viole ces dispositions; • permettent à l’entreprise de retirer tout matériel qui viole les conditions d’utilisation; et • incluent une clause indemnisant l’entreprise à l’égard de tout le CGU affiché. Obligation relative à la violation de la propriété intellectuelle, à l’atteinte à la vie privée et à la diffamation En offrant à ses clients la possibilité d’afficher du CGU sur son site Web, une entreprise doit demeurer diligente si elle veut limiter ses obligations relatives à la violation de la propriété intellectuelle, aux atteintes à la vie privée et à la diffamation. Pour réduire les risques, l’entreprise devrait notamment veiller à ce que les conditions d’utilisation du site Web : • enjoignent aux collaborateurs de limiter le contenu qu’ils soumettent à du matériel à l’égard duquel ils détiennent tous les droits; Les entreprises devraient également envisager de mettre en œuvre un programme de modération du contenu et noter tout matériel qui est identifié comme une violation de la propriété intellectuelle, une atteinte au droit à la vie privée d’un particulier ou un cas de diffamation — surtout qu’en cas de réclamation, une indemnité provenant d’un créateur de contenu individuel pourrait ne pas accorder une protection d’une grande portée. La loi des États-Unis intitulée Digital Millennium Copyright Act est un autre outil servant à protéger les entreprises intéressées à utiliser du CGU. Cette loi isole un fournisseur de services en ligne aux États-Unis de la responsabilité relative au droit d’auteur si le fournisseur respecte certaines lignes directrices prescrites en matière d’exonération et bloque sans tarder l’accès à du matériel qui serait contrefait (ou retire ce matériel de son site Page 2 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Web) dès qu’il est avisé de la contrefaçon par le titulaire du droit d’auteur ou l’agent de ce dernier. Les entreprises devraient également veiller à obtenir de larges droits du collaborateur quant à l’utilisation du CGU. Pour ce faire, l’entreprise pourrait notamment obtenir une licence du collaborateur au moment de la présentation du contenu donnant le droit à l’entreprise « d’utiliser, de reproduire, de modifier, de publier et de distribuer le matériel, sur n’importe quel support, pour toujours, ainsi que le droit d’utiliser le nom du collaborateur, son portrait et sa performance ». Grâce à cette licence, le collaborateur demeurera propriétaire du CGU, mais l’entreprise aura la possibilité d’utiliser le contenu pour remplir les objectifs de son site Web. Cette façon de procéder est généralement plus acceptable pour les collaborateurs et moins susceptible de contestation judiciaire que l’autre façon de procéder en exigeant des collaborateurs qu’ils cèdent la propriété de leur CGU à l’entreprise. Conclusion En encourageant les visiteurs de son site Web à soumettre du contenu original, une entreprise peut en fait attirer de nouveaux clients et développer la fidélité de la clientèle, mais l’intégration du CGU peut s’avérer désastreuse si l’entreprise n’a pas abordé toutes les questions soulevées. Les entreprises qui souhaitent profiter pleinement de cette tendance devraient envisager d’employer toutes ces mesures de protection : énoncer clairement les conditions d’utilisation d’un site, superviser le contenu et supprimer le matériel désobligeant, et obtenir des droits suffisants du créateur quant à l’utilisation du CGU. Communiquez avec : Kai Brown à Toronto à [email protected] Canada : La juridiction « virtuelle » à l’ère de la mondialisation : Desjean c. Intermix et l’adaptation du critère du lien réel et substantiel Deux changements importants ont marqué la dernière décennie au Canada : l’adoption d’Internet et la prolifération des recours collectifs. Ces deux phénomènes se recoupent dans l’affaire Desjean c. Intermix, un recours collectif déposé à la Cour fédérale. La question soulevée par cette affaire est relativement nouvelle : une personne qui acquiert un produit Web peut-elle poursuivre le fournisseur dans le forum où ce produit a été téléchargé? Quels critères s’appliquent afin de déterminer si un tribunal canadien peut faire valoir sa compétence? Devant la Cour fédérale En 2005, Patrick Desjean a déposé une déclaration auprès de la Cour fédérale dans laquelle il tentait de faire autoriser son action à titre de recours collectif contre Page 3 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Intermix Media Inc., une société américaine située en Californie qui offre des services sur Internet. Selon la déclaration, la société a joint de façon trompeuse des logiciels espions ou des logiciels publicitaires au gratuiciel que les consommateurs téléchargeaient à partir de ses sites Web. En réponse à cette déclaration, Intermix a demandé le rejet de celle-ci aux motifs que la cour n’avait pas compétence sur Intermix et sur l’affaire. La Cour fédérale a accueilli la requête et la Cour d’appel fédérale a confirmé cette décision. Dans sa déclaration initiale, M. Desjean soutenait qu’Intermix, en se livrant à des pratiques trompeuses, frauduleuses et illégales, ainsi qu’en effectuant de la publicité mensongère, a enfreint l’article 52 de la Loi sur la concurrence. Plus précisément, il soutenait qu’Intermix offrait aux consommateurs des gratuiciels, tels que des économiseurs d’écran et des jeux, sans les informer du fait que d’autres logiciels étaient joints à ces gratuiciels. Parmi ces logiciels supplémentaires, selon M. Desjean, il y avait des programmes espions ou publicitaires qui étaient conçus pour propager des annonces et du contenu invasif aux ordinateurs. M. Desjean soutenait en outre qu’Intermix a tenté d’empêcher les consommateurs de détecter et de désinstaller ces logiciels supplémentaires. Selon M. Desjean, ces pratiques l’ont exposé à toutes sortes de procédés malhonnêtes de la part de tiers, ont causé des dommages à son ordinateur et lui ont donné le droit de recouvrer des dommagesintérêts sous le régime de l’article 36 de la Loi sur la concurrence. Avant que l’audition de la requête en autorisation du recours collectif n’ait lieu, Intermix a déposé un avis de requête en ordonnance de radiation de la déclaration aux motifs que la Cour fédérale n’avait pas compétence. L’affaire a été entendue par le juge de Montigny. La cour a commencé son analyse juridique en observant que l’évolution de la loi dans le contexte des technologies de communication virtuelle en est encore à ses débuts. La cour a ensuite procédé à un examen de la jurisprudence récente relativement aux questions de compétence d’un tribunal contre un défendeur à l’étranger. Notamment, la cour a cité l’arrêt Morguard Investments Ltd. c. De Savoye, dans lequel la Cour suprême du Canada a reconnu le critère de « lien réel et substantiel ». La cour a également cité l’arrêt Muscutt c. Courcelles, dans le cadre duquel la Cour d’appel de l’Ontario a dressé une liste de huit facteurs que les tribunaux devraient prendre en considération afin d’établir s’il existe un lien réel et substantiel entre l’action et le forum. Selon la preuve fournie par Intermix et l’application des facteurs dans l’arrêt Muscutt, la Cour fédérale a conclu que le critère du lien réel et substantiel n’avait pas été rempli. Entre autres, à l’égard du facteur tenant compte du lien entre le forum et le défendeur, la cour a noté qu’Intermix n’a pas de serveur ni d’employé, ni de bureau ni de compte bancaire au Canada. Il a également noté qu’Intermix n’a pas invoqué de lois canadiennes, qu’elle ne paie pas d’impôts au Canada et qu’elle n’exerce aucune activité de publicité ou de Page 4 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 marketing directe ou de démarchage sur le marché canadien. forum, et l’affirmation de la compétence est habituellement inappropriée. En outre, à l’égard du facteur qui tient compte de l’injustice qu’il y aurait pour le défendeur à ce que le tribunal s’approprie la compétence, la cour a soutenu qu’il serait manifestement inéquitable de soumettre Intermix à sa compétence, puisque cela imposerait un fardeau trop lourd aux exploitants étrangers de sites Web sans présence réelle au Canada. Un autre facteur important consiste à déterminer si l’affaire est de nature interprovinciale ou internationale étant donné que l’appropriation de compétence se justifie plus facilement dans les litiges interprovinciaux que dans les litiges internationaux. La nature internationale du litige entre M. Desjean et Intermix constitue un autre élément en faveur de l’absence de compétence. Au milieu de ces deux cas extrêmes, on trouve le cas où un défendeur exploite un site Web interactif qui permet aux utilisateurs d’échanger des renseignements avec l’ordinateur hôte. Dans ce cas, le tribunal doit examiner le niveau d’interactivité. L’application de cette approche a mené la Cour à conclure que les sites Web exploités par Intermix n’étaient pas interactifs et ne justifiaient donc pas la constatation de liens minimaux. De plus, la cour a cité de la jurisprudence canadienne et américaine sur la compétence à l’égard d’Internet. Selon la cour, il est maintenant bien établi auprès des autorités américaines qu’il doit y avoir certains « liens minimaux » entre le défendeur et le territoire de compétence. Cette idée a été élaborée par la décision Millennium Enterprises, Inc. c. Millennium Music, LP, dans laquelle divers liens sont mentionnés. D’une part, on trouve le cas où le défendeur fait affaire sur Internet avec des résidents dans le forum, et l’affirmation de la compétence est habituellement appropriée. D’autre part, on trouve le cas où le défendeur affiche simplement des renseignements sur un site Web accessible aux utilisateurs dans le En plus de conclure qu’elle n’avait pas la compétence étant donné qu’il n’existait pas de « lien réel et substantiel » ou de « lien minimum » entre le défendeur et le forum, la cour a également souligné que même si elle avait pu s’attribuer la compétence, elle aurait refusé étant donné qu’il existait un forum plus approprié dans lequel ce litige pouvait être résolu. La Californie, ou peut-être un autre tribunal d’un autre État américain, serait mieux placé pour avoir compétence. Par conséquent, la Cour fédérale a ordonné que la déclaration de M. Desjean soit rejetée au motif que la Cour n’avait pas compétence. Devant la Cour d’appel fédérale M. Desjean a porté cette décision en appel, en s’appuyant plus particulièrement sur l’arrêt Moran c. Pyle National (Canada) Ltd., dans lequel la Cour suprême du Canada a soutenu que le fabricant devait être prêt à défendre ses produits partout où ils causent un préjudice et qu’il aurait dû raisonnablement envisager le Page 5 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Remarques de McCarthy Tétrault : tribunal devant lequel il se retrouve lorsqu’il a mis ses produits sur le marché. M. Desjean a soutenu également que le juge de première instance aurait dû conclure qu’il existait un lien réel et substantiel entre Intermix et le Canada. L’affaire Desjean c. Intermix représente une étape de plus dans l’évolution du critère du lien réel et substantiel. Même si l’ère numérique et les recours collectifs posent de nombreux défis pour les plaideurs, les avocats et les juges, la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont réaffirmé et adapté l’arrêt Morguard afin de soutenir cette réalité moderne. Ce faisant, les juges ont souligné que le simple fait de télécharger un produit n’est pas suffisant pour régler la question de compétence. Il est plutôt nécessaire d’évaluer le lien réel entre le tribunal devant lequel le recours collectif est intenté, les parties en présence et les éléments fondamentaux de la poursuite. À cet égard, les révolutions qui ont bouleversé notre monde nous ont également, ultimement, ramené au point de départ. Dans un jugement rendu en novembre 2007, la Cour d’appel fédérale (les juges Létourneau, Pelletier et Trudel, JJ.A.) a rejeté à l’unanimité l’appel. La cour a soutenu qu’étant donné que le pourvoi était fondé sur une appréciation autre que celle du juge, M. Desjean devait faire la démonstration d’une erreur manifeste et dominante dans l’appréciation qu’en a faite le juge de première instance. La cour a de plus conclu que M. Desjean n’a pas rempli cette exigence, car il n’a pas fait référence au raisonnement du juge de première instance dans ses observations et qu’il a simplement substitué son appréciation des faits pertinents à ceux du premier juge. La cour a également traité de l’applicabilité de l’arrêt Moran aux faits donnant lieu à ce litige. Elle a noté que M. Desjean avait fondé sa déclaration contre Intermix sur les prétendues infractions à la Loi sur la concurrence, qui vise à prévenir les pratiques frauduleuses et trompeuses, et non sur les allégations selon lesquelles Intermix avait mis sur le marché un produit défectueux. Par conséquent, la cour a conclu qu’on ne pouvait s’appuyer sur l’arrêt Moran pour confirmer la compétence dans une affaire de publicité fausse ou trompeuse. Louis M. Brousseau et Shaun Emery Finn ont agi à titre de conseillers juridiques d’Intermix. Communiquez avec : Louis M. Brousseau à Montréal à [email protected] ou Shaun Emery Finn à Montréal à [email protected] Page 6 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Ontario : Obligations d’alerte en matière de fraude dans la Loi sur les renseignements concernant le consommateur de l’Ontario Dans le dernier numéro, nous faisions état des propositions du gouvernement fédéral visant à lutter contre le vol d’identité. Au niveau provincial, des préoccupations à l’égard du vol d’identité ont mené à des modifications récentes à la Loi sur les renseignements concernant le consommateur de l’Ontario, lesquelles entraient en vigueur le 1er janvier 2008. Dans certaines situations, les personnes qui accordent du crédit seront tenues de prendre des mesures supplémentaires avant de conclure une opération avec une personne. Aux termes des modifications, un consommateur peut exiger de toute agence de renseignements sur le consommateur (ARC) qui détient un dossier le concernant qu’elle place dans son dossier une « alerte de fraude ». Si une entreprise procède à une vérification de la solvabilité de ce consommateur et découvre dans son dossier une telle alerte, l’entreprise ne peut pas procéder à l’opération sans prendre des mesures raisonnables pour confirmer l’identité de la personne partie à l’opération. L’alerte qu’un consommateur peut exiger qu’une ARC inclue dans son dossier avertira toute personne de vérifier l’identité de quiconque prétend être le consommateur. L’alerte dans le dossier de l’ARC comprendra un numéro de téléphone, ou un autre moyen de contacter le consommateur afin de confirmer l’identité de quiconque prétend être le consommateur. Avant de placer une alerte dans le dossier d’un consommateur, l’ARC est tenue de prendre des mesures raisonnables pour confirmer l’identité de la personne qui en exige l’inclusion. Si une entreprise procède à une vérification de la solvabilité d’un consommateur et que son dossier révèle une alerte, l’entreprise ne peut pas procéder à certaines opérations prescrites avec quiconque prétend être le consommateur sans prendre des mesures raisonnables pour confirmer l’identité de cette personne. La loi et son règlement d’application prévoient que ces mesures doivent être prises lorsque l’opération avec le consommateur vise : • l’octroi de crédit ou d’un prêt (y compris une augmentation d’une limite de crédit à découvert d’une personne, la délivrance de cartes de crédit supplémentaires ou les prêts hypothécaires); • l’achat, la cession ou le recouvrement de la dette d’une personne; • une convention de location qui concerne la personne; • un contrat d’achat ou de location de biens ou de services qui concerne la personne; • un contrat de travail de la personne; ou • la souscription d’une assurance visant la personne. Page 7 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Une alerte de fraude dans le dossier de l’ARC expirera six ans après son inclusion dans le dossier d’un consommateur, à moins que le consommateur n’en fasse la demande plus tôt. Amérique du Nord : Les droits découlant de la loi dans un monde virtuel sont-ils réels ou illusoires? Communiquez avec : Wendy Gross à Toronto à [email protected] La question de savoir si les adeptes de jeux vidéo acquièrent des droits reconnus par la loi dans le monde réel à l’égard de leurs biens à l’intérieur d’un jeu a trouvé écho dans la Cour de district du sud de la Floride aux États-Unis. Un joueur expérimenté de World of Warcraft a introduit un recours collectif contre Internet Gaming Entertainment, Ltd. (IGE), affirmant que IGE avait violé les conditions d’utilisation et le contrat de licence d’utilisateur final (CLUF) de World of Warcraft. Il accuse IGE de « gold farming » — elle paierait des travailleurs dans des pays en voie de développement pour amasser des devises dans le jeu, qu’elle vendrait ensuite à d’autres utilisateurs contre de l’argent réel. En janvier, IGE a produit une réponse à la poursuite, réfutant les allégations. Le recours n’a pas encore été certifié. Le joueur est contrarié par IGE affirmant que les faits et gestes de cette dernière nuisent au jeu en dévaluant la monnaie, ce qui désavantage les joueurs qui ne violent pas le CLUF par rapport à leurs concurrents et diminue le plaisir de jouer. Dans sa déclaration, il accuse IGE d’un ensemble de maux contractuels et tortueux découlant de la violation d’un contrat de tiers bénéficiaire et de la violation de la loi des États-Unis intitulée Computer Fraud and Abuse Act pour violation de biens mobiliers. Le joueur fonde ses affirmations sur l’assertion que le jeu comporte un régime de propriété Page 8 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 ayant toutes les caractéristiques familières du monde réel, comme la propriété exclusive, la persistance des droits et une monnaie pour appuyer le commerce. Par ailleurs, des créations intrajeu comme le « CopyBot » permettent aux utilisateurs de faire sans frais un nombre illimité de copies de biens théoriquement protégés par les mêmes droits relatifs à la propriété intellectuelle qui protègent des biens dans la vie réelle. Remarques de McCarthy Tétrault : S’il est donné suite à cette affaire, elle pourrait donner aux tribunaux l’occasion de se prononcer sur la nature des biens virtuels comparativement aux droits réels. Une telle décision aurait des conséquences importantes pour les utilisateurs individuels, ainsi que pour les entreprises qui souhaitent faire la promotion de leurs activités et de leurs marchandises grâce à un nouveau support. À l’heure actuelle, des centaines d’entreprises, dont Adidas, Reuters, L’Oréal, Dell, IBM et Toyota, sont présentes dans des mondes virtuels comme Second Life, où elles peuvent faire la promotion de leur entreprise et vendre des marchandises virtuelles aux utilisateurs du jeu ainsi que vendre des produits réels aux mêmes utilisateurs. Il est intéressant de noter que Linden Labs, le créateur de Second Life, a reconnu le droit des utilisateurs de Second Life de « conserver la pleine protection de la propriété intellectuelle à l’égard du contenu numérique qu’ils créent dans Second Life ». On en est même venu à réagir affirmativement aux avis de retrait en vertu de la loi des États-Unis intitulée Digital Millennium Copyright Act. Bien qu’il y ait eu divers règlements et jugements convenus dans des affaires impliquant la contrefaçon, ni le Canada ni les États-Unis n’ont encore obtenu de décision se prononçant sur la nature des droits virtuels comparativement aux droits réels. Compte tenu de la popularité croissante des mondes virtuels, des intérêts concurrents en jeu et des sommes en cause, nous devrions nous attendre à un nombre accru de litiges dans ce domaine au cours des années à venir. Communiquez avec : Robert Chaplick à Toronto à [email protected] Europe : Microsoft condamnée à payer une amende record au titre de violations des lois sur la concurrence dans la Communauté européenne Le 27 février 2008, la Commission européenne a condamné Microsoft à payer une amende record de 899 millions d’euros pour avoir omis de mettre en œuvre les mesures correctives imposées en 2004 pour remédier à une conduite Page 9 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 que la Commission considérait comme un abus de position dominante. L’amende représente la dernière et ultime bataille dans une guerre d’une décennie entre la Commission et Microsoft au sujet du système d’exploitation Windows et de Media Player. L’amende de 899 millions d’euros porte les amendes totales auxquelles la Commission a condamné Microsoft à 1,68 milliard d’euros. Remarques de McCarthy Tétrault : En 2004, à la suite d’une enquête d’une durée de cinq ans, la Commission européenne avait conclu que Microsoft avait abusé de sa position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation d’ordinateurs personnels i) en refusant de