Conseillers d`orientation-psychologues

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Conseillers d`orientation-psychologues
CONSEILLERS D’ORIENTATION-PSYCHOLOGUES
Les psychologues du 2nd degré et du supérieur
Les missions des conseillers d’orientation-psychologues sont régies par l’article 2 du statut du
20 mars 1991 et s’adressent prioritairement au public des jeunes en formation initiale.
Elles se centrent sur l’observation continue, la mise en œuvre des conditions de la réussite
scolaire, l’information, l’aide à l’élaboration et à la réalisation des projets scolaires et
professionnels des élèves et des étudiants.
La place du CIO et son rôle dans la prise en charge des jeunes sortis du système éducatif sans
qualification est réaffirmée, ainsi que son action en direction du public adulte.
Du point de vue des pratiques, l’action des conseillers d’orientation-psychologues comporte
plusieurs points communs avec celle de leurs collègues psychologues scolaires.
Un certain nombre de tâches correspondent à celles qu’effectuent les psychologues quel que
soit leur champ d’exercice : examens psychologiques, entretiens individuels, ou en groupe,
rédaction de comptes-rendus pour différentes commissions, et participation à ces
commissions, conduite de formations, d’enquêtes ou de travaux de recherches.
D’autres activités sont davantage liées au cadre spécifique que représente l’institution
scolaire : ainsi tout ce qui concerne la mise en place d’un dispositif d’observation continue, et
de suivi pour les élèves « fragiles » ou en difficulté, ainsi que la contribution à la réussite
scolaire et la concertation avec les enseignants.
Toutefois dans le 2nd degré, les questions liées à l’avenir prennent une place de plus en plus
importante dans le développement psychologique de l’adolescent. Grâce à ses nouvelles
capacités cognitives, affectives et sociales, l’enfant accède à un univers de possibles et à un
horizon temporel, qui transforment radicalement sa perception de lui-même, des autres et du
monde.
Mais cette évolution s’effectue également dans un contexte scolaire marqué par une
diversification qui l’oblige à se placer sur l’échiquier des positions scolaires. D’abord limités
aux options puis aux parcours diversifiés, les choix concernent bientôt des types de formation
et des filières.
La préparation progressive à ces échéances est inextricablement liée dans notre système
scolaire à la construction identitaire.
Même si l’éducation à l’orientation est censée équiper les jeunes pour effectuer les
« bons choix », l’intervention spécifique du psychologue de l’éducation qu’est le CO-Psy
est néanmoins indispensable.
On pense bien entendu immédiatement à leur connaissance des formations et du monde
professionnel. Mais les évolutions considérables ces dernières années dans le domaine de
l’accès à l’information ont déplacé la demande et rendent plus visible la sollicitation des
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conseillers en tant que psychologues pour aider les jeunes à articuler construction identitaire,
représentation de l’avenir, des professions et des voies de formation.
En effet, en fonction de l’histoire singulière de chaque adolescent, de son origine sociale, du
rapport qu’il entretient avec sa scolarité, le conseiller d’orientation-psychologue est à même
d’interpréter le sens que prend la formulation d’un choix scolaire ou professionnel.
Il peut ainsi percevoir les « projets magiques », qui évitent le contact avec une réalité trop mal
vécue, les projets « écrans » qui visent à se conformer au choix de l’entourage, les projets qui
servent à s’opposer à la famille ou au contraire à s’identifier à une personne significative, les
projets « réparation » d’une blessure familiale, etc.
Ces projets, à l’adolescence, ont une fonction à un moment donné dans le développement
psychologique. Ils peuvent servir de moteur ou de frein et c’est au psychologue d’en
comprendre les enjeux et d’en permettre l’élaboration.
Il appréhende ainsi directement les liens entre ces représentations anticipées du futur et la
construction identitaire.
Parce qu’il exerce dans le champ éducatif, le CO-Psy est attentif au poids déterminant du
système scolaire pour modeler la représentation scolaire de soi et des professions.
Plusieurs recherches ont montré, en effet, que selon la filière dans laquelle un adolescent est
scolarisé, il construira une représentation correspondante de lui-même.
