Celui qui croyait aux soins et celui qui n`y croyait pas
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Celui qui croyait aux soins et celui qui n`y croyait pas
Celui qui croyait aux soins et celui qui n’y croyait pas Patrick Vinay MD* Le 11 février dernier, l’Assemblée des Évêques du Québec réitérait son opposition devant le projet de loi visant à permettre à une personne en fin de vie d’abréger ses jours en ayant recours à une assistance médicale. En parallèle du débat public, on assiste, depuis quelques années, à une redécouverte de ces moments précieux, dans leur dimension relationnelle1. Médecin en soins palliatifs, Patrick Vinay pose sur cet enjeu fondamental, un regard empreint d’humanité. LA VISION DU BIEN-PORTANT : IL FAUT QUE CELA FINISSE! D ans les sociétés occidentales et particulièrement au Québec, deux visions s’affrontent au sujet des soins de fin de vie. N’est-il pas paradoxal que toutes deux se réclament du meilleur service aux malades ? Il y a ceux qui souhaitent leur donner le droit de mourir sur demande, et ceux qui aimeraient les aider à vivre les vendanges tardives de la vie. Comment en arrive-t-on à des visions si incompatibles ? Et pourquoi tant de détermination chez les protagonistes des deux camps. La réponse à ces questions est à chercher dans la vision des personnes impliquées, qui varie selon leur compréhension de l’expérience qu’elles sont en train de vivre. 168 Mai – Juin 2014 Considérons la vision la plus répandue, celle du bien-portant. C’est celle que nous partageons largement avec la population, les politiciens, les journalistes, les représentants de notre société qui s’élancent, en pleine course collective, vers un avenir qu’on veut plus libre, plus satisfaisant. En plein contrôle de sa vie Pour certains bien-portants, la vie est précieuse non pas parce qu’elle ouvre un avenir de possibles, mais parce qu’elle permet d’accomplir ses volontés. Le bien-portant qui mène sa vie avec autorité, valorise son autonomie EN SON NOM 40 et ne peut tolérer de devenir dépendant des autres. C’est parce qu’il peut aller et venir à sa guise, choisir son quotidien, demeurer indépendant, que son présent est précieux. Il le vit comme un conducteur automobile bien en contrôle de son véhicule, dont le volant répond à la moindre pression. Sa dignité réside dans cette possibilité d’actualiser ses volontés comme ses désirs. On peut dire que le bien-portant se croit autonome parce que fait de sa propre main et de ses propres efforts, et qu’il a perdu de vue le puissant lien de dépendance aux autres dont sa belle autonomie est entièrement issue. C’est d’ailleurs ainsi qu’il conçoit l’existence de tout être humain. Cette attitude, le bien-portant la conserve devant la maladie lors qu’elle survient. Si sa mécanique biologique fait défaut, il compte sur la toute-puissance de la médecine pour le guérir. L’ère de la science le lui dit : aujourd’hui, on sait faire… Les soins techniques lui apparaissent puissants et ils le sont en effet. Mais ils prennent tant de place qu’il ne voit pas que ce n’est pas la technicité seule qui guérit : une partie importante de l’efficacité thérapeutique passe par le patient travail relationnel qui s’échange entre malade et soignants, entre malade et famille. Dégradation intenable et « inutile » de l’état du malade A la vue du malade, le bien-portant ressent un profond malaise. « Je ne voudrais pas être comme lui ! ». Il ne peut évacuer une sourde crainte, car il sait bien qu’au fond, il ne contrôle vraiment ni sa santé ni sa vie. Voir la dépendance de l’autre, regarder sa souffrance, fait jaillir en lui une voix qui le dérange. Soudain son impuissance est là, pleine de malaise. Sa bulle de puissance et de confort est menacée par la maladie de l’autre : va-t-il devoir s’en occuper ? «Je ne sais pas quoi faire pour lui: il ne sert donc à rien de m’arrêter et rester près de lui. D’autres doivent s’en occuper ! Un jour, si je deviens ainsi, je veux mourir plutôt que de vivre cela !» Et la chance s’enfuit de découvrir l’autre