fournir à des concurrents les renseignements nécessaire pour que leurs produits fonctionnent sous Windows et ii) en attachant Media Player au système d’exploitation Windows. En plus d’enjoindre à Microsoft de fournir des renseignements sur l’interopérabilité à ses concurrents et de cesser d’attacher Media Player à Windows, la Commission avait condamné Microsoft à verser une amende de 497 millions d’euros. Il s’agissait à l’époque de la plus grosse amende jamais imposée. Microsoft a contesté la décision de la Commission devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes (Tribunal) et demandé une ordonnance pour suspendre les mesures correctives demandées par la Commission tant que le différend n’était pas tranché. Microsoft Page 10 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 avait fait valoir que la décision allait à l’encontre de ses droits de propriété intellectuelle, minait l’innovation et portait atteinte à ses intérêts commerciaux. Elle avait aussi prétendu que l’amende et les mesures correctives lui causeraient un tort irréparable. En décembre 2004, le Tribunal a rejeté la demande de Microsoft de suspension des mesures correctives en attendant qu’une décision soit rendue sur la contestation de Microsoft parce que cette dernière n’avait pas démontré que les mesures correctives lui causeraient un tort grave et irréparable. Le Tribunal a rendu sa décision sur la contestation de Microsoft en septembre 2007. Les motifs du Tribunal maintenaient en grande partie les conclusions de la Commission en 2004. Entre décembre 2004 et la décision du Tribunal en septembre 2007, la Commission a surveillé la mise en œuvre par Microsoft des mesures correctives imposées en 2004. En mars 2007, la Commission s’est opposée aux mesures mises en œuvre par Microsoft pour se conformer à la décision de la Commission. Microsoft était tenue, aux termes de la décision, de fournir des renseignements complets et précis sur l’interopérabilité à des conditions raisonnables. La Commission a allégué que Microsoft n’avait pas fourni des renseignements complets et précis et exigeait des sommes trop élevées de ses concurrents pour ces renseignements. La Commission avait mis en garde Microsoft qu’elle pouvait être condamnée à des amendes jusqu’à trois millions d’euros par jour pour chaque jour pendant lequel Microsoft ne se conformait pas à la décision de 2004. Après la publication de la décision du Tribunal en septembre 2007, Microsoft a commencé à offrir des renseignements sur l’interopérabilité à ses concurrents à un prix moins élevé. L’amende de 899 millions d’euros avait trait à la non-conformité depuis 2004 jusqu’à l’automne 2007. Il est intéressant de souligner que l’amende à laquelle Microsoft a été condamnée pour abus de position dominante dépasse de beaucoup les amendes que la Commission a imposées pour des ententes de prix, que beaucoup considèrent comme la forme la plus flagrante de conduite anticoncurrentielle. Communiquez avec : Randal T. Hughes à Toronto à [email protected] ou Donald B. Houston à Toronto à [email protected] ou Jeanne L. Pratt à Toronto à [email protected] International : Google réalise l’acquisition de DoubleClick Après une attente de presque un an, le géant des moteurs de recherche Google a franchi les derniers obstacles réglementaires et conclu son acquisition de DoubleClick. En avril 2007, Google avait annoncé qu’elle faisait l’acquisition de DoubleClick, agence de publicité en ligne, au prix de 3,1 milliards de dollars américains. Cependant, l’opération avait été suspendue en raison d’un examen minutieux au chapitre des lois antitrust de la part d’organismes antitrust aussi bien aux États-Unis qu’en Europe. Le 20 décembre 2007, la Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis a permis la réalisation de l’acquisition, malgré l’opposition à la fusion de la part d’entreprises comme Microsoft Corp., Yahoo! et AT&T Inc., ainsi que de groupes industriels et de politiciens. La FTC a conclu qu’il est peu probable que la fusion réduise sensiblement la concurrence au sein de tout marché concerné. Le 11 mars 2008, la Commission européenne a également approuvé l’acquisition. Après une longue enquête, la Commission a conclu que la fusion n’entraverait pas de façon significative une concurrence réelle en Europe. Elle a fait observer que Google et DoubleClick n’étaient pas des concurrents. Même s’ils étaient finalement devenus des rivaux, la Commission a décidé que les autres concurrents exerceraient probablement une pression suffisante sur le marché. De plus, la présence d’autres outils crédibles de diffusion d’annonces vers lesquels Page 11 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 les clients peuvent se tourner, notamment Microsoft et Yahoo!, empêcherait l’entité issue de la fusion de mettre en œuvre des stratégies visant à marginaliser les concurrents. Communiquez avec : Lorne P. Salzman à Toronto à [email protected] International : Les recommandations de l’ICANN pourraient accroître considérablement les nouveaux noms génériques de domaines de premier niveau Il fut un temps où les entreprises n’étaient préoccupées que par les « .com » et « .net » du monde dans le cadre de leurs stratégies visant les marques de commerce et les noms de domaine. Mais désormais, avec des noms de domaines de premier niveau génériques spécialisés (gTLD) comme « .travel » et « .pro », les entreprises auraient avantage à réexaminer leurs portefeuilles de noms de domaine. En fait, puisque l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN) va de l’avant avec l’expansion potentiellement phénoménale des gTLD, ce réexamen pourrait devenir une priorité. L’omniprésent « point-quelque chose » fait partie du système de noms de domaine (ou DNS) d’Internet qui permet aux utilisateurs de faire référence à des noms de domaine de sites Web (comme « www.mccarthy.ca »), plutôt qu’aux encombrantes adresses numériques du Protocole Internet adressées à chaque ordinateur sur Internet. En plus des 20 gTLD qui existent actuellement, on compte près de 260 autres domaines de premier niveau, dont quelque 240 codes nationaux de TLD (chacun un ccTLD). En août 2007, le Generic Names Supporting Organization de l’ICANN a déposé son rapport final intitulé Introduction of New Generic Top-Level Domains. Le document comprend une série de recommandations qui pourraient, si elles sont mises en œuvre, ouvrir la voie à un grand nombre de nouveaux gTLD. Le rapport recommande notamment que tous les requérants de nouvelles inscriptions de gTLD soient évalués en fonction de critères transparents et prévisibles auxquels les requérants pourraient avoir accès avant d’entamer le processus. Dès la mise en œuvre intégrale de ces recommandations, les ressources techniques et financières pourraient bien être les obstacles les plus importants à l’octroi de nouveaux gTLD. Cela pourrait accroître grandement le potentiel des nouveaux gTLD. Afin de démontrer l’importance des noms de domaines de premier niveau, il pourrait être utile de se tourner vers l’expérience de petites nations comme le Tuvalu et les États fédérés de Micronésie. En raison du hasard des règles d’affectation des noms, ces deux pays ont acquis une valeur stratégique démesurément élevée pour certaines entreprises du secteur des médias. Le Tuvalu s’est vu attribuer le ccTLD de « .tv » et les États fédérés de Micronésie se sont vu attribuer celui de « .fm ». Ces ccTLD se sont traduits en des Page 12 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 dizaines de millions de dollars de droits de licence de la part de tiers registraires n’ayant par ailleurs aucun lien avec les deux pays. Remarques de McCarthy Tétrault : Il va sans dire que certains des nouveaux gTLD deviendront populaires et que bien d’autres tomberont. Cependant, dans la réalité actuelle du cybersquattage et du raffinement croissant des fraudes en ligne, les entreprises devraient commencer à examiner les conséquences d’un monde comptant des centaines plutôt que des douzaines de gTLD. Il sera encore plus important de prendre des décisions quant aux noms de domaine à enregistrer et quant aux processus à mettre en œuvre pour faire face aux contrefacteurs éventuels de marques de commerce ou de noms commerciaux. Les entreprises devraient s’attendre à un certain degré d’incertitude et à d’éventuelles crises de croissance en raison de l’expansion future, mais elles pourront gérer ces risques grâce à une planification et à une expertise appropriées. En définitive, les nouveaux gTLD pourraient bien offrir aux entrepreneurs de nouvelles possibilités. LICENCES DE LOGICIEL International : Les licences de logiciels et de contenus libres : du copyright au copyleft — Partie III Ce texte est le troisième d’une série de quatre articles consacrés aux licences de contenu libre, et en particulier au régime du copyleft aux termes de la licence générale publique GNU (ou licence GPL). Cette troisième partie aborde les difficultés relatives à la détermination du droit applicable et les dispositions d’exonération des obligations attachées au copyleft de la licence GPL. Communiquez avec : Steven Hennig à Ottawa à [email protected] Page 13 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Remarques de McCarthy Tétrault : Nombreuses sont les personnes dans l’industrie du logiciel et même en pratique juridique, qui croient que la licence GPL, étant donné son origine américaine, est régie en toutes circonstances par le droit des États-Unis et s’interprète selon ce dernier. Toutefois, la licence GPL ne présente qu’une vague ressemblance avec les modèles ou ébauches de licence existants. Les conditions d’une licence effective doivent être définies spécifiquement par les propriétaires du droit d’auteur sur l’œuvre devant faire l’objet de la licence. Comme pour toute autre question de droit des contrats ou de droit de la responsabilité délictuelle, en l’absence de stipulation valide en la matière entre les parties, le droit applicable à un contexte donné de distribution sous conditions de licence GPL dépend d’un certain nombre de facteurs concourant à désigner le territoire ayant un rapport réel et substantiel avec le problème en question. Ces facteurs comprennent les domiciles respectifs des propriétaires du droit d’auteur et des titulaires de licence, le lieu où le logiciel a été créé et les territoires à partir desquels ou dans lesquels le logiciel a été distribué et utilisé. juridique aux différents territoires potentiels selon les circonstances. Cela permet de déterminer un moyen d’action adéquat, en fonction de l’espace juridique où le droit est le plus contraignant ou défavorable relativement au problème considéré. L’analyse ci-dessus devient encore plus complexe si l’on prend en compte le fait que différentes personnes ayant contribué à une œuvre initialement concédée aux termes d’une licence GPL peuvent se livrer à des activités de développement et de distribution dans des territoires autres que ceux où l’œuvre avait au départ été distribuée aux termes de la licence. Pour prendre l’exemple le plus simple, il est difficile de concevoir que la loi américaine puisse régir l’interprétation de la licence GPL dans le cas d’un logiciel créé au Canada, dont le droit d’auteur est détenu au Canada et qui est distribué sous licence GPL et utilisé dans ce même pays. Passons à présent à la deuxième partie de notre analyse en deux phases, afin de déterminer si une utilisation particulière de code logiciel soumis à la licence GPL a pour effet d’étendre les obligations découlant du copyleft de la licence à l’œuvre résultante incorporant tout ou partie du code libre original. Après avoir déterminé, selon le droit applicable, que l’utilisation du code libre sous licence constitue normalement une violation du droit d’auteur pouvant entraîner des poursuites, il convient de définir s’il existe des dispositions d’exonération susceptibles de rendre admissibles des activités pouvant à première vue donner lieu à une action. Comme nous l’avons expliqué dans le dernier numéro, ce type de dispositions peut se trouver dans i) l’énoncé effectif de la licence GPL, dans ii) la foire aux questions sur la licence GPL (FAQ) publiée par la Free Software Foundation (FSF) ou dans iii) toute autre déclaration à effet d’autorisation ou exécutoire faite par les propriétaires du droit d’auteur relatif au code libre considéré ou en leur nom. Les questions de conflit de lois en matière de licence de contenu libre dépassent le cadre de cet article, mais il convient de ne jamais perdre de vue que le droit régissant la licence GPL peut varier d’un cas à l’autre. En ce qui concerne les questions de conformité à la licence GPL dans des situations commerciales délicates, il est souvent judicieux d’étendre l’analyse Page 14 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Les dispositions d’exonération des obligations attachées au copyleft de la licence GPL La formulation expresse de la licence GPL, qui prévoit que la simple juxtaposition d’une œuvre fondée sur un logiciel libre sous licence et d’une autre œuvre sur un volume de stockage ou sur un support de distribution commun n’a pas pour effet d’entraîner l’application des dispositions du copyleft à l’autre œuvre en question, est un parfait exemple du premier type de dispositions d’exonération. Ainsi, un recueil (collective works), compris au sens de la licence, nécessite que les œuvres élémentaires le composant constituent un tout unitaire contextualisé. Dans ce cas, les œuvres élémentaires peuvent être autrement distinguées les unes des autres. Pour les raisons expliquées précédemment, cette interprétation est cohérente avec la nature du recueil défini par la Loi sur le droit d’auteur canadienne. Les dispositions de la licence GPL permettant de soustraire la simple juxtaposition d’œuvres aux obligations de copyleft aux termes de la licence GPL peuvent causer un sentiment de facilité trompeur. Il convient de toujours garder à l’esprit que certaines œuvres logicielles peuvent se présenter initialement comme une juxtaposition autorisée d’œuvres sur un support ou sur tout autre volume au moment de la distribution du produit logiciel, pour ensuite se combiner de manière illégitime au cours de la compilation ou de l'exécution du produit, et ainsi former une œuvre dérivée alors visée par les dispositions de copyleft de la licence GPL. Par exemple, deux œuvres Page 15 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 logicielles distribuées séparément dans un produit peuvent fusionner à la compilation pour former un logiciel exécutable unique. Ces œuvres peuvent ainsi finir par s’exécuter conjointement comme un tout unitaire occupant la même plage d’adresses durant l’exécution du produit compilé. Un tel cas de figure peut à première vue contrevenir à la formulation littérale de la licence GPL, puisque les œuvres combinées à la compilation ou durant l’exécution constituent des reproductions fautives d’œuvres sous licence aux termes de la législation sur le droit d’auteur. Le deuxième type de dispositions d’exonération est contenu dans les énoncés de la FAQ sur la licence GPL. Comme son nom l’indique, la FAQ consiste en une série de commentaires présentés sous forme de questions réponses. Ces commentaires fournissent quelques lignes directrices pratiques et de l’aide pour interpréter et appliquer les différentes dispositions de la licence GPL. Il n’est pas certain que les termes de la FAQ puissent être considérés en toutes circonstances comme exécutoires et juridiquement applicables à l’égard de chaque adoption particulière des conditions de la licence GPL par un titulaire de droit d’auteur relativement à du code libre sous licence. Il suffit en revanche de savoir que les juristes spécialisés dans le domaine des licences libres et leurs clients de l’industrie logicielle ont fréquemment recours à cette FAQ pour régler les questions de droit que soulève la concession de licences libres conformément à la licence GPL. Dans le cas des logiciels sous licence GPL, dont le droit d’auteur sous-jacent appartient à la Free Software Foundation (FSF), il n’est pas inconcevable d’avancer que la FAQ sur la licence GPL devient supplétive aux conditions de la licence GPL : les deux documents sont produits et promus par le même organisme et sont publiés par ce dernier sur le même site Internet. Qui plus est, il est permis de présumer que toute directive interprétative figurant dans le texte de la FAQ a vraisemblablement un effet liant à l’égard de la FSF, que ce soit par adoption contractuelle expresse ou sur le fondement de la théorie de la préclusion (estoppel). Il est en revanche plus difficile, lorsqu’un titulaire de droit d’auteur autre que la FSF adopte les conditions types de la licence GPL pour concéder sous licence un logiciel libre, de soutenir que l’acceptation des conditions de la licence GPL par des tiers indépendants s’étend automatiquement à la FAQ. En de telles circonstances, il peut être compliqué d’établir le fondement d’une adoption contractuelle expresse ou d’une préclusion, comme on peut éventuellement le faire dans le cas des logiciels concédés sous licence par la FSF. On doit pouvoir avancer que la nécessité de se reporter aux directives énoncées dans la FAQ pour résoudre les questions de droit Page 16 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 relatives à la concession de licences libres est devenue tellement courante dans la communauté juridique et dans l’industrie du logiciel que les termes de cette FAQ constituent un « usage du commerce » ou une « coutume ». Cela permettrait de considérer que les énoncés de la FAQ lient le concédant de licence libre au même titre que les questions de droit contractuel. Établir qu’une pratique ou une activité constitue une « coutume » ou est « habituelle » exige une preuve imposante. Ce type de pratique ou d’activité ne peut être élevé au rang de coutume que s’il peut être qualifié d'habitude de longue date, constante (« long and unvarying habit ») et couramment observée. Les tribunaux canadiens exigent qu’il soit démontré qu’une pratique est « notoire et certaine » pour la considérer comme une coutume ou un usage. Dans le même ordre d’idées, l’Uniform Commercial Code des États-Unis définit une coutume comme un « usage du commerce » et la limite à une « [traduction] pratique tellement habituelle dans un endroit, une profession ou un métier qu’il est justifié de s’attendre à ce qu’elle soit observée ». Malgré la rigueur des conditions exigées pour conclure à une coutume ou à un usage du commerce, le recours à la FAQ est répandu et admis par les juristes et leurs clients à un point tel que l’incorporation en bloc de ses conditions dans la licence GPL ne serait ni déraisonnable ni injustifiée, même en ce qui a trait à l’adoption de la licence GPL par des tiers. L’exonération puisant son fondement dans la FAQ qui permet à la fois à des programmes libres et à des programmes exclusifs d’être exécutés en même temps sans déclencher l’application des obligations liées au copyleft de la licence GPL, si les deux types de programme communiquent sans aucun lien d’interdépendance, constitue un cas d’exonération important. La FAQ prévoit deux critères pour déterminer de façon générale si un programme libre concédé sous licence GPL est utilisé de manière suffisamment distincte et indépendante d’un produit exclusif existant pour éviter l’imposition des obligations du copyleft à l’ensemble combiné des deux programmes. Selon le commentaire de la FAQ qui nous intéresse ici, il convient de considérer en premier lieu le mécanisme de communication entre les deux programmes, puis, en second lieu, la sémantique de cette communication. En ce qui concerne le mécanisme de communication, la FAQ établit que, si les deux programmes sont incorporés dans le même fichier exécutable ou sont conçus pour fonctionner conjointement dans une plage d’adresse commune, il s’agit d’un programme combiné ou d’une œuvre dérivée au sens de la licence GPL. Les obligations liées au copyleft s’imposent alors au logiciel exclusif faisant partie du programme combiné, avec pour conséquence intrinsèque l’obligation de publier le code source aux termes de la licence GPL. Page 17 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 En revanche, la FAQ précise que certaines techniques de communication entre les deux programmes, comme l’utilisation de canaux, d’interfaces de connexion et d’arguments de ligne de commande, traduisent un degré d’indépendance des programmes en principe non susceptible d’étendre l’application des obligations de copyleft de la licence GPL aux logiciels exclusifs n’interagissant que de cette façon avec le logiciel libre. Malgré cela, s’agissant du deuxième critère, la FAQ établit qu’une sémantique de communication suffisamment poussée entre un programme libre et un programme exclusif milite en faveur de l’idée d’un programme combiné. Dans ce cas, les obligations liées au copyleft de la licence GPL s’imposent au logiciel