Sachant, en outre, qu’à l’adolescence, le jeune « s’essaie dans des formes identitaires
différentes qui sont indispensables à la constitution d’un système subjectif articulé », on1
mesure l’importance des expériences et des possibles que peut offrir le milieu scolaire pour
favoriser le développement.
Ces éléments montrent s’il en était besoin combien les questions liées à la scolarité
(réussite ou échec, démobilisation scolaire, absentéisme, troubles du comportement,
blocages) sont inextricablement liées aux questions d’avenir, et à la construction
identitaire.
Selon sa position scolaire, l’adolescent va être plus ou moins poussé à intérioriser le reflet de
lui-même que lui propose l’Ecole.
Cette intériorisation ne peut qu’influer (positivement ou négativement) sur l’estime de soi,
base du développement de la personnalité et sur la représentation qu’il se fait de son avenir.
Ainsi, dans les situations d’échec précoces, on observe souvent une incapacité à se projeter
dans l’avenir et à construire une grille de lecture différenciée des professions.
De plus, aujourd’hui, le formidable allongement de la durée de scolarisation a modifié
considérablement le rapport aux études et la place qu’elles prennent dans le développement
psychologique à l’adolescence, les difficultés d’insertion sont venues renforcer ce mouvement
et aviver les tensions pour les jeunes en difficulté, ne leur laissant souvent comme exutoire
que le repli sur soi ou la violence.
Ainsi, plus encore que par le passé, une dissociation de ces éléments, reviendrait à se priver de
la dynamique que représente le futur pour le développement de la personnalité et pour la
réussite scolaire.
Elle aboutirait à figer les représentations d’avenir et les possibles en fonction de la situation
scolaire à un moment donné.
L’intervention du conseiller d’orientation-psychologue, s’il se donne pour objectif de
favoriser le développement de la personnalité doit donc s’exercer simultanément sur 3
axes.
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J. Guichard - « cadres et formes identitaires vicariantes et pratique en orientation. OSP » Mars 2000.
3
En direction des individus, des groupes et de l’institution
Sa compétence repose donc sur une double assise :
• sa formation de haut niveau en psychologie,
• sa formation pluridisciplinaire en sociologie, de l’éducation et du travail, en sciences
de l’éducation, en économie, en statistiques. Elles font prendre tout leur sens aux
problématiques individuelles et collectives du champ de l’éducation et de l’orientation.
Cette action vise
ƒ à faciliter l’adaptation réciproque de l’élève et de l’institution scolaire
ƒ à favoriser la réussite scolaire
ƒ à permettre l’élaboration progressive des projets scolaires et professionnels
ƒ à contribuer à l’analyse des situations et des politiques éducatives grâce à des
méthodologies appropriées.
Mise en œuvre de ces objectifs
Lors des entretiens individuels, les conseillers d’orientation-psychologues peuvent aborder
les problèmes scolaires, les problèmes relationnels rencontrés par les adolescents et les
questions liées à leur avenir.
Ils peuvent favoriser la prise de conscience, et l’explicitation des difficultés rencontrées,
l’émergence d’une demande et l’élaboration progressive de solutions.
Cette intervention est complémentaire de celle qui s’exerce en direction des groupes
Des recherches récentes montrent combien le dialogue, l’échange avec les pairs, et « la mise
en récit » jouaient un rôle majeur dans la construction de la subjectivité.
Elle permet la mise en cohérence des expériences, l’articulation du passé, du présent, et de
l’avenir, l’identification de soi dans une certaine forme identitaire.
Plusieurs situations de groupe peuvent être proposées sur des thèmes touchant l’image de soi,
l’analyse de difficultés scolaires ou de problèmes relationnels, ou encore la perception du
travail et des professions.
Ces groupes sont l’occasion, au travers d’activités diversifiées, de permettre l’échange dans
un cadre structuré, la confrontation des points de vue, l’élaboration de la pensée grâce à la
mise en forme orale et écrite que nécessite l’expression pour autrui.
Cette action en direction des groupes concerne aussi les équipes enseignantes
Elle vise à aider les enseignants à comprendre ce qui se joue pour un élève donné, les raisons
de ses difficultés et à favoriser la mise en place de stratégies d’aide adaptées.