plus avant et de se découvrir soi-même… Une situation devenue intolérable Si, en plus, il existe un lien affectif profond entre le bien-portant et le malade, et qu’il voit celui-ci diminué, incapable de maintenir la belle assurance de son passé, cela lui cause une souffrance. Et il projette sur lui sa propre souffrance, même si le malade est confortable. « Il souffre de façon intolérable, j’en suis certain, je le vois… Il faut le sortir de là ! » La souffrance et l’impuissance le poussent alors à demander de faire cesser, pour le malade comme pour lui-même, cette situation que la médecine n’a pas su contrôler. Les demandes d’euthanasie jaillissent alors : « Faites cesser cette situation ». Des demandes d’acharnement thérapeutiques jaillissent aussi : « Faites encore plus ! ». Dans les deux cas, une souffrance est criée et on exige des gestes aux effets immédiats. Puisqu’on ne peut pas faire disparaître le problème, on demande la fin de la vie du maEN SON NOM 41 Mai – Juin 2014 169 la communication antérieure. Alors, pour certains, il vaut mieux abréger la vie du malade vécue dans des conditions considérées indignes de lui, supprimer une vie où on ne voit plus de sens parce qu’elle est devenue pauvre de futur. Ne pas le faire serait manquer de la plus élémentaire compassion. Impitoyable compassion. lade, souvent au nom des conversations antérieures avec lui. Il s’agit en quelque sorte de solutions qui nous font faire l’économie d’autres réponses à inventer, d’une évolution à soutenir, d’un confort à obtenir. Le malade passe par le dépouillement « Il ne voulait pas cela docteur ! » Maintenant que la technologie médicale curative est dépassée, on ne considère pas les autres facettes des soins, qui sont encore capables de transformer profondément la situation du malade. C’est frappant de voir que cette vision techno-centrique des soins est parfois le fait de médecins qui ont axé leur profession sur l’aspect technologique qui fait leur spécificité. Au contraire, les infirmières, qui vivent autrement leur métier de proximité, ont plus de confiance dans l’efficacité des soins simples et attentifs habités de médecine. Mais que veut le malade maintenant ? Souvent, il s’est coulé dans une nouvelle vie, plus simple, plus pauvre qu’auparavant mais aussi plus précieuse, même si elle a peu de valeur aux yeux du bien-portant. Son désir de vivre est encore ardent s’il demeure confortable. Souvent, il a peu de douleurs: la médecine s’est mise au service de son confort. Il demande alors un ultime essai, une ultime chimiothérapie, même palliative, quelque chose pour nourrir un espoir, pour vivre une semaine de plus. La famille le voit néanmoins différent d’avant et le pense facilement souffrant. Elle ne sait pas qu’il y a de nombreux signes qui permettent d’évaluer si le malade est souffrant ou non (même quand il est en coma), ce qui permet de titrer précisément les doses d’opiacés et d’autres médicaments requis pour maintenir le confort sans produire de surdosage et sans accélérer le décès. Le bien-portant n’a pas suivi le parcours du malade Les bien-portants (dont les familles) sont donc plus prônes à faire ou à maintenir une demande euthanasique. Si la maladie a changé le malade, eux n’ont pas encore changé. Ils sont révoltés par la situation et veulent en voir la fin, même au prix de la disparition du malade. Ils formulent la demande avec véhémence et avec la certitude qu’ils sont fidèles à la demande ancienne du malade, vue comme inamovible. Mais le malade at-il encore la même vision ? A-t-on mis en jeu toutes les ressources qui jaillissent d’un accompagnement attentif et délicat ? Et quand rien ne marche Une vie privée de sens ? Mais cette médication vient de la main d’étrangers, de soignants qu’on ne contrôle pas : on n’est certain ni de son efficacité, ni de l’intérêt réel des soignants pour leur malade. Et rien ne ramènera toute l’autonomie ou 170 Mai – Juin 2014 EN SON NOM 42 Photo : Micheline Marcoux, m.i.c. «L’avenir devenant court, les priorités du malade changent. Et