exclusif. Les deux programmes en question sont alors effectivement vus comme un programme unique, malgré l’adoption de mécanismes de communication acceptables en d’autres circonstances pour établir le caractère distinct des deux programmes. À titre d’exemple, la FAQ énonce que l’échange de structures de données complexes internes entre deux programmes est représentatif d’une sémantique de communication permettant de conclure à l’existence d’un programme combiné unique pour l’application de la licence GPL. Le dernier type d’exonérations peut provenir du titulaire du droit d’auteur. Il se situe en dehors des conditions types de la licence GPL et est également externe à la FAQ, qui ont toutes été décrites précédemment. Par exemple, en adoptant la licence GPL pour distribuer un logiciel selon le modèle « libre », le titulaire d’un droit d’auteur peut prévoir des exonérations ou des exclusions particulières, afin d’autoriser différentes combinaisons de logiciel libre et de logiciel exclusif et de veiller à ce que le programme exclusif soit ainsi tenu à l’écart des obligations liées au copyleft de la licence GPL. L’exemple de ce type d’exonérations peut-être le plus célèbre est la note explicative annexée à la licence GPL et intitulée « clarifying note », qui aurait prétendument été ajoutée par Linus Torvalds relativement au logiciel Linux. La note en question assurait à la communauté des développeurs que les programmes d’utilisateur exclusifs faisant appel aux services du kernel (noyau) de Linux par l’intermédiaire d’appels système normaux n’entraient pas dans la définition des œuvres dérivées pour l’application de la licence GPL. Ce type de déclaration externe peut très bien lier son auteur, encore une fois sur le fondement du droit contractuel ou de la préclusion. Toutefois, pour avoir des effets pratiques, la déclaration doit émaner du titulaire ou de l’ensemble des titulaires du droit d’auteur sur l’œuvre sous licence au moment où elle est formulée. Dans le cas d’un logiciel libre, la multitude de personnes ayant pu contribuer au Page 18 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 développement d’un produit libre peut rendre difficile cette détermination. Ainsi, il n’est pas évident d’établir si Linus Torvalds était le seul et unique propriétaire de toutes les composantes de Linux pouvant être touchées par l’exonération lorsqu’il a déclaré cette dernière. La chronologie est un élément essentiel, car un titulaire de droit d’auteur peut valablement instaurer une exonération à un moment donné, alors qu’il possède la totalité du droit d’auteur et du droit moral sur une œuvre sous-jacente. Si des tiers doivent ensuite travailler sur l’œuvre sousjacente et la modifier pour la redistribuer à d’autres, leur contribution à l’œuvre, puis ultérieurement celle d’autres tiers, sera soumise exactement aux mêmes conditions que celles qui s’attachaient à l’œuvre sousjacente. Cela tient bien sûr à la nature du copyleft inhérent à la licence GPL. En revanche, si le titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre sous-jacente consentie sous licence GPL fait une déclaration d’exonération après que des tiers ont apporté des modifications à l’œuvre, cette déclaration n’est pas censée lier les tiers en question. De plus, cela pourrait tout à fait constituer une violation des droits de ces tiers sur leurs modifications de l’œuvre, qui sont protégés par les conditions initiales de la licence GPL, avant la déclaration en question. Cet article a mis l’accent sur les problèmes inhérents aux obligations liées au copyleft aux termes de la licence GPL; il faut cependant savoir que ce type de licences soulève bien d’autres questions et difficultés. Cela fera l’objet de la prochaine partie de cet article. Communiquez avec : Alfred Macchione à Toronto à [email protected] Page 19 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Financement des entreprises de technologie FINANCEMENT LIÉ AU SECTEUR DE LA TECHNOLOGIE Amérique du Nord : Transformer votre entreprise de technologie en société ouverte — Partie III Dans les deux derniers numéros, nous avons expliqué pourquoi certaines sociétés de technologie fermées se transforment en société ouverte, et pourquoi un grand nombre ne le font pas. Si vous avez déjà soupesé le pour et le contre d’une transformation en société ouverte, et voulez vendre vos actions sur le marché public, nous vous exposons maintenant le processus du premier appel public à l’épargne (ou PAPE dans le jargon du milieu). L’équipe interne du PAPE La première étape du processus consiste à organiser l’équipe chargée de manœuvrer dans le dédale des aspects juridiques, réglementaires et financiers d’un PAPE. À l’interne, votre chef des finances et votre chef de la commercialisation (qui est souvent un vice-président à la commercialisation) constitueront les deux personnes clés, et le chef de la direction ainsi que d’autres cadres supérieurs de la société apporteront habituellement une collaboration importante. Le fait que le chef des finances et le chef de la commercialisation doivent consacrer une grande partie de leur temps (de six à neuf mois, soit la durée habituelle d’un processus de PAPE) au processus du PAPE constitue l’un de vos défis. Cela signifie que ces deux personnes importantes auront beaucoup moins de temps à consacrer à leurs « fonctions quotidiennes ». Idéalement, votre société aura prévu une telle situation et pourra ainsi confier ces fonctions à d’autres personnes. Toutefois, il n’est pas rare, particulièrement dans les petites sociétés de technologie (et d’autres secteurs) qui s’inscrivent en Bourse, que plusieurs autres membres de l’équipe de la haute direction (en particulier, le viceprésident aux ventes) s’impliquent trop dans le processus du PAPE, si bien que l’attention de la société se trouve détournée pendant quelques trimestres (particulièrement en termes d’efforts relatifs aux ventes). Ceci peut entraîner, par exemple, une baisse du chiffre d’affaires pendant un ou deux trimestres suivant le PAPE. Cela peut mener à une baisse du cours de l’action (maintenant négociée publiquement) de la société de technologie au-dessous du prix d’émission dans le cadre du PAPE, une situation pouvant se révéler très décourageante pour les investisseurs et les employés (ces derniers ayant souvent des options d’achat d’actions de la société). Page 20 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Il est donc primordial que tous les hauts dirigeants fassent preuve d’une grande discipline pour ce qui est du temps consacré au processus du PAPE. L’équipe ne doit pas perdre de vue le fait que derrière le processus de PAPE, si captivant et important qu’il soit, se trouve une entreprise qui doit continuer d’être dirigée (d’autant plus que votre société sera bientôt ouverte et que vos prochains résultats financiers trimestriels seront publics). Conseillers externes Outre votre équipe interne, vous devrez avoir recours dans le cadre du processus du PAPE aux talents et aux efforts d’au moins trois conseillers externes différents. Premièrement, vous aurez besoin des services d’un banquier d’affaires (et leur banque d’affaires) dans le cadre de votre transformation en société ouverte. Le banquier d’affaires vous indiquera si les marchés financiers sont disposés à acheter des actions de votre société et à quel prix. Il procédera à une vérification diligente (dans le cadre de laquelle il demandera l’aide d’un cabinet d’avocats) de votre société (cette vérification diligente sera décrite plus amplement dans le prochain numéro), et il participera à la rédaction du très important prospectus (dont nous parlerons plus en détail ci-après et dans le prochain numéro). Mais par-dessus tout, le banquier d’affaires vous aidera à vendre vos actions. Il établira avec vous la proportion la plus souhaitable de particuliers investisseurs et d’investisseurs institutionnels pour votre société. Puis il mettra à contribution son réseau de distribution pour préparer un registre des ordres pour vos actions afin de finaliser le processus du PAPE. Si votre société est jeune et n’a pas d’antécédents significatifs, la crédibilité et la réputation de votre banquier d’affaires seront d’autant plus importantes. Le processus du PAPE est un exercice juridique extrêmement exigeant. Afin de protéger le public investisseur, et en général l’intégrité des marchés boursiers, le prospectus et les autres aspects du processus du PAPE sont assujettis à un nombre imposant de règles et de régimes juridiques. Il vous faudra donc avoir recours aux services d’un cabinet d’avocats ayant deux forces dans le cadre de votre transformation en société ouverte. Il est évident que le cabinet d’avocats doit avoir une solide expertise en valeurs mobilières, particulièrement en ce qui concerne les PAPE. Mais il doit aussi avoir une expérience approfondie dans le secteur de la technologie afin de bien comprendre votre technologie et votre modèle d’entreprise unique. Ces connaissances sont indispensables dans la préparation du prospectus et le processus de vérification diligente. Enfin, vous aurez besoin d’un cabinet de comptables qui vous aidera à vous acquitter des nombreuses obligations de nature réglementaire visant vos états financiers ainsi que des autres obligations liées à la comptabilité. À titre de seuil, votre prospectus devra nécessairement inclure les états financiers vérifiés des trois derniers exercices. Les comptables vous fourniront aussi d’autres services utiles, notamment en ce qui concerne les sections de nature financière du prospectus, comme le rapport de gestion, dans le cadre Page 21 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 duquel vous devez expliquer de façon significative vos résultats financiers sous forme narrative. Un coût qui semble élevé? Il est vrai que tous ces services seront coûteux. La rémunération du banquier d’affaires correspondra habituellement à 6 % des fonds réunis auprès des nouveaux actionnaires publics dans le cadre du processus du PAPE. Les avocats et les comptables facturent habituellement leurs services selon un tarif horaire. Ensuite viennent les coûts d’impression du prospectus ainsi que les coûts de la traduction en français de celui-ci si vous placez vos actions au Québec. Et si vous voulez vendre une partie de vos actions aux États-Unis, il y aura des coûts supplémentaires pour les services juridiques américains. Lorsque vous établissez un budget pour les honoraires de vos conseillers professionnels, nous vous conseillons toutefois de ne pas vous arrêter au seul montant des honoraires mais plutôt de considérer ces coûts par rapport au total des fonds réunis dans le cadre du processus du PAPE. De plus, ce n’est pas une bonne idée de rogner sur les honoraires professionnels pour des services comme la vérification diligente, compte tenu de l’envergure de la responsabilité personnelle et d’entreprise qui peut se rattacher à un prospectus erroné. Ainsi, comme c’est le cas pour tous les services juridiques, comptables et autres services professionnels de qualité, le véritable critère ne doit pas être le coût mais la valeur. Le très important prospectus Une fois que vous avez mis sur pied votre groupe de travail (composé de personnes provenant de votre société et de vos conseillers externes), le point central du processus du PAPE devient la rédaction du très important prospectus. Il s’agit du document que vous devez, en vertu de la loi, remettre aux personnes qui investiront éventuellement dans votre société bientôt ouverte. Le prospectus est un document d’une importance capitale. Pour comprendre le rôle essentiel du prospectus, pensez à la différence qui existe entre la vente des actions de votre société à des centaines de petits investisseurs (c.-à-d., des particuliers) et peut-être des dizaines d’investisseurs institutionnels (comme des fonds communs) (ce qui correspond essentiellement au processus du PAPE) et la vente d’actions à un investisseur de capital de risque, ce que vous avez probablement fait il y a quelques années lorsque vous étiez à un stade antérieur de développement en tant que société de technologie. L’investisseur de capital de risque était un investisseur expérimenté dans des sociétés de technologie, et particulièrement dans votre créneau (c.-à-d., logiciel, matériel, microplaquettes). Cet investisseur a examiné en profondeur votre marché, votre entreprise et vos défis puis il a personnellement effectué une vérification diligente visant votre équipe de direction, votre technologie et vos aspects financiers. Il a donc acquis une très bonne connaissance de votre société et en participant avec vous à de nombreuses rencontres sur une Page 22 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 période de six à huit semaines, il a obtenu des réponses à toutes ses questions. Puis son avocat a préparé un document d’achat d’actions dans lequel vous avez dressé une longue liste de déclarations et garanties concernant votre entreprise. C’est seulement après que soit terminé cet échange d’information que l’investisseur a investi plusieurs millions de dollars dans vos actions. Pour des raisons d’ordre pratique, il est bien sûr impossible de répéter ce processus détaillé et personnalisé d’échange d’information lorsque des actions sont vendues à des centaines d’investisseurs publics. Le prospectus constitue la solution de remplacement. Ce document doit révéler « de façon complète, véridique et claire » tout fait important relatif à votre société et à ses activités, de sorte que les investisseurs éventuels puissent comprendre votre situation avant de décider d’acheter vos actions. Il s’agit de l’opération autour de laquelle gravite le régime de réglementation des valeurs mobilières : vous pouvez vendre vos actions à des personnes que vous n’avez jamais rencontrées pourvu que vous leur remettiez un prospectus qui leur permet de prendre une décision éclairée. Dans le prochain numéro, nous examinerons les différentes exigences du prospectus et le processus de vérification diligente sur laquelle s’appuie le document. Communiquez avec : George S. Takach à Toronto à [email protected] Canada : Incidence prévue des modifications fiscales canadiennes proposées sur les investisseurs transfrontaliers de capital de risque et d’investissement La législation fiscale canadienne actuelle crée des obstacles à la fluidité de l’investissement transfrontalier. Plus précisément, de nombreux investisseurs internationaux de capital de risque, particulièrement les fonds de capital de risque établis aux États-Unis, se sont plaints des délais et des frais supplémentaires associés aux investissements faits au Canada. Les modifications proposées aux obligations relatives à la retenue et aux certificats de décharge de l’article 116 annoncées dans le budget fédéral du 26 février 2008 devraient être considérées comme de bonnes nouvelles pour les investisseurs de capital de risque américains actifs au Canada. En vertu de la législation fiscale canadienne actuelle, un fonds établi aux États-Unis qui investit directement dans une société en exploitation au Canada sera généralement tenu, au moment d’une disposition, d’obtenir auprès de l’Agence du revenu du Canada un certificat (habituellement appelé un « certificat en vertu de l’article 116 » suivant l’article correspondant de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada)), de produire une déclaration de revenu canadienne et de fournir certains détails concernant chacun de ses commanditaires. En vertu des modalités de leurs conventions de société en commandite, il arrive souvent que les commanditaires de capital de risque ne puissent le faire. Et même Page 23 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 lorsqu’ils sont autorisés à le faire, le respect des exigences peut se révéler particulièrement complexe. Pour alléger ce fardeau administratif, de nombreux fonds américains de capital de risque en sont venus à structurer leurs investissements au Canada au moyen d’une opération portant sur des actions échangeables. Ces fonds investissent directement dans les actions d’une société du Delaware nouvellement créée contre lesquelles la totalité des actions de la société canadienne existante en exploitation sont échangeables à la survenance de certains événements. Il semble également que d’autres fonds américains structurent leurs investissements canadiens par l’intermédiaire d’une société résidant dans un troisième territoire (p. ex., la Barbade ou le Luxembourg) qui permet d’alléger le fardeau administratif et peut représenter par ailleurs une solution plus avantageuse sur le plan de la planification fiscale. Dans de nombreux cas, ces aspects complexes ont entraîné des coûts d’opérations considérablement plus élevés ou ont dissuadé des investisseurs qui envisageaient d’investir au Canada. En fait, des analystes ont attribué à ces restrictions fiscales le manque de capital de risque mis à la disposition des entrepreneurs canadiens. Dans le budget fédéral de 2008, le gouvernement canadien a proposé d’apporter des modifications aux obligations relatives à la retenue et au certificat de décharge de l’article 116 et il faut espérer que ces modifications viendront atténuer une partie du coût et des inconvénients associés à certaines opérations transfrontalières. Les propositions pourraient avoir pour effet d’alléger le fardeau de conformité imposé à certains vendeurs non résidents et de leur permettre d’éviter la retenue sur le prix d’acquisition à la clôture. Pour être admissible à l’allégement proposé, il faut remplir plusieurs exigences. Compte tenu du risque potentiellement élevé de retenue des acheteurs, ceux-ci devront évaluer avec diligence si les critères pertinents peuvent être satisfaits adéquatement. Dans certains cas, les avis, déclarations et certificats pourraient ne pas suffire à offrir aux acheteurs le niveau d’assurance souhaité. Dans un autre ordre d’idées, mais toujours dans le secteur du capital de risque, le budget a aussi proposé des bonifications relatives à la recherche scientifique et au développement expérimental au Canada, en particulier en ce qui concerne la recherche et le développement poursuivis par des sociétés privées sous contrôle canadien et certains travaux de recherche et de développement admissibles devant être poursuivis à l’extérieur du Canada. Pour une analyse plus détaillée des modifications visant les obligations relatives à la retenue et au certificat de décharge de l’article 116, consultez les commentaires du cabinet relatifs au budget fédéral. Page 24 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Communiquez avec : W. Ian Palm à Toronto à [email protected] ou Patrick McCay à Toronto à [email protected] Ontario : Budget de l’Ontario 2008 : Des allégements fiscaux limités pour le secteur de la technologie Le 25 mars 2008, l’Ontario a publié son budget. Au nombre des mesures budgétaires visant les sociétés de technologie et leurs investisseurs figurent une exonération fiscale limitée de 10 ans pour les sociétés, le crédit d’impôt à l’innovation de l’Ontario et le crédit d’impôt de l’Ontario pour les produits multimédias interactifs numériques. Exonération fiscale de 10 ans visant les sociétés (activités de commercialisation) Le budget propose une exonération d’impôt de 10 ans pour les nouvelles sociétés qui commercialisent la propriété intellectuelle mise au point par des universités, des collèges ou des instituts de recherche admissibles du Canada. Les sociétés admissibles établies entre le 24 mars 2008 et le 25 mars 2012 seraient exonérées de l’impôt sur le revenu des sociétés et de l’impôt minimum sur les sociétés pendant leurs 10 premières années d’imposition. L’exonération s’appliquerait aux sociétés constituées au Canada qui tireraient la totalité ou la plus grande partie de leurs revenus des activités de commercialisation admissibles qu’elles mènent en Ontario. Ces activités comprendraient généralement l’élaboration de prototypes et la commercialisation et la fabrication de produits liés à la propriété intellectuelle dans des secteurs prioritaires comme la bioéconomique et les technologies propres, les technologies de pointe de la santé, les télécommunications et les technologies informatiques et numériques. Crédit d’impôt à l’innovation de l’Ontario Le crédit d’impôt à l’innovation de l’Ontario (CIIO) est un crédit d’impôt remboursable de 10 % offert aux petites et moyennes entreprises au titre des activités admissibles de recherche scientifique et de développement expérimental (RS&DE). Le budget propose d’élargir l’application du CIIO à l’instar des bonifications proposées dans le budget fédéral de 2008 pour les activités de RS&DE. Le budget propose en outre de porter de deux millions de dollars à trois millions de dollars le montant maximum des dépenses de RS&DE admissibles et de porter à 700 000 $ le plafond de la fourchette d’élimination progressive du revenu imposable tout en maintenant à 50 millions de dollars