Elle s’appuie sur le suivi et l’observation réalisés par les CO-Psy dès l’entrée au collège et sur
les contacts avec les structures d’aide extérieures.
Elle peut également s’exercer au bénéfice d’équipes souhaitant mettre en place des projets
pédagogiques pour amener les élèves à donner plus de sens à leurs apprentissages et à
diversifier leurs expériences dans le cadre scolaire.
Enfin, le rôle du psychologue porte également sur l’institution
Dans l’établissement scolaire, le CO-Psy peut contribuer à l’analyse des situations éducatives
problématiques et à l’examen des flux d’orientation, à la conception et à l’évaluation des
dispositifs d’aide individualisée, notamment du point de vue de la signification qu’ils
prennent pour les élèves et les familles.
Ils disposent pour étayer leur analyse des données recueillies par le CIO sur les politiques des
établissements, du district, du département et de l’académie.
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Le CIO constitue en effet un observatoire privilégié du fonctionnement du système éducatif et
des parcours des jeunes (par l’analyse longitudinale de cohorte par exemple) dans l’Ecole et
au moment de l’insertion.
Par ses liens avec de nombreux organismes extérieurs recevant des jeunes en souffrance ou en
danger (CMPP, service de pédopsychiatrie, protection judiciaire de la jeunesse, aide sociale)
ainsi qu’avec celles qui mettent en œuvre des dispositifs d’aide à la qualification ou à
l’insertion (MGI, missions locales, PAIO, AFPA, ANPE, GRETA), le CIO représente un
point stratégique dans le district pour tout ce qui concerne l’information et l’aide aux
adolescents et aux jeunes adultes dans le champ de l’éducation et de l’orientation.
A cet égard, il pourrait représenter un point d’appui pour la mise en place d’un futur service
de psychologie de l’éducation et de l’orientation.
Service
La structuration en service ne représenterait pas une modification majeure pour les CO-Psy et
les DCIO.
Depuis la création des CIO, ils ont en effet l’habitude d’un fonctionnement qui allie
l’existence d’une structure spécifique, distincte des établissements scolaires, à laquelle ils sont
très attachés, et une collaboration étroite avec ces derniers. Ainsi la politique de Centre estelle articulée avec celle des collèges et des lycées et s’inscrit-elle dans le cadre des politiques
départementale et académique. Il paraît important qu’un service de psychologue de
l’éducation et de l’orientation puisse être affirmé au niveau départemental, académique et
national.
Le regroupement de tous les psychologues exerçant dans le système éducatif en un seul lieu
présenterait un certain nombre d’avantages : un meilleur suivi, et une meilleure coordination,
ainsi qu’une structure d’échange et d’élaboration de la politique de Centre et des pratiques
professionnelles.
Il permettrait également de s’appuyer sur le réseau des compétences nécessairement
diversifiées pour construire les réponses les plus appropriées en fonction des situations.
Il constituerait éventuellement une piste de solution pour régler la question du statut des CIO
en donnant une certaine crédibilité à la création d’établissements publics.
Conclusion
Il est clair qu’aujourd’hui la pluralité des besoins et la multiplication des demandes viennent
buter sur une charge de travail beaucoup trop importante et un effectif trop réduit de
conseillers d’orientation-psychologues.
Leur trop faible disponibilité les met dans une situation « d’urgence chronique » au détriment
d’un réel travail de prévention, d’observation, de suivi et de concertation avec les autres
acteurs de terrain.
Pour le SNES, persister dans ce sens en n’augmentant pas significativement les recrutements,
c’est cultiver le paradoxe qui aboutit à ce qu’un système se dote de professionnels hautement
qualifiés et organise les conditions pour qu’ils ne puissent pas effectuer leurs missions.
Au bout du compte, c’est priver les jeunes et les équipes éducatives d’un apport original pour
analyser, comprendre et mettre en œuvre des dispositifs qui favorisent la réussite et l’accès du
plus grand nombre à des poursuites d’études et à l’obtention de qualifications.
C’est jouer contre la démocratisation du système éducatif, et contre l’investissement éducatif.