de nouveaux impératifs relationnels se lèvent en lui. […] Ces priorités ont toutes un nom propre : celui d’un frère, d’une amie, d’une relation souffrante, d’un enfant.» bien-portants vont donc facilement se dire d’accord avec un geste qui délivre des souffrances appréhendées, surtout si ce geste demeure vague et qu’ils ne voient pas d’autres alternatives. (cela arrive parfois), ne serait-ce pas plus sain d’endormir le malade et de le laisser mourir de causes naturelles plutôt que de le tuer ? Placés devant une fin de vie théorique (un sondage par exemple), les LA VISION DU MALADE EN PHASE TERMINALE QUI VIT AUTRE CHOSE la médecine. Pour un temps, il a fait confiance à la toute puissante médecine, avec des succès indéniables, mais souvent temporaires. Le malade a été un bien-portant lui aussi, autrefois. Il a déjà pensé comme un bien-portant. Il a peut-être même signé un testament biologique, qu’on peut lire souvent autant comme une demande à ne pas subir d’acharnement thérapeutique que comme une demande conditionnelle d’euthanasie. Quand la maladie a fait irruption dans sa vie, incroyable, nouvelle, pleine d’injustice, il s’est armé de puissance pour en venir à bout. Il a consulté les plus savants médecins, il leur a amené sa maladie, comme un objet extérieur à lui, pour qu’on la guérisse ! Il convenait de la mettre au pas et d’utiliser contre elle ces progrès fabuleux de Voilà qu’avec l’évolution, le malade se transforme. De rechute en rechute, son expérience de vie change. Il doit vivre avec des inconforts, accepter les inconvénients de ses traitements. Le temps se met à passer plus lentement, les médicaments envahissent son quotidien. Il devient obligé de vivre en pointillés, par courts moments. Les autres deviennent aussi plus présents dans sa vie, car il a besoin d’aide. Il encourage les malades qui sont assis près de lui, à la salle d’attente, partageant avec eux les espoirs de la réalité quotidienne. Il est entré dans la communauté des malades. Sa bulle de bien-portant a disparu. EN SON NOM 43 Mai – Juin 2014 171 Nouveaux impératifs relationnels Vendanges tardives de la vie Vient un temps où il réalise qu’il n’y a plus rien à faire pour guérir sa maladie, seulement faire en sorte qu’elle occupe le moins de place possible. L’avenir devenant court, les priorités du malade changent. Et de nouveaux impératifs relationnels se lèvent en lui. Les multiples priorités de notre vie sont en effet comme toutes placées dans un grand tamis, lieu de nos choix. De ce tamis, le bien-portant choisit certaines priorités, souvent articulées autour de sa vie quotidienne : finir le garage, réaliser un voyage, changer de voiture… Quand soudainement le tamis devient violemment secoué par la maladie, toutes les petites priorités tombent, laissant paraître dans le tamis celles qui demeurent, comme des objets lourds, des priorités de fond, en attente urgente d’attention. Ces priorités ont toutes un nom propre : celui d’un frère, d’une amie, d’une relation souffrante, d’un enfant. Il lui faut maintenant du temps pour servir ces priorités fondamentales, articulées au sens même de sa vie : bientôt il ne pourra plus le faire. À cause de ce changement de vision, le malade demande de vivre encore une semaine, d’attendre le fils ou la fille qui arrivera demain d’Australie, de faire une ultime rencontre. On devine ici le désir d’une ultime manifestation identitaire qui doit s’exprimer maintenant, même si elle aurait pu s’exprimer auparavant. On observe une transformation des relations qui se simplifient, qui transcendent les murs autrefois élevés par les malentendus ou par les choix. On devine une pacification recherchée par les malades pour leurs proches. C’est cela, cueillir les fruits de la vendange tardive de la vie.Mais pour le faire,il faut être confortable : les soins palliatifs doivent avoir amélioré la situation, libéré des inconforts paralysants. La transformation profonde du malade met en relief les liens entretenus avec les siens, éclaire son histoire relationnelle d’une