le plafond de la fourchette d’élimination progressive du capital imposable. Crédit d’impôt de l’Ontario pour les produits multimédias interactifs numériques Le budget propose de faire passer de 20 % à 25 % le taux du crédit d’impôt de l’Ontario Page 25 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 pour les produits multimédias interactifs numériques (CIOPMIN) de certaines sociétés dans le cas des dépenses admissibles engagées après le 25 mars 2008 et avant le 1er janvier 2012. Le budget propose aussi de prolonger jusqu’au 1er janvier 2012 le taux de CIOPMIN bonifié de 30 % pour les petites sociétés. Pour de plus amples renseignements sur les autres propositions du budget, consultez les commentaires (en anglais seulement) de notre cabinet. Communiquez avec : Patrick McCay à Toronto à [email protected] ou Stefanie Morand à Toronto à [email protected] Page 26 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Sous-traitance de technologie IMPARTITION International : Introduction à l’impartition des processus administratifs à l’étranger — Partie II Le présent article est le deuxième d’une série de trois portant sur les rudiments de l’impartition des processus opérationnels (IPO) à l’étranger. La première partie explorait la conjoncture et les stratégies en matière d’IPO à l’étranger. Cette deuxième partie examine certains aspects juridiques clés des opérations d’IPO à l’étranger. Le dernier volet traitera de la relation continue entre une entreprise et son fournisseur de services d’impartition une fois que l’opération d’IPO à l’étranger a été menée à terme. Votre société a l’obligation de protéger ses données ou renseignements sensibles, exclusifs ou confidentiels par le truchement de différentes sources, notamment : • les lois (p. ex., lois relatives à la protection de la vie privée et à l’emploi); • les exigences réglementaires (p. ex., les règles et procédés adoptés par les autorités bancaires et les conseils d’examen de l’industrie); • les conventions avec des tiers (p. ex., les conventions de non-divulgation et conventions accordant des droits de propriété intellectuelle); • les politiques internes (p. ex., les politiques en matière de protection de la vie privée et de sécurité). Protéger les renseignements de votre société Pour la société qui envisage une IPO à l’étranger, la protection des renseignements de la société (plus précisément les renseignements personnels concernant les clients et les employés de la société) représentent souvent l’enjeu le plus important. Une brèche dans la protection des renseignements peut entraîner différentes formes de responsabilités d’un point de vue juridique, une intervention réglementaire et une atteinte à la cote d’estime et à la réputation de la société. Même si un nombre très restreint de ces sources régissent directement la conduite de votre fournisseur de services d’impartition, elles peuvent faire en sorte que votre société soit responsable des violations faites par ces fournisseurs de service. De plus, certains organismes de réglementation peuvent exiger que votre société impose des limites à la transmission des données de la société à l’extérieur du Canada. Même si votre fournisseur de services d’impartition peut être tenu de se conformer aux exigences en matière de protection de la vie privée et de sécurité des Page 27 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 données dans le territoire où il se trouve, les lois de territoires étrangers régissant la protection des renseignements ne sont généralement pas aussi strictes que les lois canadiennes. Pour bien cerner les exigences propres à votre société sur le plan juridique, vous devrez préciser dans le contrat d’impartition les responsabilités du fournisseur de services d’impartition en ce qui a trait à la protection des renseignements de votre société. Les recours et dispositions en matière de responsabilité stipulés dans le contrat inciteront le fournisseur à tenir compte de vos exigences. Ces normes sont habituellement établies dans le cadre de dispositions pertinentes en matière de confidentialité, d’obligations de respecter les lois, politiques et pratiques touchant notamment la protection de la vie privée qui régissent votre société (plutôt que de dépendre des lois sur la protection de la vie privée qui régissent le fournisseur dans le territoire où il est établi), et d’exigences détaillées sur le plan de la sécurité qui correspondent ou sont supérieures aux normes suivant lesquelles votre société protégerait ses renseignements et données. À mesure qu’évolue la technologie en matière de protection et d’exploitation des données sensibles, le fournisseur devrait être tenu de proposer et de mettre en œuvre de nouvelles mesures de sécurité conformément aux meilleures pratiques de l’industrie. Droit de propriété intellectuelle (PI) dans le cadre d’opérations transocéaniques Le contrat d’impartition type comporte des dispositions qui attribuent le droit de PI, notamment la PI créée dans le cadre du contrat. Le contrat d’impartition devrait accorder à votre société la totalité des droits de propriété et de licence dont elle a besoin pour exercer ses activités après l’expiration ou la résiliation du contrat. Les processus opérationnels mêmes peuvent être brevetables en vertu des lois sur les brevets des États-Unis et c’est pourquoi vous devez vous demander si votre société a besoin de l’avantage concurrentiel que procure la propriété de brevets à l’égard de nouveaux processus (ou d’améliorations aux processus existants) créé aux termes du contrat d’impartition. Peu importe le droit de propriété visé aux termes du contrat d’impartition, et le titulaire de ce droit, il est conseillé de faire examiner les dispositions de PI par un conseiller juridique dans tout pays dont les lois en matière de PI peuvent s’appliquer. Les règles prises en vertu de lois (p. ex., pour donner effet à une cession ou pour la réversion automatique des droits de PI) de ce territoire peuvent différer des lois canadiennes et américaines. Ces règles peuvent souvent être remplacées par le contrat qui a préséance, mais une telle démarche peut exiger des renvois précis au droit applicable pour être valables. Page 28 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Règlement des différends (et comment faire appliquer la décision) Il est rare que des clients poursuivent leur fournisseur de services d’impartition, et vice versa, les deux parties préférant plutôt régler les différends contractuels au moyen de procédures d’intervention et de négociation internes. S’il est impossible de régler un différend de cette manière, les parties peuvent alors décider de s’engager dans un litige ou d’avoir recours à l’arbitrage. Si une décision est obtenue d’un tribunal ou d’un arbitre, les tribunaux du pays du fournisseur doivent faire homologuer un jugement en faveur de cette décision pour que celle-ci puisse y être appliquée. Selon certaines estimations, il peut s’écouler plusieurs années, par exemple, pour qu’un tribunal indien entende une instance fondée sur un jugement par un tribunal étranger. L’arbitrage exécutoire représente souvent un mécanisme officiel de règlement des différends plus pratique dans les cas d’impartition à l’étranger. En général, il faut beaucoup moins de temps pour faire appliquer les décisions arbitrales rendues à l’étranger, à condition qu’elles aient été rendues dans le cadre de régimes d’arbitrage internationaux dont l’Inde (ou le pays où votre fournisseur exerce ses activités) est signataire. contrat d’impartition au nom du fournisseur a des intérêts en jeu. L’entreprise locale de fournisseur de services d’impartition à l’étranger qui existait il y a 10 ans ressemble aujourd’hui davantage à un conglomérat international. C’est pourquoi vous devez vous assurer de traiter avec une entité qui possède des actifs et des sources de revenu pouvant garantir ses obligations aux termes du contrat d’impartition. Si le fournisseur possède des ramifications au Canada, vous pourriez demander que l’entité canadienne signe le contrat d’impartition en plus de l’entité étrangère qui fournira réellement les services. De plus, si votre société entretient une relation avec le personnel de l’entité canadienne, envisagez l’intégration de ce personnel dans la structure de gouvernance et d’intervention dans le contrat d’impartition, ce qui permettra d’établir une responsabilisation au sein de l’organisation du fournisseur tant au Canada qu’à l’étranger. Tenir compte des lois locales en matière de fiscalité et d’emploi Mettre à profit la relation établie au pays Il est toujours conseillé de faire examiner un contrat d’impartition à l’étranger par un conseiller juridique compétent dans le pays où les processus de votre société sont impartis. Les lois du pays hôte en matière de fiscalité et d’emploi sont particulièrement importantes. Pour pouvoir faire appliquer des jugements et pour gérer la relation avec votre fournisseur de services d’impartition, votre société cherchera à obtenir des garanties que l’entité qui signe le Certains pays (l’Inde constitue encore une fois l’exemple le plus connu) ont des lois fiscales pouvant faire en sorte qu’une partie du revenu de votre société soit imposée par les autorités Page 29 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 fiscales du pays hôte en vertu de l’entente d’impartition. Dans le cadre de la législation fiscale de l’Inde, une société peut être réputée avoir créé un « établissement permanent » en Inde (créant ainsi une obligation fiscale possible dans ce pays) si les autorités fiscales concluent que la relation d’impartition est davantage le prolongement des activités étrangères de la société qu’une opération sans lien de dépendance. Dans le même ordre d’idées, certaines lois étrangères peuvent considérer les employés de votre fournisseur de services d’impartition comme des employés de votre société et pourraient exiger que votre société se conforme aux lois locales en matière d’emploi. Cette situation entraîne parfois un problème de « co-emploi ». fiscalité locale, qu’il s’agisse d’adapter le mode particulier de gestion quotidienne du fournisseur de services d’impartition de votre société ou de la restructuration de votre organisation au niveau de la société. Dans tous les cas, ces mesures devraient être mises en place le plus tôt possible. Dans le prochain numéro, nous examinerons les façons dont une société peut optimiser ses relations continues avec son fournisseur de service d’IPO à l’étranger. Communiquez avec : Joel Ramsey à Toronto à [email protected] La définition d’établissement permanent et de co-emploi dépend souvent de nombreux critères et peut tenir compte de plusieurs caractéristiques de l’entente prévue. Dans le cas de l’établissement permanent, ces critères peuvent comprendre le temps que passe les employés de votre société en Inde, le droit éventuel de votre société d’utiliser les installations du fournisseur à l’étranger pour exercer des activités commerciales et la capacité que peuvent avoir les employés du fournisseur de conclure des contrats au nom de votre société. Prévoyez l’analyse des lois locales le plus tôt possible et assurez-vous qu’elle soit terminée avant que le fournisseur commence à fournir des services pour votre société. Il existe plusieurs façons d’atténuer le risque lié à la Page 30 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 CONTRATS DES SOCIÉTÉS DE TECHNOLOGIE Canada : Nouvelle obligation de déposer les « contrats importants » conclus dans le cours normal des activités Les sociétés fermées qui concluent des contrats avec des émetteurs assujettis canadiens (sociétés ouvertes) seront peut être surprises d’apprendre que ces contrats pourraient être accessibles au public par Internet. Les récentes modifications apportées au Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue exigent maintenant que les émetteurs assujettis déposent dans SEDAR certains « contrats importants » conclus « dans le cours normal des activités ». Les contrats importants conclus le 1er janvier 2002 ou après cette date et qui sont toujours en vigueur seront également visés par cette nouvelle exigence s’ils n’ont jamais été déposés auparavant. Avant l’entrée en vigueur de ces modifications le 17 mars 2008, les émetteurs assujettis n’étaient pas tenus de déposer dans SEDAR les contrats importants conclus « dans le cours normal des activités ». Un contrat important s’entend de tout contrat auquel est partie un émetteur assujetti ou l’une de ses filiales et qui est important pour l’émetteur assujetti et comporte généralement une annexe ou un addenda auxquels le contrat et ses modifications font renvoi. Les émetteurs assujettis doivent maintenant déposer certains types de contrats importants conclus dans le cours normal des activités. Il s’agit notamment des contrats de franchise et de licence et des autres contrats portant sur l’utilisation d’un brevet, d’une formule, d’un secret commercial, d’un procédé ou d’un nom commercial. De plus, les contrats importants dont dépendent en grande partie les activités de l’émetteur assujetti sont visés par la nouvelle exigence de dépôt. Ainsi, les contrats de licence et les contrats d’impartition importants dans le secteur de la technologie pourraient devoir être déposés et deviendraient donc accessibles au public. Le Règlement permet l’adaptation ou l’omission de certaines dispositions contractuelles lorsqu’un membre de la haute direction de l’émetteur assujetti a des motifs raisonnables de croire que leur divulgation porterait un préjudice grave aux intérêts de l’émetteur assujetti ou violerait des dispositions de confidentialité. Une phrase descriptive du type d’information omise ou adaptée doit être ajoutée. Il faut toutefois noter qu’aucune adaptation ni omission n’est possible si la disposition concerne : • les clauses restrictives et les ratios prévus par les contrats de financement ou de crédit; • les dispositions relatives aux cas d’inexécution et les modalités de résiliation du contrat important; • toute autre modalité qui est nécessaire pour comprendre l’incidence du contrat important sur les activités de l’émetteur assujetti. Page 31 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Pour ce qui est des contrats importants conclus avant le 17 mars 2008, les autorités de réglementation peuvent envisager d’accorder une dispense pour que soient adaptées certaines dispositions dans le cas où leur divulgation violerait une disposition de confidentialité. Dans le cadre de leur décision d’accorder une dispense, les autorités de réglementation tiendront compte d’un certain nombre de facteurs, notamment : • un membre de la haute direction de l’émetteur assujetti a des motifs raisonnables de croire que la divulgation des dispositions porterait préjudice aux intérêts de l’émetteur; • l’émetteur assujetti n’est pas en mesure d’obtenir de l’autre partie une renonciation à la disposition de confidentialité. n’ont jamais encore été déposés. Dans le cadre de cet examen, une attention particulière devrait être accordée aux obligations de confidentialité existantes dans les contrats. Avant d’afficher les contrats dans SEDAR, l’information confidentielle ou préjudiciable qui se trouve dans les contrats et les annexes devrait être adaptée ou omise (si le Règlement l’autorise) et une phrase descriptive devrait être ajoutée. De plus, les émetteurs assujettis doivent prendre garde de ne pas divulguer de renseignements personnels de manière à contrevenir à la législation relative à la protection de la vie privée. Les émetteurs assujettis doivent aussi être attentifs aux nouvelles exigences de dépôt au moment de négocier de nouveaux contrats. En particulier, ils devraient s’assurer que les dispositions en matière de confidentialité permettent de déposer le contrat dans SEDAR. En s’adaptant à la nouvelle exigence, les émetteurs assujettis devraient aussi définir des contrats importants types et mettre en place un processus d’examen systématique de ces contrats. Remarques de McCarthy Tétrault : Les sociétés fermées pourraient vouloir ajouter à leurs contrats des dispositions en matière de confidentialité prévoyant un droit d’approbation de toute adaptation du contrat. Bien qu’un droit d’approbation sera toujours assujetti aux exigences des lois applicables (y compris celles du Règlement), une telle disposition permettrait aux sociétés fermées d’établir quelles dispositions contractuelles confidentielles peuvent être communiquées publiquement. Les émetteurs assujettis devront examiner attentivement les contrats importants toujours en vigueur qui ont été conclus le 1er janvier 2002 et après cette date qui Communiquez avec : Patrick Boucher à Montréal à [email protected] ou Frédéric Cotnoir à Montréal à [email protected] ou Vanessa Grant à Toronto à [email protected] Page 32 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Propriété intellectuelle DROIT D’AUTEUR Canada : Annulation de la redevance sur les iPod liait pas les parties puisque les enregistreurs audionumériques n’étaient pas spécifiquement en cause, la Cour a exprimé son désaccord. Elle a conclu que sa décision antérieure tranchait la question de manière concluante. Dans le volume 3, numéro 1, nous avons indiqué que la Société canadienne de perception de la copie privée (SCPCP) avait déposé un projet de tarif de redevances pour 2008 et 2009 aux termes du régime de la copie privée. La SCPCP y demandait notamment une redevance sur les enregistreurs audionumériques comme les iPod. La Commission du droit d’auteur du Canada avait accepté la demande et accordé la redevance. Toutefois, le 10 janvier 2008, moins de 24 heures après avoir entendu l’affaire, la Cour d’appel fédérale a catégoriquement rejeté la décision de la Commission du droit d’auteur. Dans une affaire antérieure, la SCPCP avait demandé à la Commission du droit d’auteur d’imposer la redevance sur la mémoire non amovible des enregistreurs audionumériques. La Commission avait accepté cette demande. Toutefois, la Cour d’appel fédérale avait conclu que la mémoire non amovible ne pouvait faire l’objet d’aucune redevance et que la Commission du droit d’auteur n’avait pas le pouvoir d’homologuer une redevance sur les enregistreurs audionumériques ou leur mémoire intégrée. Même si la SCPCP a tenté de faire valoir que la précédente décision de la Cour ne Page 33 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Remarques de McCarthy Tétrault : Même si la décision de la Cour ne portait pas spécifiquement sur l’étendue du régime de la copie privée, elle constitue une importante victoire pour les titulaires de droits. Si la décision de la Commission du droit d’auteur n’avait pas été renversée, les termes généraux qu’elle employait risquaient d’élargir la portée du régime de la copie privée pour englober non seulement les enregistreurs audionumériques, mais aussi une vaste gamme d’appareils électroniques comme les ordinateurs et les téléphones cellulaires. Selon des déclarations de la Commission du droit d’auteur contenues dans des décisions antérieures, la décision aurait pu être interprétée de manière à inclure la copie de sources de partage de fichiers poste à poste dans le régime de la copie privée, ce qui aurait violé l’intention du Parlement de limiter l’étendue du régime au fait de fournir une compensation pour copier de la musique appartenant déjà à une personne à des fins d’utilisation privée. Cette décision aurait également diminué l’importance fondamentale des droits exclusifs et des marchés en pleine croissance pour la distribution légitime de musique en ligne. On peut également soutenir que la décision de la Commission du droit d’auteur contrevenait aux obligations du Canada aux termes de traités internationaux et bilatéraux et de conventions sur le droit d’auteur en omettant de limiter à de rares circonstances les exceptions aux droits exclusifs. À ce jour, la SCPCP n’a pas demandé l’autorisation de la Cour suprême du Canada d’en appeler de la décision de la Cour d’appel fédérale. Nous vous aviserons de tout autre fait nouveau. Communiquez avec : Barry B. Sookman à Toronto à [email protected] ou Daniel Pollack à Toronto à [email protected] Page 34 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Protection de la vie privée CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES Canada : Les commissaires à la protection de la vie privée publient des lignes directrices relatives à la vidéosurveillance Les commissaires à la protection de la vie privée du Canada, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta viennent de publier conjointement de nouvelles lignes directrices relatives à l’utilisation de la vidéosurveillance par les organisations du secteur privé. Bien qu’ils reconnaissent que certaines raisons justifient que les organisations du secteur privé aient recours à des techniques de vidéosurveillance, les commissaires soulignent i) que la législation sur la protection des renseignements personnels impose des restrictions sur la collecte, l’utilisation et la communication des renseignements personnels et ii) que la vidéosurveillance donne lieu à la collecte de tels renseignements. Remarques de McCarthy Tétrault : Les lignes directrices visent les entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, laquelle s’applique aux entreprises exerçant des activités commerciales dans toutes les provinces, sauf la Colombie-Britannique, l’Alberta et le Québec; à toutes les Page 35 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 entreprises exerçant des activités commerciales lorsque des renseignements personnels sont transmis à l’extérieur de frontières internationales ou provinciales, quel que soit l’endroit où se trouve l’entreprise; ainsi qu’à la relation d’emploi entre des organisations sous réglementation fédérale, comme les banques, les lignes aériennes et les compagnies de chemin de fer, et leurs employés. Les lignes directrices visent aussi les entreprises assujetties aux lois de l’Alberta et de la Colombie-Britannique intitulées Personal Information Protection Act. Ces régimes législatifs imposent, comme critères juridiques importants pour la collecte, l’utilisation et la communication de renseignements personnels, que ces mesures doivent être raisonnables dans les circonstances et qu’elles ne peuvent être effectuées qu’avec le consentement de la personne visée. Les lignes directrices comprennent une liste de dix facteurs à considérer lorsqu’on envisage de recourir à la vidéosurveillance, ou qu’on élabore un plan de vidéosurveillance : 1. Se demander si un moyen portant moins atteinte à la vie privée que la vidéosurveillance pourrait répondre à nos besoins. 2. Déterminer les fins opérationnelles de la vidéosurveillance et limiter son utilisation à ces fins. 3. Élaborer une politique sur l’utilisation de la vidéosurveillance. 4. Limiter autant que possible l’utilisation et la portée visuelle des caméras. 5. Informer le public que l’on effectue une surveillance vidéo. 6. Entreposer toutes les images enregistrées dans un lieu sûr et d’accès restreint, et les détruire lorsqu’elles n’ont plus d’utilité opérationnelle. 7. Se préparer à répondre aux questions du public. Les personnes ont le droit de savoir qui les observe et pourquoi, quelle information est recueillie, et ce que l’on fait des images enregistrées. 8. Offrir aux personnes l’accès aux renseignements les concernant. Cela comprend les images vidéo. 9. Sensibiliser les opérateurs de caméra à l’obligation de protéger la vie privée des gens. 10. Évaluer périodiquement la nécessité d’utiliser la surveillance vidéo. Les lignes directrices traitent également d’autres questions relatives à la vidéosurveillance au moyen d’une série de questions et réponses. Communiquez avec : Barbara A. McIsaac, c.r., à Ottawa à [email protected] Québec : Une société d’assurances tenue de payer des dommages pour surveillance illicite et pour avoir fait fi des décisions de la cour Les employeurs ou les assureurs qui désirent recourir à la vidéosurveillance doivent prendre garde puisqu’au Québec, la surveillance abusive peut entraîner des sanctions sévères. En février 2008, la Cour d’appel du Québec a ordonné à la Compagnie d’assurance-vie Penncorp de payer des dommages punitifs de 125 000 $ à l’assuré, André Veilleux, après que Penncorp eut tenté d’obtenir des preuves même si elle savait que la surveillance contreviendrait au droit à la vie privée de l’assuré, protégé en vertu de l’article 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. M. Veilleux, un homme de 54 ans qui avait exploité un garage de 1982 à 2000, a liquidé son entreprise pour des raisons de maladie. Il a commencé à recevoir des paiements mensuels d’assurance-invalidité de Penncorp en 1998. En avril 1999, Penncorp a cessé de faire les paiements. En 2001, M. Veilleux a poursuivi Penncorp pour obtenir le paiement des prestations. Au cours du procès, Penncorp a cherché à présenter des vidéocassettes provenant des activités de surveillance effectuées en mai et en août 2002. Page 36 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 La Cour supérieure du Québec a refusé d’admettre les cassettes puisque l’assureur n’avait pas de motifs raisonnables d’effectuer la surveillance et a ordonné à Penncorp de verser les paiements d’invalidité mensuels que M. Veilleux aurait dû recevoir d’avril 1999 à février 2003. La Cour d’appel a confirmé cette décision en mars 2004. En juin 2003, Penncorp a engagé le même enquêteur pour effectuer une autre activité de surveillance à l’endroit de M. Veilleux et de son fils. En août 2005, ces derniers ont poursuivi Penncorp pour atteinte à la vie privée. En septembre 2006, la Cour supérieure du Québec a ordonné à Penncorp de verser à M. Veilleux des dommages moraux de 12 500 $ et des dommages punitifs de 25 000 $ pour atteinte au droit à la vie privée de M. Veilleux et pour avoir fait fi du système judiciaire. M. Veilleux et Penncorp ont tous les deux contesté la décision. Dans sa décision rendue en février, la Cour d’appel du Québec a maintenu le jugement de la cour inférieure mais augmenté les dommages à 125 000 $. Remarques de McCarthy Tétrault : La Cour d’appel avait déjà statué dans l’affaire Bridgestone que la surveillance ne viole pas la Charte dans tous les cas. Lorsque la cour décide si elle doit admettre ou non la preuve tirée de la surveillance, elle doit évaluer si : • la surveillance était justifiée par des motifs rationnels et conduite par des moyens raisonnables; Page 37 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 • la société possédait déjà des motifs raisonnables pour effectuer la surveillance avant de décider de le faire — les motifs ne peuvent être créés a posteriori; • la filature était nécessaire et a été menée de la façon la moins intrusive possible; • la société a pris les mesures nécessaires pour vérifier les renseignements par des moyens moins intrusifs avant de recourir à la surveillance; et • la surveillance, exercée dans des lieux publics, a porté atteinte à la dignité. Il y a intrusion intentionnelle lorsque l’auteur du comportement illicite démontre l’intention de porter atteinte au droit à la vie privée d’une autre personne ou agit en sachant qu’il est fort probable que cela constitue une atteinte. À la lumière de l’arrêt Veilleux, des éléments de preuve obtenus dans de telles circonstances peuvent ne pas être admis devant un tribunal. De plus, l’article 49 de la Charte confère à la victime le droit d’obtenir la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte, et le tribunal peut condamner son auteur à des dommagesintérêts punitifs. Le demandeur doit démontrer que le comportement de l’auteur est scandaleux ou déraisonnable, non justifié, sévère et répétitif. Dans le cas de M. Veilleux, la surveillance effectuée en mai 2002 constituait une atteinte illicite à la vie privée de celui-ci. La surveillance effectuée en août 2002 constituait une intrusion excessive parce qu’elle a été effectuée après que la cour eut refusé à Penncorp le droit d’interroger M. Veilleux et de demander un examen médical. Penncorp a décidé de se faire justice elle-même et a tenté de contourner la décision de la cour en entreprenant pendant trois jours une surveillance systématique et répétitive dans des endroits privés. Sa motivation financière semblait malveillante. L’arrêt Veilleux démontre l’importance de plus en plus grande que les tribunaux accordent au droit à la vie privée dans le cadre de litiges. Les sociétés d’assurances et les employeurs qui peuvent avoir interprété la décision Bridgestone comme permettant la surveillance devraient évaluer attentivement si la surveillance est justifiée et l’utiliser avec prudence. Communiquez avec : Charles S. Morgan à Montréal à [email protected] ou Julie Elmlinger à Montréal à [email protected] Canada : À qui appartient quoi? : Existe-t-il, pour les employés, une attente raisonnable à ce que la vie privée soit respectée en ce qui concerne les données stockées sur les ordinateurs? Le droit de l’employé à la vie privée s’applique-t-il aux courriels et autres données créés et stockés sur l’ordinateur que l’employé utilise à des fins professionnelles? Quels sont les droits de l’employeur en ce qui concerne l’accès à ce genre d’information? Les réponses à ces questions dépendent de l’existence, pour l’employé, d’une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée relativement à l’information stockée sur un ordinateur. Qu’est-ce qu’une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée? Deux critères doivent être établis pour démontrer une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée. Premièrement, l’employé doit avoir une attente subjective en matière de vie privée, qui est habituellement démontrée par les mesures prises pour protéger l’information en question. Deuxièmement, l’attente de l’employé en matière de respect de la vie privée doit être objectivement raisonnable. Pour déterminer la présence des critères subjectifs et objectifs, il faut poser des questions telles que celles qui suivent : • Page 38 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 À qui appartient le matériel sur lequel les données sont stockées? • Les données ont-elles été transférées au système informatique ou au réseau de l’employeur, ou à une tierce partie? • L’employeur a-t-il établi une politique sur la gestion de l’information ou sur l’accès par l’employeur à l’information? • Comment les données sont-elles organisées? Les données de l’employeur se trouvent-elles dans un emplacement distinct sur l’ordinateur personnel de l’employé? • L’employé a-t-il tenté de protéger son ordinateur et certains fichiers à l’aide d’un mot de passe? Si l’ordinateur appartient à l’employeur Le fait que l’employeur détient la propriété d’un ordinateur qu’utilise l’employé à des fins professionnelles est un facteur important susceptible de nuire à l’attente raisonnable en matière de respect de la vie privée en ce qui concerne les données stockées sur l’ordinateur, voire en ce qui concerne les données générées par l’usage occasionnel de l’ordinateur à des fins personnelles. Au Canada, plusieurs arbitres ont rendu des décisions selon lesquelles les employés qui utilisent le système informatique de leur employeur pour envoyer et recevoir des courriels et pour afficher des messages sur des forums de discussion n’ont pas le droit à leur vie privée. Dans un cas en particulier, l’arbitre a affirmé que l’employé ne devait pas s’attendre à disposer du droit à la vie privée lorsqu’il se sert de l’Internet et du système de courrier électronique de son employeur. Le concept de propriété est un facteur tellement important que dans une affaire en particulier, le tribunal d’arbitrage a décidé qu’étant donné qu’un employé licencié avait utilisé l’ordinateur portable de son employeur à la maison et au bureau pour accéder à un service de courriel indépendant (Hotmail), toute attente raisonnable en matière de respect de la vie privée à l’égard du compte Hotmail était supplantée par le droit de l’employeur de fouiller le contenu des biens qui lui appartiennent. Politiques de l’employeur Un autre facteur important servant à déterminer l’existence d’une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée est le fait qu’un employeur a établi ou non une politique régissant l’usage du courrier électronique et de l’Internet. Dans une cause, l’existence d’une politique interdisant l’usage du système de courrier électronique à des fins inacceptables ainsi qu’un avis clair s’affichant à l’ouverture de session et indiquant que le système sera surveillé conformément à cette politique ont contribué à miner l’attente en matière de respect de la vie privée d’un employé. Si l’ordinateur appartient à l’employé Si l’ordinateur appartient à l’employé, mais qu’il l’utilise à des fins professionnelles, existe-t-il une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée en ce qui concerne les données stockées sur cet ordinateur? Au Canada, la réponse à cette question n’est pas claire. Page 39 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Aux États-Unis, certaines décisions ont tranché en faveur du droit d’accès de l’employeur aux données lorsqu’une attente en matière de respect de la vie privé n’est pas objectivement raisonnable. Par exemple, il n’y avait aucune attente raisonnable à l’égard de la vie privée en ce qui concerne des fichiers stockés sur l’ordinateur personnel d’un employé qui était branché au réseau d’une base militaire avec un disque partagé. De la même façon, il n’y avait pas d’attente raisonnable en matière de vie privée à l’égard de l’information stockée sur l’ordinateur d’un employé qui avait volontairement fait l’achat d’un ordinateur en vue de l’utiliser pour son travail et qui n’avait pris aucun moyen pour protéger les données à l’aide d’un mot de passe. privée en ce qui concerne les données qui sont stockées sur un ordinateur, il doit l’énoncer clairement. Les employés devraient être tenus de confirmer qu’ils ont lu et compris les politiques en question, et qu’ils acceptent de s’y conformer. Les employeurs devraient en outre établir clairement que les copies des données appartenant à l’employeur demeurent la propriété de ce dernier, peu importe l’endroit où elles sont stockées. Enfin, les employeurs peuvent gérer les attentes de leurs employés en matière de respect de la vie privée en ce qui concerne l’information stockée sur des portables en fournissant des ordinateurs à leurs employés pour leur permettre d’accomplir du travail à l’extérieur, et en tirant parti du fait qu’ils demeurent propriétaires du matériel. Remarques de McCarthy Tétrault : De nombreux employeurs souhaitent superviser l’usage que font leurs employés des ordinateurs et des réseaux de l’entreprise pour diverses raisons, notamment pour empêcher la collecte et la diffusion de matériel illégal (par exemple, la pornographie juvénile) et pour empêcher que ne soit commis un vol de temps associé à l’usage prolongé d’Internet et du réseau de courrier électronique de l’employeur à des fins personnelles. Communiquez avec : Barbara A. McIsaac, c.r., à Ottawa à [email protected] ou Helen Gray à Ottawa à [email protected] Compte tenu de l’ambivalence de la loi au Canada, les employeurs devraient établir des politiques précises et détaillées régissant leur droit d’accès aux données et aux systèmes. Si l’employeur ne souhaite pas que ses employés aient une attente raisonnable en matière de respect de la vie Page 40 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Communications CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES Canada : Le CRTC approuve la vente de BCE Le 27 mars 2008, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (« CRTC ») a approuvé, sous réserve de certaines conditions, l’opération de privatisation de Bell Canada Entreprises (« BCE »), la plus grande société de télécommunications du Canada. Aux termes de la transaction, BCE, qui est aussi la société comptant le plus grand nombre d’actionnaires du public au Canada, appartiendrait à un petit groupe d’investisseurs formé du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (« Teachers’ ») et de trois sociétés américaines de financement par capitaux propres, soit Providence Equity Partners International VI L.P. et des fonds d’investissement membres de son groupe (« Providence »), Madison Dearborn Capital Partners V L.P. et des fonds d’investissement membres de son groupe (« Madison ») et Merrill Lynch Global Partners, Inc. (« Merrill Lynch »). La transaction, évaluée à 51,7 milliards de dollars, est la plus importante acquisition d’entreprise jamais réalisée au Canada et apparemment la plus importante transaction par voie de capitaux propres dans le monde à ce jour. La transaction était subordonnée à l’approbation de plusieurs autorités de réglementation canadiennes, notamment l’approbation du CRTC en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. Même si la principale unité d’exploitation de BCE, Bell Canada, est une entreprise de télécommunications, elle détient des participations dans plusieurs titulaires de licence de radiodiffusion, d’où l’obligation de l’approbation en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. L’examen du CRTC visait principalement à assurer que BCE demeurera « détenue et contrôlée par des Canadiens » au sens de la législation canadienne sur les communications. Cette législation limite le nombre d’actions comportant droit de vote que peuvent détenir des non-Canadiens dans des entreprises de communication canadiennes réglementées et le nombre d’administrateurs qui peuvent être des non-Canadiens. Cette législation exige en outre que les autorités de réglementation s’assurent que des non-Canadiens ne peuvent pas exercer un « contrôle de fait » sur l’entreprise, par voie de convention d’actionnaires ou de quelque autre arrangement. L’approbation du CRTC et les conditions qu’il impose à BCE sont en général conformes aux récentes décisions réglementaires, dans le contexte particulier de la transaction de BCE. Le CRTC a réaffirmé le critère juridique du contrôle qu’il avait approuvé dans son examen de la vente des sociétés de radiodiffusion d’Alliance Atlantis Broadcasting Inc. Selon ce critère, « le "contrôle de fait" est généralement Page 41 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 le pouvoir ou la capacité, exercé ou non, de décider de l’orientation du processus décisionnel d’une entreprise sur ses activités. On peut également l’interpréter comme étant la capacité de gérer les activités quotidiennes d’une entreprise. » En appliquant ce critère aux faits de la transaction de BCE, le CRTC a exigé : • des modifications visant à garantir que le conseil d’administration de BCE se compose en tout temps d’une majorité d’administrateurs qui soient à la fois i) Canadiens par citoyenneté ou résidence et ii) dont la nomination ne relève pas directement ou indirectement de non-Canadiens; • des augmentations des seuils pour les droits de veto que des non-Canadiens peuvent exercer à l’égard de transactions futures de BCE (p. ex., contracter des dettes, vendre des actifs ou faire des investissements) à au moins 5 % de la valeur des entreprises de radiodiffusion; • des modifications touchant le comité indépendant de programmation proposé afin de s’assurer que les décisions de programmation de radiodiffusion soient prises par des Canadiens; et • d’autres modifications à la structure de gouvernance d’entreprise, y compris à la composition du comité exécutif et aux quorums pour les réunions du conseil d’administration, afin de s’assurer que BCE n’est pas contrôlée dans les faits par des non-Canadiens. Le CRTC a également exprimé des préoccupations quant à la conformité de la structure de la transaction avec la législation ontarienne sur les régimes de retraite, mais, tel qu’il est indiqué ci-après, le CRTC s’en est remis, sur ce point, à un avis de l’autorité de réglementation des régimes de retraite de l’Ontario selon lequel la transaction respecte la législation. La transaction de BCE est toujours subordonnée à l’obtention de l’approbation réglementaire d’Industrie Canada en vertu de la Loi sur la radiocommunication. La transaction a par ailleurs été contestée par certains détenteurs d’obligations de Bell Canada. Le 7 mars 2008, la Cour supérieure du Québec a approuvé le plan d’arrangement de BCE visant la transaction et rejeté du même coup toutes les réclamations des détenteurs d’obligations. Les décisions rejetant ces réclamations font actuellement l’objet d’un appel. La transaction est également subordonnée à la réalisation fructueuse des arrangements financiers que Teachers’ et ses co-investisseurs par capitaux propres ont pris. Contexte de la transaction proposée BCE Inc. est l’entreprise de services de télécommunications titulaire dans pratiquement tout l’Ontario, le Québec et les Maritimes. Ses filiales comprennent Bell Canada, Bell Mobilité Inc., Fonds de revenu Bell Aliant Communications régionales et Bell ExpressVu Inc. Les sociétés offrent des services Page 42 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 de télécommunications, notamment des services de téléphonie locaux et interurbains, de transmission sans fil de la voix et des données et d’accès Internet par câble. Elles font également de la distribution de services de radiodiffusion par satellite et réseaux terrestres et offrent des services de télé à la carte et de vidéo sur demande. Le CRTC a reçu une demande de BCE et de certains membres de son groupe (la « requérante »), en vue d’obtenir l’autorisation de transférer le contrôle effectif de la requérante à une société devant être constituée (« BCE Holdco »). BCE Holdco détiendrait les actions de BCE par l’entremise de sa filiale 6796508 Canada Inc. (« Bidco »). BCE et Bidco ont conclu une entente définitive, en vigueur à compter du 29 juin 2007, selon laquelle Bidco s’engage à acheter toutes les actions ordinaires et privilégiées de