lumière nouvelle. Les petites choses lui deviennent précieuses et les choix du passé sont intégrés autrement. Que de conversations de fin de vie ont touché les soignants qui en ont été témoins, parce que, débordantes de la vie et de la force d’accomplissement qui s’y élèvent, elles présentent les impératifs nouveaux du malade. Même durant les heures ou les jours de coma, celui-ci s’accroche souvent à la vie tant qu’une rencontre, qu’un geste n’aura pas eu lieu, témoignant d’un processus intérieur continu qui lui appartient en propre. Il mourra à son temps, au moment choisi par lui ! Ce délai lui a-t-il été inutile ? « Docteur, ne me donnez pas trop de morphine samedi, cela me fait dormir parfois. Je ne l’ai pas vue de puis deux ans et elle vient me voir ! J’ai quelque chose à lui dire. » Que de fois me suis-je demandé, voyant une dame assise en silence et tenant la main de son mari inconscient depuis deux jours, lequel des deux, en vérité, tenait la main de l’autre. 172 Mai – Juin 2014 EN SON NOM 44 Photos : Raymonda Un temps précieux, un espace d’humanité La fin de vie constitue un moment privilégié qui peut devenir précieux pour le malade et pour ses proches. C’est un espace sacré qui leur appartient en propre et qui se déploie au-delà de la peur. C’est un espace où le malade pourra, s’il le veut, vivre un dernier effort de manifestation identitaire pour formuler un ultime héritage pour les siens. C’est un espace à protéger par le confort physique, à rendre fertile en l’entourant d’une présence humaine gratuite et disponible. La compassion devient alors un patient travail d’accompagnement et de libération pour le malade comme pour sa famille. Ce travail contribuera puissamment à la résolution future du deuil pour ceux qui restent et leur fera découvrir des facettes inconnues de leur proche en fin de vie et de leur propre humanité. Une grande partie des forces en cause ici n’ont rien à voir avec la technique médicale qui n’apporte que la puissance pharmacologique savamment orchestrée pour permettre le confort. Les membres du personnel œuvrant en soins palliatifs ne pensent donc pas que l’euthanasie soit une bonne solution : leur quotidien professionnel les a amenés proche de la pensée des malades dont ils cherchent à soutenir les projets. La fin de vie est un temps précieux dans la vie des humains, mais ce temps n’a de valeur que si des soins attentifs et un entourage délicat sont disponibles. Ce temps est fragile et il appartient au malade : lui seul peut véritablement en apprécier la valeur. L’euthanasie n’est donc pas une bonne réponse; c’est voler au malade du temps qui lui appartient pour devenir enfin pleinement lui-même au bout de lui-même. Mais on ne réussit pas toujours ce défi, et il y a des situations de toute fin de vie où demeure une souffrance que rien n’aura réussi à apaiser. On devra parfois endormir le malade pour l’extraire de sa détresse. Cela est inévitable, mais heureusement assez rare. Même conduit à cette extrémité, on n’a pas eu besoin d’avoir recours à l’euthanasie. EN SON NOM 45 Mai – Juin 2014 173 DEUX VISIONS PROFONDÉMENT CONTRAIRES alors pour eux à lui imposer une vie et des souffrances inutiles. D’autre part, ils ne prennent pas en considération ce qu’une telle demande implique pour l’équipe soignante et pour les membres de ces familles qui devront vivre avec le poids d’un homicide sur la conscience. Devant une demande d’aide médicale à mourir, il importe de laisser toute sa place à l’autre, d’écouter les plaintes de sa souffrance, d’ouvrir le plus possible un espace nouveau devant lui. Dans un moment de rencontre, toute souffrance qui se dit peut guérir. Il ne faut pas se presser de tout régler dans l’instant avec une injection létale, mais se donner assez d’espace et de temps pour cheminer avec lui. Les opposants à l’euthanasie ont une vision diamétralement opposée : « Qui serions-nous pour accepter cette demande sans avoir tout fait pour l’aider ? » Ils savent qu’aider ne veut pas dire faire mourir promptement celui qui est en