BCE émises et en circulation (la « proposition de BCE »). La proposition de BCE a été approuvée à la majorité par les actionnaires de BCE lors d’une assemblée extraordinaire des actionnaires le 21 septembre 2007 à Montréal. La transaction proposée serait réalisée au moyen d’un arrangement conforme à l’article 192 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. La valeur de la transaction est estimée à 51,7 milliards de dollars. Une fois la transaction complétée, BCE Holdco deviendrait propriété privée, avec un capitalactions constitué d’actions de catégorie A non participatives avec droit de vote (les « actions de catégorie A »), d’actions de catégorie B participatives sans droit de vote (les « actions de catégorie B ») et d’actions de catégorie C participatives sans droit de vote (les « actions de catégorie C »). Les actions de catégorie B et de catégorie C auraient une valeur monétaire équivalente et constitueraient ensemble la valeur totale des actions de BCE Holdco. Morcague Holdings Corp. (« Morcague ») détiendrait 66,7 % des actions de catégorie A dans BCE Holdco. Toutes les autres actions, soit 33,3 %, seraient détenues par des nonCanadiens, à savoir Providence, Madison et Merrill Lynch. Les actions de catégorie A seraient assujetties à un vote entre Morcague et Teachers’ Private Capital, division de Teachers’. La majorité des actions de catégorie B et la totalité des actions de catégorie C de BCE Holdco seraient détenues par des Canadiens, Teachers’ se constituant l’actionnaire majoritaire avec 51,6 % des actions. Des nonCanadiens détiendraient environ 42 % des actions de BCE Holdco, les trois principaux actionnaires non canadiens étant Providence (17,3 % des actions), Madison (9,0 %) et Merrill Lynch (6,1 %). Bidco et BCE auraient des actions de catégorie A et de catégorie B émises et en circulation. BCE Holdco détiendrait 100 % des actions de catégorie B et 58,1 % des actions de catégorie A de Bidco, toutes les autres actions de catégorie A, soit 41,9 %, étant détenues par Morcague. De la même façon, Bidco détiendrait 100 % des actions de catégorie B et 58,1 % des actions de catégorie A de BCE, toutes les autres actions de catégorie A, soit 41,9 %, étant détenues par Page 43 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Morcague. Un résumé de la ventilation des actions telle que proposée peut être consulté sur le site Web du CRTC. Approbations réglementaires La transaction doit être approuvée par un certain nombre d’organismes de réglementation, notamment le CRTC, Industrie Canada, Investissement Canada et le Bureau de la concurrence. Le CRTC doit approuver la transaction projetée en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, en raison du projet de transfert de l’actif de radiodiffusion de BCE (l’objet de la décision du 27 mars 2008). Le CRTC examine également régulièrement la propriété d’entreprises de télécommunications en vertu de la Loi sur les télécommunications. Industrie Canada, qui est l’autorité de réglementation du spectre canadien, doit également examiner la transaction projetée en vertu de la Loi sur la radiocommunication. Les critères de propriété et de contrôle par des Canadiens sont analogues dans ces trois lois, et plus rigoureux que ceux prévus dans la Loi sur Investissement Canada, laquelle ne devrait donc pas constituer un obstacle important à la transaction. Le fait que les investisseurs qui acquièrent BCE ne soient pas directement en concurrence avec celle-ci simplifie l’examen en vertu de la Loi sur la concurrence. Examen de la propriété et du contrôle en vertu de la Loi sur la radiodiffusion La Loi sur la radiodiffusion confère au CRTC le pouvoir de réglementer le système canadien de radiodiffusion dans un contexte de mise en œuvre de divers objectifs stratégiques, notamment l’obligation voulant que le système canadien de radiodiffusion soit effectivement la propriété des Canadiens et sous leur contrôle. Conformément au paragraphe 26(1) de la Loi sur la radiodiffusion, le gouverneur en conseil a donné au CRTC des instructions quant aux catégories de requérants non admissibles à une attribution, à une modification ou à un renouvellement de licence (les « instructions »). En vertu des instructions, aucune licence de radiodiffusion et aucun renouvellement ou modification de licence ne peuvent être accordés à un requérant qui est un « nonCanadien ». Un « non-Canadien » est une personne ou une entité qui n’est pas un « Canadien ». La définition de « Canadien » comprend une « personne morale qualifiée ». Au sens des instructions, une « personne morale qualifiée » s’entend d’une personne morale constituée ou prorogée sous le régime des lois fédérales ou provinciales qui remplit les conditions suivantes : • le premier dirigeant et au moins 80 % des administrateurs sont des Canadiens; et • des Canadiens détiennent dans l’ensemble la propriété effective et le contrôle directs ou indirects d’au moins 80 % des actions avec droit de vote émises et en circulation Page 44 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 et d’au moins 80 % des votes, à l’exception de celles détenues uniquement à titre de sûreté. Dans le cas d’une personne morale qui est une filiale, • la société mère est une personne morale constituée ou prorogée sous le régime des lois fédérales ou provinciales; et • des Canadiens détiennent dans l’ensemble la propriété effective et le contrôle directs ou indirects d’au moins 66 ⅔ % des actions avec droit de vote émises et en circulation de la société mère et d’au moins 66 ⅔ % des votes, à l’exception de celles détenues uniquement à titre de sûreté. De plus, si une société ne remplit pas les conditions énoncées ci-dessus (p. ex., le premier dirigeant ou plus de 20 % des administrateurs ne sont pas des Canadiens, ou des Canadiens ne détiennent pas la propriété effective et le contrôle de 80 % de toutes les actions avec droit de vote émises et en circulation ou 80 % des votes), alors ni cette société ni ses administrateurs ne peuvent exercer de contrôle ni influer sur quelque décision de programmation d’une filiale qui est titulaire d’une licence de radiodiffusion. Un « comité de programmation indépendant » doit plutôt être créé et investi de la responsabilité des décisions de programmation de la filiale. financières, contractuelles ou d’affaires, ou de tout autre facteur utile à la détermination du contrôle de fait. Un facteur important permettant de déterminer si des non-Canadiens exercent un contrôle effectif sur un titulaire d’une licence de radiodiffusion est le niveau d’influence que les investisseurs non canadiens peuvent exercer sur l’entreprise par une représentation désignée au conseil d’administration et aux comités du conseil. À cet égard, le CRTC examine notamment le nombre d’administrateurs au conseil d’administration et aux comités du conseil nommés par des investisseurs canadiens en comparaison du nombre d’administrateurs nommés par des non-Canadiens, et cherche également à s’assurer que les administrateurs nommés par des investisseurs canadiens sont représentés de façon adéquate à toutes les réunions du conseil d’administration ou de comités du conseil. Conclusions relatives au contrôle canadien Après avoir examiné les questions relatives au contrôle par des Canadiens, le CRTC a exigé, comme condition d’approbation de la transaction, que certaines modifications soient apportées à l’« entente des investisseurs principaux » entre les investisseurs. Les conditions du CRTC visent les objectifs suivants : • Le « contrôle » est un aspect important du critère. En vertu des instructions, le CRTC doit établir si un requérant est contrôlé par un nonCanadien en raison de relations personnelles, Page 45 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 fixer à 13 le nombre des membres du conseil d’administration en incluant, dans le total des membres, six représentants de Teachers’, un membre indépendant et le PDG, tous obligatoirement des Canadiens; • accorder au président du conseil d’administration la voie prédominante pour la nomination et le licenciement du PDG; • prévoir qu’il y ait en tout temps un président nommé par le conseil d’administration, que celui-ci soit un membre du conseil d’administration, qu’il ne soit pas un membre nommé par un actionnaire non canadien, qu’il soit lui-même un Canadien et qu’il ne puisse pas en même temps être le PDG; • prévoir qu’une vacance au conseil d’administration ou à un comité du conseil d’administration, entraînée par la perte du pouvoir de Teachers’ de nommer un membre, soit comblée par un membre nommé par l’investisseur canadien qui acquiert le plus grand nombre d’actions de Teachers’ et que ce membre soit lui-même un Canadien; • obliger BCE Holdco à adopter les mêmes règles en matière de quorum pour les comités rattachés aux conseils d’administration de Bidco et de BCE que pour BCE Holdco; • prévoir que les membres du conseil d’administration nommés par des investisseurs principaux non canadiens sont considérés comme des non-Canadiens aux fins d’établir s’il y a quorum lors d’une assemblée du conseil d’administration; • • augmenter à 110 millions de dollars le seuil pour les transactions exigeant l’approbation des investisseurs (afin de respecter ainsi le critère de 5 % de la valeur de l’entreprise adopté par le CRTC dans la décision CanWest/Alliance Atlantis); et • intégrer des définitions précises des termes « indépendant » (dans le contexte d’« administrateurs indépendants ») et de « cours normal des affaires » (dans le contexte de l’approbation par les actionnaires de transactions qui ne s’inscrivent pas dans le cours normal des affaires). En plus d’exiger de BCE qu’elle dépose une entente des investisseurs principaux modifiée, le CRTC lui a ordonné de déposer : • une version modifiée et signée du règlement administratif portant sur le comité indépendant de programmation, qui prévoit qu’aucun membre de ce comité ne peut être membre du conseil d’administration, membre de la direction ou employé d’un actionnaire non canadien; et • une version modifiée et signée de l’entente de services consultatifs prévoyant que les services rendus par des investisseurs non canadiens en vertu de cette entente ne porteront pas sur la programmation, que Teachers’ sera autorisée à examiner les avis des services consultatifs et à les commenter. prévoir un second membre nommé par Teachers’ au sein du comité exécutif; Page 46 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Sous réserve du respect de ces conditions et de ses décisions quant au bloc d’avantages tangibles (résumées ci-après), le CRTC a approuvé la requête. Conformité avec la législation ontarienne sur les régimes de retraite Le CRTC s’est également penché sur la conformité de la structure de la transaction avec la législation ontarienne sur les régimes de retraite. La législation applicable interdit à un régime de retraite d’investir directement ou indirectement dans les valeurs mobilières d’une société conférant plus de 30 % des voix pouvant être exprimées pour l’élection des administrateurs de la société (les « actions comportant droit de vote pour l’élection des administrateurs »). Aux termes de la transaction projetée, Teachers’ ne détiendrait pas plus de 30 % des actions comportant droit de vote pour l’élection des administrateurs, de fait, elle n’en détiendrait aucune. Toutefois, une société appartenant à un ancien dirigeant de Teachers’, Morgan McCague, détiendrait 66,7 % des actions comportant droit de vote de catégorie A de BCE Holdco. Une convention intervenue entre Teachers’, M. McCague, la société de M. McCague et des sociétés connexes prévoit que les droits de vote rattachés aux actions doivent être exercés conformément aux directives de Teachers’ et confère à Teachers’ le droit d’enjoindre à M. McCague de céder les actions. Le CRTC n’a accepté cet arrangement qu’après avoir obtenu une lettre de la Commission des services financiers de l’Ontario selon laquelle la structure proposée respecte la restriction de 30 % quant à la détention d’actions comportant droit de vote pour l’élection d’administrateurs par Teachers’. Avantages tangibles L’actif de radiodiffusion visé par cette transaction comprend Bell ExpressVu, l’actif de câblodistribution dans la province de Québec et une participation minoritaire dans CTVglobemedia Inc. Le CRTC s’attend généralement à ce que les requérants s’engagent à offrir des avantages clairs et sans équivoque au système de radiodiffusion représentant une contribution financière de 10 % de la valeur de l’actif de radiodiffusion transféré dans le cadre d’une transaction. Toutefois, aucun avantage n’est exigé pour le transfert du contrôle effectif d’entreprises de distribution de radiodiffusion (comme Bell ExpressVu ou l’actif de câblodistribution du Québec), mais seulement pour le transfert des entreprises de programmation de radiodiffusion. BCE a réservé 109,6 millions de dollars de la valeur de la transaction pour l’actif de radiodiffusion applicable aux fins du calcul des avantages tangibles associés. Le CRTC a révisé la valeur de l’actif de radiodiffusion applicable de BCE, la faisant passer de 109,6 millions de dollars à 219,1 millions de dollars, principalement en fonction de l’inclusion dans l’évaluation d’une prime d’acquisition constatée, soit la valeur du service « TVPI » (télévision à la carte et Page 47 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 vidéo sur demande par protocole Internet) et de la valeur des engagements relatifs aux baux d’exploitation. Cette évaluation supérieure a porté la valeur du bloc d’avantages tangibles à 21,9 millions de dollars. De ce bloc, le CRTC a ordonné que 10,5 millions de dollars soient investis dans un fonds dont les revenus annuels seront affectés au soutien des nouveaux médias. Conclusion La décision du CRTC est généralement conforme aux décisions récentes visant d’autres transactions examinées par le CRTC et Industrie Canada. La décision donne toutefois des précisions utiles sur les questions propres aux circonstances particulières entourant la transaction de BCE. On peut obtenir le texte intégral de la décision du CRTC sur le site Web du CRTC. Communiquez avec : Hank Intven à Toronto à [email protected] ou Stephen Rawson à Toronto à [email protected] Canada : Six questions : sexe, fiscalité et projet de loi C-10 En février 2008, des intervenants de l’industrie cinématographique et télévisuelle ont publiquement dénoncé les modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu prévues dans le projet de loi C-10, criant à la « censure ». Cité dans Xtra.ca, un magazine en ligne, à propos de ces dispositions, le réalisateur David Cronenberg s’indigne d’une telle atteinte à la liberté d’expression et de l’incidence catastrophique qu’elle pourrait avoir sur le financement d’un film « parce que tout le montage financier pourrait s’écrouler comme un château de cartes ». La ministre du Patrimoine canadien, Josée Verner, a rejeté les allégations de censure, déclarant que le projet de loi C-10 ne constituait aucunement une forme de censure, mais visait plutôt à « rassurer les contribuables sur la façon dont les fonds publics sont dépensés ». Pourquoi alors toute cette controverse? La présente introduction en six questions couvre les principaux points et l’historique de la controverse actuelle entourant le projet de loi C-10. QUOI? Le projet de loi C-10, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu, notamment en ce qui concerne les entités de placement étrangères et les fiducies non résidentes ainsi que l’expression bijuridique de certaines dispositions de cette Loi, et des lois connexes, modifie la définition de « certificat de production cinématographique ou magnétoscopique canadienne du paragraphe Page 48 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 125.4(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Pour être admissible à certains crédits d’impôt fédéraux relevant du Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens (BCPAC), une production doit recevoir un certificat de production cinématographique ou magnétoscopique canadienne. En vertu des modifications, un « certificat de production cinématographique ou magnétoscopique canadienne » s’entend d’un certificat délivré par le ministre du Patrimoine canadien relativement à une production et attestant qu’il s’agit d’une production cinématographique ou magnétoscopique canadienne relativement à laquelle ce ministre est convaincu que certains critères sont respectés quant au partage des recettes et que « le fait d’accorder à la production un soutien financier de l’État ne serait pas contraire à l’ordre public ». C’est cette disposition « d’ordre public » qui prête tant à controverse. La ministre du Patrimoine canadien a déclaré que la disposition d’ordre public du projet de loi C-10 ne concernera « que le contenu extrême et tout à fait inacceptable ». Les médias ont laissé entendre que les critères justifiant le refus de crédits d’impôt pourraient comprendre des motifs comme la violence gratuite, la sexualité outrancière, un contenu sexuel excessif sans but éducatif ou le dénigrement d’un groupe identifiable. En fait, le libellé du projet de loi C-10 ne donne aucune explication des critères selon lesquels le ministre du Patrimoine pourrait considérer qu’un film est « contraire à l’ordre public ». Le projet de loi C-10 prévoit également que le ministre du Patrimoine publiera des lignes directrices suivant lesquelles une production cinématographique ou magnétoscopique répondrait aux critères. Le projet de loi C-10 dispose expressément que les lignes directrices ne sont pas des textes réglementaires au sens de la Loi sur les textes réglementaires (et ne sont donc pas soumises au processus d’examen et d’observation du public applicables aux textes réglementaires). Au moment de la rédaction du présent article, la ministre du Patrimoine n’avait pas encore publié de lignes directrices ni donné de précisions quant à leur contenu, malgré les demandes pressantes des intervenants de l’industrie cinématographique et télévisuelle. Le 2 avril 2008, le ministère des Finances aurait fait valoir, devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, que les critères selon lesquels des productions cinématographiques et télévisuelles seraient jugées offensantes ne devraient pas être inclus dans la législation ni dans son règlement d’application — les tribunaux ayant tendance à invalider des règlements trop vagues, mais être moins rigides à l’égard de critères contenus dans des lignes directrices. La ministre du Patrimoine canadien, Mme Verner, a également comparu devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, déclarant que Patrimoine Canada n’appliquerait la disposition d’ordre public que 12 mois après que le projet de loi C-10 aura reçu la sanction royale. Elle a en outre invité les intervenants de l’industrie cinématographique et télévisuelle à participer Page 49 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 à l’élaboration des lignes directrices, invitation ultérieurement déclinée par les intervenants de l’industrie qui s’inquiétaient d’être associés à l’élaboration de lignes directrices en matière de censure, alors qu’ils sont tout à fait contre le principe. QUAND? Le projet de loi a été adopté par la Chambre des communes avec l’appui de tous les partis le 29 octobre 2007. Il a été approuvé en deuxième lecture au Sénat le 4 décembre 2007. Au moment de la rédaction du présent article, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce tenait des audiences sur le projet de loi C-10, et des parties intéressées comparaissaient devant le Comité. OÙ? Le projet de loi doit être soumis en troisième et dernière lecture au Sénat. À la fin de février 2008, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a reporté la troisième et dernière lecture du projet de loi C-10, lorsque le public a commencé à s’indigner du projet de loi, reportant à avril 2008 le dénouement de cette affaire. QUI? L’opposition au sein de l’industrie rallie un large éventail de groupes et de particuliers, notamment des réalisateurs, des acteurs et des politiciens qui ont publiquement exprimé leur opposition au projet de loi. Parmi les groupes qui ont fait entendre leurs préoccupations ou qui font des pressions en vue de contester le projet de loi, on compte notamment ACTRA (Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists), la Writers Guild of Canada, la Guilde canadienne des réalisateurs et l’Association canadienne de production de films et de télévision. POURQUOI? Une disposition « d’ordre public » analogue a été proposée dans un projet de règlement de la Loi de l’impôt sur le revenu en 2003 par la ministre du Patrimoine libérale de l’époque, Sheila Copps. Différents médias ont rapporté les explications de Mme Copps voulant que les dispositions qu’elle proposait visaient à « inverser le fardeau de la preuve » aux producteurs de matériel extrêmement répréhensible, et a donné au ministre du Patrimoine la possibilité de priver un film d’un crédit d’impôt dans des cas extrêmes. La proposition de 2003 s’inscrivait dans la foulée du film Karla sur les vies de Paul Bernardo et de Karla Homolka et du scénario hypothétique où un film comme Karla pourrait être admissible à des crédits d’impôt s’il avait été produit au Canada. Toutefois, le Règlement de l’impôt sur le revenu édicté en 2005 ne contenait aucune disposition accordant une discrétion ministérielle de refuser des crédits d’impôt à des films considérés contraires à l’ordre public. Il est difficile d’expliquer qu’est-ce qui motive le gouvernement conservateur à inclure la disposition d’ordre public dans le projet de loi C-10. Les crédits d’impôt ont toujours été largement inspirés par des considérations de création d’emplois et destinés à encourager les producteurs à embaucher des Canadiens au moyen d’un critère relativement objectif selon lequel des points sont attribués à une production en fonction du nombre de Canadiens embauchés à des postes clés. La Page 50 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 réglementation actuelle exclut déjà le contenu comme la pornographie, les nouvelles, la téléréalité, les jeux questionnaires, les talkshows, les vidéos d’entreprise et la publicité. COMMENT? Les crédits d’impôt fédéraux visés ne sont pas la seule source de financement pour les producteurs de films et d’émissions de télévision. Ces derniers disposent d’autres sources de financement directes et indirectes fédérales, provinciales et privées, notamment Téléfilm Canada (qui relève également de Patrimoine Canada), les banques, les programmes de crédits d’impôt provinciaux et d’autres investisseurs privés. En pratique, toutefois, les crédits d’impôt du BCPAC et la certification de productions canadiennes sont souvent des éléments critiques en vue d’obtenir un financement pour les productions canadiennes. Il faut prendre en considération que : • les productions cinématographiques et télévisuelles nationales font en général l’objet d’une demande de subventions et peuvent obtenir des subventions à l’étape du scénario, mais que les crédits d’impôt remboursables ne sont ultérieurement demandés et reçus qu’après les principaux travaux de prise de vues. • les productions nationales dépendent souvent de plusieurs sources de financement. Ces autres sources de financement peuvent subordonner le décaissement de leurs fonds ou avances au producteur à la perspective ou à la condition que le crédit d’impôt fédéral et la certification de production canadienne du BCPAC soient obtenus. • un producteur (ou un investisseur) ne saura donc qu’une production est inacceptable qu’après que la production aura été tournée, que les fonds auront été dépensés et que le comité d’examen aura examiné le film et rendu sa décision, le cas échéant. • les producteurs qui se voient refuser des crédits d’impôt pourraient s’exposer au risque coûteux de devoir rembourser les investisseurs dont les subventions ou avances (p. ex., Téléfilm Canada, les avances d’institutions bancaires et de distribution, etc.) étaient subordonnées à l’obtention des crédits d’impôt. Ce qui pourrait entraîner la faillite de l’entreprise, voire la faillite personnelle, du producteur. • la disposition d’ordre public ne s’appliquerait pas au tournage de productions étrangères au Canada qui reçoivent des crédits d’impôt fédéraux relevant du BCPAC, mais qui ne sont pas considérés comme des productions « canadiennes ». Des représentants de Patrimoine Canada ont fait valoir que ces crédits d’impôt visent à encourager l’investissement en fonction des dépenses faites au Canada et non pas en fonction du contenu. Les tenants de la disposition d’ordre public font quant à eux valoir qu’il est tout simplement juste que les fonds publics ne servent pas à financer la production de contenu offensant, Page 51 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 et que rien n’empêche les producteurs de tel contenu de mener à bien leurs projets à l’aide d’autres sources de financement. Les opposants aux modifications expriment de nombreuses préoccupations, notamment : • l’importance du crédit d’impôt et de la certification de production canadienne dans les ententes de financement; • l’incertitude quant à la personne qui décidera du caractère « contraire à l’ordre public » d’une production; • l’absence de lignes directrices ou de critères; • la nature discrétionnaire du processus d’examen et de décision; • l’effet ponctuel et pratique du moment et de la subjectivité des décisions; • l’incapacité résultante des producteurs d’obtenir le financement adéquat pour leurs productions; et, bien sûr, • l’arrière-goût de censure. écriront en fonction des lignes directrices de manière à obtenir les crédits d’impôt nécessaires à la réalisation de la production. Dans l’un et l’autre cas, ils font valoir qu’à terme on pourrait assister à une expression artistique frileuse de la part des auteurs canadiens exceptionnels et originaux de films et d’émissions de télévision. Communiquez avec : Jeanette Lee à Toronto à [email protected] Canada : Les produits culturels canadiens et le phénomène de la « longue traîne » : les nouveaux facteurs économiques de la production et de la distribution au Canada — Partie III Cet article poursuit notre série de quatre qui traite l’incidence des nouvelles technologies sur les produits culturels. Il examine l’avenir du secteur de la télévision à l’égard des changements technologiques. L’avenir de ce secteur dépend du maintien d’un marché canadien distinct pour les droits audiovisuels. Remarques de McCarthy Tétrault : Les banques pourraient être découragées de consentir les prêts nécessaires à des productions plus « extrêmes » ou risquées si les projets sont susceptibles de ne pas être admissibles aux crédits d’impôt à ces conditions subjectives. Si les lignes directrices sont mises en place, certains opposants font valoir qu’il s’ensuivra une autocensure — les auteurs et producteurs Page 52 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Les radiodiffuseurs canadiens bénéficient d’un certain nombre de mesures de protection, notamment les cinq mesures suivantes : 1. des restrictions dans l’attribution de licences aux nouveaux radiodiffuseurs concurrents de télévision en direct captée gratuitement au Canada, notamment des exigences en matière de propriété étrangère; 2. des dispositions obligatoires et prioritaires pour les signaux de télévision canadiens d’entreprises de câblodistribution et de communications par satellite; 3. la politique relative à la substitution de signaux identiques applicable aux signaux importés des stations américaines « 4+ », qui avantage les radiodiffuseurs canadiens de télévision en direct captée gratuitement, diffusant le même programme au même moment; 4. l’article 19.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu, qui n’admet pas les frais de publicité engagés par des annonceurs canadiens sur des stations américaines à titre de dépense d’entreprise; et 5. des dispositions pénales relativement à la réception non autorisée de signaux chiffrés. Il est intéressant de noter que ces cinq mesures de protection ne sont pas propres au Canada. Les États-Unis ont mis en place ces mêmes cinq mesures de protection afin de soutenir leurs radiodiffuseurs locaux. En fait, les États-Unis protègent davantage leurs radiodiffuseurs locaux à deux égards. En premier lieu, les entreprises de câblodistribution et de communications par satellite aux États-Unis ne peuvent diffuser Page 53 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 d’autres versions des signaux d’un réseau (soit décalés dans le temps ou autrement) dans les marchés locaux, mais doivent respecter le territoire exclusif des stations affiliées locales d’un réseau. Au contraire, les entreprises de câblodistribution et de communications par satellite peuvent diffuser des signaux de télévision canadiens et américains en direct captés gratuitement et décalés dans le temps dans des marchés partout au Canada. Les stations affiliées locales d’un réseau aux États-Unis, jalouses de leur exclusivité sur le marché, ne permettraient jamais cela. En deuxième lieu, plutôt que d’imposer les règles relatives aux « obligations réglementaires de transmission », les radiodiffuseurs locaux aux États-Unis peuvent choisir d’exiger le « consentement pour la retransmission » des entreprises de câblodistribution locales, ce qui peut se traduire par un « tarif de distribution ». Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (le « CRTC ») examine actuellement s’il devrait adopter un régime semblable au Canada. Le Canada possède lui-même quelques mesures de protection. Par exemple, il interdit les services de diffusion payants et spécialisés américains concurrents par les entreprises de câblodistribution et de communications par satellite canadiennes, afin de soutenir les équivalents locaux offrant ces services. Toutefois, le Canada n’interdit pas la diffusion de la programmation américaine de ces services. Le Canada ne dispose donc pas de la station HBO, mais bénéficie tout de même de toute la programmation de la station HBO. Les gens qui militent en faveur de la « déréglementation de la diffusion » oublient souvent que les lois américaines équivalent à bien des égards aux lois canadiennes. Par exemple, les gens qui prônent un accord à « ciel ouvert », c’est-à-dire qui souhaitent voir l’abolition des frontières, ne réalisent peut être pas que les lois américaines interdisent la réception de Bell ExpressVu et de Star Choice aux ÉtatsUnis, tout comme les lois canadiennes interdisent la réception de DirecTv ou d’EchoStar au Canada. Canada pour supprimer ces mesures. En fait, comme l’illustre l’affaire iCraveTV, les titulaires de droits de programmation américains sont en faveur du renforcement des mesures servant à protéger l’intégrité de la frontière canadienne concernant les droits d’auteur. La seule pression commerciale américaine se manifeste quand on suggère que les politiques du CRTC pourraient réduire le statut actuel des intervenants qui ont un accès limité au marché canadien (comme Spike ou Country Music Television). Ainsi, pour ce qui est de l’intégrité du marché canadien des droits, les principaux intervenants de l’industrie ne souhaitent pas de changement important dans les politiques qui la protègent. Les lois canadiennes et américaines, ainsi que les mesures réglementaires, visent à protéger l’intégrité des droits sur le marché. (En plus d’appuyer les droits d’auteur, les lois canadiennes appuient les règles du CRTC.) Contrairement à l’opinion populaire, ni la venue des satellites de radiodiffusion directe ni l’introduction de l’accès Internet haute vitesse n’ont « érodé » la force du secteur de la radiodiffusion au Canada en pratique. L’élément sous jacent crucial du système de radiodiffusion canadien réside dans le fait que le marché canadien de la radiodiffusion pour les programmes est différent de celui des États Unis. De plus, les titulaires de droits d’auteur des deux côtés de la frontière souhaitent généralement conserver cette pratique. La pénétration des services américains de radiodiffusion directe par satellite au Canada continue d’être un irritant, et le renforcement des amendes en vue de contrer les marchés noir et gris demeurera nécessaire. Toutefois, la pénétration de DirecTv et d’EchoStar ne représente qu’une fraction de la pénétration des fournisseurs canadiens autorisés, soit Bell ExpressVu et Star Choice, qui ont obtenu un franc succès. À cet égard, il est important de noter que les États-Unis ne font pas pression sur le Page 54 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Pour ce qui est des satellites, les auditoires indiquent une préférence marquée pour les services locaux offrant un assortiment d’émissions nationales et importées. La part de téléspectateurs de chaînes étrangères disponibles par câble ou satellite en Grande-Bretagne, en France, en Allemagne, en Italie, en Grèce, en Espagne et au Portugal est inférieure à 5 % et, dans certains cas, elle est même nulle. La clé est d’occuper l’espace avec des services locaux faisant partie des créneaux populaires. Pour ce qui est d’Internet, il s’agit sans aucun doute d’un nouveau média puissant. Sans pour autant constituer une menace pour la diffusion traditionnelle, Internet comporte certaines faiblesses particulières ainsi que certaines forces. Dans son rapport portant sur l’incidence de la technologie adressé au gouverneur en conseil, déposé le 14 décembre 2006, le CRTC a divisé le contenu audiovisuel sur Internet en trois grandes catégories : • • Contenu généré par les utilisateurs — Ce type de contenu tend à être peu coûteux à produire, il est en majeure partie non commercial et de qualité inférieure. Ce type de contenu se manifeste en raison du succès des sites de réseautage social comme YouTube et MySpace. Contenu commercial relativement peu coûteux — Ce contenu comprend entre autres des nouvelles et des clips Page 55 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 sportifs, de musique, d’information et de divertissement. Ce type de contenu canadien abonde actuellement à la télévision et à la radio canadienne et est généralement viable au Canada sans bénéficier directement de subventions importantes. • Programmation de haute qualité, relativement onéreuse — Ce type de contenu comprend notamment des dramatiques et des documentaires et est populaire à la télévision canadienne, mais n’est généralement pas réalisé au Canada sans d’importantes subventions. Le contenu canadien compris dans cette catégorie demeure en grande partie non rentable. Ce classement en trois catégories est pratique, car il permet de se concentrer sur la troisième catégorie, à l’égard de laquelle la production de contenu canadien a le plus besoin d’aide et les ressources économiques sont les plus problématiques. La programmation des deux premières catégories n’est pas confrontée aux mêmes menaces économiques, et le contenu canadien de ces catégories semble prendre de l’ampleur sur Internet. Dans son rapport, le CRTC a indiqué ce qui suit : Il est évident que l’ouverture d’Internet et d’autres nouveaux médias numériques favorise l’éclosion d’un contenu audiovisuel non commercial créé par des utilisateurs canadiens. Ce type de contenu semblerait aussi déborder le cadre voulu de la Loi. Quoi qu’il en soit, il n’exigerait encore aucune intervention réglementaire. Pour ce qui est de la deuxième catégorie, le contenu commercial relativement peu coûteux, les entreprises canadiennes font la preuve qu’elles se livrent à une concurrence positive sans intervention réglementaire. Par exemple, les sites Web canadiens prédominent dans les catégories des nouvelles et des informations avec 17 des 20 meilleurs sites les plus populaires (d’après le nombre de visiteurs par mois). Le conseil n’a pas eu d’élément particulier de preuve sur la capacité ou l’utilisation du contenu canadien sur Internet mais, au moins dans cette catégorie, il ne semble absolument ni fondé, ni opportun d’intervenir de façon réglementaire. Les divergences d’opinion les plus marquées concernent la troisième catégorie, le contenu relativement onéreux de haute qualité, qui fait son apparition sur Internet et sur les plateformes mobiles. C’est dans cette troisième catégorie, soit « la programmation de haute qualité, relativement onéreuse, comme des dramatiques et des documentaires », qu’il est crucial que les radiodiffuseurs privés canadiens maintiennent l’intégrité du marché des droits de façon à utiliser les profits tirés des programmes de haute qualité importés afin de soutenir Page 56 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 la création de dramatiques et de documentaires canadiens. Internet dit « sans frontière » menace-t-il l’intégrité des droits du marché canadien à cet égard? En fait, au fur et à mesure que les titulaires de droits commencent à utiliser Internet pour offrir des téléchargements de films et d’autres programmes audiovisuels, ils commencent à utiliser les mêmes frontières géographiques et les mêmes cases horaires que celles qui s’appliquent à la télévision traditionnelle. En effet, aux États-Unis, vous pouvez obtenir des épisodes téléchargés de Beautés désespérées pour 1,99 $ l’épisode, mais seulement un jour après la diffusion de l’épisode sur le réseau ABC. Cependant, ces épisodes ne peuvent être téléchargés sur des ordinateurs situés à l’extérieur des États-Unis. Comment peut-on maintenir ces frontières sur Internet? Il s’agit là d’une question fort intéressante. L’élément de réponse clé se trouve dans l’adresse du protocole Internet (IP) qui est attribuée à chaque ordinateur accédant à Internet par l’intermédiaire d’un fournisseur de services Internet. Lorsque vous accédez à un site Web, vous envoyez à ce site Web votre adresse d’ordinateur. Pourquoi? Pour que le site Web puisse retourner les données à votre ordinateur personnel. Évidemment, il existe des millions de ces adresses. Mais des entreprises, principalement au Japon, ont créé des listes de ces adresses avec leur emplacement correspondant. De cette façon, elles peuvent établir que certaines catégories d’adresses sont attribuées à des ordinateurs au Canada ou aux États-Unis. Les listes sont mises à jour toutes les heures. Lorsque vous accédez à un site Web, le site Web peut donc repérer votre adresse sur ces listes et vous répondre : « Désolé, nous ne desservons pas votre territoire », ou encore il peut vous diriger vers un site Web plus approprié. Il existe un certain nombre de fournisseurs de ces listes, notamment Akamai, Limelight, Tometa et RealNetworks. Il s’agit d’entreprises internationales dont les serveurs de fichiers se trouvent dans plus de 100 pays et qui gèrent le trafic Internet partout dans le monde pour des entreprises de médias de grande envergure. Un examen des énoncés figurant sur le site Web de ces entreprises permet d’en apprendre davantage à ce sujet. Voici un extrait tiré du site Web d’Akamai.com : [TRADUCTION] Le service de délivrance de licence d’Akamai est un service intégré permettant de sécuriser, d’offrir et de monétiser le contenu audio et vidéo de grande valeur sur les ordinateurs personnels et les appareils portatifs. Ce service permet au propriétaire de contenu de protéger son contenu et de le rendre disponible aux fins de commerce électronique au moyen d’une vaste gamme de modes de Page 57 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 paiement pour les clients : télévision à la carte, inscription, usage limité, impossibilité de reproduction et bien d’autres. Caractéristiques clés : géolocalisation afin de contrôler la distribution. L’extrait suivant est tiré du site Web de Tometa Software : [TRADUCTION] Grâce à sa trousse de développement logiciel, à son soutien par courriel gratuit et à ses exemples de code dans pratiquement toutes les langues, Tometa WhereIs fournit facilement l’information relative à l’emplacement géographique des visiteurs Internet et aux adresses IP. La technologie de géolocalisation IP à la fine pointe et les bases de données mises à jour constamment permettent de vous fournir l’information suivante en insérant une seule ligne de code dans votre programme ou votre site Web : ville (p. ex. Spokane), État ou région (p. ex. Washington), pays (p. ex. ÉtatsUnis d’Amérique), indicatif régional (p. ex. 509), latitude, longitude, adresse IP, indicatif de pays (p. ex. É.