détresse ! Ils sont également conscients que les demandes de mort disparaissent quand la douleur s’apaise, quand la souffrance est partagée, quand l’accompagnement, dans le temps précieux de la fin, fait découvrir au malade de nouvelles facettes de sa vie, lui permettant de jeter un regard renouvelé sur son passé et son présent. Les personnes opposées à l’euthanasie ne veulent pas présumer de l’évolution du malade. Celui-ci a Les personnes favorables à l’euthanasie sont souvent aveuglées par le droit à l’autonomie, par l’obligation de respecter la volonté du malade sans lui proposer d’alternative, par le sentiment implicite que leur propre autonomie pourrait être semblablement remise en cause un jour. « Qui êtes-vous pour refuser cette demande ? » Ils ne voient aucun avenir au malade, car ils sont dans l’incapacité de comprendre son présent. Refuser de tuer le malade revient 174 Mai – Juin 2014 EN SON NOM 46 droit à son plein futur même s’il ne s’ouvre qu’aux prix d’efforts consentis par les autres autour de lui. Bien sûr, l’expression de sa souffrance exige une réponse efficace. Mais de nouvelles voies apparaissent si on fait confiance au présent, si on assure le confort, si on l’entoure avec attention. Ces solutions sont toujours exigeantes, mais elles ont le mérite de ne tuer personne, de ne pas préjuger de l’évolution de l’autre. Dans plusieurs sociétés occidentales, le recours au suicide assisté ou à l’euthanasie, perçu à tort comme une option de compassion, sera difficile à contrer, car l’apport des autres à notre humanité propre est devenu transparent à nos yeux égocentriques. Une vision refermée sur une caricature de l’individu apparent, sur l’artificiel du technologique omniprésent, sur le lien fallacieux tendu entre dignité et autonomie, fait disparaître toute confiance dans l’efficacité de l’accompagnement partagé. Cela se voit partout. Sans qualité de vie, il y aurait moins de valeur de la vie. Et l’appel du souffrant devient vite étouffé. On n’observe pas ce phénomène dans les sociétés moins « évoluées » (ou moins infirme pourrait-on dire), qui savent encore que chaque personne s’implante et croît dans un tissu relationnel fort et fidèle. Pour eux, Santé s’écrit encore avec un grand ‘S’, plein de relationnel vivifiant. v Deux conceptions de l’homme s’affrontent autour de ce débat sur l’euthanasie. Une riche réalité jaillit des interactions avec nos semblables, même en fin de vie; elle semble imperceptible aux uns, évidente aux autres. Ce sont là des conditions pour un dialogue de sourds. Les choix d’une société qui s’occupe peu de la vie relationnelle des vieux et des mourants, qui n’offre pas de soins palliatifs appropriés à 60% de la population, seront certainement simplifiés par l’euthanasie ! Mais c’est au détriment du développement de notre humanité collective devenue transparente jusqu’à se rendre invisible dans ces moments ultimes de la vie. Nul n’a le droit, et encore moins le devoir de tuer, mais nous devons toujours soulager, et cela exigera un effort qui est aujourd’hui de plus en plus difficile à comprendre. Notre avenir collectif repose pourtant sur ce choix. Entre deux compassions, choisissons celle qui respecte la confiance et l’espace de surprenance* d’autrui (un concept que nous devons à JeanFrançois Malherbe), celle qui protège le riche terreau d’où nous venons, celle qui nous permet de cueillir le véritable héritage de celui ou de celle qui part. Ce choix implique que nous travaillions à soulager toutes les souffrances, quelle qu’en soit l’origine : c’est là une obligation morale atteignable sans euthanasie. Dr Patrick Vinay est néphrologie et biochimiste. Depuis dix ans, il œuvre comme médecin de soins palliatifs au CHUM-Notre-Dame à Montréal. Il y a été chef de l’unité des soins palliatifs de 2009 à 2014. 1 Pensons notamment à la série radiophonique de Mario Proulx « Vivre jusqu’au bout », diffusée une première fois en 2010 : http://ici.radio-canada.ca/radio/vivre_jusquau_bout/serie_documentaire/ EN SON NOM 47 Mai – Juin 2014 175