-U.), code DMA (p. ex. 881), code de région (p. ex. WA), graphique du drapeau du pays (grand ou petit) et liste complète des pays. L’extrait suivant est tiré du site Web de Shareme.com : [TRADUCTION] Le système GeoBlock filtre tout le trafic du client jusqu’à votre serveur Web selon les emplacements que vous choisissez. Vous pouvez même bloquer certains emplacements, en précisant l’État ou la ville. La plupart des tentatives de piratage proviennent de secteurs et de pays en particulier. Arrêtez-les avant même qu’ils n’aient commencé et protégez votre site grâce à GeoBlock![...] En utilisant le service Web de Tometa WhereIs pour vos mises à jour, GeoBlock maintient une base de données constante et à jour de chaque adresse IP sur Internet et de l’emplacement de ces adresses IP. Finalement, voici un extrait tiré du site Web de RealNetworks.com : [TRADUCTION] Le blocage géographique vous permet de configurer des règles administratives en fonction de l’emplacement géographique de vos utilisateurs finaux. Utilisez le blocage géographique pour analyser où sont situés vos utilisateurs ou pour bloquer l’accès à certaines régions géographiques en fonction des droits de diffusion. Y a-t-il des frontières sur Internet? Oui, il y en a. Non seulement ces frontières sont possibles, mais pour un produit audiovisuel de grande valeur, elles sont nécessaires afin de maintenir l’ordre du marché aux fins de l’exploitation des droits. Et tout le monde les utilise : CBS, NBC, Fox, ABC, CTV, Global — tous ces diffuseurs utilisent un logiciel de géolocalisation afin de Page 58 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 contrôler la diffusion des programmes audiovisuels de grande valeur. Bien que ces systèmes ne soient pas à toute épreuve, ils sont considérés comme étant efficaces à 95 %. Le but de ce contrôle renvoie aux facteurs économiques liés à la culture que nous avons examinés plus tôt. Les revenus du monde de la télévision sont générés par « la programmation de haute qualité, relativement onéreuse, comme des dramatiques et des documentaires ». Cette programmation doit être financée initialement et est très risquée. Lorsque ces émissions obtiennent du succès, et qu’elles figurent au palmarès des 20 meilleures émissions dont tout le monde parle autour de la machine à café, elles peuvent être très rentables, mais uniquement si elles peuvent être vendues à de multiples plateformes dans différents territoires et à divers prix. Les frontières deviennent donc importantes. Cela étant dit, retournons au rapport d’IBM de 2006. Internet marquera-t-il la fin de la télévision comme nous la connaissons? Pas vraiment. En fait, si vous posez cette question aux dirigeants de l’industrie de la télévision, tous vous diront qu’Internet est important, qu’ils souhaitent que leurs émissions fassent l’objet de publicités et soient téléchargées, que ce soit sur Internet ou sur téléphone cellulaire, mais ces plateformes additionnelles sont loin d’anéantir les cotes d’écoute de la télévision et contribuent plutôt à l’augmentation des cotes d’écoute de la télévision. En encourageant une émission et en permettant aux gens de reprendre des épisodes manqués des dramatiques, ces plateformes augmentent l’engouement pour la télévision. Les chiffres le démontrent clairement. Si l’on examine plus particulièrement la télévision au Canada, malgré la venue des satellites et d’Internet au cours de la dernière décennie, le nombre de visionnements et la part de l’auditoire dont profitent les télédiffuseurs d’émissions payantes et spécialisées ont augmenté au lieu de diminuer. Lorsqu’on analyse ces chiffres, et qu’on examine le fonctionnement d’Internet, on peut en conclure qu’il est peu probable que les télédiffuseurs seront décimés par Internet ou par la télévision mobile au cours des prochaines années. Bien qu’une hausse marquée des revenus de la télévision en direct captée gratuitement dans l’avenir semble peu probable, une baisse marquée semble tout aussi improbable. Tous semblent d’accord pour dire que, pour diverses raisons d’ordre juridique et économique, les nouveaux services sur des médias non réglementés ne risquent pas de décimer ou d’anéantir la télévision traditionnelle. En résumé, il devient de plus en plus évident qu’Internet viendra compléter, et Page 59 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 non remplacer, les médias traditionnels. La probabilité qu’Internet anéantisse la télévision est aussi faible que la probabilité que la télévision détruise la radio, ou que tout autre « nouveau » média n’entraîne l’extinction des livres. En fait, au cours des cinq dernières années, les cotes d’écoute des services de télévision canadiens ont augmenté aux dépens des services de télévision américains, notamment en raison de la baisse des cotes d’écoute des stations américaines. La venue d’Internet, des DVD et des téléphones cellulaires a une incidence négligeable sur les cotes d’écoute de la télévision. Même si la croissance des revenus de la télévision traditionnelle canadienne a ralenti au cours des cinq dernières années, les revenus de la télévision payante et de spécialité canadienne ont augmenté de façon marquée, et ce, malgré la venue d’Internet, des DVD et des appareils mobiles. Le 20 mars 2007, le CRTC a comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien. En 2006, le CRTC a mené une importante enquête afin de déterminer l’incidence de la nouvelle technologie sur les diffuseurs canadiens. Voici les conclusions du CRTC à cet égard : Bien que la consommation de nouvelles technologies soit en croissance, nous avons observé que cette croissance avait une incidence minime sur le système réglementé. Les Canadiens consomment encore la grande majorité des émissions par l’intermédiaire d’entreprises de radiodiffusion réglementées et les nouvelles technologies ont joué un rôle complémentaire jusqu’à présent… (italiques ajoutés par le rédacteur) Il est important de garder à l’esprit ces points aux fins de la production de contenu canadien. Comme nous l’avons mentionné, la viabilité des radiodiffuseurs canadiens dépend du maintien de droits canadiens distincts sur le marché relativement aux productions de haute qualité plutôt onéreuses. Dans le cas de la télévision privée, les radiodiffuseurs canadiens doivent contrôler la diffusion d’émissions étrangères qui génèrent des profits au Canada. Ce n’est qu’à ce moment qu’il est possible de commander des émissions canadiennes de grande valeur qui peuvent faire leur entrée sur le marché. Par conséquent, les nouvelles technologies risquent d’avoir un effet d’addition et de promotion, et non de substitution. Les licences multi-plateformes augmenteront et du contenu en format réduit personnalisé sera créé pour les appareils mobiles et Internet. On constatera des distinctions entre les générations pour ce qui est des tendances d’usage également, de même que pour l’utilisation du contenu en format réduit, afin de remplacer la diffusion traditionnelle dans les lieux comme le transport en commun, les salles d’attente, les coins-repas et ainsi de suite. Mais la Page 60 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 télévision que nous connaissons survivra et notre capacité à réglementer la télévision subsistera. Une étude menée en 2007 par le Convergence Consulting Group appuyait cette thèse. Dans cette étude, on notait que les facteurs économiques d’Internet n’appuyaient pas la migration des émissions télévisées traditionnelles vers la télévision sur le Web, tant du point de vue des dépenses que du point de vue pratique pour les téléspectateurs ainsi que du point de vue du rendement pour les titulaires de droits d’auteur. De plus en plus, les observateurs notent que la télévision traditionnelle et spécialisée est très robuste. Sans vouloir minimiser l’effet négatif d’Internet en ce qui a trait au piratage, il est vrai que les téléchargements non autorisés de matériel audiovisuel sont en croissance sur Internet, mais devinez ce qui est arrivé à YouTube lorsque Google l’a acheté? YouTube a commencé à supprimer le contenu illégal de grande qualité qui était protégé par le droit d’auteur à la demande des titulaires de droits d’auteur. Viacom a tout de même intenté une poursuite de plus de 1 milliard de dollars contre YouTube. Aux États-Unis, les lois se rangent de plus en plus du côté des titulaires de droits d’auteur. Au Canada, la loi sur le droit d’auteur a besoin d’être renforcée et mise à jour afin d’appuyer nos créateurs. Après avoir discuté de l’incidence des changements technologiques sur les secteurs de la télévision et du cinéma au Canada, nous nous tournerons vers l’industrie de la musique dans le dernier article de cette série. Communiquez avec : Peter S. Grant à Toronto à [email protected] Page 61 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Technologie propre CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES Colombie-Britannique : Taxe sur les émissions carboniques de la Colombie-Britannique La Colombie-Britannique est le premier territoire en Amérique du Nord à introduire une taxe générale sur les émissions carboniques. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé la taxe sur les émissions carboniques dans le cadre de son budget le 19 février 2008. Contre toute attente, la critique de la taxe sur les émissions carboniques s’est adoucie, la Chambre de commerce la qualifiant de « taxe sur les émissions carboniques intelligente » et donnant au budget une note de « A ». Un récent sondage indique par ailleurs qu’une légère majorité des citoyens de la ColombieBritannique appuient la taxe sur les émissions carboniques. Comment un gouvernement a-t-il pu introduire une nouvelle taxe sans en subir les contrecoups politiques? Premièrement, la taxe est neutre sur le plan fiscal et deuxièmement elle est faible au départ puis augmente graduellement au taux par tonne prévu à mesure que les marchés de carbone se développent. La taxe sur les émissions carboniques est neutre sur le plan fiscal puisque chaque dollar tiré de la taxe sur les émissions carboniques doit servir à la réduction de l’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés. Le gouvernement de la Colombie-Britannique s’est engagé à inclure ce mandat dans la législation de manière à ce que ni le gouvernement actuel ni aucun gouvernement ultérieur ne puisse succomber à la tentation d’utiliser les fonds de la taxe sur les émissions carboniques pour le financement de projets spéciaux ou le règlement de dépenses générales. Ce moyen de taxer les activités à intensité carbonique, tout en injectant davantage de fonds dans l’économie entre les mains des entreprises et des consommateurs, témoigne de la stratégie sous-jacente du gouvernement de la Colombie-Britannique visant à résoudre les questions environnementales mondiales tout en stimulant l’économie locale. À plusieurs occasions pendant le discours du budget, la ministre des Finances, Carole Taylor, a souligné l’importance de jumeler ces deux objectifs. La taxe sur les émissions carboniques devrait rapporter quelque 1,85 milliard de dollars au cours des trois premières années, et la totalité de ce montant sera retournée aux entreprises et aux particuliers sous forme de baisses d’impôt sur le revenu. L’impôt sur le revenu des sociétés en général passera de 12 % à 11 % et l’impôt sur le revenu des petites entreprises passera de 4,5 % à 3,5 % à compter du 1er juillet 2008. L’impôt sur le revenu des particuliers des deux niveaux d’imposition les plus bas sera réduit de 2 % en 2008 et de 5 % en 2009. Page 62 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 À compter du 1er juillet 2008, le prix du carbone sera de 10 $ la tonne et augmentera de 5 $ la tonne pour les quatre années suivantes. Ainsi, dans la première année, le prix de l’essence augmentera de 0,241 $ le litre et celui du diesel de 0,0276 $ le litre. L’achat ou l’utilisation de biocarburants, comme le biodiesel et l’éthanol, sont dispensés de la taxe sur les émissions carboniques. La taxe sur les émissions carboniques de la Colombie-Britannique est analogue à une taxe à la consommation en ce sens qu’elle est payable par l’utilisateur final au point d’achat ou d’utilisation de combustibles fossiles en Colombie-Britannique. Remarques de McCarthy Tétrault : carboniques alors qu’en Colombie Britannique, les importantes ressources hydroélectriques permettent la production d’électricité sans trop recourir aux combustibles fossiles. Au cours des deux prochaines années, il est prévu que chaque province introduira une variété de politiques et de règlements visant les émissions carboniques et le développement économique dans leur région. Suivre ces changements constituera tout un défi. Communiquez avec : Cheryl L. Slusarchuk à Vancouver à [email protected] La taxe sur les émissions carboniques de la Colombie-Britannique ne constitue qu’un moyen possible d’intervention parmi plusieurs, selon les caractéristiques de la province en matière d’émissions carboniques et les attentes envers le gouvernement. Par exemple, la province de Québec a introduit une forme de taxe sur les émissions carboniques l’année dernière pour favoriser le développement de technologies vertes en percevant un peu moins d’un sou par litre auprès des sociétés pétrolières. Cette taxe permet de recueillir quelque 200 millions de dollars par année. L’expérience en Colombie-Britannique n’est pas nécessairement applicable dans d’autres provinces. En Alberta, par exemple, les sables bitumineux faussent sensiblement les caractéristiques de cette province en matière d’émissions Page 63 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 International : Eco-Patent Commons — Partage de brevets pour un environnement plus propre et plus vert vieux téléphones mobiles en de nouveaux appareils comme des appareils photos numériques. Remarques de McCarthy Tétrault : À la faveur d’une prise de conscience de plus en plus généralisée à l’égard des questions environnementales touchant la fabrication de produits électroniques, une nouvelle initiative de partage de brevets visant des inventions écologiques a vu le jour. Plus tôt cette année, IBM et le World Business Council for Sustainable Development Team se sont associés à Nokia, Pitney Bowes et Sony pour créer Eco-Patent Commons. L’Eco-Patent Commons vise à créer un portefeuille partagé de brevets et à encourager l’innovation dans le domaine de la durabilité de l’environnement. On espère que la collaboration et la coopération facilitées par le partage de ces brevets se traduiront par un certain nombre d’avantages du point de vue de l’environnement pour ses membres, notamment la conservation de l’énergie, la réduction de la consommation d’eau, la prévention de la pollution et l’augmentation du recyclage. La participation à un portefeuille de brevets en commun est un couteau à deux tranchants. Alors que vous pouvez avoir accès à des brevets de tiers, vous devrez également fournir au portefeuille certains de vos droits patrimoniaux. Il faut faire preuve de prudence et prendre en considération les exigences en matière de dépôt et de divulgation du portefeuille de brevets, lesquelles ne conviennent peutêtre pas à vos besoins et à vos objectifs. Par exemple, vous pourriez avoir mis au point un brevet particulièrement précieux que vous ne voudriez pas inclure dans le portefeuille, mais vous pourriez être obligé de le faire. Communiquez avec : Robert Nakano à Toronto à [email protected] Pour devenir un membre de l’Eco-Patent Commons, une société doit lui remettre au moins un brevet et s’engager à ne pas le faire valoir contre les autres membres. Les brevets approuvés seront à la disposition des autres membres sans frais. Les donateurs auront un accès comparable aux brevets soumis par les autres membres. Nokia, par exemple, a remis un brevet visant une technologie de recyclage pouvant aider au recyclage de Page 64 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 Biotechnologies/ Sciences de la vie CAUSES/DÉVELOPPEMENTS JURIDIQUES Canada : Modifications au Règlement sur les médicaments brevetés : modifications relatives aux exigences de rapport et aux délais Les membres de l’industrie pharmaceutique et biologique doivent savoir que de récentes modifications relatives aux exigences de rapport et aux délais en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (Règlement) sont entrées en vigueur le 6 mars 2008. D’autres modifications, portant sur les obligations de dépôt de documents par voie électronique, entreront en vigueur le 1er juillet 2008. L’objectif énoncé des modifications est d’« améliorer l’efficience des examens du prix des médicaments brevetés qu’effectue le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB) ainsi que les délais à l’intérieur desquels ces examens pourront être faits ». Le CEPMB est l’organisme administratif chargé de surveiller l’application du règlement qui a été initialement constitué aux fins d’empêcher la tarification excessive des médicaments brevetés au Canada. Actuellement, le breveté doit déposer certains documents d’information auprès du CEPMB à l’égard de quelque médicament faisant l’objet ou susceptible de faire l’objet d’un brevet, que le brevet soit ou non effectivement exploité. Même si les prix excessifs peuvent être révisés rétroactivement à la date de publication d’un brevet, la jurisprudence indique clairement que le CEPMB ne peut pas faire valoir sa compétence à l’égard d’une tarification excessive tant qu’un brevet n’a pas été délivré. Afin de faciliter la conformité avec les obligations d’information en vertu du Règlement, le CEPMB a créé trois formulaires principaux. Ces formulaires résument le type d’information que les brevetés sont tenus de déposer : • Formulaire 1 : Identification du médicament. Ce formulaire devait être rempli et soumis au CEPMB 30 jours après la réception de l’avis de conformité, ou 30 jours après le lancement du médicament sur un marché canadien, soit la première de ces deux éventualités. • Formulaire 2 : Information sur l’identité et sur les prix du médicament. Ce formulaire doit être rempli et soumis au CEPMB dans le délai mentionné dans le formulaire 1. • Formulaire 3 : Recettes et dépenses de recherche et développement. Ce formulaire devait auparavant être rempli et soumis au CEPMB dans les 60 jours suivant la fin de l’année civile. Page 65 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 pendant les deux années qui suivent la demande, dans les 30 jours qui suivent chaque période de six mois. Les principales modifications au règlement sont : 1. Formulaire 1: • Les premiers renseignements concernant le médicament breveté doivent être soumis dans les sept jours suivant le jour de la délivrance d’un avis de conformité ou dans les sept jours suivant la première vente du médicament au Canada. Ces renseignements doivent aussi être accompagnés de la monographie du produit ou des renseignements analogues. Les mises à jour du formulaire 1, telle la délivrance de nouveaux brevets, peuvent toujours être soumises dans les 30 jours suivant la délivrance du brevet. 2. Formulaire 2 : • L’information sur l’identité et sur les prix d’un médicament d’ordonnance breveté destiné à un usage humain au jour de sa première vente au Canada doit désormais être fournie dans les 30 jours qui suivent ce jour. • L’information sur l’identité et sur les prix d’un médicament sans ordonnance destiné à un usage vétérinaire doit désormais être soumise seulement après la réception d’une plainte. Ainsi, un breveté doit soumettre au CEPMB l’information nécessaire pour chaque période de six mois commençant le 1er janvier et le 1er juillet de chaque année, dans les 30 jours qui suivent la date à laquelle le CEPMB envoie une demande en réponse à une plainte concernant le prix d’un médicament, et 3. Les nouvelles exigences de rapport par voie électronique s’appliquent à l’information qui doit être soumise au CEPMB. Les brevetés devront fournir l’information au CEPMB au moyen d’un document électronique déterminé, selon le format et le type de fichier original, portant la signature électronique de la personne dûment autorisée attestant l’exactitude et l’intégralité des renseignements fournis. Ces exigences de rapport par voie électronique entreront en vigueur le 1er juillet 2008. Communiquez avec : Anita Nador à Toronto à [email protected] ou Ian K. Bies à Toronto à [email protected] Page 66 CoConseil : le trimestriel du droit de la technologie, volume 4, numéro 1 CoConseil CoConseil McCarthy Tétrault : droit de la technologie droit des affaires droit du travail et de l’emploi litige Les publications CoConseil McCarthy Tétrault sont conçues pour vous aider à comprendre de quelle façon les changements et les faits nouveaux dans le domaine du droit influent sur votre entreprise. Chaque CoConseil explore en profondeur un domaine du droit en particulier et contient des commentaires ainsi que de l’information sur les sujets juridiques qui, selon nous, sont les plus pertinents pour vous. À l’heure actuelle, nous publions des CoConseil axés sur le droit de la technologie, le droit des affaires, le droit du travail et de l’emploi et le litige. Pour lire les autres publications CoConseil McCarthy Tétrault ou pour vous y abonner, veuillez consulter notre site Web. VANCOUVER P.O. Box 10424, Pacific Centre Suite 1300, 777 Dunsmuir Street Vancouver (Colombie-Britannique) V7Y 1K2 Tél. : 604-643-7100 Téléc. : 604-643-7900 CALGARY Suite 3300, 421 - 7th Avenue SW Calgary (Alberta) T2P 4K9 Tél. : 403-260-3500 Téléc. : 403-260-3501 TORONTO Box 48, Suite 5300 Toronto Dominion Bank Tower Toronto (Ontario) M5K 1E6 Tél. : 416-362-1812 Téléc. : 416-868-0673 OTTAWA The Chambers Suite 1400, 40 Elgin Street Ottawa (Ontario) K1P 5K6 Tél. : 613-238-2000 Téléc. : 613-563-9386 MONTRÉAL Bureau 2500 1000, rue De La Gauchetière Ouest Montréal (Québec) H3B 0A2 Tél. : 514-397-4100 Téléc. : 514-875-6246 QUÉBEC Le Complexe St-Amable 1150, rue de Claire-Fontaine, 7e étage Québec (Québec) G1R 5G4 Tél. : 418-521-3000 Téléc. : 418-521-3099 ROYAUME-UNI et EUROPE 5 Old Bailey, 2 e étage Londres, Angleterre EC4M 7BA Tél. : +44 (0)20 7489 5700 Téléc. : +44 (0)20 7489 5777 Tous les efforts ont été déployés pour s'assurer de l'exactitude et de l'à-propos de la présente publication, mais les observations contenues aux présentes sont nécessairement de portée générale. Les clients sont priés de demander des conseils précis sur les questions qui les concernent et de ne pas se fier uniquement au texte de la présente.